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Il suffira d'une étincelle

L'incendie d'une cathédrale va provoquer un jeu de massacre au sein d'une petite ville de Bourgogne. Emmanuel Venet nous livre une savoureuse satire sociale où l'évêque est priapique, l'immigré bouc-émissaire et les édiles corrompus. On se régale!

Monseigneur Philippe Ligné a bien de la chance, car deux femmes s'intéressent de près à ses pulsions sexuelles. Il y a d'abord Sibylle Stoltz, sa gouvernante alsacienne qui considère qu'il faut bien que la nature exulte et s'offre à la levrette comme elle dit à l'homme d'Église. Mais il y a surtout Marie-Ange Mourron, une paroissienne dont la plastique provoque en lui des sensations inavouables. La jeune femme va jouer un jeu de séduction de plus en plus osé dans le confessionnal avant de tomber dans les bras de l'ecclésiastique. Sous couvert de formation, il va instaurer des rendez-vous clandestins pour assouvir cette passion brûlante qui va pousser Marie-Ange au divorce.
C'est d'ailleurs lors de l'un de ces rendez-vous qu'ils vont apprendre via une chaîne d'info que la cathédrale de Pontorgueil est en proie à un violent incendie.
Cet événement va ébranler bien des certitudes et remettre en cause la gestion de la sécurité de cet édifice patrimonial d'importance. Les historiens se penchent sur l'édification du bâtiment et ses modifications successives, sur l'architecture et sa stabilité. Les enquêteurs vont chercher à savoir si la société privée en charge de la sécurité et des alarmes incendie a tenu ses engagements, mais aussi si la municipalité n'a pas manqué à son devoir de vigilance en signant un peu vite ce contrat. Tous les édiles sont désormais aux abois.
Cependant, «au terme d'une inspection soigneuse des décombres de la cathédrale Saint-Fruscain menée entre le 19 avril et le 11 juin 2010 et d'entretiens avec les protagonistes de l'incendie à la même période, Valère Graunion, expert près la cour d'appel, conclut que, s'il était assez facile de reconstituer la chronologie du sinistre, il était impossible d'en déterminer avec certitude l'origine.» Des conclusions qui n'empêcheront nullement la population de désigner un coupable en la personne d'un immigré qui avait trouvé refuge dans le lieu de culte. À moins que ce ne soit un toxico. Après tout, il suffit de piocher dans les marges pour assurer sa bonne conscience.
La technique qui consiste à circonscrire un incendie en allumant un contrefeu peut s'avérer efficace. Ici, elle serait plutôt susceptible d'attiser les rancoeurs, raviver les préjugés, ramener au jour des affaires soigneusement étouffées.
On l'aura compris, Emmanuel Venet se régale et nous régale avec cette satire sociale explosive. Avec ironie et un humour noir mordant, l'auteur fait voler en éclat les conventions sociales. Sur ce bûcher des vanités, chacun va en prendre pour son grade, entre petits arrangements et grandes négligences, entre soif du pouvoir et envie de faire rapidement fortune. de l'homme d'Église au politique, de l'architecte au journaliste, de l'entrepreneur à l'avocat, tous en prennent pour le grade. Ils s'imaginaient avoir un tempérament de feu mais constatent combien il leur est difficile d'entretenir une petite flamme, toute petite.
Saluons aussi la parution de Marcher droit, tourner en rond dans la nouvelle collection de poche des éditions Verdier. Ce roman retrace la confession d'un homme atteint du syndrome d'Asperger qui rêve de retrouver sa camarade de lycée.
NB. Tout d'abord, un grand merci pour m'avoir lu jusqu'ici! Sur mon blog vous pourrez, outre cette chronique, découvrir les premières pages du livre. Vous découvrirez aussi mon «Grand Guide de la rentrée littéraire 2024». Enfin, en vous y abonnant, vous serez informé de la parution de toutes mes chroniques.


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Derrière un bandeau présentant une toile de James Ensor, sur laquelle les figures colorées et burlesques d'un carnaval encadrent un squelette au visage grimaçant, Emmanuel Venet propose une comédie de moeurs provinciales, joyeusement grinçante, un roman comme une sotie dénonçant les turpitudes et les hypocrisies des habitants de cette France étriquée des petites villes. Dans ce texte comme dans ses précédents récits, il laisse la plus allègre liberté à son imagination, passant d'une page à l'autre de la farce d'un vaudeville à l'histoire tragique du voyage d'un migrant africain, ajoutant toujours à cet art du conte sa gourmandise pour les mots, comme lorsqu'il décrit au long de plusieurs paragraphes l'architecture d'une cathédrale, usant avec délectation de la palette complète d'un vocabulaire technique, précieux et pittoresque. Et puis, si la dimension oulipienne de son écriture est là moins évidente que dans d'autres de ses oeuvres, son goût des images et des symboles, sa manière légère et élégante de filer ici la métaphore du feu, d'un incendie bien réel à la chaleur érotique des corps et aux braises de la passion, emporte définitivement l'adhésion du lecteur… On se laisse volontiers brûler aux étincelles de cette écriture !
À Pontorgueil, une ville moyenne située non loin de Verrières (cette autre cité d'une Bourgogne à moitié imaginaire, qui apparaissait déjà dans Virgile s'en fout), la cathédrale, un beau soir, s'embrase, jusqu'à être bientôt réduite en cendres. Catastrophe pour l'évêque, que l'annonce de l'événement surprend en pleins ébats amoureux avec l'une de ses ouailles, obligé de rentrer dare-dare constater les dégâts ! Dès le lendemain, une enquête commence, révélant cette aventure cachée mais aussi de multiples autres secrets, les mesquineries et les ridicules de différentes figures de la vie locale, gérants incompétents, escrocs à la petite semaine, responsables véreux ou marginaux miséreux. le fait-divers n'est pas sans rappeler l'incendie réel de la Cathédrale de Nantes, le 18 juillet 2020, d'autant plus que dans la réalité comme dans la fiction, un migrant, employé au nettoyage et à la fermeture vespérale de l'édifice, est rapidement mis en cause (mais si sa culpabilité est avérée à Nantes, le Blaise Muki de l'histoire d'Emmanuel Venet sortira blanchi de l'affaire). D'autres pistes aussi sont évoquées, comme celle de la vengeance d'un fils de la bourgeoisie locale contre un évêque qui lui a volé sa mère ou celle de l'incompétence d'un jeune paumé, employé ce soir-là à la surveillance de la cathédrale… Rien n'y fait pourtant, on ne connaîtra pas la cause de l'incendie. Et qu'importe, d'ailleurs, puisque cette destruction est peut-être, finalement, pour les notables du coin, une aubaine ? Et qu'importe aussi pour le lecteur, puisque ce récit, dans lequel Emmanuel Venet aura rebattu les cartes de quelques destins avec cette souriante perfidie qu'on lui connaît et qu'on adore, révèle une fois encore toute la subtilité d'analyse de son auteur, la finesse de son regard sur les êtres et les choses, la réjouissante puissance de son talent de satiriste ? Allons, ne boudez pas votre plaisir, vous reprendrez bien un peu de Venet, non ?
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Si vous n'avez pas encore lu Marcher droit tourner en rond, d'Emmanuel Venet, alors vous êtes chanceux : lire Venet, c'est goûter un style élégant et plein d'intelligence, agrémenté d'un humour tout desprogien. Et il se trouve que ce nouveau roman - Contrefeu - s'inscrit dans la parfaite veine de cette fresque (de bras cassés) miniature qu'était Marcher droit… , succès modeste à sa sortie, mais dont chaque lecteur devint un fidèle. Et de fidèles, il en est aussi question dans cette chronique perfide du charme discret de la bourgeoisie de province — si l'on peut dire. Avec son évêque habité par le feu de la passion, sa fervente consumée par l'ardeur du désir, son migrant africain brûlé d'un destin dramatique (mais qui fait un coupable idéal), ses quelques affairistes bouillonnants d'idées pour faire de bons placements, ou encore son jeune alterno' qui refuse d' « entrer dans les schémas de la consommation de masse » tout en reprochant à sa mère de pas installer la climatisation, Venet multiplie les points de vue, brouille les pistes et révèle les failles de chaque protagoniste avec autant de minutie que de désinvolture. C'est fin, c'est drôle, on serait même tenté de dire que c'est malheureusement si vrai que cela en devient cruel. Et le pire : c'est qu'on aime ça (on en redemande d'ailleurs).
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Quelle plaisir de lire Emmanuel Venet ! Dans un roman court, efficace, il se permet de dézinguer à tout va, en dénonçant la bêtise humaine, ainsi que sa cupidité. C'est tour à tour un homme d'église, un maire, un clandestin, un fils vengeur, un maire stupide, un praticien du même acabit, un entrepreneur véreux, et j'en passe, qui vont défiler sous nos yeux, confronté à l'incendie de la cathédrale de Pontorgueil. Une farce humaine absolument délicieuse, tout juste distraite d'une description incroyable de la cathédrale. Emmanuel Venet fait preuve d'un style sans pareil, direct, corrosif et donc jouissif ! On en redemande !

Livre lu dans le cadre d'un mass critique - Grand merci à Babélio et aux éditions Verdier pour le plaisir !
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Alors que l'évêque de Pontorgueil brûle des feux de l'amour avec une de ses paroissiennes, la cathédrale incendiée s'effondre. Crime, attentat, incident malheureux ? L'auteur donne la parole à tous les protagonistes locaux : défilent alors toutes les malversations et petitesses dont les hommes sont capables pour assouvir leurs besoins d'argent, de sexe, de pouvoir. Qu'importe si les laissés-pour-compte - un migrant, un clochard, le fils d'une prostituée- en subissent directement les conséquences.
Une satire du capitalisme et de la société à la Desproges, avec humour et ironie .
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À Pontorgueil, avril 2010, une cathédrale brule et s'effondre. La petite bourgade s'agite tout autour de cet évènement et Emmanuel Venet décrit d'un chapitre à l'autre des personnages qui vont graviter d'une manière ou d'une autre autour de cet incendie. "Contrefeu" est plein d'humour, Emmanuel Venet se régale à décrire les petits compromis du quotidien de ses personnages. Derrière la plume drôle et cynique de l'auteur, on perçoit une certaine vision de la France. Une vie provinciale avec tous les coups bas qui vont bien. "Contrefeu" se lit tout seul et derrière la description d'une petite société qui règle ses comptes, l'auteur aborde aussi les thèmes qui lui sont chers, de la psychiatrie au rapport à la norme. Comme souvent les niveaux de lecture sont nombreux dans les livres d'Emmanuel Venet et une nouvelle fois c'est un régal de bout en bout. Malin.
Lien : https://lesmafieuses.wordpre..
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À Pontorgueil, les habitants sont tous bien singuliers, enfin ceux que l'auteur nous décrit.
Il en a va du médecin aux pratiques douteuses, à l'homme qui se voit grand patron d'une boîte quitte à payer le prix de l'insécurité et de la fourberie, en passant par un père qui lorgne sur la mère d'un baptisé.

Un incendie a eu lieu, la cathédrale Saint-Fruscain en est la victime. S'agit-il d'un acte criminel ou d'un accident banal ? L'enquête tentera de le démontrer en passant par une satire sociale exacerbée. Certains sont pointés du doigts car ils en ont le faciès ou le mobile. D'autres sont exclus par leur sainteté d'apparence.

Une chose est sûr c'est que dans ce village il y est beaucoup question d'incendie dans les sous vêtements ! Chaque personnage a des tendances extrêmes, à se jouer parfois de la femme de manière dérangeante.

Même si l'écriture est soignée, que la drôlerie est présente, l'appétence sexuelle des protagonistes à chaque page m'a plutôt déplut.
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Un court commentaire pour dire tout le bien de ce court roman drôle, cynique, dans l'air du temps ! on y rencontre beaucoup des affres de notre société, du petit monde que peut constitué cette ville de Pontorgueil. Pas grand chose à ajouter à mes amis lecteurs et critiques. Emmanuel Venet nous surprend toujours autant, c'est un régal !
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