AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Critiques de Kurt Vonnegut (208)
Classer par:   Titre   Date   Les plus appréciées


Tremblement de temps

Nous sommes en 1996 et Kurt Vonnegut a écrit une première mouture d’un roman mettant en scène son alter ego de fiction, l’écrivain de SF Kilgore Trout. Un tremblement de temps vient de contraindre l’humanité à revivre la dernière décennie (enfin de 1991 à 2001), sans pouvoir y modifier quoi que ce soit. Le retour au libre arbitre désarçonne tout le monde… Mais si l’auteur n’a jamais renoncé à la « production d’agencements idiosyncratiques de vingt-six symboles phonétiques, dix chiffres et environ huit signes de ponctuation en lignes horizontales à l’encre sur de la pulpe de bois blanchie et aplatie », reprendre et corriger ce roman l’ennuie. À la place, il nous en donne des extraits et nous explique ce qu’il aurait voulu faire, tout en devisant de différentes choses. Mélange de chroniques, de billet d’humeur, de confidences voire de confessions, ce texte déroule son charme puissant et même sans connaître l’oeuvre de cet auteur on ne peut qu’être sensible à la vitalité de sa plume et à son humour féroce.

Commenter  J’apprécie          90
Tremblement de temps

Que dire de ce livre -le dernier d'un auteur que je ne connaissais pas (chuuut)- sinon que ça a été pour moi un véritable ovni littéraire !

Sautant de sujet en diatribe, d'anecdotes de vie (vraies ? Inventées ?) à des réflexions plus poussées, parfois censées, passionnantes, souvent déroutantes, ce livre est...particulier !

Le postulat de départ me plaisait : l'idée que les gens aient à revivre les 10 dernières années écoulées sans rien pouvoir changer, si ce n'est leur façon de voir les choses au bout de cette seconde décennie, les nouveaux choix qui s'offrent  à eux suite à l'analyse de leur seconde "chance".

Mais en fait, on comprend vite que cette idée de départ n'est qu'un prétexte pour l'auteur à de nombreuses digressions, à se lancer dans des réflexions, idées, anecdotes qui semblent le définir et être tirées de sa vie et ses expériences passées, dont certaines difficiles (guerre, suicide d'un proche).

On sent à travers ce fouillis organisé une certaine gouaille chez l'auteur, une opposition à toutes ces technologies qui abrutissent nos civilisations occidentales, un certain humour décalé aussi. Et des cicatrices.

Je ne sais pas trop quel était le but de l'auteur en écrivant ce livre mais après tout, qu'importe : c'était suffisamment déroutant pour m'interpeller, un peu trop décalé par contre pour que j'adhère complètement.

Malgré tout je ne regrette pas cette lecture qui m'a (largement,  oh oui !) fait sortir de mes types de lectures habituels.

Et j'en remercie NetGalley et les éditions super 8.
Commenter  J’apprécie          90
Nuit mère (Nuit noire)

En Résumé : J’ai passé un très bon moment de lecture avec ce roman qui ne m’a pas laissé indifférent que ce soit dans les thématiques qu’il soulève comme dans sa construction. Il s’agit d’un récit autobiographique fictif d’Howard W. Campbell Jr. qui fût pendant la seconde guerre mondiale le plus propagandiste de la cause nazi et qui aujourd’hui, à l’approche de son procès déclare qu’il fût en fait un espion américain. Un récit qui nous interroge sur qui nous sommes, sur le rôle que nous jouons dans le monde actuel et sur la façon dont nous le jouons. Il nous rappelle ainsi que nos actes sont jugés principalement par la façon dont les autres le comprenne et qu’il faut parfois faire attention. Mais il ne s’arrête pas là il nous offre aussi de nombreuses autres réflexions sur nos choix, nos actions, la guerre la notion de différence, de haine ou bien encore de choix. Il dresse aussi le portrait d’une humanité qui parait plus acteur, coincé dans son rôle même si parfois il arrive à en sortir du bon. Mais surtout l’ensemble est accentué par la construction du récit assez simple, léger avec une ironie et un humour noir qui viennent contrebalancer la gravité du message. Le tout est aussi porté par des personnages qui peuvent paraitre exagérés, mais qui finalement collent parfaitement à l’intrigue. Alors après, c’est vrai, que ce côté un peu théâtral offrent une certaine facilité et certains retournements un peu caricaturaux, mais franchement rien de gênant. La plume de l’auteur s’avère simple, efficace malgré une traduction parfois hasardeuse je trouve. En tout un roman qui m’a captivé et je lirai sans soucis d’autres écrits de l’auteur.





La chronique complète sur le blog.
Lien : http://www.blog-o-livre.com/..
Commenter  J’apprécie          90
Abattoir 5

Vous le savez peut-être, je ne suis pas un grand fan des livres érigés au rang de "classiques", d'incontournables. Mais force est de constater qu'Abattoir 5 n'avait vraiment rien pour rebuter: un thème intéressant, des louanges unanimes, un auteur intéressant et drôle (que j'avais pu découvrir dans le léger et excellent "Elle est pas belle, la vie?"), une pagination tout à fait convenable... Je me suis donc lancé, et mon Dieu! quelle aventure!



Kurt Vonnegut nous livre ici un roman que l'on devinera bien souvent déguisant un conte moderne, sorte de fable progressant sur le terrain glissant des horreurs de la Seconde Guerre Mondiale. Glissant car si le thème est évidemment fort en émotions et tranches de vie, l'auteur a toujours tout intérêt à ne pas basculer dans une horreur trop crue ou au contraire dans un magma d'émotions qui saura faire exploser le lecteur au cours de sa lecture. Kurt Vonnegut, décidément, est un homme extrêmement intelligent.

Décidant de réaliser un roman véritablement autobiographique, il s'applique à rendre son histoire la plus juste possible. Et si évidemment, à l'inverse de son alter ego Billy Pèlerin, Kurt n'a pas "décollé du temps" suite à un kidnapping extraterrestre (les Tralfamadoriens), il n'en reste pas moins que le récit est purement autobiographique, au sens où l'auteur présente les faits et nous les rend le plus personnellement possible.

Cela donne donc un récit complètement perché, vaste déflagration d'absurde et d'un humour noir qui tape dans le mille à chaque fois. Billy Pèlerin, sorte de héros neutre (en fait, le terme "héros" est complètement illusoire, tant Pèlerin n'a rien d'un héros), va donc vivre différents fragments de sa vie successivement, puisqu'il a à proprement dit décollé du temps, et ainsi aperçu sa vraie nature: le temps n'est pas linéaire, ni dirigé vers une fin, mais une sorte de succession de moments figés dans l'ambre.

Billy Pèlerin n'a franchement rien de charismatique et est même une splendeur de passivité (il m'a parfois fait pensé à Stoner). Il sera parfois émouvant, parfois agaçant. Emouvant tant cette vie qu'on retrouve condensée en moins de deux-cent pages est riche en évènement douloureux, agaçant lorsqu'il se laisse porté fatalement vers l'horreur.

L'idée géniale de Vonnegut, c'est d'aligner côte à côte les moments foncièrement différents de la vie de Billy Pèlerin, et ainsi de créer des contrastes vertigineux mais tout à fait dans la continuité d'une trame narrative. Et ainsi, comme une lumière de bougie souligne l'ombre et inversement, le livre fonctionne ainsi: les moments qui font sourire (comme son voyage vers le zoo de Tralfamadore, fabuleux) mettent en perspective la colère aveugle traduite en bombe à Dresde. Le tout est en plus extrêmement bien ficelé, Kurt Vonnegut parvenant à ne pas perdre son lecteur au milieu de tout ce bordel.

Alors, bien sûr, je peux vous parler de l'horreur de la guerre, du côté "antimilitariste" du roman, que l'on ne peut nier. Mais c'est en vérité la résultante de tout le reste, et je trouve bien plus intéressant la façon dont Vonnegut nous raconte son expérience magnifique car tellement subjective. Tout comme il n'est pas foncièrement intéressant de disséquer pourquoi on se dit que la peine de mort c'est pas bien à la fin de "La Ligne Verte". J'imagine que c'est le boulot des profs de français de s'y intéresser. Ce que je peux vous dire, c'est que l'effet est là, d'une puissance rare, et qu'effectivement: la guerre, ce n'est pas bien.



Alors lisez-le cet "Abattoir 5". C'est un petit chef-d'oeuvre où il est bien compliqué d'y voir des points négatifs. C'est proprement magnifique.
Commenter  J’apprécie          96
Abattoir 5

Cela aurait pu me plaire, cela aurait du me plaire. Mais j'ai abandonné ma lecture à la centième page. Cela ne m'arrive quasiment jamais, parce que lorsque cela ne me plait pas, je lis en diagonale, je saute des lignes, voire des pages, mais je vais jusqu'au bout. Là, je préfère le laisser de côté et le reprendre dans quelques mois ou quelques années, peut-être que ce n'est pas le bon moment.

J'ai aimé l'écriture, les parties du récit ancrées dans le réel.

Mais même si j'en comprend la finalité ( l'absurdité et les traumatismes de la guerre), les parties sur les sauts temporels m'ont paru trop obscurs pour que j'en saisisse la symbolique ou alors il aurait fallu que l'humour y soit plus présent

Bref une déception, mais plus liée à mon incapacité à apprécier ce roman qu'à la valeur du roman en lui même.

C'est la vie.
Commenter  J’apprécie          80
Abattoir 5

"Abattoir 5 ou la croisade des enfants", pour être exacte, est un roman , cent romans, mille romans, un récit où les souvenirs de soldat de l'auteur côtoient ceux d'un certain Billy Pilgrim, présent comme lui lors du bombardement de Dresde en février 1945. Présent en lui ? présent avec lui ? Impossible de savoir. Car Vonnegut brouille les pistes à l'envi; tantôt il semble nous raconter la genèse de son livre , tantôt il s'égare dans la mémoire de Billy, tour à tous prisonnier dans un abattoir, opticien marié de force à une ogresse dévoreuse de bonbons, captif d'un zoo sur la planète Tralfamadore, meilleur ami d'un romancier raté.

Ce que l'on comprend, dans toute cette mixttérature, c'est surtout que la guerre ne laisse pas indemne; que les blessures de l'esprit peuvent sembler bénignes, et se révéler mortelles après longs temps de vie; que l'on n'échappe pas à une époque pourrie, à moins de lire, lire et lire encore, ce qui élève l'âme et la rend invincible.

"C'est la vie".
Commenter  J’apprécie          82
Abattoir 5

C’est le second livre que je lis de cet auteur mais ce sera le dernier. Je n’accroche ni à son style d’écriture, encore moins à son intrigue.

Il s’agit d’un roman étrange qui raconte les mésaventures de Billy Pèlerin, ancien soldat reconverti en opticien.

La chronologie est floue puisqu’on passe d’une époque à l’autre selon les délires de ce personnage : soit à Dresde lors du bombardement; soit lorsqu’il est enlevé par des extra-terrestres pour être exposé dans un zoo; soit sa vie privée après la fin de la seconde guerre mondiale; soit des bribes de son enfance.

L’auteur dénonce l’absurdité de la guerre, la futilité de l’existence humaine mais c’est si flou et si alambiqué que je me suis ennuyée à périr. Je n’ai trouvé aucun plaisir dans cette lecture d’où cette note catastrophique!

Peut-être d’autres lecteurs ont su déceler la pépite mais pour ma part, ce fut le trou noir !
Lien : http://leslecturesdehanta.co..
Commenter  J’apprécie          80
Tremblement de temps

Je tiens à remercier les éditions Super 8 et la plateforme NetGalley pour la confiance qu’ils m’ont témoignée en acceptant ma sollicitation pour ce titre.



Un roman (?) qui a bien failli ne jamais voir le jour comme nous l’explique Kurt Vonnegut dans son prologue :



Et voilà que moi, à l’hiver 1996, je me trouvais être le créateur d’un roman qui ne tenait pas debout, qui n’allait nulle part et qui, pour commencer, n’avait jamais demandé à être écrit. Merde ! J’avais, si vous voulez, passé pas loin d’une décennie sur ce poisson ingrat. Et il n’était même pas bon à appâter les requins.

(…)

Mon gros poisson, qui puait pas mal, était intitulé Tremblement de temps. Baptisons-le Tremblement de temps I. Et baptisons celui-ci, ragoût concocté à partir des meilleurs morceaux du précédent et mélangé à des réflexions et expériences des sept derniers mois environ, Tremblement de temps II.



Bien que le roman ait été publié en 1997 et que l’auteur jouisse d’une certaine notoriété, il faudra attendre 2018 pour qu’une version française soit publiée à l’initiative de Super 8. L’occasion pour les lecteurs français de découvrir un inédit édité à titre posthume (Kurt Vonnegut est mort en 2007, à l’âge de 84 ans).



Je ne sais pas si ce Tremblement De Temps est représentatif du travail de Kurt Vonnegut, mais c’est, de prime abord en tout cas, totalement déroutant comme lecture. Le pitch proposé n’est que très vaguement évoqué et sert surtout à l’auteur de prétexte pour nous parler de lui à travers diverses anecdotes le concernant lui ou ses proches et autres réflexions sur des sujets divers et variés.



Son alter ego fictionnel (avec qui il échange beaucoup), Kilgore Trout, écrivain de SF qui a la particularité de jeter aux ordures ses nouvelles sans même chercher à les faire publier, intervient souvent pour nous faire part, lui aussi de ses réflexions et son vécu (?).



J’avoue qu’au début de ma lecture je me suis demandé dans quel bourbier j’avais mis les pattes et quel pouvait bien être l’intérêt de la chose que j’étais en train de lire. La réponse s’est imposée d’elle-même après quelques chapitres ; tout l’intérêt de ce bouquin pour le moins atypique réside dans la plume de Kurt Vonnegut.



Force est de reconnaître que l’auteur est un conteur hors pair, on boit littéralement ses phrases, c’est un véritable régal pour les yeux, le cœur et les neurones (mon athéisme viscéral m’interdit d’y ajouter l’âme… mais grande est la tentation de le faire). J’en profite d’ailleurs pour saluer le travail de la traductrice Aude Pasquier.



Kurt Vonnegut a autant de gouaille que de talent, la langue de bois et le politiquement correct ne sont définitivement pas sa tasse de thé, il dit ce qu’il a à nous dire sans y aller par quatre chemins, pimentant même son propos d’un humour aussi ravageur que corrosif.



Morceau choisi à propos de l’Église :



« Quand ils ont découvert que j’étais divorcé, ai-je dit, ils m’ont prescrit toutes sortes de pénitences qu’il fallait que j’accomplisse avant de redevenir assez pur pour pouvoir me marier chez eux.

— Eh bien, voilà, a dit Trout. Imaginez les pinailleries qu’il aurait fallu que vous surmontiez si vous aviez été un ancien taulard. Et puis, si ce pauvre enculé qui vous a écrit a vraiment trouvé une Église qui l’a accepté, il pourrait très bien être de retour en prison à l’heure actuelle.

— Pourquoi ? ai-je demandé. Pour avoir piqué dans le tronc des pauvres ?

— Non, a répondu Trout. Pour avoir plu au Christ en abattant un médecin qui se rendait à son boulot dans une usine à avortement. »



Si l’auteur peut se targuer d’avoir eu une vie bien remplie ponctuée de nombreuses rencontres, mais aussi de deuils ; les interventions de Kilgore Trout quant à elles apportent un brin de folie à l’ensemble, à travers notamment des rencontres avec des personnages hauts en couleur et ses nouvelles aux histoires pour le moins ubuesques.



Ce bouquin n’est à nul autre pareil, un véritable fourre-tout sans queue, ni tête, mais qui se lit malgré tout avec beaucoup de plaisir (et j’en ai été le premier surpris). Une lecture quasi expérimentale qui vaut son pesant de cacahuètes. A réserver toutefois aux amoureux des mots qui ont un peu de temps à perdre…



Je ne peux pas dire, en refermant ce bouquin, que j’ai découvert l’univers littéraire de Kurt Vonnegut, par contre j’ai appris beaucoup de choses sur Kurt, non seulement l’auteur, mais aussi l’homme qu’il était. Une belle rencontre par écrits interposés qui m’a donné envie de découvrir ses « vrais » romans.



Je laisse le mot de la fin à Kurt Vonnegut :



Écoutez : nous sommes sur terre pour glandouiller. Ne laissez personne prétendre autre chose !
Lien : https://amnezik666.wordpress..
Commenter  J’apprécie          80
Nuit mère (Nuit noire)

Voilà un roman qui sort des sentiers battus, aux antipodes de ce que je lis habituellement, et dont, au final, je suis sortie assez secouée.



Howard C. Campbell dit lui-même qu’il est un américain de naissance, un nazi de réputation et un apatride par inclination.



Cet homme que l’on devrait détester nous livre ce récit autobiographique, fictif, de sa vie durant la Seconde Guerre Mondiale en tant que grand propagandiste sur les ondes radios et du côté des nazis.



Récit autobiographie qu’il aurait envoyé à l’auteur, Kurt Vonnegut, depuis sa cellule à Jérusalem dans laquelle il attend son procès.



Ce qui frappe dans ce récit, c’est qu’au début, on devrait haïr Howard pour ce qu’il a fait, mais au fur et à mesure des pages, on ne sait plus trop quoi penser de lui et la balance penche irrémédiablement vers le mec sympa plutôt que vers le vrai salaud.



L’équilibre étant toujours sujet à caution puisque Howard pourrait nous raconter des carabistouilles… ou pas !



Parce que si cet homme fut un propagandiste, ce ne fut pas vraiment de son fait, mais en tant qu’espion pour les États-Unis !



Dans ses discours farcis à la haine des autres et à la sauce antisémite, ses soupirs, ses toussotements auraient été des codes pour les Américains à l’écoute de ses diatribes haineuses.



Vrai ou pas vrai ?? Sans doute vrai, mais peu de personnes peuvent le confirmer et tout le roman sera rempli de faux-semblants, de ces gens qui pensent être une chose et qui sont l’exact opposé, de ces gens qui se disent purs et qui ne valent pas mieux que les nazis nostalgiques ou les nazis de l’époque du moustachu à la mèche de cheveux noire.



Soyez sur vos gardes durant la lecture car nous sommes ce que nous feignons d’être, aussi devons-nous prendre garde à ce que nous feignons d’être.



La plume de l’auteur est facile à lire, le roman se termine en quelques heures, il n’est guère épais (guerre et paix), mais il y a dedans quelques réflexions profondes dont les plus étonnantes sont celles entre Howard Campbell et Eichmann, ce dernier lui demandant s’il devait avoir recours à un agent littéraire ou encore les tournois de pingpong organisés au ministère de la Propagande.



Ici, les salauds ne sont pas toujours ce qu’ils semblent être et les gentils non plus, tout le monde cache des choses, tout le monde cache ce qu’il est vraiment, et les gens tendent à devenir les personnages dont ils ont endossé les habits pour les besoins de leurs missions.



Nuit mère est un roman étrange, une confession d’un homme seul, d’un homme qui soulève de l’admiration chez les amateurs de la race Blanche et le dégoût chez les autres, exacerbant chez ces derniers des envies de lui casser la gueule puisqu’il fait un parfait bouc émissaire en tant qu’Américain ayant frayé avec l’Ennemi (oubliant de ce côté là que les banques américaines soutinrent l’effort de guerre des deux cotés, aussi bien des yankee que des casques à pointes et des bottines à clous).



Un roman rempli de faux-semblants qui me laisse un peu groggy et perplexe sur la nature Humaine (mais je l’étais déjà).


Lien : https://thecanniballecteur.w..
Commenter  J’apprécie          80
Nuit mère (Nuit noire)

Un homme. Une nuit. Sa vérité.

Howard Campbell va être jugé pour crime contre l’humanité, quinze ans après la fin de la seconde guerre mondiale. Il nous raconte ce qu’il a vécu, comment il a été engagé, comment il a œuvré, pour le compte des Etats-Unis, sans véritablement savoir les informations qu’il transmettait via ses émissions de propagande. Il a vécu aussi, eu des amis, vécu une grande histoire d’amour avec Helga, se montra cruel aussi (là, vous vous doutez bien que j’expose mon propre point de vue).

Mon premier constat est que ce livre est facile à lire, l’écriture, ou plutôt les paroles d’Howard coulent toute seule, les chapitres sont bien conçus et nous donnent envie de poursuivre la lecture – d’en savoir plus, finalement, sur cet homme. Et cette facilité de lecture me fait immédiatement penser à une chose : puisqu’il est si facile à lire, il lui a été facile, à lui, à d’autres, d’endoctriner d’autres hommes. Le pouvoir de la parole. Preuve en est que l’on peut devenir un héros aux yeux des autres, et pas pour les bonnes raisons.

Je ne peux qu’être effarée par ce que nous montre Kurt Vonnegut : le racisme et l’antisémitisme profond, y compris après la guerre, sévissent toujours, et il suffit de peu pour se liguer les uns contre les autres, voir les autres contre une seule personne. Préserver la « pureté de la race » n’est pas l’apanage du troisième Reich. Et l’étrangeté de certaines alliances ferait presque sourire n’était la gravité de l’enjeu.

Les paroles ne se sont pas envolés, les écrits sont restés aussi – les poèmes d’Howard, les lettres qu’il reçoit sont autant d’effet de réel pour confirmer sa carrière d’auteur et présenter une version de la vérité, non replongeant ainsi dans son passé. Howard ne se définit pas (seulement) en fonction de la guerre, il se définit en fonction d’Helga, de son amour inconditionnel pour elle, de la douleur liée à sa disparition. Un seul être vous manque et plus rien n’a d’importance.

Howard n’est pas un homme, non plus que son beau-père. Howard est un symbole, au même titre que ceux qu’il a dessinés, un jour, sur la fenêtre de son appartement, le symbole de ce que les hommes « de bonne volonté » n’ont pas pu empêcher – sans oublier les quelques « ratés » du rêve américain. Howard est le symbole, aussi, de la distinction entre justice et vengeance – justice qu’il réclame, presque seul.

Nuit mère – ou la confession d’un homme infiniment seul.
Lien : https://deslivresetsharon.wo..
Commenter  J’apprécie          80
Abattoir 5

Billy Pélerin, le bien-nommé, est un authentique anti-héros. Il semble que, depuis ce crash, dont il fut le seul rescapé, d'un vol amenant un groupe d'opticiens à un congrès international à Montréal, il soit affligé, à son corps défendant, de la faculté de voyager par à-coup et dans le désordre, dans le temps, à travers une faille de ce dernier. Ainsi le calamiteux personnage se voit télé-transporté à l'époque où il était troufion, prisonnier de guerre, puis spectateur impuissant du bombardement apocalyptique de Dresde, dont il réchappa, en se réfugiant, ironie de l'histoire, dans les caves d'un abattoir. D'une pichenette il se retrouve ensuite après guerre, dans un hôpital militaire, où on le soigne d'une dépression post-traumatique; une autre secousse du temps le propulse en 1967, alors qu'il est kidnappé par les trafalmadoriens, entité extra-terrestre, dont l'aspect extérieur affecte la forme d'un déboucheur à ventouse vert, dont la tige, d'une grande souplesse, est terminée d'une main unique portant un œil vert. Les aimables visiteurs, l'ayant parqué dans un zoo constitué d'une sphère protectrice dont les parois transparentes permettent au trafalmadoriens, toujours plus nombreux, d'épier les us et coutumes de l'être humain, lui ont de plus enseigné leur conception du temps qui réfute notre succession linéaire des instants. De tout ceci, il appert qu'une personne qui meurt semble seulement mourir, et qu'elle se porte comme un charme à de nombreuses autres époques. Comme résultante de cette haute philosophie, l'interminable et cocasse succession des morts dans le récit sera, à chaque fois, expédiée par cette lapidaire et fataliste expression à valeur d'antienne : c'est la vie.



Paru en 1969, ce roman original et irrévérencieux, mélange de fantasy, de roman picaresque et de souvenirs autobiographiques, est à replacé dans le mouvement antimilitariste et pacifique qui agitait alors une partie de la société américaine. C'est avec humour et non-conformisme que l'auteur s'attache à dénoncer l'absurdité et l'horreur de la guerre.
Commenter  J’apprécie          80
Abattoir 5

A la fermeture de cet Abattoir 5, s'il y a un mot qui m'a frappé au point de penser que c'était les Tralfamadoriens qui me l'enfonçaient dans le crâne (et en même temps, pourquoi ils auraient fait ça ?) c'est bien : Déception.

Et pas que pour le livre mais déjà et surtout par rapport à toutes les critiques dithyrambiques qu'on peut lire absolument partout concernant ce que beaucoup n'hésitent pas à appeler Le chef-d'oeuvre de Kurt Vonnegut Jr. Et à là limite, y'a comme un petit relent de jalousie aigre qui remonte. J'aurais vachement voulu moi aussi applaudir à n'en plus finir aux aventures de Billy Pèlerin qui avaient, à priori, tout pour me plaire : les mondes parallèles, les-morts-qui-sont-morts-mais-en-fait-pas-vraiment... mais surtout l'hymne anti-militariste censé se dégager de cette oeuvre.



J'ai trouvé ça plat, de peu d'intérêt, un personnage principal qui m'est apparu comme l'idiot du village éveillant plus la pitié affligée qu'autre chose... Non vraiment, quand je compare mon avis à ceux des aficionados, et on sait qu'ils sont légions, j'en viens à me demander si je ne suis pas passée à côté (genre plusieurs années lumières) de ce livre et rhâââ ce que j'aime pas ce petit goût d'incompréhension.
Commenter  J’apprécie          87
Elle est pas belle, la vie ? Conseils d'un ..

Après vérification, oui, Vonnegut est bien un auteur de science-fiction comme je pensais m'en souvenir, mais il a vécu l'équivalent de plusieurs existences (études et boulots variés, seconde guerre mondiale sous les bombardements - d'où Abattoir5- et suicide de sa mère le jour de la fête des mères, quelle horreur!). J'ai donc appris aussi qu'il participait en tant qu'orateur aux cérémonies de remise de diplômes (ce truc a l'air bien anglo-saxon, je ne me souviens pas du tout qu'on m'ait remis autre chose qu'un bout de papier dans un vague secrétariat). Dommage, finalement, toge et mortier donnent des photos marrantes quand même et cela marque plus sans doute la fin des études et le début d'une autre vie.



En tout cas rien de lourd et empesé dans ces discours, souvent humoristiques, pleins d'anecdotes, très "parlés", l'auditoire étant sollicité pour donner son avis en levant la main, etc... Quelques petites redites forcément, au fil du temps (de 1978 à 2004), mais rien de rédhibitoire.



Des thèmes favoris, importants aux yeux de Vonnegut, reviennent souvent :

La nécessité de "familles élargies"

"Un mari, une épouse et des enfants ne font pas une famille, pas plus qu'un Diet Pepsi et trois Oreo ne font un petit déjeuner. Vingt, trente, quarante personnes - ça, c'est une famille. Les mariages implosent tous. Pourquoi? Les mariés se disent l'un à l'autre, parce qu'ils sont humains : 'Tu n'es pas assez de gens pour moi'."

Il prend l'exemple d'un Ibo du Nigeria qui avait six cents proches aux quels il pouvait présenter son nouveau bébé.



Les rites de passage

"Mon opinion est que refuser un rite de passage aux jeunes hommes de notre société est un complot soigneusement ourdi, quoique subconsciemment, pour rendre ces jeunes hommes impatients d'aller à la guerre."



L'oncle Alex

"Mon oncle Alex Vonnegut m'a enseigné quelque chose de très important. Il m'a dit que quand les choses allaient vraiment bien, il fallait toujours le constater. Il parlait d'occasions très simples, pas de grandes victoires. Boire de la citronnade à l'ombre d'un arbre, sentir les effluves d'une boulangerie, pêcher ou écouter de la musique venant d'une salle de concert tandis qu'on est dehors dans le noir ou, si je puis me permettre, après un baiser. Il m'a dit qu'il était important dans pareilles circonstances de dire à voix haute : 'Elle est pas belle, la vie?'.

Oncle Alex estimait que c'était un gâchis terrible d'être heureux et de ne pas le constater."



Vonnegut n'était pas chrétien, mais il cite plusieurs fois le Sermon sur la montagne (être miséricordieux). Ses opinions en matière de politique (y compris étrangère) ou de religion ne caressent pas dans le sens du poil, il cherche à faire réfléchir les jeunes têtes en face de lui, par exemple sur leur dépendance à l'argent,à la notoriété, au pétrole.



Cependant je ne suis pas totalement emballée car il me manque l'oralité du texte, qui a été lu devant des centaines de jeunes diplômés, il manque leurs réactions aussi. Parfois je l'avoue c'était censé ma faire sourire, et c'est tombé à plat, je n'ai pas compris toutes les références. Je pense qu'il faudrait que je connaisse mieux l'auteur et que, par exemple, je lise un de ses romans, pour mieux appréhender son univers.
Lien : http://enlisantenvoyageant.b..
Commenter  J’apprécie          80
Le petit oiseau va sortir

Quand on titre un recueil de nouvelles "Le petit oiseau va sortir", c'est manifestement qu'on souhaite prendre une photo. Et c'est bien un instantané de son époque que Vonnegut dresse ici, mais au moyen de fables le plus souvent irréalistes, ou tout au moins contenant un élément de surnaturel, d'absurde.

Et c'est tout ce paradoxe qui anime le livre, comment dépeindre le réel avec l'irréel et y parvenir bien mieux qu'avec un réalisme brut. L'absurde des récits prête très souvent à rire, mais un rire qu'on ne sent monter parfois que pour éviter les larmes qui voudraient poindre quand on est face à l'absurdité de notre monde, de notre époque.

Petit bémol peut-être, un certain ethnocentrisme américain qui fait qu'il sonne moins juste je trouve quand il tente dans une nouvelle de sortir de son cadre géographique... Si c'est pas clair, vous vous ferez votre propre idée en le lisant !

Commenter  J’apprécie          80
Le petit déjeuner des champions

Alors, par quoi commencer avec ce livre...

Je crois qu'ici, j'avais affaire à un cas de "ce n'est pas toi, c'est moi" avec ce livre. J'ai découvert Vonnegut il n'y a pas très longtemps avec Slaughterhouse-5 (Abattoir 5) et Cat's Cradle (le Berceau du chat) que j'avais énormément aimé. Tellement que je les considère dans la liste de mes livres favoris (surtout Cat's Cradle). En effet, j'avais énormément été éblouie par l'humour particulièrement noir et l'absurdité de l'auteur qui arrive à descendre en permanence l'humanité entière ( et lui compris ). Malheureusement, c'est ces points particuliers qui m'ont fait défaut dans ce livre. Tout était trop, trop lourd, trop absurde, trop cynique et l'oeuvre ne semblait pas avoir d'autres objectifs que de critiquer l'ensemble de la société américaine. Pas que cette critique me dérange particulièrement, mais c'est juste que je ne trouvais pas que ce roman constituait la meilleure façon de le faire. L'histoire semble ici complètement effacée et inutile, on se demande depuis le début où cette lecture va nous mener et au final, on a pas vraiment de réponse.

Cependant, certains passages étaient aussi vraiment géniaux ce qui fais que dans l'ensemble, je n'ai pas détesté le livre mais je ne crois pas vraiment pouvoir dire que j'en ai compris la moitié car ce serait mentir.

Pour conclure, je dirais que je vous conseillerez ce livre uniquement si de base, vous êtes un fan de l'auteur, si ce n'est pas le cas, j'ai peur que ce livre vous dégoûte un peu de l'auteur, ce qui serait bien dommage vu la qualité de ses autres livres.
Commenter  J’apprécie          80
Abattoir 5

Du 13 au 15 février 1945, les aviations britannique et américaine bombardent la ville allemande de Dresde, la détruisant quasi entièrement et faisant plusieurs dizaines de milliers de morts. Pourtant la ville n’a aucun intérêt stratégique, et n’abrite même plus de troupes allemandes. Témoin de ce massacre, Kurt VONNEGUT en fait le thème de son oeuvre majeure : Abattoir 5.

Le premier chapitre du roman peut donner à penser que l’on commence alors une autobiographie. L’auteur y écrit à la première personne et y présente ses intentions : écrire un roman sur son expérience à Dresde. Mais dès le deuxième chapitre c’est Billy Pèlerin qui personnifie l’auteur. Et Billy Pèlerin est un personnage singulier puisqu’il a la faculté de "décoller du temps", c’est-à-dire de se projeter aléatoirement en diverses périodes de sa vie, de son vécu de la seconde guerre mondiale à sa vie d’américain moyen, en passant par son enlèvement par les extraterrestres de la planète Tralfamadore, thème récurrent dans l’oeuvre de VONNEGUT.

Kurt VONNEGUT alias Billy Pèlerin est profondément marqué par toutes ces expériences. Par la guerre bien sûr, de par sa nature même, mais aussi parce qu’il est le témoin d’un de ses épisodes les plus tragiques. Par sa vie personnelle également, parce qu’elle est ponctuée d’évènements dramatiques. Par son expérience sur Tralfamadore enfin, parce que ce n’est pas banal, et qu’en y étant enfermé dans une cage de zoo "tout-confort", il y vit sans soucis et sans cauchemars tout en portant un regard extérieur sur la folie des hommes.

L’originalité d’une telle approche est encore accentuée par le style de l’auteur. Son écriture est en effet simple et factuelle, reposant entièrement sur des phrases et des paragraphes courts, donnant un rythme incroyable au récit. Le lecteur a d’ailleurs l’impression que VONNEGUT/Pèlerin se contente de relater des faits, à défaut de comprendre, et donc d’analyser, le sens de la vie et de la guerre. C’est par exemple, dès la troisième phrase, le cas de ce prisonnier fusillé pour avoir pris une théière qui n’appartenait à personne. Le ton employé est celui de l’humour, noir bien entendu, un leitmotiv revenant à chacune des morts plus ou moins violentes qui ponctuent le roman : "c’est la vie".

Tout cela fait de Abattoir 5 une oeuvre profondément originale. Autobiographie, plaidoyer antimilitariste, roman de Science-Fiction, elle est tout cela à la fois. Elle est surtout particulièrement marquante et se pose définitivement comme un chef d’oeuvre de la littérature.
Commenter  J’apprécie          80
Le petit déjeuner des champions

Un bordel conceptuel, thématique et narratif complet, une œuvre clairement iconoclaste et punk, avec tout ce que ça suggère de transgressions pas toujours finaudes et de jusqu'au-boutisme un peu couillon par moments.

Mais au final, un bouquin satirique d'une grande force et d'une sincérité assez implacable.

Pas un bouquin pour tout le monde, clairement, mais si la longueur d'ondes est la bonne, l'essentiel passe avec plaisir, voire enthousiasme.
Lien : https://syndromequickson.com..
Commenter  J’apprécie          70
Abattoir 5

Le livre se résume en trois thèmes : extraterrestres, voyage dans le temps et bombardement de Dresde.



Extraterrestres, car Billy est enlevé par une race extraterrestre, originaire d'une planète nommée Tralfamadore.



Voyage dans le temps, car Billy voyage dans le passé et le futur.



Et bombardement de Dresde, car c'est le thème central du roman (et le vécu de l'auteur). Ce bombardement, méconnu des masses, était plus meurtrier que les deux bombes nucléaires sur Hiroshima et Nagasaki. En effet, à Dresde, on compte environ 300 000 morts, tandis les deux bombes nucléaires en ont fait environ 200 000. La plupart des victimes étaient des civils; des femmes et des enfants.



Bon roman, mais j'aurais préféré en savoir davantage sur Tralfamadore et les Tralfamadoriens, de développé davantage.
Commenter  J’apprécie          70
Abattoir 5

VONNEGUT a vécu en direct le bombardement de Dresde en 1945 et souhaite nous en causer par le biais d’un bouquin qu’il est en train d’écrire. Le même que celui qu’on est en train de lire. Il a du mal à rassembler ses souvenirs, et après quelques pages comme brouillonnées décide de nous conter la vie de Billy Pèlerin (Billy Pilgrim dans certaines traductions). Et là ça part dans tous les sens, accrochez vos ceintures.





Billy a assisté au bombardement de Dresde en 1945 (ça doit déjà vous rappeler quelque chose), il tente de faire partager ses souvenirs (il n’est pas le narrateur) alors qu’il est quasi quinquagénaire et que l’action se situe à la fin des années 60 (cela aura son importance) et qu’il officie dans l’optique. Nous allons le suivre dans les années 40 en pleine guerre mondiale, au front, puis revenir au présent, en cette fin de décennie numérotée 60. Puis Billy dérape et raconte son kidnapping par les extra-terrestres. Œuvre de science-fiction ? Je serais de répondre par la négative, pourtant il est référencé parmi les meilleures livres de la catégorie et considéré comme un classique du genre. Billy est définitivement traumatisé par ce qu’il a vu pendant la guerre, en particulier à Dresde, et il s’invente un sas de décompression par la création imaginaire d’un monde parallèle, la planète Trafalmadore, où les gens sont accueillants et chaleureux.



Nous avons là trois espaces temps pour un même roman, faut quand même bien se tenir au pinceau pour y retrouver ses repères. Sorti initialement en 1969, sa lecture est une triple ambivalence. Il y a d’une part le jeune soldat perdu de l’armée Etats-unienne en Allemagne, qui égrène ses souvenirs avec flou, par ailleurs pas toujours en rapport avec l’action, comme pour ne pas avoir à affronter l’indicible. D’autre part on voit évoluer l’opticien des années 60, meurtri et déjà épuisé par la vie. Mais il y a le « petit garçon » sur Trafalmadore, heureux et béat, friand d’anecdotes burlesques ou loufoques.



Roman inclassable, il reste très lisible grâce à l’écriture et l’univers si particulier de l’écrivain, tout en cynisme, en drôleries (m’est avis que Jim HARRISON s’est inspiré de sa patte), les situations absurdes sont pléthore. Les références à la science fiction et à ses auteurs sont nombreuses, le style étant évoqué comme une fuite de la réalité trop difficile à supporter. Si son écriture dans les années 60 me paraît importante à préciser, c’est que cet « Abattoir 5 » fleure bon le psychédélisme d’alors : visions déformées, anecdotes ressemblant à des hallucinations, mais aussi antimilitarisme virulent, anticléricalisme de fin de volume, rejet des institutions, et bien sûr désenchantement, désillusion pour un monde qui ne paraît pas à la hauteur.



« Abattoir 5 » sait aussi se faire historique avec cette précision : il y a eu presque deux fois plus de morts lors du bombardement de Dresde que sur Hiroshima la même année. Ce bombardement, même si VONNEGUT a du mal à trouver un fil directeur pour le narrer, il en est pourtant beaucoup question vu par les yeux de Billy (qui vous l’aurez compris est le double de VONNEGUT). Le négativisme, voire la misanthropie hautement cynique d’une partie de la narration se complète avec cette joie d’être entouré de Trafalmodoriens. Un bouquin d’une rare originalité où certain.e.s pourront se sentir décontenancé.e.s voire exclu.e.s. Sans doute qu’avec des produits hallucinogènes sa lecture en devient parfaite et que l’on parvient à ouvrir certaines portes qui semblent verrouillées. Il est à la fois historique et hors du temps, rationnel et totalement surréaliste, morbide et drôle. C’est un tout qui laisse pantois. Arrêtez-vous une seconde sur le titre « Abattoir 5 ou la croisade des enfants », l’ambivalence est déjà là. Pour finir, que l’on apprécie ou non les incessantes jongleries dans le temps et l’espace, il est indéniable que l’écriture de VONNEGUT est de haute voltige et qu’elle tient le récit d’une main de fer.





https://deslivresrances.blogspot.fr/
Lien : https://deslivresrances.blog..
Commenter  J’apprécie          70
Le petit déjeuner des champions

Kurt Vonnegut est un auteur que j'affectionne particulièrement : j'aime son écriture, j'aime son humour, j'aime ses réflexions.

Cela étant dit.... J'ai été plus que décontenancé à la lecture de ce livre. Son style y est poussé à l'extrême ; l'absurdité y est omniprésente. Tout au long de ma lecture, je me suis sentie baladé par l'auteur : il nous emmène où il veut, en nous faisant faire de multiples détours et digressions.

Certes, c'est absolument génial ; c'est une sorte d'exercice littéraire doublé d'une critique acerbe de la société. Mais ce n'est pas le plus facile à aborder, loin de là !

Bref, j'en ressors avec cette impression de malaise dû à cette incertitude d'avoir compris où l'auteur allait, et d'avoir pataugé.

Ce dont je suis certaine toutefois, c'est que je trouve Kurt Vonnegut absolument génial !
Commenter  J’apprécie          70




Acheter les livres de cet auteur sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten

Lecteurs de Kurt Vonnegut (1376)Voir plus

Quiz Voir plus

Stefan Zweig ou Thomas Mann

La Confusion des sentiments ?

Stefan Zweig
Thomas Mann

10 questions
15 lecteurs ont répondu
Créer un quiz sur cet auteur

{* *}