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Citations sur XY (24)

... c'est le jour zéro et en conclusion soit on est le voyageur que j'ai toujours été qui accuse le paysan de ne rien savoir soit on est le paysan que je serai dorénavant et qui gentiment et en continuant à piocher lui répond oui monsieur c'est vrai monsieur moi je ne sais rien monsieur mais celui qui s'est perdu c'est vous.
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Les jours qui ont suivi le massacre ont été les pires de ma vie, et je m'en souviens à peine. Du moins comme jours, comme succession d'heures qui scandent le temps, je m'en souviens à peine : je me souviens plutôt de tout un ensemble d'angoisse, de déplacements, d'attentes, de peurs, de questions, de froid, de silence, de lassitude, de stupeur, d'impuissance, tout cela comme renversé pêle-mêle dans ma vie, sans ordre, sans un véritable écoulement. Dévider cette pelote, faire la distinction entre l'avant et l'après et raconter ces jours-là en suivant un fil chronologique, ça m'est impossible : dans ma mémoire il ne s'agit désormais plus que d'un encombrement unique, comme si le temps s'était arrêté, voilà, à l'instant où j'étais descendu de cette motoneige, et qu'à partir de là, ensuite, tout eût commencé à arriver simultanément.
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San Giuda est un petit hameau de 42 âmes perdu dans les montagnes du nord de l'Italie. Chaque matin, à 10 heures, le traineau de Beppe Formento, qui tient un centre équestre de l'autre côté du bois, arrive avec ses quelques touristes, pour une visite éclair du village avant de repartir d'où il est venu. Tous les jours, sans exception. Imaginez donc la consternation des habitants lorsque, par un matin de novembre, le traineau se présente vide sur la place du village, tiré par un seul des deux chevaux, terrorisé et les yeux révulsés.
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Je me présente aux urgences avec les pantoufles de Mickey. Bon, il n’y a plus grand-chose à faire, désormais, je suis entrée. Tchao Luciano, tchao Ignazio. Les infirmiers me regardent drôlement, mais j’avance tout droit, je sens que je ne peux expliquer qu’une seule fois, à Crocetti, cette affaire inexplicable, au moment où il va me recoudre. Le voilà, debout devant la porte des consultations : il ne fait rien, aucune urgence, il bavarde avec l’infirmière belle, comment s’appelle-t-elle, Sofia…
— Giovanna, dit-il, quand il me voit.
— Mario. Tu dois me recoudre.
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On dirait un cauchemar, et si c’était un cauchemar tu pourrais courir joyeusement en tirer des symboles et des significations et des projections inconscientes. Mais ce n’est pas un cauchemar, c’est la réalité
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... à quoi peut-il croire celui qui passe sa vie devant un écran, sinon à ce qui lui est dit à travers cet écran?
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Ces noms. Dans les noms, comme dans les lieux, vit une force et dans les récits qu’il m’a faits je percevais une force gigantesque. Il les prononçait avec un tel naturel, comme si je savais de qui il parlait- et en effet, par la manière dont ils s’agencent à la perfection les uns les autres, et tous ensemble avec le lieu auquel ils donnent vie, ils inspirent - inspirent- une sorte de familiarité congénitale : ils résonnent et ils sont aussitôt figures, fond et destin. L’anonymat n’existe pas, dans ces endroits. Solidité. Temps. Tradition. Maintenant, …, je ne me rappelle pas un seul de ces noms, mais je me souviens très bien de leur force - c’est la force d’une masse humaine homogène et compatible, aux frontières tellement précises.
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Je l’ai dit aux carabiniers, je l’ai dit au Procureur, je l’ai dit à tous ceux qui m’ont demandé « qu’est-ce que vous avez vu ? » : l’arbre, nous avons vu l’arbre, l’arbre glacé. C’est la première chose que nous avons vue, dès que nous sommes arrivés dans la forêt – et même par la suite quand nous avons vu le reste, c’était encore la seule chose entière que nous ayons vue. L’arbre. Il était là, à sa place, à l’entrée de la forêt, cristallisé comme toujours dans son manteau de glace, dont la transparence était ternie par la neige fraîche – mais il était rouge. Il était rouge, oui, comme si Beppe Formento, au moment où il le glaçait, avait mis du sirop de griotte dans le canon
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Dans cette blancheur fatale il était la seule chose qui gardât une forme, et il paraissait – je n’exagère pas – allumé, palpitant de cette intime lumière aurorale qui revient aujourd’hui encore dans mes rêves. Je rêve de cette transparence rouge, oui, aujourd’hui encore, et je la rêve sans l’arbre, désormais, sans même la forme de l’arbre : je rêve de cette couleur et rien d’autre. Un couchant emprisonné dans un ciel de gélatine, un rideau de scène en quartz rouge qui tombe sur mon sommeil, un immense bonbon Charms qui dévore le monde, j’ai continué à rêver de cette transparence rouge et je continue à le faire, parce que c’est ce que nous avons vu, quand nous sommes arrivés à la forêt. Qu’est-ce que vous avez vu ? Nous avons vu l’arbre glacé trempé de sang.
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Maintenant je sais comment s’appelle cette façon de faire, maintenant je sais tout sur les impulsions autolésionnelles et les actes manqués, mais alors je n’étais qu’une fille de seize ans idiote qui fait la chose à ne pas faire. Donc je force sur mon couteau et la lame, mince et flexible, au lieu de pénétrer dans la croûte, ricoche et me tranche l’index de la main gauche, juste à la jointure – je la vois s’enfoncer profondément dans ma chair. Je n’éprouve aucune douleur, mais de l’horreur : je vois le rose du doigt devenir rouge, je vois l’éclat de la chair vive s’agiter dans l’entaille, au fond de laquelle je vois quelque chose de blanc – l’os –, et je sens que je m’évanouis.
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