Ouf ! J'en suis arrivée à bout ! Non, ce n'est pas ce que vous croyez, j'ai beaucoup aimé ce livre, mais il n'est pas simple à lire. L'écriture de
Marie Vieux-Chauvet n'y est pour rien ! C'est simplement, qu'il faut avaler les histoires qu'elle nous raconte avec brio sur Haïti. Il faut le lire à petites doses.
Rien ni personne n'est épargnée. Aussi bien les miséreux, les pauvres que l'élite tel les bourgeois, les intellectuels, les médecins, les prêtres, les acteurs sociaux y sont pour quelque chose dans la mise en place d'un dictateur pour les diriger. Tous sont coupables. Elle dénonce la lâcheté, la méchanceté, l'envie, la jalousie, la soumission, les humiliations, les révoltes étouffées dans l'oeuf, le pouvoir.
Non pas le pouvoir sain qui permet de faire avancer les forces vives d'un pays, mais celui qui rabaisse les gens, les tire vers le bas et toute la société qui va avec, homme, donc humain, qui ne règne que pour détruire.
A travers les trois chapitres de ce livre, on découvre avec Amour, Claire qui vit avec ses deux soeurs, Anette et Félicia, dans la maison familiale. Seule Félicia est mariée. Jean Luze, son mari est français et est convoité par les deux autres soeurs.
Claire, vieille fille aigrie, raconte ses soeurs, son beau-frère, ses états d'âme, sa jalousie, sa haine, sa frustration de ne pas avoir connu l'amour, d'avoir été sacrifiée parce qu'elle n'était pas blanche, contrairement à ses soeurs.
Grâce à elle, on découvre également la petite province d'Haïti, la politique, le pouvoir, la misère, la colère, la haine, la jalousie, la torture. Les atrocités exercées par Calédu.
Colère, raconte la vie de la famille Normil, qui possède des terres. Un matin, des hommes en uniformes sont arrivés. Ils ont plantés des poteaux tout autour de la propriété familiale des Normil, les empêchant d'approcher de leurs terrains. Ils ont été spoliés. Un mur sera construit. Plus de possibilités de faire les récoltes, ce qui leur permettait de vivre.
Les voisins, les amis, tout le monde leur tourne le dos. Plus personne ne les salue. Ils sont considérés comme des pestiférés. Tous ont peur. Mais lorsque la jeune soeur, Rose, se livrera au « Gorille » pour que la famille soit préservée, ils sont revenus. Ils flattaient la famille afin qu'elle intercède auprès de Rose, donc auprès du Gorille, pour avoir des privilèges.
Chacun des protagonistes va essayer de lutter contre l'horreur. le père et le frère, vont chacun à leur façon essayer de trouver une solution pour sortir Rose de l'infamie dans lequel elle est. Mais la peur est là, elle prend chacun dans ses tripes et il est difficile de lutter contre plus fort que soi. Il y a également le grand-père et le dernier fils qui est handicapé. Il ne peut plus marcher. Ils vont se réfugier dans le Vaudou. Et la mère, qui renonce, que son mari trompe, et qui se réfugiera dans l'alcool. Tous n'en sortiront pas indemne. Loin de là.
Quant à Folie, il s'agit de 4 poètes qui se sont barricadés dans une cabane complètement délabrée. Ils y sont depuis 8 jours environ. Ils voient des diables partout dehors. Ils n'osent plus sortir, n'y pour faire leur besoin, ni pour manger… Ils ne font que boire du « Clairin », boisson locale alcoolisée et écrire des poèmes. La folie les saisit l'un après l'autre.
A travers ces trois histoires,
Marie Vieux-Chauvet dénonce les horreurs que connaît son pays, Haïti sous la dictature de Duvallier qu'elle ne nommera jamais dans le livre. Ce sera Calédu, le Gorille ou le Commandant. Elle dénonce la folie furieuse et la cruauté sans limite de cet homme, ainsi que la faiblesse des hommes devant le pouvoir.
Un livre que je ne peux que vous recommander. Il permet de donner une vision précise de ce qu'est Haïti.