Quant au Pilgrim, il était perdu. Ce n'était plus qu'une carcasse sans valeur, dont le ressac allait en quelques heures disperser les débris. Il eût été impossible d'en rien sauver. Mais si Dick Sand n'avait pas cette joie de ramener à son armateur un bâtiment intact, du moins, grâce à lui, ceux qui le montaient étaient-ils sains et saufs sur quelque côte hospitalière, et, parmi eux, la femme et l'enfant de James W. Weldon.
Pendant huit jours, l’embarcation dériva, sous l’impulsion du courant, dans les conditions qui ont été relatées. Aucun incident de quelque importance ne se produisit. Sur un espace de plusieurs milles, la rivière baignait la lisière de forêts superbes ; puis, le pays, dépouillé de ces beaux arbres, laissait les jungles s’étendre jusqu’aux limites de l’horizon.
Si les indigènes manquaient à cette contrée, – ce dont Dick Sand ne songeait nullement à se plaindre, – les animaux du moins y foisonnaient. C’étaient des zèbres qui jouaient sur les rives, des élans, des « caamas », sortes d’antilopes extrêmement gracieuses, qui disparaissaient avec la nuit pour faire place aux léopards, dont on entendait les hurlements, et même aux lions, qui bondissaient dans les hautes herbes. Jusqu’alors, les fugitifs n’avaient aucunement eu à souffrir de ces féroces carnassiers, ni de ceux de la forêt, ni de ceux de la rivière.