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Critique de Foxfire


Le post-apo de Julia Verlanger c'est un peu un idéal de divertissement. La trilogie « la terre sauvage » mérite bien son statut culte. J'ai dévoré cette intégrale dans laquelle j'ai trouvé tout ce que j'aime dans le post-apo, des récits alliant aventures ludiques et propos sur l'humain, une ambiance particulière, des personnages forts, des décors marquants. Les romans qui composent cette intégrale respectent parfaitement les codes du genre tout en ayant une véritable personnalité.

Le 1er roman, « l'autoroute sauvage », est sans doute celui que j'ai préféré. Si c'est un post-apo finalement classique, j'y ai trouvé une ambiance assez personnelle. Ce 1er volet m'a pas mal fait penser au très bon film « apocalypse 2024 » (« a boy and his dog »), adapté d'une nouvelle d'Harlan Ellison (que je n'ai pas lue mais comme il a écrit le scénario lui-même j'imagine que c'est une adaptation assez fidèle), en tout cas la 1ère partie du métrage. Dans les deux oeuvres, on retrouve cette opposition très marquée entre les groupes et les solitaires (dans le film on parle de « solos ») et surtout dans le roman comme dans le film la problématique de la frustration sexuelle, rarement abordée dans ce genre, occupe une place importante dans l'histoire. Je trouve qu'aborder ce sujet est plutôt pertinent dans un contexte post-apo qui exacerbe les rapports de domination et Verlanger le fait très bien. Elle est finalement moins cynique qu'Ellison, peut-être moins pessimiste aussi. Dans le monde de Verlanger, si la plupart des hommes sont des salauds ultra-violents, les héros restent des personnages globalement positifs, Gerald et Thomas ne sont pas dénués de sentiments et ont indéniablement conservé un sens moral. Ce n'est pas vraiment le cas dans « Apocalypse 2024 » où le héros incarné par Don Johnson ne semble pas pouvoir être atteint par des considérations morales et ne semble chercher à satisfaire que des instincts très primaires, en gros bouffer et baiser. Si cet aspect très amoral ne m'a pas dérangée dans le film, j'ai même trouvé ça intéressant et audacieux, j'ai aimé le fait que les personnages de « l'autoroute sauvage » restent positifs, le fait de m'attacher à eux a renforcé mon sentiment d'identification. le décor est parfaitement planté, le côté road movie est très bien mené, les péripéties s'enchainent bien dans une construction narrative solide et cohérente. L'ensemble est rythmé, on ne s'ennuie pas une seconde. L'écriture de Verlanger contribue grandement à la réussite du roman. Elle a un style qui claque, direct, incisif.

Le 2ème volet intitulé « la mort en billes » est aussi une très belle réussite. Tout d'abord, il y a le plaisir de retrouver des personnages auxquels on s'est fortement attaché. Ensuite, l'auteure parvient à renouveler son récit en proposant de nouveaux développements intéressants qui s'intègrent naturellement à son univers. Et pourtant, la structure narrative reste à peu près la même que dans le 1er roman. Mais, elle parvient à modifier ses enjeux de façon finalement assez subtile.

Le dernier roman de la trilogie, « l'île brûlée », est sans doute celui qui m'a le moins séduite. Mais cela reste un bon roman. Verlanger a clairement essayé de renouveler encore une fois son récit en l'emmenant sur des chemins assez inattendus. On ne peut pas lui reprocher de s'être contentée de refaire le même roman, ce n'est pas le cas. Encore une fois, la structure narrative est assez semblable aux autres mais les enjeux et les développements sont très différents. Dans ce tome, l'auteure déploie une belle imagination et s'attache à proposer un récit un peu plus touffu que les précédents. Et c'est justement le reproche que j'ai à lui faire, ce qu'il gagne en densité il le perd en simplicité et je trouve que c'était là ce qui faisait la force des deux premiers romans. Ce côté direct d'une intrigue épurée au maximum, le héros doit se rendre d'un point A à un point B et au cours de son périple il doit affronter des épreuves, est d'une efficacité redoutable. Je trouve que dans ce 3ème volet » on a un peu moins ça. Ceci dit, le roman reste très plaisant, les personnages toujours aussi attachants et le style encore une fois très accrocheur.

4 nouvelles viennent compléter cette intégrale. « Les bulles » est particulièrement intéressante. Ecrite en 1956, elle annonce déjà certains éléments des romans mais le ton est assez différent, plus sombre et moins ludique. « le recommencement » est la suite de cette nouvelle même si elle a été écrite bien plus tard, en 89. C'est une bonne nouvelle également. J'ai beaucoup moins aimé « nous ne vieillirons pas » qui ressemble plus à mon sens à de la poésie en prose qu'à une véritable nouvelle. Et j'avoue que je ne suis pas très cliente de ce registre, ça manque de fil narratif à mon goût. Enfin, « Les derniers jours » clôt cette intégrale de belle façon avec un récit prenant.

Si les nouvelles proposées dans ce volume sont bonnes et intéressantes, j'en ai tout de même moins apprécié la lecture que les romans. le ton des nouvelles est plus sombre. Ce que j'ai particulièrement apprécié dans la trilogie c'est son côté série B assumée. Les romans font la part belle à l'action. Que c'est généreux ! Voilà de la belle littérature populaire. Il va falloir que je me penche sur les autres écrits de Verlanger. Je suis curieuse de voir si elle est aussi généreuse et efficace dans d'autres registres.
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