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J'ai beaucoup aimé cette nouvelle, car l'auteur nous entraîne encore dans une de ces monomanies dont il a le secret.

Ici, Stefan Zweig se penche sur l'amour inconditionnel, virant à l'obsession pour la personne aimée. On n'est pas dans l'érotomanie, car notre inconnue ne s'imagine pas que l'écrivain est amoureux d'elle et ne lui demande rien. C'est un amour absolu sur lequel elle va construire toute sa vie, lisant beaucoup car il est écrivain, s'intéressant à la musique pour l'apercevoir lors d'un concert, allant sur son terrain mais restant incognito, sans le harceler…

L'amour de l'enfant de treize ans au départ ne semble pas pathologique, elle pense qu'elle est amoureuse avec un grand A (ça existe encore de nos jours, cf. les ados qui hurlent en voyant Justin Bieber ou Brad Pitt selon les générations) mais, peu à peu, il y a une dérive, une fixation, une obsession qui envahit toute sa vie. « J'étais en deuil et je voulais être en deuil ; je m'enivrais de chaque privation que j'ajoutais encore à la privation de ta vus. Bref, je ne voulais pas me laisser distraire de ma passion : vivre pour toi. »


Même lorsqu'elle le revoit des années plus tard, elle ne lui dit pas qui elle est. Elle se contente de quelques jours passés avec lui et va construire toute sa vie la dessus. Elle a un enfant de cet homme, mais ne le lui dira jamais, acceptant de vivre en marge de la société bien pensante de l'époque. Elle reporte sur l'enfant les sentiments qu'elle éprouve pour le père et n'existera que pour lui. On sait tout de suite qu'elle écrit cette lettre parce que l'enfant est mort. On imagine ce qu'aurait pu provoquer cet amour, presque idolâtrie, sur l'enfant…

Elle l'appelle « mon bien-aimé » chaque fois qu'elle lui raconte quelque chose de nouveau, et cette expression revient de façon itérative, comme l'est une obsession.

Elle est amoureuse de l'homme, de l'écrivain (celui qui raconte des histoires, les invente), de l'amour. On est plus dans le registre de la passion, de l'excès que de l'amour, car il y a une véritable fixation sur l'objet aimé. On retrouve de ce fait le thème des monomanies, cher à Stefan Zweig avec les échecs dans « le joueur d'échecs », ou le jeu dans « Vingt-quatre heures de la vie d'une femme », entre autres.

On trouve une phrase importante dans « le joueur d'échecs », où l'auteur écrit : « les tortures psychologiques de la Gestapo ont annihilé son être tout entier, et comment le jeu d'échecs lui a permis de survivre, à moins que justement il ne l'ait fait basculer dans la folie. » qui peut s'appliquer aussi à « Lettre d'une inconnue »

On retrouve enfin dans ce texte la notion de confession, la parole qui libère, le secret qui tombe, devenant ainsi la propriété de l'écrivain, objet d'adoration.

Zweig était contemporain de Freud dont il a publié une biographie et la maladie mentale l'intéressait. On peut noter également que, pour Freud, les auteurs de biographies devenaient habités par la personne dont ils étudiaient la vie au point que cela pouvait devenir obsessionnel et flirter ainsi avec la monomanie.

Bref, j'ai beaucoup aimé, comme toujours avec Stefan Zweig et cet auteur me plaît tellement que cela me rend peut-être indulgente. Je suis très perméable à sa sensibilité à fleur de peau, à son style, cette « nouvelle enchâssée comme il les aime, avec un court passage nous expliquant les circonstances de l'écriture de la lettre, puis le texte lui-même pour finir avec un épilogue où il développe les réactions de celui qui la reçoit.

La façon dont il aborde le fonctionnement mental m'intéresse beaucoup. Il flirte en permanence avec la persécution, le délire, l'obsession, la perversité ou l'autodestruction car l'amour de notre inconnue ne ressemble en rien à l'amour du Romantisme.

Dans ce livre, figure une autre nouvelle, très courte mais dense, « La ruelle au clair de lune » qui traite également d'un amour pathologique, celui d'un homme jaloux et radin qui va mendier l'amour de la femme qu'il a perdu, n'hésitant pas à s'humilier devant elle, dérivant ainsi dans une relation sadomasochiste, où les rôles s'inversent, le persécuteur devenant persécuté. L'auteur choisit, dans cette nouvelle, d'insérer le récit dans le cadre de deux promenades nocturnes que fait le narrateur dans les ruelles d'un port.

J'ai envie de « tester » ses biographies. Je crois que je vais demander au Père Noël ses oeuvres dans la Pléiade »….

Note : 9,2/10
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Plus je lis Zweig, plus je l'apprécie, pourtant ma première lecture de cet auteur m'avait laissé peu convaincue. J'ai bien fait de poursuivre, un livre de tant à autre.
Ici, l'intensité de la passion amoureuse est telle qu'on se sent porter par une vague immense qui n'en finit pas de grossir et nous emporter pour se fracasser sur les rochers.
C'est fort, puissant, passionnant, et on se sent tellement impuissant face à ce malheur, à cette douleur portée tout le long d'une vie.
Comment le béguin d'une petite fille finit par devenir une folie amoureuse, c'est impensable et pourtant c'est bien là l'histoire de cette lettre reçue par cet écrivain.
Court mais fort.
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Il y a quelque chose qui tourne la tête, voire qui vous remue dans cette confession à bout de souffle d'une femme inconnue à l'homme dont elle est depuis toujours follement éprise à son insu.
Est-ce le style si fin de Zweig, est-ce les effets de perspective autour desquels ce texte est construit ? On a le sentiment de passer d'un personnage à l'autre, tantôt on est la femme qui jette avant de mourir ses derniers mots sur le papier, tantôt on est l'homme, séducteur innocent qui les reçoit, on est dans ses yeux à elle qui encore enfant essaie d'apercevoir l'aimé par le judas de la porte, on est lui quand il la croise, par deux fois sera son amant mais ne la reconnaîtra pas, on est elle, absente toujours, morte déjà, dans le vase vide qu'elle ne garnira plus clandestinement et qu'il regarde en frissonnant en reposant la lettre de cette inconnue…
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La passion compulsive est le thème de "Lettre d'une inconnue" suivie de "La Ruelle au clair de lune". Jusqu'où un être humain peut aller lorsque l'irrationnel du feu brûlant de l'amour est dépassé ? Les amours non partagées, destructrices de vies, sont au coeur des deux récits.
Quelle prouesse d'écriture ! C'est majestueux ! Un petit bijou littéraire !
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Voici ma première rencontre avec Stefan Zweig, un auteur qui j'avoue me faisait un peu peur, je ne saurais vraiment expliquer pourquoi, mais il fait parti de ces grands auteurs classiques.

Concernant la première nouvelle, Lettre d'une inconnue, j'ai tout simplement adorée et dévorée cette lettre. Stefan Zweig nous offre ici, un exemple d'amour tellement puissant, un amour qui n'attend rien en retour, c'est terriblement bien écrit. C'est court, mais c'est un texte bouleversant qui ne peut laisser personne indifférent. J'aime beaucoup cette idée de la lettre non signée, du coup écrite à la première personne et dévoilant avec une innocence touchante, avec un amour débordant mais également avec un spleen et une tristesse absolue des sentiments pleinement vécus.

En ce qui concerne la seconde nouvelle, La ruelle au clair de lune, je dois dire que je suis totalement passé à côté. En même temps c'était dure de suivre Lettre d'une inconnue.

Voilà, première découverte de Stefan Zweig mais certainement pas la dernière.
Lien : https://readlookhear.wordpre..
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A Vienne, un écrivain d'une quarantaine d'années de retour de voyage découvre une mystérieuse et longue missive : il s'agit en quelque sorte de la confession d'une femme, une ancienne voisine, qui avoue l'avoir aimé passionnément depuis son adolescence. Mais pour quelle raison se décide-t-elle à lui écrire seulement maintenant ? Qui est-elle vraiment ?

C'est un court récit qui m'a beaucoup émue. J'en ai découvert la trame dans un ancien numéro de Je bouquine, dont j'ai toujours une série dans ma salle de classe pour faire patienter les plus rapides ! J'ai été immédiatement séduite par cette nouvelle de forme autobiographique. Stefan Zweig est un conteur talentueux qui a l'art de se glisser avec subtilité dans la peau de ses personnages – y compris les plus inattendus, comme celui de cette jeune femme brisée. Difficile de vous en dire plus sans tout dévoiler, toujours est-il que j'ai été très sensible au destin tragique et poignant de cette mystérieuse inconnue, autant qu'à l'écriture. le style fluide, prenant, est de toute beauté, une invitation à poursuivre ma découverte de cet auteur !

Dans La Ruelle au clair de lune, le narrateur tente de comprendre le lien complexe qui unit un homme à une prostituée qui le rudoie au vu et au su de tous. C'est un tableau lyrique et sombre de la rue et des amours clandestines, au ton très différent de la nouvelle précédente. Ma préférence va cependant à Lettre d'une inconnue, plus proche de mon univers...
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L'amour de l'adolescente est décrit avec une telle précision que chacun peut se reconnaître dans cet amour de jeunesse. L'attente de voir l'homme aimé s'approcher, l'espoir d'être remarqué et d'attirer un regard, tous les ingrédients sont réunis, dans cette nouvelle, pour nous replonger dans l'insouciance de l'amour. Puis, vient la déception de cette femme, qui, à aucun moment, ne sera reconnue par l'homme qu'elle aime depuis tant d'années.
Nous vivons avec elle les derniers instants de sa souffrance dans cette lettre adressée au seul homme qui a compté dans sa vie.

Stefan Zweig est un génie littéraire
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Enfin ! Après plusieurs essais (Amok et Vingt-quatre heures de la vie d'une femme), me voici entièrement séduite par une oeuvre de Stefan Zweig. Il faut dire que j'étais quasiment prête à laisser tomber, je trouvais les écrits de l'auteur intéressants sans parvenir à être pleinement touchée. Cette fois-ci, j'ai été bouleversée… Une écriture d'une justesse et d'une sensibilité incroyable. La passion se fait absolue, omniprésente, sans remède. Et qu'y a-t-il de pire que d'aimer un homme qui ne cesse de vous oublier ? Mon édition comprenait également une autre nouvelle : La ruelle au clair de lune. Sa construction rappelle énormément celle d'Amok : un lieu lugubre et isolé, en pleine nuit, le récit d'une tranche de vie à un inconnu qui se fait confident. Je dois vous avouer que j'ai été un petit peu moins séduite. Malgré tout, c'est une nouvelle qui reste prenante et sympathique.

Lettre d'une inconnue

Je connaissais déjà l'intrigue de ce court roman. Il y a quelques temps, je suis en effet tombée complètement par hasard sur le film de 1948, avec Joan Fontaine. Et autant le dire : j'avais adoré. Lettre d'une inconnue relate l'histoire d'une toute jeune fille qui tombe sous le charme de son nouveau voisin, un pianiste amateur de soirées mondaines et de femmes. Les années passent. Elle passera sa vie à l'épier, à l'attendre, à rougir lorsqu'elle le croise, pour enfin réussir à lui parler. Elle fera ainsi sa connaissance alors même qu'elle connait déjà tout de lui. La nouvelle démarre par la réception d'une lettre, où cette jeune fille, devenue femme, confie à cet homme qu'elle aime tant tout son amour, mais aussi les tourments endurés par une passion amoureuse non réciproque.

On a un tel sentiment de compréhension face à cette femme magnifique qui se livre entièrement, presque avec pureté. J'ai autant eu envie de lui crier d'oublier cet homme qui n'en vaut pas la peine, que j'en ai voulu à notre pianiste volage et inconstant. Mais non, notre inconnue préférera se taire et souffrir en silence face à l'humiliation d'être comme inexistante aux yeux de cet homme, plutôt que de lui avouer son secret. Un texte sublime, à découvrir de toute urgence.

La ruelle au clair de lune

Avec cette nouvelle, nous retrouvons à nouveau la thématique de la souffrance face à un amour malheureux. le narrateur, un voyageur allemand, se retrouve seul en pleine nuit, dans une ville portuaire française. Exténué, il chemine à travers les ruelles sombres jusqu'à se retrouver dans un petit bar des bas-fonds de la ville. Il y fait alors une rencontre surprenante : celle d'un homme sale, au physique usé qui se retrouve raillé et humilié par une femme qui vend ses charmes (celle-ci n'est autre que son ancienne épouse). Quelques minutes plus tard, notre narrateur se retrouve suivi au détour d'une rue. Ce n'est autre que cet homme malheureux qui souhaite alors se confier, et se raconter à travers une ancienne histoire d'amour. Les dernières lignes du récit laissent entrevoir la possibilité d'un drame, que le narrateur est sur le point d'ignorer…

Avec La ruelle au clair de lune, nous sommes une nouvelle fois en plein coeur d'une histoire triste. Je crois que j'ai eu plus de mal car je n'ai réussi à prendre parti ni pour cet homme, anciennement riche et aujourd'hui vagabond, ni pour cette femme qui n'a de cesse de l'humilier. J'ai pour autant aimé suivre cette intrigue. On finit par comprendre que chaque personnage porte ses propres souffrances. Mais je ne sais pas si cette nouvelle restera dans les annales me concernant. Je lui préfère mille fois Lettre d'une inconnue.
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Pour moi, c'est un peu le Graal.
Arriver à écrire une lettre, a fortiori à un(e) inconnu(e).
Quoique, me direz-vous sans doute à raison. C'est peut-être plus simple avec une inconnue. Moins voué à l'échec. A la déception, tout du moins.
Loin de moi l'idée de minimiser la réussite de Zweig, c'est une simple réflexion qui peine à se trouver une conclusion ferme.
Reste que c'est un chef-d'oeuvre. D'autant plus marquant, frappant, attendrissant et déroutant que, de nos jours, on peut toujours courir en attendant le facteur.
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Un homme de 41 ans rentre chez lui et ouvre une lettre épaisse de deux douzaines de pages écrites à la hâte.

Une femme de 25 ans lui a écrit et lui raconte leur première rencontre alors qu'elle était âgée de 13 ans et lui de 25 ans.

15-16 ans après, elle a franchi le pas et lui avoue tout ce qu'il doit savoir, en commençant sa lettre par : A toi qui ne m'as jamais connue…

Emouvant,
attachant,
intense,
juste magnifique !

Toute la beauté de l'écriture féminine est écrite par Stefan Zweig dans ce court roman que vous ne pourrez jamais plus oublier après votre lecture !
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