AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
4,02

sur 28 notes
5
5 avis
4
7 avis
3
3 avis
2
1 avis
1
1 avis

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Parce que toute une génération qui a vécu l'indicible n'en a plus parlé quand elle est revenue de l'enfer,
Parce que lorsqu'on donne la vie, la notion de transmission devient essentielle,
Parce que savoir d'où on vient, quand on ressent un silence, des non-dits autour de soi, est forcément un besoin vital,
Pour tout cela et sans doute beaucoup plus, Severine Werba a écrit ce roman qui n'en est pas un, mais plus un retour sur ses origines, d'où je viens pour savoir qui je suis et à qui j'appartiens.
Pour tout cela sans doute aussi, nous avons une soif de comprendre, de savoir, de la suivre dans cette recherche de ses origines, savoir à qui Elle appartient, pour mieux nous connaître aussi un peu sans doute.
Quand on est jeune, 17, 20 ans, les vieux livres, les souvenirs de nos anciens, même s'ils ne sont pas trop envahissants, sont synonymes de passé, et ne sont pas ceux avec lesquels on a le plus envie de vivre. Séverine Werba l'a vécu, elle qui s'installe dans l'appartement parisien de Boris, son grand père originaire d'Ukraine. Devenue mère, elle se pose les questions essentielles, entre le pourquoi du silence de celui qui ne dit pas, et le silence de tous ceux qui ne demandent pas. Car des deux côtés rien n'est dit, aucun souvenir n'est évoqué, une chape de plomb est posée sur un passé dérangeant ou trop douloureux à porter.
Ses pas vont l'entrainer à la recherche de son grand père Boris jusqu'à Torczyn, le village d'Ukraine dont il est originaire. Evocation terrible des grandes Aktions Nazies, de ces charniers, de ses tombes gigantesques creusées par ceux-là même qui allaient être exécutés en masse, d'une balle dans la tête, femmes, enfants, hommes, vieillards, avant que les nazis ne trouvent la solution finale, plus rapide, plus économique, moins stressante pour leurs soldats, l'horreur avant l'horreur absolue, mais tellement réelle.
Des rues et des jardins de Paris à la rafle du Vel d'Hiv à Paris, des villages d'Ukraine aux ghettos juifs, des camps d'extermination au retour des survivants, l'indicible est à portée de mémoire, vécu par ceux qui bientôt ne seront plus là pour en témoigner. Même si tout ou presque a été dit, chaque histoire est unique et tellement forte.
Alors on pourrait se dire, un livre de plus sur cette période si terrible que parfois on voudrait juste fermer les yeux pour oublier que l'homme peut être aussi mauvais, que tout ça a juste pu exister. Mais non, pas un livre de plus, un très beau livre, qui montre que savoir d'où l'on vient, qui on est, ce n'est pas juste une question de date de naissance, il y a avant nous tous ceux qui nous ont précédé et qui font de nous ce que nous sommes.
Un très beau roman, une écriture qui coule, qui donne envie de savoir, qui touche le lecteur, qui vibre au rythme des recherches de Séverine Werba, que l'on accompagne au fil des pages. Enfin, je ne l'aurai peut-être pas qualifié de roman, même si on le lit presque aussi facilement qu'un roman justement. En tout cas de très belles pages, dures parfois, mais essentielles. Je vous le recommande vivement.

Lien : https://domiclire.wordpress...
Commenter  J’apprécie          100
"Je témoigne d'un non-témoignage, je témoigne d'un silence, d'un trou laissé par la souffrance. Je témoigne d'une amputation. Je n'ai rien vu de mes yeux, je n'ai pas connu ceux qui sont morts et pourtant ils m'importent. Et pourtant je les cherche."

En mourant, Boris, le grand-père de la narratrice a emporté avec lui dans la tombe l'histoire de sa famille, tout ce dont il n'a jamais parlé : le départ d'Ukraine pour la France, la guerre, la déportation, la disparition tragique de ses proches. Comme cela arrive dans beaucoup de cas, c'est après que l'on regrette de ne pas avoir posé les bonnes questions, cherché à savoir... Alors qu'elle s'apprête à fonder une famille, Séverine est rattrapée par ce silence. Soudain, elle prend conscience du vide qui risque d'empêcher ses propres racines de s'ancrer solidement. Et décide de partir sur les traces de son grand-père et de ceux qui l'ont précédé ou accompagné et qu'elle n'a pas connus, pour cause d'extermination.

Qu'est-il arrivé à la soeur de Boris, Rosa, à son mari et à leur petite Lena ? Que sont devenus ceux de la famille qui ont choisi de rester dans leur petit village d'Ukraine ? La narratrice se lance dans une enquête qui tient du vital, en tout cas elle le ressent comme ça. Une enquête qui passe par la consultation d'une tonne d'archives, succession de listes destinées à répertorier les juifs, énoncés qui serrent la gorge. Des recherches qui la mènent également sur les lieux où ils ont vécu. A Paris, la rue de l'Échaudé et surtout l'immeuble de la rue Saint André des Arts où Rosa et Lena ont été raflées, destination le tristement célèbre Vel d'hiv, avant Pithiviers et le convoi final. Un passage particulièrement poignant et éprouvant dans le livre. En revenant sur leurs traces, la narratrice semble leur redonner vie, remettre leur tragique existence dans la mémoire universelle. Et puis il y a le voyage en Ukraine et la plongée dans l'horreur des massacres opérés sur le front de l'Est (ceux qui ont lu "Les bienveillantes" verront tout de suite de quoi il s'agit), la froide mise en oeuvre des "grandes Aktions nazies". Là aussi, tirer de l'ombre, remonter à la surface, voir pour mieux se souvenir.

L'important pour Séverine est de s'inscrire dans une filiation, une continuité, une appartenance. Reconstituer cette branche disparue, effacée, rayée, gommée et lui redonner sa place dans la généalogie familiale ; le terreau dans lequel ses propres racines pourront puiser leur nourriture, le tuteur qui permettra à ses propres ramifications de pousser droit.

L'auteure réussit parfaitement à communiquer le côté vital de cette quête et à la rapporter à un registre personnel, celui de l'identité, au-delà d'une religion ou d'une nationalité, celle qui émane d'êtres de chair et de sang, celle qui construit les familles, générations après générations. Jamais on ne m'aura aussi bien parlé de cette notion d'appartenance.

Roman ou récit, la frontière est des plus ténues. Peu importe, le résultat est là qui prend directement aux tripes. Un livre remarquable.
Lien : http://www.motspourmots.fr/2..
Commenter  J’apprécie          90
Appartenir est le premier roman de Séverine Werba. Roman et/ou récit autobiographique, il est difficile de réellement différencier les deux. Ce qui est certain, c’est que c’est un écrit très fort et marquant pour le lecteur. On n’en ressort pas indemne.

Avant même d’ouvrir le roman, on est intrigué par cette belle couverture et ce titre énigmatique. La quatrième de couverture nous en dit un peu plus et on imagine rapidement que la lecture ne sera pas de tout repos…

"La nécessité de chercher s’étale sur ma vie depuis la naissance de ma fille, fragilisant l’équilibre entre travail et famille, prenant une place nouvelle qui m’accapare et me renvoie à moi-même. Une sensation intime, pas raisonnable mais nécessaire, difficile à partager. Comment expliquer que les morts reviennent. Qu’il me faut revenir à la guerre alors que ma fille vient de naitre, que je reprends mon travail."

Voilà en un passage l’essentiel de la raison d’être du roman.

Séverine ne sait rien de Boris son grand-père. De la guerre, de la déportation, de la mort de ses proches, Boris n’a jamais rien dit. C’est à la naissance de sa fille que Séverine a eu envie d’en savoir plus, de comprendre, de connaitre, de combler ce vide sur l’histoire familiale et de s’inscrire dans une appartenance.

"La vie devrait regarder droit devant. C’est pourtant dans ce passé qui n’est pas le mien que se joue le reste de mon existence. Rien ne me parait plus important que de me souvenir et de les retrouver."

Séverine se lance dans une enquête fouillée pour redonner vie à ses ancêtres. Elle recherche les livres Russes et Yiddish de Boris qu’elle a donnés à une bibliothèque, les rues dans lesquelles vivaient Rosa, la sœur de son grand-père et leur petite Lena, 2 ans, avant leur rafle au Vel d’Hiv et leur déportation (extrêmement émouvant tout ce qui touche à Lena dans cet opus…), écrit aux archives ukrainiennes et finit par partir une semaine seule en Ukraine sur les traces du passé…

Si certains passages du livre ont déjà été abordés à de nombreuses reprises dans d’autres ouvrages (comment ne pas penser à Elle s’appelait Sarah de Tatiana de Rosnay), il en est différent pour les massacres de la communauté juive en Ukraine. La mise sur le devant de la scène des massacres par balles en Ukraine est « aussi instructif que dérangeant » : les massacres de Loutsk, les juifs creusant leur propre fosse avant d’être exécutés d’une balle dans la tête à la chaine... un pan des plus tristes de notre Histoire … Ce voyage en Ukraine est le moment fort du livre sur lequel l’auteur revient dans la fin du livre. On y trouve des situations émouvantes et fortes, mais aussi des phrases piquantes voire choquantes...

"En Ukraine, l’histoire des Juifs est clandestine. C’est certainement le plus douloureux. Le peuple ukrainien ne questionne pas officiellement sa responsabilité dans les massacres. Il se sent étranger à cette histoire qui est aussi la sienne. Indépendante depuis 1991, l’Ukraine choisit ses nouveaux héros parmi ses figures nationalistes fascistes du XXème siècle, tueurs de Juifs, mais cela n’a aucune importance. Les Ukrainiens ont souffert, les Russes aussi, et dans ces méandres tragiques, chacun revendique son droit au souvenir et son plaidoyer mémoriel. « Ils n’ont qu’à faire le boulot, m’avait dit Archi. Les Juifs l’ont bien fait » avait-il conclu. « Ukrainian history is not so clean » était sa formule."

L'écriture de Séverine Werba est parfaite pour ce genre de récit historique et chronologique. Les chapitres sont souvent courts, ce qui permet au lecteur de respirer. Etant donné l'intensité et la gravité des thèmes, c'est fort appréciable. Quant au style, il s'adapte également parfaitement aux événements narrés: souvent grave et respectueux et avec une certaine distance, ce qui permet au lecteur d'ingurgiter les faits et les juger sans influence. C'est pour moi un quasi sans faute de l'auteur de ce côté-là.

Je conclurais en disant que c’est un premier roman très réussi, sur un sujet délicat. Dérangeant pour le lecteur, il est impossible de tourner la dernière page sans avoir les mêmes questions que l’auteur : quelle trace laisse une vie ? A quoi sert-elle ? Quelle place a-t-elle dans l’Histoire ? Et moi, est ce que je connais ma propre histoire ? Est-ce que je connais mes origines ? Celle de ma famille, parents, grands-parents ? Ce qui m’a façonné et m’a permis de me construire ? etc…

Je ne peux que vous conseiller de lire ce livre poignant et marquant sur son appartenance à l’Histoire.

4,5/5

Lien : http://alombredunoyer.com/20..
Commenter  J’apprécie          80
Il a fallu la naissance de sa fille pour que la narratrice se rende compte qu'elle ne savait rien du passé de son grand-père Boris, surnommé Babar, venu de Russie. Elle a pourtant vécu dans sa proximité, mais n'a jamais pensé, ou osé, le questionner, pas plus que les autres membres de la famille.

Dès lors, il va devenir urgent de partir à la quête de ses racines, du côté de l'Ukraine. Elle y met une certaine obsession, jusqu'à faire un voyage sur place à la recherche de traces improbables, dans un pays qui les a trop souvent effacées.

Des récits sur le thème des origines, la disparition de familles entières déportées ou tuées, j'en ai lu un certain nombre. Mais celui-ci m'a happée dès le début. Sensible, intense, on entre avec la narratrice dans les méandres du passé, anxieuxe de savoir ce qui est arrivé à Rosa, à Léna, la petite fille de deux ans, à Joseph. Souvent l'imagination de la narratrice comble les vides béants devant lesquels elle se trouve. L'auteure sait nous faire ressentir la souffrance intérieure d'une génération qui ne peut rien dire de ce qui l'a précédée, qui ne peut qu'imaginer l'horreur. S'y ajoute le regret de ne pas savoir comment Boris a pu vivre ce séisme majeur.

Lien : http://legoutdeslivres.canal..
Commenter  J’apprécie          62
Le hasard a voulu que je lise ce roman juste après Otages intimes de Jeanne Benameur et celui ci fait écho au précédent.
Dans ce roman, Séverine Werba part à la recherche d'un territoire enfoui, inexploré qui la constitue mais pourtant lui échappe.
D'où venait Boris, son grand-père? Pourquoi n'évoquait-il jamais son passé?
A la naissance de ses enfants, l'impossibilité de s'inscrire dans une lignée familiale conduit cette Séverine Werba à fouiller son histoire familiale, mais Boris n'est plus là pour apporter des réponses.
Alors commence une quête obsessionnelle. Elle cherche dans l'appartement de ses grands parents, consulte les archives, se rend en Ukraine.

"J’étais prise chez lui d’une envie irrépressible de fouiller. J’ai ouvert, examiné, touché, déplacé tout ce qui pouvait l’être. Inlassablement. Encore et encore. Les placards, les tiroirs, la boîte à couture, les penderies, le buffet, le semainier de la chambre, le secrétaire du salon, le cagibi. J’ai déplié toutes les nappes, tous les napperons, les maillots de corps et les cravates, reniflé les eaux de toilette, effleuré le papier de soie qui protégeait la robe mauve que ma grand-mère Nelly portait au mariage de mes parents."

Cette recherche intime nous plonge dans l'histoire terrible des juifs d'Europe de l'Est.
Et les nazis ont atteint leur but. Non seulement, ils ont exterminé, mais ils ont aussi effacé les traces de l'existence de leurs victimes
Alors comment progresser quand les éléments sont si minces. Séverine Werba nous fait partager ses doutes, ses espoirs, ses déchirures.
Elle se rend dans le village de son grand-père en Ukraine, à la recherche de gens qui se souviendraient de sa famille. Elle veut voir les rues où ils ont vécu, mais aussi le ghetto, les camps. C'est une façon de se rapprocher des siens. Et peu à peu, les pogroms ne sont plus seulement des chiffres. Les victimes prennent un visage, ont un âge, un nom. Elles s'appellent Léna, Rosa, Joseph.
On referme ce livre avec autant de questions que de réponses, mais au moins, le temps de quelques pages, elle a redonné une existence aux siens.

Un livre bouleversant et même s'il est intime, il nous concerne tous.
Lien : http://leslivresdechris.blog..
Commenter  J’apprécie          50
Une quête intime sur les traces d'une famille

"Appartenir" raconte l'histoire d'une jeune femme en quête de ses origines.
Séverine Werba nous raconte comment, arrivée à un stade de sa vie personnelle où elle a besoin "d'être au clair avec elle même et avec ce qu'elle va transmettre", elle est partie à la recherche de l'histoire de son grand-père.

Ce grand-père Boris qu'elle adorait, né en 1906 et mort lorsqu'elle avait 17 ans, "cohabitait avec des fantômes, avec des morts sans sépulture" mais n'a jamais parlé à sa famille, de son enfance, de sa vie d'avant, enfermé "dans un chagrin mutique".

Devenue adulte, mère de deux jeunes enfants, Séverine Werba en veut à son grand père d'avoir verrouillé la porte de son passé comme elle s'en veut à elle même de ne pas lui avoir posé de questions.
Pour mener à bien cette enquête elle quitte son travail et se consacre exclusivement à cette recherche pendant un an.

Cette quête va commencer pour elle par sa conversion puis par des recherches à la bibliothèque à laquelle elle a donné tous les livres de son grand-père 20 ans plus tôt puis par des recherches auprès d'institutions juives. Elle parle d'obsession, de mission...

Son grand père a quitté l'Ukraine à l'âge de 18 ans pour l'Allemagne en laissant sa famille derrière lui, famille qu'il ne reverra jamais. Cette histoire fait largement écho pour moi à celle de Mendel dans "L'exercice de la médecine" de Laurent Seksik qui a eu un parcours et un destin similaires de la Russie à l'Allemagne puis Paris.

Ses recherches la mènent aux Archives de Paris et à la rafle du Vel d'Iv sur les traces de Rosa, une des soeurs de son grand père et de sa petite fille Léna tout juste âgée de 2 ans, toutes deux déportées en 1942. Elle éprouve le besoin viscéral d'imaginer en détail les derniers moments de Rosa et de Léna, le besoin de les nommer, de les tirer du néant, de leur redonner une existence...

Son enquête va la mener jusqu'à Torczyn, le village dont Boris était originaire, en Ukraine, dans les lieux où ont vécu ses arrières grands-parents. On espère avec elle une rencontre qui la fasse avancer.

Revenir sur ces lieux où 26758 personnes ont été exécutées au bord de fosses, est une épreuve terrible pour elle. Elle parcourt le "chemin des larmes" qu'empruntaient hommes, femmes et enfants vers la fosse. Ces fosses que tout le monde ignorent aujourd'hui dans ce pays où non seulement personne n'honore la mémoire de ceux qui ont été exterminés, mais où chacun se ment sur ce passé trop encombrant.
Sergueï, sorte de gardien de la mémoire, qui la guide ne peut lui montrer qu'une petite stèle, érigée pour témoigner de ce génocide, au milieu de champs où des camions déversent des betteraves..." Rien dans le présent ne parle du passé".

Séverine Werba nous parle à la fois de son enquête mais aussi de ses motivations, de son cheminement, de ses multiples émotions.
Elle explique son besoin d'arracher à l'oubli ces êtres et sa sensation de les porter désormais même si elle n'en a retrouvé qu'un prénom ou une date de naissance. «Penser à eux ne me rend pas triste. Penser à eux me fait du bien parce qu'ils existent une seconde fois».

Ce premier roman est bien écrit, constitué de phrases courtes qui instaurent un rythme haletant comme pour traduire sa recherche. le titre de ce récit fort, émouvant et marquant est particulièrement bien choisi car il traite merveilleusement bien de la question de l'appartenance, de l'identité.



Lien : http://leslivresdejoelle.blo..
Commenter  J’apprécie          10
"Je témoigne d'un non-témoignage, je témoigne d'un silence, d'un trou laissé par la souffrance. Je témoigne d'une amputation. Je n'ai rien vu de mes yeux, je n'ai pas de souvenirs, je n'ai pas connu ceux qui sont morts et pourtant ils m'importent. Et pourtant je les cherche".
Séverine Werba a écrit un très beau livre, sincère et poignant, qui raconte comment on peut être traumatisé, à distance pourtant, par la tragédie de son histoire familiale pendant la seconde guerre mondiale.
Rosa, sa fille Lena - qui avait 2 ans, Motel et les autres, tous les membres de la famille de son grand-père Boris ont vraiment "disparu": c'est à dire qu'ils ont été tués de façon absolument barbare pendant la guerre, et qu'en plus, pour tenir bon, les survivants ont préféré les oublier en apparence, effacer tous leurs souvenirs... Il n'en reste à peine qu'une photo dans une boîte à chaussures. A partir de ces minuscules indices de vie, Séverine Werba mène l' enquête et tente de retrouver quelques traces de leur existence, qu'elle ne soupçonnait pas avant...
L'écriture de son livre redonne à ces êtres supprimés si brutalement une dignité, une place, en perpétuant leur mémoire, même si la quête de Séverine Werba s'avère presque désespérée, surtout quand elle va en Ukraine, dans le village de ses grands-oncles. Mais l'écriture de ce livre permet aussi à Séverine Werba d'aller au bout de sa propre quête identitaire, de résoudre un mal-être confus qu'elle a toujours ressenti sans l'identifier.
Elle-même au départ n'est pas tout à fait juive, pas tout à fait considérée comme telle, parce que seuls ses grands-pères l'étaient et la démarche engagée de "baptême juif" qu'elle entreprend semble assez dérisoire, décevante par rapport à ses attentes. Nul doute que ce livre la rattache à cette famille bien plus fortement et plus sincèrement que n'importe quel rite.
Moi même, j'ai un nom de famille juif, je ne suis pas juive du tout - mais je laisse les gens le croire s'ils le pensent, pourquoi m'en défendrai-je? c'est un honneur pour moi que des personnes puissent le croire- car c'est mon mari qui a un père juif et toute une partie de sa famille morte en déportation. Ma propre fille, qui est une adolescente un peu fragile -comme beaucoup d'adolescents- et qui ne se sent pas bien, écrit partout qu'elle est juive. J'ai été très sensible à tout le mal-être décrit par Séverine Werba, car je me demande si celui qu'éprouve ma fille en ce moment n'est pas un peu comparable au sien.
Bref, ce livre est important, car c'est plus qu'une histoire familiale reconstituée de façon émouvante et sincère, c'est un livre qui questionne plus largement sur l'identité juive, et sur l'étendue des traumatismes familiaux.
Lien : http://effleurer.une.ombre.o..
Commenter  J’apprécie          00

Lecteurs (52) Voir plus



Quiz Voir plus

Les écrivains et le suicide

En 1941, cette immense écrivaine, pensant devenir folle, va se jeter dans une rivière les poches pleine de pierres. Avant de mourir, elle écrit à son mari une lettre où elle dit prendre la meilleure décision qui soit.

Virginia Woolf
Marguerite Duras
Sylvia Plath
Victoria Ocampo

8 questions
1714 lecteurs ont répondu
Thèmes : suicide , biographie , littératureCréer un quiz sur ce livre

{* *}