[...] de même que certaines histoires d'amour ne sont pas faites pour être vécues car elles ne sont que passion, et la passion se change en amertume quand on refuse de croire qu'elle est éphémère.
C'est juste un homme ? Non, c'est bien plus que ça. C'est Stephen King, le créateur de tous mes mondes et de tous mes héros.
Il aime écrire des histoires d'horreur pour la même raison qu'on aime en lire : on sait que les créatures n'existent pas, qu'elles nous permettent d'avoir peur dans un cadre codifié où la fin du livre marque le retour à la réalité. Et on y retourne un peu plus forts parce qu'on nous a donné la possibilité de faire face à nos angoisses inexprimées.
Quand le monde est à ce point hostile, je lis un livre de Stephen King de même qu'on appelle ses parents pour demander conseil. Je ne pointe pas, en fermant les yeux, une phrase au hasard pour en tirer de fines déductions sur mon avenir : Stephen King n'écrit pas l'horoscope. J'écoute simplement les histoires qu'il raconte, des histoires de gens comme moi face à leurs démons, qui se battent pour les vaincre.L'horreur qu'ils vivent dédramatise celle qui hante mon quotidien et leurs batailles bravement menées me donnent un peu d'espoir.
Il dit vrai à propos de l'enfance, de nos meilleurs amis, de la tragédie au cœur de laquelle nous plonge le deuil , de la terreur te de la vulnérabilité que nous inspirons à nous-mêmes face à des vices qui nous semblent insurmontables.
Stephen King ne triche pas. Il a dit la vérité sur la peur et la mort, sur l'importance de rester droit et de faire de notre mieux, il ne ment pas non plus sur l'amour.
Il dit vrai quand il imagine le monde sous un dôme, à la merci d'antagonismes politiques qui se disputent le pouvoir alors que nos ressources s'amoindrissent.
Il dit vrai quand il narre la sociologie des petites villes, où il suffit d'un rien pour que les querelles de voisinage prennent des allures de guerre civile.
Il dit vrai quand il décrit les affres de l'adolescence, les moqueries acharnées qui poussent les plus vulnérables aux pires extrêmes.
Faire de notre mieux : le seul recours possible face à l'adversité, aussi mince que le poids de notre volonté face au chaos.Le seul principe valable parce qu'il est aussi le seul réalisable.Il ne s'agit pas d'être le meilleur ni d'avoir la volonté en acier trempé d'un pistolero. C'est une affaire d'humilité et de sympathie,participer au monde en laissant le monde nous surprendre.
Je jette un œil à Herbert qui fixe celui à qui il consacre une partie de son quotidien depuis plus de dix ans . Ni son expression ni sa posture ne trahissent ce qui se passe à l'intérieur. En même temps, à moins de nous rouler par terre en bavant, personne ne peut l'imaginer.
Il estime que son travail en tant qu'écrivain est de raconter l'absolue vérité sur la façon dont les gens se comportent et réagissent face à l'adversité.
Huit années de lecture m'ont fait comprendre le plus durement possible que le voyage compte plus que la destination, que le seul moyen d'atteindre son but, quand on le confond avec son destin, c'est de renoncer, à l'un comme à l'autre. Qu'on passe à côté de sa vie à trop vouloir la réussir.