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Citations de Alexandre Page (87)


Kazia était réfractaire à croire spontanément ce qu'on lui présentait comme une vérité définitive ; il avait toujours eu cette volonté de contradiction. D'ailleurs, il était né avec un pied bot comme pour contrevenir au désir de son père d'en faire un vigoureux soldat de l'armée rouge. Il trouvait étrange cette facilité des gens à s'abandonner au profit du « régime », à suivre le chemin tracé que ce dernier exigeait de son peuple.
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— Vois-tu, la feuille du tilleul à la forme d’un cœur. Elle symbolise l’amour, mais elle console également les âmes esseulées. La nature nous entend sans que l’on ait besoin de parler, et elle nous offre ses présents pour nous réconforter. Prends-la et fais-la sécher. Je la tiens d’un ami, et je te la donne.
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Elle est maudite, comme ce lac. Beaucoup vont la voir, mais moi je m’en méfie et tu devrais t’en méfier aussi. Il ne faut pas tenter le Diable. Ce n’est pas sans raison que les sorcières sont mises à l’écart des villages.
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Il n’avait pas eu cette certitude immédiate en longeant le lac, en échangeant avec Ivan, qu’il se trouvait derrière les légendes de Tcherepitsa autre chose que du folklore et de vieilles croyances.
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— Il y a des loups à Saint-Pétersbourg, mais ils ne sont pas comme ceux des forêts. Ils sont bien pires. En vérité, je ne passe qu’une partie du temps à Saint-Pétersbourg. Depuis deux ans, je voyage en Russie pour la Société russe de géographie. Ces loups, je les ai rencontrés en Carélie, dans le nord, dans une contrée bien moins belle et plus hostile que Tcherepitsa. Heureusement, on m’avait conseillé d’être armé et je l’étais. J’ai pu les faire fuir à défaut d’en abattre un seul, car je n’avais jamais appris à tirer.
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La toujours entreprenante Veroushka osa demander à Saltikov de lui décrire Saint-Pétersbourg. C’était un défi ardu. Elle ignorait tout de ce à quoi pouvait ressembler une ville telle que la grande capitale de Pierre le Grand. Quand Saltikov lui parla de la flèche dorée de l’Amirauté, il lui fallut ajouter qu’elle brillait comme le soleil au zénith, car c’était la seule chose qui avait la couleur et l’éclat de l’or dans son quotidien très étroit. De ponts, de canaux, de vrais édifices de pierres et de carrosses, elle n’en avait jamais vu. Même l’imagerie populaire n’était pas arrivée dans ces tréfonds de la Petite Russie. Elle ne pouvait imaginer les dimensions d’une telle ville, et lorsque Saltikov lui expliqua qu’elle était mille fois plus grande que Tcherepitsa, le chiffre était trop énorme pour qu’elle pût se le représenter :
— Comment les gens font-ils pour se connaître ? demanda-t-elle.
Saltikov soupira, avant d’ajouter :
— La plupart des gens ne se connaissent pas. Ils se croisent sans se parler. De toute façon, tout le monde est bien trop pressé pour chercher à connaître l’autre
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Le repas avec la comtesse promettait d’être des plus monacaux. Sa fatigue déjà sensible le matin grandissait au fil du jour et le soir elle atteignait son paroxysme, si bien que la malheureuse semblait hanter sa propre demeure tel un spectre décharné. Sa main tremblait en plongeant dans la soupe et la force lui aurait sans doute manqué pour couper son pain si Liouba, connaissant bien sa maîtresse, n’avait pas réduit le gros morceau en petits carrés qu’elle pouvait aisément tremper dans son potage. C’était un spectacle contristant, car cette jeune femme de vingt ans mangeait comme une grand-mère de quatre fois son âge.
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Le lendemain, je me devais de peindre. Les derniers jours avaient été fort peu productifs, et l'échéance pour remettre mon prochain Hussard aux jardin des Tuileries approchait. Il me fallait le commettre comme j'en avais commis tant d'autres, je savais comment procéder, j'avais le geste, et pourtant, devant mon chevalet, dans mon silencieux atelier qui ne m'avait jamais paru aussi vide, je ne parvenais pas à poser une touche de couleur.
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J’en étais arrivé à ce degré d’injustice où la fidélité, où combattre ses propres vices, devient un sacrifice condamnant l’autre à vous devoir quelque chose, lorsque ce n’est que le devoir d’un honnête homme.
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La mer !... Étrangement, ce ne fut pas tellement sa vue qui me submergea. Elle était immense et du reflet bleu émeraude des poètes et des peintres. Non, ce qui me submergea était ce que les artistes ne pouvaient décrire. Il y avait l’air, chargé d’ozone et de sel, un médecin aurait dit qu’il faisait palpiter le cœur et se dilater les poumons, mais au bénéfice du patient ! Puis il y avait le sac et le ressac, bruit lancinant et ininterrompu qui jette sur la plage quantité de curiosités merveilleuses puisées au fond des abîmes pour le plaisir ou parfois la frayeur des promeneurs. La plage qui était d’un sable si fin qu’il paraissait de la poudre, et parce qu’il était aussi doux que le pelage d’un chat, les habitués disaient que même les femmes en habits n’avaient rien à craindre pour leur attifets.
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(…) il vaut parfois mieux affronter la tempête que de demeurer des années prisonniers d’une île déserte, (…)
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Un couple est une petite barque au milieu de la tempête du monde, les vagues tentent de le faire craquer, il peut leur céder ou résister à leurs assauts.
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Il fallait serpenter, ruser, roublardiser pour s’élever dans le monde de l’art, contraindre sa nature aux exigences des autres (…)
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Durant ses voyages en Afrique, il avait vu un animal que l’on nomme caméléon, et il comparait l’artiste moderne à cette créature capable de s’adapter à son environnement :
— Quand l’artiste tient un sujet, me dit-il, il doit d’abord savoir pour qui il travaille. L’État, l’Église, un citoyen, mais encore un citoyen français, un américain, un russe, un anglais, mais encore un bourgeois ou un aristocrate descendu en ligne directe de Clovis ou de Guillaume le Conquérant. Est-il catholique, protestant ou juif ? Tout cela importe, car sans cela, votre œuvre peut déplaire à un point que vous n’imaginez même pas, et cela, parfois pour un centimètre carré de peinture dans une toile monumentale. Croyez-en mon expérience, le succès ou l’échec d’une toile tient toujours à un détail que l’on pense anodin. On m’a dit un jour qu’un jeune artiste sans le sou était devenu richissime parce que le visage d’un de ses personnages dans une scène de bal avait rappelé à un grand-duc les traits d’un amour de jeunesse ! C’est à cela que tiennent nos vies !
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La gloire est une chose étonnante. Elle peut traverser les siècles, les millénaires parfois, et pourtant, elle peut s’enfuir et revenir en un instant aussi volatile que la constance des hommes. Il ne m’avait pas fallu une vie pour la perdre, et il me suffisait d’une œuvre pour la retrouver en des proportions plus grandes encore que jadis.
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Elle avançait peu et elle sortait plus souvent insatisfaite qu’heureuse des longues heures laborieuses passées devant sa toile monumentale. Elle vivait ce que vivent tous les artistes qui font ce qu’ils n’aiment pas faire, mais le font car le public l’exige d’eux.
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Je crois qu’ils la firent réfléchir sur ce que nous avions à espérer l’un et l’autre de cette société injuste qui décidait pour l’artiste de la place qui devait être la sienne, et sur les solutions possibles pour échapper au destin qu’elle voulait tracer pour nous. Je voulais peindre des arbres et des ruisseaux, on réclamait de moi des batailles et des soldats. Elle voulait peindre des batailles et des soldats, et on réclamait d’elle des arbres et des ruisseaux. Moi, car j’étais un artiste médaillé, un espoir de la grande peinture d’histoire qui avait trop promis, elle, car elle était condamnée à ne jamais être assez virile pour peindre convenablement les combats des hommes. Nous n’étions pas des artistes à notre place (…)
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— Oh, ils ont acheté, c’est vrai, lui dis-je, et j’en suis ravi, mais aucun d’eux n’imagine que cet art est digne de moi. Ils ont acheté parce que c’est joli, mignon, mignard aurait dit les plus précieux, mais ils pensent que c’est un art paresseux, un art d’artiste dilettante qui s’amuse, l’art d’un peintre qui procrastine en se livrant à des travaux de seconde main. Pour l’heure, ils ne me jugent pas durement, car après tout, même Édouard Detaille fait de l’aquarelle, même le grand Meissonier pour se détendre, seulement, eux reviennent à la grande peinture d’histoire le lendemain et on leur pardonne leurs « vacances ». Moi, c’est cela que j’aime peindre à présent, c’est cela que je veux peindre. Je ne veux plus peindre de batailles, de soldats. Mais je crains que l’on me reproche toujours de faire moins lorsque jadis j’ai pu faire plus, comme on te reprochera toujours de vouloir faire plus lorsqu’une femme ne peut que faire moins.
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(…) je conçus l’idée d’exposer directement dans mon atelier. Plus exactement, d’exposer dans le salon de réception et de répandre la nouvelle dans la presse. L’exercice était déjà commun à cette époque, la visite aux ateliers d’artistes était devenue une mode et un type de sortie fort apprécié. Les amateurs d’art aiment voir les coulisses de la création, et quelle plus belle manière de les découvrir qu’en visitant l’atelier du créateur ? Les artistes installés avaient assez de notoriété pour faire de leurs ateliers des galeries d’art courues, et même des salles de spectacles, de concerts, de théâtre, car rien n’est trop beau pour donner à des clients ordinaires le sentiment de privilèges extraordinaires. Je commençais seulement dans l’exercice et je prévoyais une petite réception musicale et dansante, assez légère et divertissante pour susciter chez le visiteur l’envie d’acheter, mais sans trop d’artifices qui les auraient détournés de l’objet de leur visite.
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La presse ne disait presque rien du tableau, et lorsqu’elle disait, elle médisait, et dans ce cas, il était aisé de deviner que l’on parlait moins de l’œuvre que de son exécutante. La médiocrité du tableau tenait dans la prétendue impossibilité de l’artiste à comprendre son sujet. C’était là ce que je redoutais et que Clémence avait imaginé pouvoir surmonter avec son talent seul, or, si le jury avait accepté l’œuvre, la presse se permettait de gloser allégrement sur l’hybris de mon épouse qui s’essayait à des sujets trop élevés pour son sexe.
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