Juste après la pluie

Celui qui peint
qui joue
ou qui écrit
est le pillard
de l'enfant dévasté
qu'il était

Le matin
Dans l’indifférence
générale
l’amour traverse la rue
Passe devant le pressing
la boulangerie
le parc
l’école
Hésite entre le trottoir sec
ou le trottoir mouillé
Jette un œil aux affiches déchirées
et au vieux chat qui traîne
derrière les poubelles
Lève la tête et dit
Tiens regarde,
un mouton broute
dans le ciel.

Il restait
là
assis
longtemps
les yeux
dans le vague
à tenter
d'escalader
la grande
paroi
du jour
avec l'affection
rugueuse
de son
silence

Une petite vie
pleine et fraîche
comme une rivière

une petite rivière
pleine et fraîche
qui nous file
entre les doigts

Il arrive au fil du temps
et des événements
qui nous submergent
que certains de nos actes
fassent de nous un peu moins
que ce que nous étions
c'est comme arracher soi-même
un petit lambeau de son cœur
Il arrive au fil du temps
qu'on nous pardonne
qu'on se pardonne
qu'on vive avec
qu'on vive sans
mais jamais
que la chair
ne revienne

Où vont les rêves
dont on ne se souvient jamais

au même endroit
que les mains
que l'on a lâchées

Faire les poches du temps
en remplissant les siennes
de sable
nous sommes
les pickpockets
du compte à rebours

Egotrip


Je suis
un écririen

j’applique le principe
des cloaques communicants

j’accumule
les cuticules
du vent

juste après la pluie


Marcher dans l’herbe
juste après la pluie
rentrer
mettre des chaussettes sèches
recommencer

Bulle


Certains coléoptères
qui travaillent sous l’eau
gardent derrière leurs élytres
une petite réserve de bulles d’air
un stock de respirations de secours
je procède de la même façon
vos yeux arpentent actuellement
mon stock de respirations de secours