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Citations sur La descente de l'Escaut (17)

On marche dans la fêlure intime du monde
Ces soubresauts nés de la douleur primitive

Quelle est la voix qui le dira ? Quel sera
ce corps qui saura mener jusqu'à son terme la

Valse triste ? Une voix s'élève à l'intérieur
De nous-même – voix chère –exprimant ce qui s'

Apparente à l'expression de la plainte première
Je suis cet homme-là qui, tant et tant, crut aux ver-

Tiges et qui, désormais, dans la déchirure du lan –
gage se tient, regard clair, miné toutefois, blessé

Dans la fêlure du monde où les plaies suintent
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J'avais la totalité du visage de l'estuaire dans ma main

J'avais l'ensemble de sa pensée sous les doigts J'avais

Ô j'avais son étrange beauté Je la possédais

m'imprégnant de ses traits afin que –une fois disparus

– je puisse encore et encore me souvenir d'eux
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Des-
cendre
au
plus
profond
du
corps
du
fleuve.

la mer
se
noie !
Plonger !
Plonger !
Puis
retrouver
ce
monde
de si peu
de joie.
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L'homme aux yeux verts, aux yeux d'eau! L'exalté qui chemise et qui, de son trajet, ne voit plus rien.

Il évoque le retable noyé, se souvient de ce bras reliquaire où l'os, encore, est visible sous le cristal.

C'est cela : voir ce qui ne saurait être vu autrement, ce qui pourrit sous le limon : ce qui grouille aussi !

Sans doute à cause des vibrations de l'eau, de ses remous et de ses gouffres, il va jusqu'à parler d'hallucinations.

Dans la nudité du sol, pourquoi lit-il les formes du paysage qu'il découvrira après la courbe ? Dites !

Le temps où les pavillons des péniches devaient mesurer 2 m 50 sans quoi les mariniers "ne savaient pas se voir" !
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Marcheur sentimental ! Toutes ces capitaineries, ces ports à investir, toutes et toutes ces écluses à ouvrir avec ta clé géante, ces douves que tu combleras dans la solitude des hommes de quart. Ô nous devons comprendre ce paysage, admettre ce qu’il offre d’étrange. Ô nous devons partir à la recherche de nos morts, de notre moi enfoui si gras dans la terre qu’il geint, la bouche pleine, nous terrifie avec sa face d’amant? Ici, c’est juste un souterrain d’où suinte l’eau blanche encore, la blessure première. Source ! Des marches à descendre. Une pierre rouge qui, jamais, ne déteint. Nous nous regardâmes. Déjà je savais qu’entre nous la ressemblance serait grande. Et j’eus peur. Des troupeaux entiers allaient-ils s’abreuver de ma substance même ? Un moment je le craignis. Le bois entier se pliait. Je devins feuille morte et forcément stagnante. J’étais pourtant là pour vivre, marcher, m’échapper et – hardiment – avancer toujours plus au nord. Ô paysage lunaire. Ô deuil. J’étais là, dans mes vêtements noirs, à écouter la fente gémir, se plaindre, avouer ses secrets. Marcheur sentimental ! Te voici lancé près de ce qui n’est encore qu’une frêle rivière. Déjà rêvant de l’embouchure. Et de la bouche magique sort l’eau très pure que tu vas suivre et qui peut, et qui doit (n’était-ce pas écrit ?) à jamais te régénérer. Quel sera le secret de l’eau ? Quels livres anciens lire pour s’approprier la connaissance ? Me voici : juste et indigne, taciturne et sensible, instable terriblement ! Moi. Faisant face à la matière même de ce qui va devenir fleuve. Moi. Pour guérir un peu ! Prévenir la mer si lointaine que je me suis mis en route. Ainsi. L’homme et la fente se regardent-ils tandis que des corneilles lisent leur acte d’alliance dans la transparence de la source. De là-haut. Ricanantes. Guettant le voyageur. D’abord, quel était le plus angoissé des deux quand ils se regardaient dans leurs yeux verts ? L’homme ? L’eau ? Il se fit un grand tapage de prémonitions diverses et chacun y alla de son acte manqué. Marcheur, je le suis. Marcheur, je progresse dans les souterrains du château, espérant ce rai de lumière qui m’enlèvera tous mes doutes. J’aimais cette béance. Ce fut immédiat. Elle annonçait blessures à venir, charpie, garrots, cette souffrance identique pour un comte de Flandre ou un berger niais. Tendresse des troupeaux ! Vous broutez sans douleur apparente des épines qui pourraient déchirer le géniteur qui perdure en moi ! Père des eaux. Père de ce silence qui enveloppe la sortie soudaine de ce liquide qui croît, s’élargit, cherche sa voie entre deux prairies et – devenu canal accueillera les péniches. Ô source ! Je te vis telle que tu m’apparaissais déjà dans mes rêves adultes. Dès lors, il suffisait dites-vous de suivre le courant ? Mais quand l’eau stagne, vers où se diriger ? Et puis : la source même était inondée ! J’allais. Je revins. Je repartis. L’eau s’écartait, m’encercla, sur le corps entier du marcheur se referma puis, très vite, de nouveau, s’ouvrit. Plus de bruit. Aucun murmure. Le crissement du vent dans les champs de betteraves. Et, très loin, la silhouette d’un journalier ivre de sucre et de blocs d’alcool. La source est calme et je le sais. Mais n’étais-je point parti pour vérifier cela ? La source. Et l’homme. Une dernière fois se regardèrent. Sans angoisse le marcheur plongea sa main malade dans l’eau de ce novembre de glace. Il ne se passa rien. D’ailleurs il ne s’est jamais rien passé. Quelque chose me dit qu’il est vain d’attendre qu’ici, enfin, l’on espère !
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Le marcheur d’eau…


Extrait 3/4

Ce n’est pas là – où paissent les moutons de sel – que se
terrent les images perverses du monde Pas en un tel lieu

Où le pâle soleil blanc projette mon reflet à l’avant du
cargo Babtai Là je distingue alors la silhouette ô combien

Contrefaite que, désormais, les troupeaux d’eau connaissent
bien Ce n’est pas là ! Voici plutôt l’apaisement le renon-

Cement Et ce compagnonnage avec le fleuve n’est en rien équi-
voque J’ai marché bu des bières au filtre magique pleuré Me

Voici d’or vêtu Me retournant vers la source Lui parlant Evo-
quant ces guerriers qui y trempaient leur bras afin que l’

épée de justice soit, pour eux, moins lourde à manier !
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Les mots, comprenez-le, sont insuffisants pour dire et exprimer la chose. Ô, demain encore, pourtant, je vous écrirai !
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Mais je vous écrirai encore : j’ai tant de choses à vous dire ! J’aime ces petits magasins qui regardent le fleuve. Il s’y vend de la dentelle, des abat-jour, d’anciennes cartes postales humides d’avoir trop approché les âmes des enfants morts enfermées dans des coffrets d’argent. Désormais – mais vous le savez – ce n’est plus ma langue. J’éructe des mots étranges venus de loin, de là-haut et qui, lentement, de village en village, sont venus à ma rencontre. Ma bouche est pleine de sable. Et ma langue est salée. Topografische kaart van België. J’y ai mes points de repère, annotant, soulignant, encadrant courbes du fleuve, lieux et paysages. j’avance et je coche. Tantôt il me semble progresser sur un terrain miné, tantôt entendre quoi ? Des anges, peut-être ! Verrai-je un phoque ? Un cygne noir ! Descendrons-nous en bande hurlante cette eau jamais soumise ? Oui, je vous écrirai. Cette carte, que je tiens serrée, vous indiquera l’endroit exact où je me suis envolé – dispersé ô décembre ! Pardonnez-le moi : je ne crains plus la mort. La formule vaut ce qu’elle vaut, mais quel bel exercice mental de – sans cesse – comparer la réalité de ce relevé à celle du fleuve ! Il naît de tout cela un modeste bonheur dont j’ai presque honte de souligner l’impact. Somptueux tout cela ! Somptueux comme ces tapis que l’on déroule pour recevoir idiots et saints. Je marche en parlant. Çà ! Qu’ici l’on s’exprime et peu importe en quelle langue ! Les mots craignent-ils la brume ? Ont-ils peur de ce livre ouvert : le brouillard ! Je fais ma guerre. J’attaque et viole ma langue maternelle. Je la regarde se balancer sur les gibets. D’où me vient cette fureur ? Me mettrais-je à haïr ma mère après l’avoir, tant de mois, portée ? Eau trouble. Écluses qui, d’effroi, se vident. Voici l’instant où se mettent en marche les péniches et cela me rappelle le départ d’une manifestation où domineraient drapeaux noirs jaunes et rouges. J’eusse dû m’engager comme soutier. Vivre dans la majesté du mazout. Ô grands arbres blancs ! Vos branches ploient sous une foule d’oiseaux fous. Croyez-moi bien : je sais parfaitement quel luxe m’accompagne, ne suis-je pas redevenu enfant ? Me voici organique au fleuve. Soutier, je suis, prenant des notes, écoutant vieilles et vieux parler. Soutier. Et sans état d’âme ! Je partirai. Le fleuve demeurera sur place. Mais je ne savais pas que tout, ici, serait si noir. La lumière semble tamisée par le diable lui-même. Grisaille. Cela n’empêche pas les enfants de se rendre à l’école, d’entasser leurs vélos à l’avant de la barque du passeur d’eau. Je perçois des rires. Et je poursuis ma route, sans douter, sans frémir, mettant mes pas dans les marques laissées par les fers des chevaux. C’est peut-être ce jour-là que j’osai me poser la seule question qui en vaille la peine : suis-je déjà venu ici, autrefois, tirant les péniches ? Vous m’avez bien compris : ai-je vraiment été cheval ? Il me vient une lente angoisse que je ne cherche plus à dominer. Elle flotte. On dirait de la gaze sur l’eau. La voici qui s’entoure de buée, de larmes oui de larmes. Ai-je été qui j’ai dit ? Mon père, peut-être, le sait. Mais comment oserais-je lui poser la question ? D’ailleurs, que répondrait-il ? Il faut aller plus loin dans le caveau, plus bas, hardiment dans la terre. Soutier, vous dis-je. Ah ! quel métier sain ! Les poumons s’encrassent mais, au moins, ils saisissent tout de la marche du monde. Père ! Hennissez donc, parfois, le soir, rien que pour me mettre sur la voie, rien que pour m’enlever un peu de ce poids d’anxiété qui m’écrase la poitrine. Je n’avais pas songé à la vase. Je n’imaginais pas que cela fût si noir. Les mots, comprenez-le, sont insuffisants pour dire et exprimer la chose. Ô, demain encore, pourtant, je vous écrirai !
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J’allais Je marchais le long de cette nudité
apaisante Je fis un vaste usage de la solitu-
De et des marées, vivantes ô combien ! Je fus
celui qui s’interrogeait : cette aventure so-
litaire le long d’un fleuve qui ne me rejetait
pas Dites ! Était-elle vraiment agissante sur
le monde ?
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Le marcheur d’eau…


Extrait 4/4

De
ma
maladie Je
ne
savais
rien.
Simplement l’
effroi
qu’aux
vagues
elle
inspirait.
A toutes !
A toutes !
Journal
froissé
contre
le hublot
de
la
cabine mauve
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