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Critiques de Amédée Achard (17)
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Les Coups d'épée de M. de la Guerche

Quelle maîtresse infidèle et injuste que la notoriété !

Elle a couronné Dumas et oublié Achard et pourtant, la qualité d'écriture du second ne le cède en rien à celle du premier, bien au contraire.



Si j'aime Dumas, je lui reproche souvent les longueurs d'une narration étirée à l'envi. Avec Amédée Achard, le rythme ne souffre aucun ralentissement, l'aventure ne faiblit jamais, les personnages sont empreints d'autant de bravoure que d'esprit ; la délicatesse des sentiments, la conscience de l'honneur, la vaillance la plus téméraire et l'humour le plus joyeux animent chacune de leurs actions.



"Les coups d'épée de M. de la Guerche" est le premier tome des aventures d'Armand-Louis de la Guerche et de Renaud de Chaufontaine, deux jeunes gentilshommes français aussi beaux que courageux, l'un protestant, l'autre catholique, unis comme des frères et solidaires comme des soldats. Dans une Europe écartelée par les guerres que se livrent les grandes dynasties, encore exsangue des guerres de religion, à la veille de la guerre de Trente ans, les deux amis sont entraînés dans une succession de péripéties dignes de la tradition du roman de cape et d'épée la plus pure. De la Rochelle à Gothemborg, de l'entourage du cardinal de Richelieu à celui de Gustave-Adolphe, roi de Suède, aucune épreuve ne leur est épargnée ; batailles, trahisons, vengeances, intrigues, attaques de pirates, missions secrètes mais aussi galanterie, amours contrariées et folle témérité, tout, absolument tout est réuni pour faire pâlir d'envie les célèbres mousquetaires de Dumas.



Un vrai régal de lecture qui se termine sur la promesse d'une belle suite avec "Envers et contre tous", le second tome de la saga.





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L'eau qui dort - Madame de Sorens - Pyrame ..

Ne réveillez pas l'eau qui dort ! Voici un fameux dicton appliqué ici au personnage principal, Berthe, dans une nouvelle parue en 1859 dans la Revue des Deux-Mondes.



Berthe était la fille de M. et Mme Des Tournels, couple aisé mais souffrant d'une profonde blessure : le décès de leur fils aîné, Jean. Les deux filles, Lucile et Berthe, souffraient de cette disparition dans le sens où la mère ne leur donnait pas tout l'amour qu'elles méritaient. D'ailleurs, elle était tellement chagrinée par la disparition du fruit de ses entrailles qu'elle en mourut très vite. En attendant, Berthe se révélait être très lunatique. "Certains accès de violence et d’emportement inexplicables duraient parfois plus d’une semaine sans que rien pût en modifier les témoignages ; elle était acerbe et malfaisante comme un fruit vert ; le regard était aigre, la parole acide. La semaine écoulée, Berthe tombait dans de longs silences et de grands accablements qui n’avaient pas moins de durée, et dont elle sortait bizarrement par des réveils soudains." C'est de ce comportement que naquit son surnom : "L'eau-qui-dort".



En âge de se marier, Berthe rechercha un homme supportant son caractère. Celui-ci se présenta. Il s'agissait de Francis d’Auberive, de bonne famille mais sans le sou. Et lorsqu'un notaire lui fit remarquer qu'il n'avait rien à offrir comme dot, Francis, tristement, se retira sans rien dire. Berthe, loin de s'imaginer ce qui se tramait, succombait de son côté au charme de celui-ci et en parla à son père. Cependant, ce dernier ne vit pas d'un bon œil cette relation, Francis ayant une fort mauvaise réputation. Il n'en parla pourtant pas à sa fille...



Je m'arrête là pour ne pas tout dévoiler. Cette nouvelle se base sur des non-dits donnant lieu à des blessures. A mi-chemin entre Balzac et Stendhal, Achard privilégie la psychologie de ses personnages. Il les sonde jusqu'au fond de l'âme. Quel dommage, encore une fois, que cet auteur ne soit pas (ou peu) connu !
Lien : http://www.lydiabonnaventure..
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Envers et contre tous

Ils sont fougueux et braves, ils sont liés comme des frères siamois, fines épées, fiers cavaliers, soldats pétris d'honneur et fiancés passionnés, j'ai nommé Louis-Armand de la Guerche, le protestant, et Renaud de Chaufontaine, le catholique. Tels sont-ils et tels se font-ils aimer de leurs dulcinées comme du lecteur.



Dans la droite lignée du premier volet qui m'avait déjà enchantée, "Envers et contre tous" - qui sonne avec autant de panache que "Un pour tous et tous pour un" - tient toutes les promesses d'une narration épique où l'action est la grande maîtresse.



Plus militaire que le premier tome - maintenant que le décor et les personnages sont bien campés - cet opus déroule sa succession d'aventures "de cape et d'épée" dans un récit servi par une plume classique superbe d'efficacité.



Définitivement, un auteur à (re)découvrir d'urgence par tous les amoureux de littérature héroïque et romanesque.





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Les Coups d'épée de M. de la Guerche - Envers..

La littérature dite "populaire" a souvent été considérée comme une "sous-littérature", parce que, face à une littérature classique "officielle", on lui prête une qualité d'écriture inférieure, avec des personnages stéréotypés, des intrigues tour à tour simplistes ou alambiquées… Bien sûr, ce n’est pas faux, mais c’est quand même un peu exagéré, si l’on prend pour acquis qu’il s’agit là d’une partie de la culture, et que à l’intérieur même de cette sous-littérature, il y des pépites qui soutiennent la comparaison avec maintes œuvres dites "classiques". Ici, il faut rendre hommage à ces grands vulgarisateurs que sont Francis Lacassin ou Claude Aziza. Non seulement ils ont fait sortir le genre du ghetto où des années de critique officielle l’avaient assigné, mais encore ils ont remis en lumière des auteurs qui valent largement le détour.

Car la littérature populaire, comme tout mouvement artistique, a ses têtes de gondoles et ses petites mains, qui autant les unes que les autres, valent au minimum une mention, quand ce n'est pas une reconnaissance publique. Tout est né du roman-feuilleton où sous le parrainage de grands noms comme Victor Hugo, Alexandre Dumas ou George Sand, une nouvelle catégorie d'auteurs a vu le jour : Eugène Sue, Paul Féval, Ponson du Terrail, pour les plus connus, mais aussi Gustave Aimard, Amédée Achard, Adolphe d'Ennery, ou Emile Gaboriau, la mode étant surtout ou roman historique, roman d'aventure ou roman social. L'âge d'or du roman populaire se situe à la Belle Epoque, grosso modo entre 1880 et 1920, et coïncident avec le moment où, progrès oblige, les auteurs n'écrivent plus pour eux mais en fonction d'un public précis : ils écrivent ce qu'attend le lectorat, de la création, ils passent à la production avant de passer à l'industrialisation. C'est l'apogée du roman historique avec Paul Féval Fils et Michel Zévaco, du roman mélodramatique avec Georges Ohnet, Jules Mary, Xavier de Monépin ou Pierre Decourcelle, du roman policier avec Gaston Leroux ou Maurice Leblanc, du roman d'aventure "vernien", avec Paul d'Ivoi, etc. A part, nous avons l'inclassable et pourtant incontournable Gustave Lerouge. Dans l'entre-deux-guerres, et depuis 1945, la multiplicité des thèmes et des modes de diffusion, ainsi que l'apport des 'pulps" américains font éclater le genre. Le roman mélodramatique à l'eau de rose se perpétue un temps avec Delly et Max Du Veuzit. Aux catégories déjà citées viennent s'ajouter, le roman fantastique et d'horreur, la science-fiction, le roman d'espionnage, le thriller... "Le "roman de gare" constitue une brève survivance du roman populaire, mais on est déjà dans une autre époque : la bande dessinée, la télévision, le cinéma ont pris le relais d'un type culturel désormais révolu.

Amédée Achard (1814-1875) est l'un de ces auteurs à redécouvrir. De son œuvre considérable, retenons deux pépites, deux romans de cape et d'épée : Belle-Rose (1847) et surtout Les coups d'épée de M. de La Guerche (1863) et sa suite Envers et contre tous (1874). Injustement méconnu, ce roman est tout à fait comparable au Bossu de Féval, on y sent le même souffle épique (qui était aussi celui de Dumas). L'auteur y relate les aventures d'Armand de La Guerche (protestant) et de son ami et éternel rival Renaud de Chaufontaine (catholique) à travers la France du début XVIIème siècle et même jusqu'en en Suède.

Dans la plus belle tradition du roman de cape et d'épée, cet ouvrage de belle facture, d'une remarquable qualité littéraire, ne peut que séduire les amateurs.

Disponible en édition Marabout, réédité chez Phébus, on a plus de chance de le trouver chez un bouquiniste ou dans un vide-grenier. Ou alors en numérique, sur ces sites de téléchargement autorisés et gratuits que sont (entre autres) Ebooks libres et gratuits ou encore Bouquineux (leur catalogue est richissime)... si vous êtes adepte de la liseuse.

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Les fourches caudines...

Les gémissements plaintifs d'Albertine de Merris paraissent si ridicules : un château près de Compiègne, une famille estimée, réputée et accueillant toute la haute société parisienne… « Entourée de l'aisance que donnent les habitudes d'une vie où le luxe et le confort ont leurs coudées franches, rassasiée des plaisirs prodigués par la civilisation la plus raffinée, emmitouflée dans la ouate et les fourrures, et traînée par quatre chevaux dont le moindre aurait payé dix paires de boeufs de labour, Mme de Merris arriva par degrés insensibles à se croire la plus malheureuse des femmes. »



Comment concevoir ces malheurs de femme heureuse sous le faible prétexte d'une trop forte indifférence de son mari, le comte de Merris ? Elle s'est mariée trop vite, oui mais comme bien d'autres à son époque. Son malheur est d'autant plus incompréhensible que son mari est absolument irréprochable : affable, joyeux, courtois, il lui laisse une totale liberté, mais trop peut-être ? « Son humeur était toujours aimable ; il ne chicanait jamais Albertine sur aucun de ces sujets qui entretiennent la mésintelligence dans quelques ménages, mais c'était peut-être l'indifférence qui l'inspirait plus que la tendresse ou la bonté » Et comme lui disait Antoinette, sa conseillère et amie intime : « on ne peut pas contenter tout le monde et sa femme ». Il ne pense effectivement qu'à contenter le monde, il ne se passe pas une journée sans l'animation d'une réception, d'un bal, d'une chasse, d'un Opéra… « - il n'y a jamais assez de monde chez lui. Si je l'écoutais, j'inviterais les Champs-Élysées et le bois de Boulogne. »

(…) Mais il est si rond en toutes choses et ses impertinences sont assaisonnées de tant de gaieté qu'on ne saurait se fâcher. »



Et Mme de Merris, bien qu'étant de ce monde et adoptant avec grâce tous les codes pour s'y confondre, ne s'y reconnait pas : « Mme de Merris connaissait à peu près tout le monde, et il n'y avait là personne avec qui elle eût désiré passer un quart d'heure au coin du feu. » elle participe nonchalamment à une chasse à courre qu'elle dédaigne et observe passivement son époux poursuivre galamment une belle femme à travers la forêt qu'il semble préférer à la course au sanglier… Passe encore quelques infidélités tant qu'on respecte les convenances et la discrétion d'usage, mais cette constante indifférence la ronge :



« L'autre jour, nous étions ensemble dans une de ces réunions bruyantes dont quelques chevaux maigres sont le prétexte. Je ne sais pas si c'est bien récréatif ; la mode est d'y paraître. Entre deux courses l'ennui me prend et je propose à M. de Merris un tour de promenade. Jamais tu n'as vu figure plus étonnée que la sienne. Il se récrie : – Moi, à votre bras, ici ? me dit-il , vous voulez donc me compromettre ? » le rire me prit, mais comme j'insistais : Çà, reprit- il, dans quel monde avez vous vu, ma chère amie, qu'un mari offrait publiquement le bras à sa femme ? - Et ce disant , il me saluait de l'air d'un ambassadeur qui prend congé de sa souveraine. »



Elle ne manque pourtant pas de beauté ni d'esprit mais c'est comme si il eût été ringard pour son époux d'aimer ostensiblement sa femme.



Antoinette réprimante comme elle peut l'indigne comportement du comte mais ce dernier l'ignore… Albertine n'a plus qu'à oublier son sort et penser à autre chose :

« Ce sont de ces petites misères qui arrivent aux plus honnêtes femmes de Paris ; le tout est de ne pas s'en apercevoir. » dit Antoinette.

« -Et le moyen ?

-On ferme les yeux. »



Mais plutôt que de fermer ses yeux, elle ouvre son coeur à un brave colonel, M de Brévans, chasseur d'Afrique, motivée par la vacuité de sa vie :

« Que nous reste-t-il à nous qui avons parfois une éducation raffinée ? L'équilibre est rompu entre cette éducation et l'existence qui nous est faite. Aucun aliment pour le coeur, aucun pour l'esprit. Il faut cependant remplir la journée, et la semaine, et le mois ! Comment faire ? Par quel travail ? La lecture qui nous est conseillée est une excitation perfide ; la musique, une amie qui nous laisse plus troublée après des consolations d'un instant. Ne va pas croire que je me range sous les drapeaux des faiseurs de réforme ; non , je ne veux être ni général d'armée, ni président de cour d'assises ; mais le monde des sentiments n'est-il pas le seul qui nous soit ouvert, et faut-il s'étonner si quelques-unes s'y réfugient avec une ardeur qui les dévore ? Je ne vois dans les salons que des compagnes de plaisirs qui n'ont pour unique fonction que le soin d'être belles à souhait et parées à ravir. Heureuses celles qui trouvent leur satisfaction dans ce vide ! »



Au moment où se forme cette nouvelle passion, le comte de Merris est atteint d'une maladie grave qui met ses jours en danger mais est sauvé grâce aux soins dévoués d'Albertine.

Une révolution s'opère alors en lui ; il se résout à changer de genre de vie, réforme sa maison, paie ses dettes, met ordre à ses dépenses ; bref, il finit par faire à sa femme une confession complète en lui demandant son pardon et en lui jurant de ne vivre que pour elle.

Albertine, en présence de cette noble franchise, est écrasée par le poids de sa faute, et ne sait quel parti prendre.

Mais son bon génie, Antoinette, vient à son aide et la décide à rompre immédiatement avec M. de Brévans.

A ce moment cruel, la comtesse reconnait avec douleur que le colonel n'est qu'un ambitieux, un égoïste, un coeur sec indigne de son amour.



Tout s'achève par une violente succession de drames d'une forte intensité émotionnelle : son époux est foudroyé par une épidémie, son amoureux d'enfance, Jacques de Cerclaux se hâte de reprendre ses droits sur le coeur de la veuve qu'il n'a jamais oublié et précipite un duel pour une raison puérile contre M. de Brévans et évince brutalement un concurrent.



Albertine qui se sentait mourir d'oisiveté, d'ennui et d'un peu de dépit, meurt désormais au sens littéral après ces drames et batailles menées pour elle :



« Tout ce sang répandu, c'est moi qui l'ai versé… Il pèse sur mon coeur, m''étouffe ; il crie contre moi… A présent, comprenez-vous pourquoi la fièvre me dévore ?... Ah ! Je vous aime, Dieu le sait ! Mais une ombre me poursuit... Il y a des heures où il me semble qu'un cadavre se dresse entre nous »



Je suis un peu déçu…Cette toile blanche qui attendait d'être peinte par de nouvelles couleurs qu'auraient pu offrir sa seconde vie de veuve, libérée et déniaisée par l'expérience, se trouve subitement brûlée, éteinte, et Albertine décède un peu bêtement, ce qui est un peu déconcertant pour le lecteur mais en fait une fin classique et pratique pour l'auteur.



Du reste, c'est une belle peinture du « grand monde » aristocratique de l'époque, traitée d'un point de vue exclusivement féminin et par deux femmes d'esprit : d'un côté Albertine, qui manque un peu de fermeté de caractère mais est loin de ressembler aux sottes pleurnichardes d'autres romans de moeurs dans le genre ; et de l'autre Antoinette, qui, sous une apparence frivole et nonchalante, cache un grand fond de sagesse. Elle a déjà parcouru la route douloureuse d'Albertine et donne à son amie les meilleurs conseils dans une conversation enjouée, pétillante d'esprit et de grâce.



Il manque peut-être un peu d'agressivité ou d'ironie dédaigneuse à l'auteur pour décrire ce monde qui, même dans ses faiblesses ou ses lâchetés, présente toujours, sous sa plume élégante, des teintes douces et flatteuses.

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Les Coups d'épée de M. de la Guerche

[Roman audio, lu par DanielLuttringer pour littéretureaudio.com]

Ce roman de cape et d'épée est très similaire à "Les trois mousquetaires" d'A. Dumas, bien qu'il soit nettement moins connu du grand public. Les deux récits concernent la même période, mettent en scène le même style de personnages et sont écrits plus ou moins au même moment.



Il y a une jeunesse, ici, que je n'ai pas retrouvé dans "Les trois mousquetaires", une certaine fraîcheur mais aussi une certaine naïveté. On retrouve davantage de "damoiselles en détresses" à sauver et moins d'affaires de politique, autre différence.

Il y a également beaucoup d'humour, surtout au début, mais cet humour disparaît petit à petit pour laisser la place à la gravité et au sérieux. Enfin, et ce n'est pas rien de le dire, il y a moins de nationalisme français dans ce roman que dans celui de Dumas.



Bref, pour les amateurs du genre, ce roman est un incontournable. de même pour les amateurs d'histoire, dont je suis, afin de mieux connaître et comprendre la guerre de trente ans.
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Belle-rose

Au début du règne de Louis XIV, Guillaume Grinedal, dit « le père Guillaume », fauconnier de son état et ancien militaire, s'est retiré avec ses trois enfants, Jacques, Claudine et Pierre, à la campagne non loin de Saint Omer, dans une petite maison léguée par son ancien maître. Un jour de 1658, un homme qui se dit commerçant confie une mission délicate à Jacques qui s'en acquitte avec un brio remarquable. A son retour, Jacques demande en mariage Suzanne, fille d'un nobliau des environs lequel refuse car le prétendant est pauvre et sans nom. Complètement dégoûté, Jacques quitte la région pour aller tenter sa chance à Paris. Détroussé en chemin par des brigands et se retrouvant sans un sou, il ne lui reste plus d'autre alternative que de s'enrôler dans l'armée...

« Belle-Rose » est un roman populaire de style « cape et épée » comme on savait si bien en écrire au XIXème siècle. Tous les ingrédients du genre sont présents : multiples rebondissements, duels, batailles, coups tordus, machinations diverses et variées, méchants très répugnants (Louvois a un très vilain rôle dans cette histoire foisonnante), bons particulièrement courageux et chevaleresques, amours contrariés. Au long de ce gros pavé de 691 pages, le héros passera son temps à faire contre mauvaise fortune bon cœur, à se battre contre une destinée contraire et n'arrivera à ses fins qu'avec une dose de constance et de courage hors du commun. Avec ce héros, ce chevalier prolétarien sans peur et sans reproche, on se retrouve à mille lieues des personnages de la littérature actuelle. Mais quel plaisir de goûter la langue magnifique, le style élégant et le panache d'un auteur sachant mener son histoire tambour battant. Selon le principe du roman feuilleton, l'intérêt est relancé systématiquement à chaque chapitre. Contemporain de Ponson du Terrail, de Paul Féval et d'Alexandre Dumas, Amédée Achard, auteur prolifique et estimé en son temps même par Dumas est injustement oublié de nos jours et c'est bien dommage. Espérons que le libre accès de ce texte permettra aux amateurs de bons romans historiques de le découvrir (ou de le redécouvrir).
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Le Clos Pommier

Le Normand n’est point pingre ni avare, il est économe.



Le père Glam, garde-champêtre à Varaville près de Cabourg et de Dozulé dans le Calvados, pourrait être riche mais il a trop bon cœur, et ses économies se sont envolées afin de permettre à des membres de sa famille, à des voisins, à des amis de ne pas se retrouver ruinés. Du coup, c’est lui qui se retrouve presque sur la paille. Heureusement, sa fille Catherine fait bouillir la marmite grâce à ses travaux domestiques et les dentelles qu’elle tisse infatigablement.



Le père Glam est veuf et il a eu le malheur de perdre son fils Fulgence de l’autre côté des océans, péri en mer. Jean Simon, pêcheur et qui était aux côtés de Fulgence lors de sa disparition, a ramené les quelques effets filiaux. Le père Glam les garde précieusement dans un coffre dans l’ancienne chambre de Fulgence, une pièce dédiée à son fils.



Simon et Catherine s’apprécient et envisagent même de se marier. Seulement le père Hennebaut, riche propriétaire local, aimerait pouvoir annexer à son domaine les quelques terres et la maison dite du Clos Pommier à cause de l’arbre qui trône dans la cour. Et Pacôme, le fils Hennebaut, se verrait bien marié à cette fille courageuse et travailleuse. Et comme le père Glam est redevable de quelques dettes qu’il ne peut honorer, une forme de chantage s’exerce sur lui.



En bon Normand qu’il est, il tergiverse puis signifie son refus à cette union, ce qui l’entraîne dans des complications sans fin. Un huissier de Dozulé est mandaté pour réquisitionner le Clos Pommier, au grand dam de Catherine et de Simon. Les deux amoureux se sentent contraints d’accepter la proposition de Pacôme mais auparavant ils contactent quelques membres éloignés de la famille, et l’huissier ému prélève même sur sa cagnotte quelques pièces blanches afin de rembourser la dette. Même les édiles et les notables des alentours se cotisent pour arrondir la somme. Mais cela ne suffit pas. Têtu, comme tout bon Normand qui se respecte, le père Glam ne veut pas donner la main de sa fille à n’importe qui, surtout à Pacôme. Seulement, ses vieux démons d’aider son prochain se réveillent et l’argent récolté est offert à un voisin qui est encore plus dans la dèche que lui.







Auteur du XIXe siècle, Amédée Achard est bien dédaigné de nos jours. Seuls survivent dans la mémoire littéraire deux romans, Les Coups d’épée de M. de La Guerche et Envers et contre tout. Pourtant il a écrit plus d’une soixantaine de romans d’inspiration diverse.



Roman de l’amour et de la jalousie, de l’honneur et de la cupidité, de la prodigalité et de la convoitise, de l’abnégation et de la concupiscence, Le Clos Pommier met en scène deux types de personnages aussi différents l’un de l’autre qu’un arbre vert qu’un arbre mort. L’un donne ses fruits à profusion, l’autre est un cœur desséché.



Dans ce roman datant de 1858, nous découvrons les prémices des thèmes que développeront plus tard Hector Malot, Emile Zola, Guy de Maupassant et quelques autres. L’argent, le terroir, le naturalisme, l’adversité à toute épreuve, le don de soi, le sacrifice et le dévouement, et une forme d’accumulation d’épreuves sentimentales et financières en sont les ressorts inépuisables.



Une étude des mœurs paysannes décrites avec justesse placées dans un quotidien séculaire, car ce qu’il se déroulait hier ou avant-hier se passe encore de nos jours malgré la libération des traditions ancrées dans les esprits. Presque car le poids des habitudes et des conventions régit souvent encore le parcours sentimental devant les exigences capitalistes.


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Envers et contre tous

[Roman audio, lu par DanielLuttringer pour litteratureaudio.com]

Le début a été vraiment long! À nouveau, les demoiselles en détresse sont enlevées, à nouveau, elles vont être mariées de force, à nouveau elles doivent être sauvées... Il y a entre le premier et le second livre des répétitions vraiment inutiles et lourdes qui m'ont lassées pendant une bonne moitié du livre.



Après, cela s'améliore un peu et j'ai finalement passé un bon moment lors de cette lecture. Jusqu'à la fin qui est si abrupte qu'on ne la voit pas vraiment arriver. Comme si l'auteur n'avait plus eu d'idée et s'était simplement arrêté là.



La lecture par Daniel Luttringer est de bonne qualité et rend le texte assez vivant. Je vous la recommande.
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Madame Rose - Pierre de Villergle

Georges, un riche parisien qui aime bien résider à l'année dans sa maison de campagne de Maisons-Lafitte, sauve de la noyade deux jeunes enfants alors qu'il canote sur la Seine en compagnie de son chien. Des voisins accourent pour aider au repêchage. Tout le monde emmène les enfants se réchauffer dans la toute proche maison de Madame Rose, une charmante jeune femme… Pierre de Villerglé est un jeune aristocrate riche et oisif qui partage son temps entre les courses de chevaux, les dîners en ville, les soirées à l'Opéra et les nuits devant les tables de jeu. Cette vie monotone l'ennuie tellement qu'il décide de se retirer dans une petite maison qu'il possède sur une de ses propriétés normandes. Il y retrouve quelques amis d'enfance…

Ce recueil est composé de deux nouvelles qui sont autant de portraits de personnages de jeunes gens qui cherchent l'amour et peinent à le trouver. Ils n'en font pas moins preuve de belles qualités de cœur. En cela, Amédée Achard fait œuvre de romancier sentimental et de moraliste un brin désabusé. Très bien écrites, ces deux histoires ne brillent pas par leur originalité et sont même un peu décevantes les amours déçues étant légions en littérature. Les situations et les rapports sociaux ayant beaucoup évolués, tout cela date énormément même s'il est toujours possible de s'y intéresser.


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Madame Rose - Pierre de Villergle

J'ai bien aimé ces deux textes, qui s'apparentent davantage à de mini-romans qu'à de longues nouvelles.



Dans les deux parties, les sentiments et réactions des personnages sont fins, très subtils et bien décrits. On sent bien l'inspiration de l'amour courtois du Moyen-âge, ce qui est original pour l'époque et surprenant de la part de cet auteur.



Je suis perplexe quant à l'apposition de ces deux textes. Certes, ils sont complémentaires dans la mesure où ils décrivent pratiquement la même situation mais d'un différent point de vue. J'aurais préféré alors que cela soit plus franc et que cela raconte la même histoire du point de vue d'un autre personnage, ce qui aurait pu apporter des précisions ou un regard nouveau. Ou alors, parler d'autre chose, d'une situation tout à fait différente. C'est à la fois trop et trop peu pour parfaitement bien fonctionner ensemble, juste assez pour qu'on mélange les deux situations mais pas assez pour qu'elles s'enrichissent l'une-l'autre.



Néanmoins, ces deux textes pris séparément sont très bons, élégants et bien écrits.
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Les Coups d'épée de M. de la Guerche

Enfant, j'avais beaucoup aimé......
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Belle-rose

Ce roman est doublement historique, puisqu'il se passe au 17ème siècle et qu'il est écrit au 19ème siècle. Néanmoins, contrairement à d'autres romans qui concernent respectivement les mêmes époques - typiquement, Alexandre Dumas - je l'ai trouvé assez mal contextualisé et le lecteur a tendance à oublier souvent à quelle époque se passe l'histoire, jusqu'à ce qu'on croise Louis XIV ou d'autres personnages célèbres de ce siècle.



Je l'ai trouvé longuet sur tout le second tiers. Entre l'excitation de la découverte et celle d'être presque à la fin, se passe un looooong moment où le lecteur se sent un peu pris pour un imbécile car les situations similaires se répètent, les personnages ne progressent pas et l'histoire piétine tant qu'on se croirait en train de regarder Lost. Et encore.



Enfin, c'est bien écrit, certes, comme presque toute la littérature du 19ème siècle qui s'est avérée assez bonne pour avoir été conservée jusqu'à nous. Néanmoins, ces longueurs qui puent le remplissage littéraire d'un temps où les auteurs étaient payés "à la ligne" ont vraiment diminué mon plaisir. Dommage...
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La nourrice sur place (illustré)

[Livre audio lu par Ritou pour le site litteratureaudio.com]

J'ai commencé par être offusquée par les clichés transportés par ce petit essai sur le tempérament des nourrices et sur leurs manigances. On ne parle pas d'UNE nourrice, ni même DES nourrices... mais DE LA nourrice, sous-entendu TOUTES les nourrices.



S'il est tout à fait possible que les promiscuités domestiques aient mis à la mode ces comportements (tant des maîtres que des serviteurs), j'ai trouvé néanmoins que le récit manquait de nuance pour être vraiment intéressant. Même s'il est indéniable qu'il est bien écrit.



La lecture par Ritou, quant à elle, est irréprochable.
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Les Coups d'épée de M. de la Guerche

Un roman de cape et d'épées dans la veine des Trois mousquetaires, du Bossu ou des Pardaillan.



Le héros, Armand-Louis de la Guerche, est un jeune homme chevaleresque et fin bretteur. Il aime sa cousine (à la mode de Bretagne) et en est aimé. Hélas ! Bien des obstacles se dressent devant leur amour : la différence de fortune mais, surtout, de grands seigneurs sensibles aux charmes d'Adrienne et fort peu gênés par les scrupules.

Armand-Louis doit escorter sa bien-aimée jusqu'en Suède où l'attend son oncle et tuteur légal. Dans une Europe où la guerre entre Protestants et Catholiques gronde, le voyage risque d'être mouvementé...



Voilà un roman d'aventure on ne peut plus classique. Les personnages et les péripéties qu'ils affrontent sont assez convenues. Il y a bien quelques originalités, comme le fait que nos héros se rendent en Suède, un pays que je n'avais encore jamais croisé dans ce genre de romans (même s'il faut reconnaître que ce cadre est sous-exploité). L'amitié du huguenot Armand-Louis avec son voisin catholique Renaud de Chaufontaine est une autre singularité de cette histoire mais j'ai regretté que cela soit traité uniquement sous l'angle de la blague et que son potentiel dramatique soit ainsi complètement désamorcé.

Autre point intéressant de ce roman : il présente une peinture rapide mais efficace des débuts de la guerre de Trente ans. C'est à peu près tout.



S'il manque d'originalité, ce roman d'aventures manque aussi de tension dramatique. Il semble fait d'une succession d'épisodes relativement indépendants les uns des autres. Armand-Louis doit faire face à plusieurs puissants ennemis mais aucun ne prend l'envergure menaçante du cardinal de Richelieu allié à Milady dans Les Trois mousquetaires, de Fausta dans les Pardaillan ou de Gonzague dans le Bossu. "Plus réussi est le méchant, plus réussi sera le film", disait Hitchcock. C'est vrai aussi pour les livres.



En résumé : une lecture divertissante mais pas aussi passionnante et amusante que les autres titres que j'ai cités. Les personnages, comme les péripéties, ne sortent pas vraiment du lot.



Challenge Romans Jeunesse 2021/2022
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La nourrice sur place (illustré)

La jeune mère parisienne qui préfère les joies du bal, des fêtes et des réceptions préférera toujours confier son rejeton à une nourrice robuste et dotée d'une généreuse poitrine. Celle-ci pourra être une paysanne originaire de Normandie, de Bretagne ou du Bourbonnais. Elle fera merveille et évitera à la Parisienne de s'user la santé à l'ingrate tâche de l'allaitement. L'ennui, c'est qu'elle se rendra très vite compte de son pouvoir de nuisance et saura en jouer largement.

Ce court essai ne date que par le contexte. Il y a longtemps que les nounous ne viennent plus des campagnes françaises… Par contre, l'éternel féminin parfaitement croqué ne changeant pas, les remarques ironiques, acerbes et finement observées, n'ont pas pris une seule ride. Si on y ajoute une langue et un style impeccable, cela devient un vrai plaisir de retrouver le texte corrosif et un tantinet misogyne d'un auteur un peu oublié du XIXème siècle.
Lien : http://lemammouthmatue.skyne..
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Maxence Humbert

Resté longtemps célèbre pour avoir été l'un des pionniers du roman de cape et d'épée, notamment de par son plus fameux roman, « Belle-Rose » (1847), Amédée Achard fut en réalité un écrivain plutôt touche à tout, qui a énormément écrit sur des thématiques très variées et pas forcément très novatrices.

C'est le cas de « Maxence Humbert », roman de moeurs bourgeoises assez typique de la littérature féminine et larmoyante qui se publiait sous le Second Empire, classique histoire de la jeune orpheline qui, à force de détermination et d'adultères, parvient à la respectabilité bourgeoise, mais ressent néanmoins une culpabilité morale.

C'est le cas de la jeune Maxence Humbert - oui, une demoiselle, car Maxence, au XIXème siècle était encore un prénom mixte, ce qu'il a cessé d'être depuis le siècle dernier. Cette jeune fille bourgeoise vit depuis l'enfance dans un relatif dénuement au sein pourtant d'un luxueux manoir. Son père est médecin, mais c'est un humaniste - comprenez, selon les critères de l'époque : un benêt irresponsable. Désireux de soigner en priorité les gens qui en ont le plus besoin, il est rarement payé, et en tire une sorte de fierté. Tout cela fait qu'il n'est pas tellement plus riche que les gens qu'il soigne, et que sa famille doit souvent se restreindre sur l'achat de nourriture et de vêtements.

Un jour, n'écoutant que son bon cœur, le docteur Humbert vient en aide au passager d'un fiacre qui vient de se renverser à quelques centaines de mètres de chez lui. Il désencastre le jeune homme sérieusement blessé, et lui panse ses blessures. Pour une fois, le médecin ne ramène pas un miséreux à son gite, mais un jeune aristocrate, dont la parure luxueuse et les bijoux clinquants font une forte impression sur la petite Maxence. Cet homme est le comte de Bruxshall, il retrouve rapidement ses forces et remercie chaleureusement son bienfaiteur, et, apprenant qu'il est médecin, tient à le payer grassement. Mais le docteur Humbert, n'estimant pas qu'il était en consultation, refuse un argent pourtant bien nécessaire. Alors, voyant que la petite Maxence le regarde avec admiration, le comte de Bruxshall lui offre une de ses bagues, lui faisant promettre que si un jour elle a besoin de lui, elle n'aura qu'à montrer cette bague pour pouvoir se faire reconnaître de lui. Puis, vu qu'il habite Paris, le comte y repart à bord d'un nouveau fiacre...

Quelques années se passent. Le docteur Humbert tombe malade et meurt. Son épouse le suit au bout de quelques mois. Maxence devient orpheline, mais, étant encore mineure, elle ne peut pas hériter, et, de toutes manières, le manoir des Humbert est totalement hypothéqué. Maxence n'ayant aucune autre famille, elle est désormais seule au monde et à la rue. Son expulsion par les huissiers est l'occasion d'un attroupement chagriné des villageois, au milieu desquels une vieille dame aristocrate seule et sans enfants, Mme de Courtheson, passant par hasard, apprend la détresse de la jeune fille et annonce à tous les gens présents qu'elle est émue du malheur de cette enfant, et qu'elle l'engage sur le champ comme camériste.

En vérité, Mme de Courtheson a moins besoin de personnel que d'une jeune fille sur laquelle elle puisse reporter son instinct maternel. C'est donc moins en servante qu'en fille adoptive que Maxence passe confortablement les dernières années de son adolescence aux côtés de Mme de Courtheson. La vieille dame reçoit peu de visites, sinon d'un voisin un peu farfelu, un mathématicien nommé Clavel. Celui-ci, bien que déjà quadragénaire mais toujours célibataire, se sent fortement attiré par Maxence. Mais la jeune fille ne s'intéresse pas à l'amour, elle ne songe qu'à l'argent, cet argent dont l'absence a ruiné son enfance et a failli la mettre à la rue. Déjà, elle a refusé la proposition de mariage d'un jeune garçon de son âge, mais sans fortune. Clavel l'indiffère, mais en tout cas, il n'a pas l'air très riche ni très ambitieux. Néanmoins, Mme de Courtheson se sent décliner et elle incite Maxence à se marier rapidement avec Clavel, faute d'autres postulants. Mme de Courtheson ayant encore de la famille, elle ne pourra léguer sa maison à Maxence. Il faut donc que Maxence se trouve un mari, si elle ne veut pas se retrouver de nouveau à la rue.

Clavel n'est pas bien riche, mais il possède une maison, et malgré son manque d'instruction, Maxence comprend que les mathématiques et la science peuvent rapporter beaucoup d'argent. La mort dans l'âme, elle accepte donc d'épouser Clavel. Le mariage se fait juste à temps, Mme de Courtheson décède quelques jours plus tard.

Dans un premier temps, Maxence est déçue de ce mariage, qui lui apporte un certain confort, mais pas la réussite qu'elle espère. Clavel est un mathématicien brillant, mais c'est un homme qui ne vit que pour trouver des formules et des théories, il n'a aucunement l'intention de s'enrichir avec la discipline qui le passionne. Lasse, Maxence se laisse faire un enfant, une ravissante petite fille, qui éveille ses instincts maternels, mais aussi paradoxalement, décuple son ambition. Puisque son mari est souvent dans sa chambre à gratter du papier, elle décide d'acheter une maison secondaire à Paris, et d'y devenir salonnière. Les premiers succès de son mari comme chercheur en mathématiques lui apportent quelques relations précieuses, qui se chargent de faire connaître les soirées mondaines de Mme Clavel. Un jour, un homme s'y présente par curiosité, et ce n'est autre que le comte de Bruxshall, un peu empâté, un peu vieilli, mais toujours beau et élégant. Maxence se fait reconnaître de lui grâce à la bague qu'elle a conservé. Elle apprend qu'il est devenu un redoutable homme d'affaires. Elle-même lui explique qu'elle ne s'y entend pas si mal, et possède un mari mathématicien dont il faudrait, à son avis, optimiser le potentiel commercial des applications possibles de ses travaux. Mais pour cela, il faudrait des capitaux, car l'activité de salonnière de Maxence engloutit une bonne part des revenus de son foyer, déjà un peu dans le rouge suite à l'achat de la maison sur Paris. Maxence et le comte vont donc s'associer pour exploiter le mathématicien naïf, et au passage, vont s'abandonner à un adultère complice dont les conséquences seront tragiques...

« Maxence Humbert » est donc un roman d'amour et d'argent, à la morale assez élastique, tant l'appât du gain y est présenté comme une corruption morale, mais à laquelle on n'échappe qu'en ayant précisément de l'argent dès la naissance. Il faut juste éviter d'être pauvre, parce que cela vous oblige à faire des actions malhonnêtes pour devenir aussi riche que les gens qui ont hérité de leur fortune. Au final, il s'agit moins de stigmatiser l'adultère et la cupidité que la pauvreté et la misère, comme vivier de mauvaises intentions. Curieuse philosophie, empreinte néanmoins d'un certain déterminisme protestant.

Durant la majeure partie du roman, Amédée Achard surprend par un réalisme quelque peu monotone mais bien agencé, qui se veut très immersif. On suit véritablement avec intérêt les stratégies de Maxence Humbert pour échapper à son destin, stratégies qui n'ont rien d'excessif ou de feuilletonesque, mais qui s'appuient sur une certaine idée du libéralisme qui fait encore autorité de nos jours.

Hélas, vers la fin, comme si soudain ses aventures épiques lui manquaient, Amédée Achard fait se télescoper des attaques cérébrales, des crises de paniques et même un empoisonnement, dans une succession de scènes rocambolesques dignes d'un Ponson du Terrail. Certes, moralement, il fallait bien que les actions de Maxence et du comte de Bruxshall soient punies, mais elle le sont avec trop d'hystérie, plongeant dans des afflictions et des hontes paranoïaques, et donc de manière peu crédible, des personnages froids, égoïstes ou calculateurs, que l'on auraît cru plus maîtres d'eux-mêmes face à la révélation publique, pourtant sans grandes conséquences matérielles, d'un adultère à peine dissimulé.

Tout cela fait que « Maxence Humbert » s'effondre manifestement en fin de parcours, mais malgré cela, ce roman conserve un intérêt historique quasi-documentaire, puisqu'il aborde de manière très variée et très exhaustive les rapports complexes entre l'amour et l'argent au milieu du XIXème siècle, avec une écriture soignée et précise, et une relative impudeur que l'on ne trouvait que rarement dans ce type de littérature. Ordinaire dans son propos, mais assez atypique dans sa forme de par ce côté réaliste et amoral, « Maxence Humbert » fera passer un bon moment à tout lecteur curieux des mentalités sous l'Ancien Régime.
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