Citations sur Jeu Blanc (Cheval indien) (139)
Parler un seul mot dans cette langue pouvait vous valoir une raclée ou le bannissement dans le débarras du sous-sol, que les grands avaient baptisé la Sœur de Fer. Il n'y avait aucune tolérance envers les langues indiennes. Le jour suivant mon arrivée, un garçon du nom de Curtis White Fox se fit laver la bouche au savon à la soude parce qu'il avait parlé ojibwé. il s'était étouffé et était mort là, dans la classe. il avait dix ans .
[..Grognements d'adultes]. Qui naissaient d’ardeurs qu’aucun de nous ne put jamais comprendre. Parfois, trois ou quatre garçons recevaient ce type de visite. Parfois un seul. D’autres fois, des garçons étaient entraînés à l’extérieur des dortoirs. Où ils allaient et ce qui leur arrivait, nul n’en parlait jamais. Au grand jour, nous échangions des regards vides, de façon à ne pas causer davantage de honte. C’était la même chose pour les filles « L’amour de Dieu », murmura un jour Angeline Lynx Leg. « [… ] Ce que la sœur apporte la nuit. Ce que le Père apporte. Pour me bénir. Pour me nourrir. »
Elle avait neuf ans et tout ce que je ressentais était du vide.
La lune était suspendue dans le ciel comme la peau d'un tambour. Pendant que je la regardais, elle devint la surface luisante d'une patinoire, sur laquelle des enfants indiens chaussés de vieux patins riaient, excités par le jeu, le plus petit d'entre eux filant à toute allure sur ses patins trop grands.
'J'entre dans la paix des créatures sauvages qui n'imposent pas à leurs vies l'anticipation du malheur'- Wendell Berry, 'la paix des créatures sauvages'
On raconte que nos pommettes sont taillées dans les crêtes de granit qui dominent notre terre natale. On raconte que nous avons les yeux brun foncé à cause du suintement de la terre féconde qui entoure les lacs et les marécages. Les Anciens affirment que nos longs cheveux droits dérivent des herbes ondulantes qui bordent les baies. Nos mains et nos pieds sont larges, plats et forts, telles les pattes d’un ours. Nos ancêtres ont appris à parcourir avec aisance les territoires que les Zhaunagush, les hommes blancs venus après nous, ont redoutés, tant qu’ils ont eu besoin de notre aide pour y naviguer. Notre parole roule et cascade comme les rivières qui nous servent de routes. Nos légendes révèlent que nous sommes issus du sein de la Terre-Mère, appelée Aki. Nous jaillissons intacts, le cœur d’Aki battant dans nos oreilles, prêts à la défendre et à la protéger.
C'est là que je compris que, quand une chose nous manque, elle laisse un trou que seule cette chose qui nous manque peut combler.
Parfois les fantômes rôdent. Ils traînent dans les coins les plus reculés, et quand vous vous y attendez le moins, ils surgissent, chargés de tout ce qu'ils vous avaient apporté quand ils étaient vivants.
Je m'appelle Saul Indian Horse...
Les Anciens disent que nos longs cheveux raides viennent des herbes ondulantes qui tapissent les rives des baies...
Notre parole s'écoule et se déverse comme les rivières qui nous servent de routes...
Ces gens, ici, veulent que je raconte mon histoire. Ils disent que je ne peux comprendre où je vais si je ne comprends pas où j'étais avant. D'après eux, les réponses sont en moi.
En racontant nos histoires, nous, buveurs invétérés de mon espèce, nous pouvons nous libérer de la bouteille et de la vie qui nous a menés là.
… Là, à l’abri, ma grand-mère aurait trouvé un moyen de me garder près d’elle. À la place, elle était partie. Morte de froid pour me sauver. Et je suis à mon tour parti à la dérive sur une nouvelle et étrange rivière.