De même que la personne rationnelle et lucide était Le modèle envié des anciens Grecs, la relaxation est Le nouvel idéal psychologique occidental. La différence étant que la maîtrise de la raison des Grecs impliquait un effort pour surmonter quelque chose - les passions - au nom d'une vie rationnelle, tandis que l'injonction de se relaxer implique seulement la nécessité de relâcher ses muscles pour pouvoir passer une soirée plus confortable devant la télévision.
On se souvient de Nabokov tournant en dérision ceux qui lisent des romans dans l'espoir d'en apprendre quelque chose. En apprendre quelque chose! N'est-ce pas aussi ridicule que d'essayer de calmer sa faim en mangeant du caviar?
Ce qu'il y avait peut-être derrière ces larmes, c'était le soupçon navrant que si elle disparaissait soudain de la surface de la terre, personé n'accorderait à son absence plus d'une minute de ses pensées.
Elle revait d'une situation où il n'y aurait ni choix à faire, ni occasions de soupirer en se demandant: "Mais sommes-nous réellement faits l'un pour l'autre ?", où l'analyse et l'interprétation seraient superflues, où l'autre serait simplement une présence indiscutable et entièrement naturelle.
Elle aurait été d'accord avec la conclusion (fort peu aristotélicienne) de Proust selon laquelle l'amitié n'est qu'une forme de lâcheté, une fuite de responsabilités et les défis bien plus formidables de l'amour.
La précision technologique n'allait pas changer les choses essentielles. Elle ne pouvait pas oublier que cette aile de Boeing avait été rassemblée à Seattle par des gens qui n'étaient au fond que des singes évolués, qui trompaient leurs femmes ou leurs maris, se mettaient stupidement en colère, éprouvait des sentiments de jalousie, de rivalité ou d'insécurité, déféquaient quotidiennement et mourraient un jour.
En parcourant une biographie, une de plus, du pauvre Flaubert, on s'aperçoit que l'illustre auteur est décrit par son biographe, Henri Troyat, comme un "étrange animal ", "hérissé de contradictions ":
"Sa haine des bourgeois était d'autant plus forte qu'il se sentait lui-même profondément bourgeois, avec son amour de l'ordre, du confort et de la hiérarchie. Il condamnait tous les gouvernements, mais ne supportait pas les excès de la populace quand elle osait les défier... Ennemi juré des prêtres, il était attiré par les problèmes religieux. Obsédé de charmes féminins, il refusa de s'arracher à quelque femme que ce fût. Révolutionnaire en art, il était conservateur dans la vie quotidienne. Assoiffé d'amitié, il vécut le plus souvent à l'écart de ses semblables..."
Le roman et Le magazine fonctionnaient comme une fenêtre (une vitrine ?) sur un monde autre et plus enchanteur, stimulant le désir en pratiquant une forme particulièrement élaborée et trompeuse de "réalisme ".
Cyril Connolly a opposé les productions journalistique et littéraire en disant que la première était faite pour être lue, et la seconde relue.