Il faut vraiment avoir quelque chose à y faire pour débarquer, fin septembre 1920 en gare de la Poste Manquée. C'est le cas d'Eugène Goupi : il vient de Paris au village marier sa cousine… Enfin, c'est ce qu'on dit…
Il est accueilli par son oncle, Mains Rouges,
Goupi Mains Rouges, deuxième de la famille à porter ce surnom avec l'ancêtre. Car faut vous dire, Monsieur… Ah, oui, j'oubliais : Eugène Goupi, pour tout le monde, ici, c'est Monsieur, Goupi Monsieur… Car faut vous dire, Monsieur, que chez ces gens-là, on vous appelle par votre sobriquet : L'empereur, Saint Homme, Les Sorts, Doux Jésus, Mes Sous, Gazette, La Morte, Carrosse, Dicton, enfin, Tonkin et Muguet… Muguet : la cousine…
Il y aura des morts et des blessés, un magot disparu et les gendarmes tenus à l'écart : « Les affaires des Goupi se règlent entre Goupi »…
C'est Mains Rouges qui mènera l'enquête interne aux Goupi, mieux que La Loi pourtant ancien gendarme…Une « enquête » menée dans la ruralité des années 20 ; des gens durs à la peine, taiseux, près de leurs sous… Une enquête rondement menée, convaincante… Alors qu'un deuxième intérêt pointe : Monsieur, Goupi Monsieur, ainsi dénommé pour son costume parfumé et ses manières de la ville. Peu à peu, lui qui prenait sa famille pour des « culs terreux », évolue : la fine moustache envahit bientôt la totalité de la lèvre, le plaisir est retrouvé de manger un morceau de jambon cru sur un quignon de pain à l'aide d'un couteau qui coupe vraiment et se replie…Bref. On voit Monsieur revenir aux sources, à sa culture initiale, rurale. C'est comme le vélo : ça ne se perd pas…
Venons-en au style : découvert il y a peu par l'entremise d'un hommage sur France-Culture, je ne connaissais de
Pierre Véry que deux films (et encore… sans connaître le nom de l'auteur) : «
Les disparus de Saint-Agil » et justement «
Goupi Mains Rouges », deux films qui ont régalé mon adolescence… Je découvre aujourd'hui un écrivain au style délicieusement désuet et évocateur, un style qui sent l'humus et le sous-bois après l'orage. Pour ma part, j'aime beaucoup…
Un seul petit bémol à ce
Goupi Mains Rouges : une fin ouverte de type cinématographique qui ne me satisfait jamais, que ce soit au cinéma ou en littérature.