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Critique de nescio667


Clayton County, une petite ville des plus banales de l'Amérique profonde. Rien d'exceptionnel ne s'y passe jamais. Aucune célébrité n'y réside. Peu de raison donc d'y voir débarquer la presse nationale. Ce n'est qu'après que le cadavre du garagiste y fut découvert -il était dans un sale état, éventré et ses organes soigneusement empilés à côté- que les gens commencèrent à en parler. Mais le premier à voir réellement quelque chose d' interpellant dans ce meurtre fut John Wayne Cleaver, un adolescent dont la mère et la tante tiennent le funérarium local. Régulièrement, John venait en aide à sa famille pour l'embaumement des corps. Or celui du garagiste présentait une anomalie à laquelle le médecin légiste n'avait accordé que peu d'attention : il lui manquait un rein. Décrit par son psy comme un sociopathe (soit une personne qui n'éprouve aucun sentiment, aucune empathie, même envers les membres de sa famille), John est une jeune homme solitaire et...passionné par les tueurs en série. Lorsqu'il en parle à son psy, c'est en termes peu rassurants : 'Je crois que le destin veut que je devienne un tueur en série...et ce que je veux, c'est éviter d'en devenir un'. Et c'est ainsi que John se trouve perpétuellement en lutte contre lui-même, contre son instinct qui le pousserait parfois à trucider sa mère ou à serrer le cou délicat de sa jeune et jolie voisine. Parmi les maigres armes dont il dispose dans cette lutte, se trouvent les règles qu'il a lui-même mises en place. L'une d'elles consiste à complimenter les gens qui l'énervent plutôt que d'entrer en conflit direct avec eux. Une autre veut qu'il s'oblige à éviter tout contact avec les animaux, afin de ne plus leur faire de mal, attitude qu'il a pu avoir dans son enfance.
Quelques temps après le meurtre du garagiste, une autre corps est découvert et, lorsqu'il est amené au funérarium, John se rend compte qu'il lui manque un bras. Dès lors, toute la science qu'il a pu accumuler concernant les tueurs en série lui paraît bien inutile, car ce genre de meurtre ne correspond à aucun 'profil' qu'il a étudié jusqu'à présent : il semble bien que le tueur 'prélève' les organes et membres, comme si, pour quelque obscure raison, il en avait besoin.
Si, dans ces cinquante premières pages, 'Je ne suis pas un serial killer' se présente comme un roman policier que l'on pourrait qualifier de classique, passé cette frontière, il nous envoie vers d'autres territoires, de ceux que Stephen King, Dan Simmons ou Robert McCammon empruntent régulièrement. Voilà, vous l'avez compris : au coeur d'un univers aussi réaliste que peut l'être une petite ville banale des Etats-Unis, Dan Wells se fait fort d'introduire un élément surnaturel, auquel on ne peut faire autrement que d'adhérer illico presto tant tout autour de lui nous paraît sensé et crédible. A l'image de ses illustres aînés cités ci-dessus, Wells met en scène si pas un enfant, en tous cas un jeune adolescent, personnage central et moteur principal de l'intrigue. Doté d'une personnalité toute particulière et qui donne son titre au roman (ou plutôt à la série, puisqu'il s'agit ici du premier tome d'une trilogie), John, à l'inverse de ce qu'il éprouve pour ses contemporains, suscite assez rapidement l'empathie de la part du lecteur, touché par son combat permanent contre lui-même et par son...humour omniprésent. Car, loin de se prendre au sérieux, le jeune homme porte sur ses actes et sur ceux du tueur qu'il traque un regard toujours légèrement décalé, teinté d'une dérision bienvenue, même lorsqu'il voit le tueur agir (ça gicle) ou lorsqu'il aide sa mère au funérarium (ça gicle moins, ça coule). Si l'on voulait donner une idée de l'ambiance régnant dans ce roman, la meilleure comparaison qui vienne à l'esprit serait celle de la série télé 'Dexter', dans laquelle la lourdeur de certaines scènes sanglantes se voient toujours contrebalancées par un humour ravageur. le personnage de Dexter s'astreint d'ailleurs également à des règles pour ne pas trucider n'importe qui et, autre point de rapprochement, l'acteur qui l'incarne tenait auparavant le rôle d'un...thanatopracteur dans une autre formidable série, « Six feet under ». Mais la comparaison s'arrête là, puisqu'ici, l'intrigue bascule clairement dans le fantastique, ce qui détonne d'ailleurs dans les publications habituelles des éditions Sonatine. Détonne, mais sans faire baisser le niveau, puisqu'avec ce premier tome, Dan Wells nous entraîne dans une histoire au final classique, mais dont le traitement et le soin porté aux personnages la rendent attachante et que l'on n'a pas envie de lâcher avant la dernière page. Dernière page qui apporte donc bien un point final à cette première 'aventure' de John Wayne Cleaver : il ne faudra pas voir la parution du tome suivant pour le connaître, rassurez-vous. Ce qui n'empêche : on l'attend déjà avec impatience.
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