Souviens-toi que ce n'est pas celui qui t'injurie ou te frappe qui t'outrage, mais le jugement par lequel tu t'estimes outragé. Si on te met en colère, c'est ton jugement, sache-le, qui te met en colère. Avant tout, donc, tâche de ne pas te laisser emporter par "ton idée". Pour peu que tu gagnez du temps, la maîtrise de toi te sera plus facile.
Si tu veux que tes enfants, ta femme et tes amis vivent toujours, tu es stupide.
Il est d’un homme complètement instruit de ne s’en prendre ni à un autre ni à lui-même.
Quand nous sommes entravés ou troublés, n'en imputons pas la faute aux autres mais à nous-mêmes, c'est-à-dire à nos évaluations
— Parmi les choses qui existent, certaines dépendent de nous, d'autres non. De nous, dépendent la pensée, l'impulsion, le désir, l'aversion, bref, tout ce en quoi c'est nous qui agissons ; ne dépendent pas de nous le corps, l'argent, la réputation, les charges publiques, tout ce en quoi ce n'est pas nous qui agissons.
.— Ce qui dépend de nous est libre naturellement, ne connaît ni obstacles ni entraves ; ce qui n'en dépend pas est faible, esclave, exposé aux obstacles et nous est étranger.
— Donc, rappelle-toi que si tu tiens pour libre ce qui est naturellement esclave et pour un bien propre ce qui t'est étranger, tu vivras contrarié, chagriné, tourmenté ; tu en voudras aux hommes comme aux dieux ; mais si tu ne juges tien que ce qui l'est vraiment — et tout le reste étranger —, jamais personne ne saura te contraindre ni te barrer la route ; tu ne t'en prendras à personne, n'accuseras personne, ne feras jamais rien contre ton gré, personne ne pourra te faire de mal et tu n'auras pas d'ennemi puisqu'on ne t'obligera jamais à rien qui pour toi soit mauvais.
— A toi donc de rechercher des biens si grands, en gardant à l'esprit que, une fois lancé, il ne faut pas se disperser en oeuvrant chichement et dans toutes les directions, mais te donner tout entier aux objectifs choisis et remettre le reste à plus tard. Mais si, en même temps, tu vises le pouvoir et l'argent, tu risques d'échouer pour t'être attaché à d'autres buts, alors que seul le premier peut assurer liberté et bonheur.
Souviens-toi que tu joues dans une pièce qu’a choisie le metteur en scène : courte, s’il l’a voulue courte, longue, s’il l’a voulue longue. S’il te fait jouer le rôle d’un mendiant, joue-le de ton mieux ; et fais de même, que tu joues un boiteux, un homme d’État ou un simple particulier. Le choix du rôle est l’affaire d’un autre.
On est toujours le maître d’un homme, quand on a le pouvoir de lui donner ou de lui ôter ce qu’il veut ou ce qu’il ne veut pas. Si l’on veut être libre, qu’on n’ait ni désir ni aversion pour rien de ce qui dépend d’autrui ; sinon, il faut être esclave.
Si tu souhaites que tes enfants, ta femme et tes amis soient éternels, tu es un fou
mieux vaut mourir de faim délivré du chagrin et de la peur, que de vivre dans l’abondance au milieu des angoisses
17. Souviens-toi que tu es un acteur dans une pièce de théâtre, qui est telle que le veut le poète dramatique.