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Critiques de Anne Fakhouri (165)
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American Fays

Prêt à suivre un buddy movie façon mafia à travers un Chicago fayrique des années 1920 ? C’est ce que nous proposent Anne Fakhouri et Xavier Dollo (alias évidemment Thomas Geha) dans American Fays où la violence le dispute à la féérie attachante, dans une ambiance drôlement et férocement décalée.



1925, Chicago est non seulement en proie à la prohibition, mais elle est aussi le théâtre de nombreux règlements de compte autour de la question des fays qui pullulent malgré l’entrée des États-Unis dans l’ère industrielle. Les No Ears Four, le plus souvent employés par Al Capone en personne, sont alors d’authentiques chasseurs de fays, ces êtres doués d’une essence non humaine, ces pixies, sirènes, nymphes et autres trolls et faunes. Tout le monde lâche sa Thompson le temps du tour de table : d’abord, présentons le patron du gang, Old Odd, enfayrisé contre son gré et donc sujet à d’incroyables crises d’asthme dès qu’il approche d’un fay (détecteur théoriquement infaillible !) ; puis vient l’assassin de service, Jack The Crap, mystérieux s’il en est, mais tout aussi efficace ; le petit chouchou de beaucoup sera sûrement le bellâtre d’origine française, un peu rêveur mais calculateur, Vincent « Bixente » Demons, alias Bix ; enfin, le bien nommé Bulldog joue, lui, les gros bras avec sa taille de géant et ses quelques réflexes de benêt, mais rassurons-nous tout de suite, son rôle sera parfois plus conséquent que d’uniquement défoncer des gueules et des portes. Quant à elles, les femmes ne sont pas totalement mises de côté, heureusement, avec Jude, la truculente tenancière d’un speakeasie (mi-bordel, mi-bar de quartier), ainsi que Rachel, le love-interest de cette aventure. Clairement, il y a du monde à qui s’attacher.

L’ambiance étant posée, le style vaut lui aussi son pesant de gnôle prohibée. Dès la scène d’introduction, le ton est donné. Un leprechaun s’est fait fay-monnayeur et le gang des No Ears Four l’a pris la main dans le sac de faux-billets. Ça ne rigole pas, mais on rigole. Les situations se veulent drôles, les réparties caustiques, les dialogues sont volontairement écrits façon Audiard et on s’attendrait même à croiser un « les cons, ça ose tout, c’est même à ça qu’on les reconnaît ! » tellement certaines répliques sont bien senties. Du point de vue de l’action, c’est tout pareil : ça flingue, ça poignarde et ça dépouille à tour de bras, mais c’est pour la bonne cause, alors on prend ! On prend même d’autant plus que des allusions en début de roman et en annexe finale lancent des pistes concernant un éventuel crossover avec un autre opus de fantasy des années 1930, ou du moins une sorte d’« univers partagé made in Critic ». À méditer, car ce roman écrit à quatre mains par un duo d’auteurs amis depuis plusieurs années prend ses racines dans une agréable nouvelle d’Anne Fakhouri, « Du rififi entre les oreilles » (paru d’abord dans l’anthologie Elfes et Assassins), qui était du même acabit.

Au cours de l’histoire d’American Fays, le lecteur pourra trouver l’enchaînement picaresque des retournements de situation un peu convenu et répétitif (caricaturons en un trio enquête – indice – action). De plus, la scène finale est plutôt longue au point d’étirer le dénouement d’une façon bizarre. Cela doit-il gâcher l’ensemble de la lecture ? Évidemment non, car l’immersion dans le monde des fays, des êtres féériques est réussie. Attendez-vous à croiser du vocabulaire fayrique/féérique par pelletées, car côté bestiaire, il y a de quoi faire ! Ce n’est pas pour rien si les auteurs remercient, entre autres nombreuses inspirations, les écrits de Pierre Dubois, elficologue de référence. Je ne suis habituellement pas fan de cette partie de la fantasy, toutefois cela fonctionne bien mieux quand on sent la féérie des contes s’immiscer dans le monde contemporain, certes cela passe ici par des rêveries, mais l’aspect du récit évoluant, le côté conte me va tout de suite mieux.



Les éditions Critic soignent donc le volume qui marque leurs cinq ans d’existence : American Fays bénéficie d’une première édition soignée avec reliure toilée, couverture cartonnée et titre imprimé à chaud, ainsi que d’avant-premières, notamment aux Utopiales de Nantes 2014. Le duo Anne Fakhouri – Xavier Dollo est réjouissant à plus d’un titre et mérite qu’on s’y intéresse.



[Davantage de contenus sur http://bibliocosme.wordpress.com/2014/11/10/american-fays/ ]



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Ce que chuchotait l'eau

Nouvelle déjà publiée dans l’anthologie Et d'Avalon à Camelot, Ce que chuchotait l’eau, écrite par Anne Fakhouri, a été choisie par L’Atalante pour clore sa Décade de l’Imaginaire largement consacrée au format numérique.



Avec Ce que chuchotait l’eau, Anne Fakhouri reprend à son compte ce qui fait l’essence de chaque aventure des chevaliers de la Table Ronde : le lien chevaleresque en péril, l’amour au tournant et l’enjeu tant glorieux que personnel que peut constituer une créature fantastique. Keu, frère du roi Arthur, est envoyé en mission pour apaiser une région éloignée souffrant de désordres climatiques. Ce qu’il découvre est ce que l’eau lui chuchote. Entre ses souvenirs d’enfance malheureuse et ses regrets liés à son statut, Keu va devoir affronter dans tous les sens du terme cette aventure.

Anne Fakhouri manie parfaitement les poncifs de cette littérature de genre, tout en titillant le lecteur là où ça plaît. Notamment, elle égratigne comme il convient Guenièvre alors, déjà, ça me plaît. Je suis un lecteur facile de ce point de vue-là et j’avoue que me replonger dans un univers arthurien me fait toujours autant plaisir. Cette fantasy-là ne se tarira jamais et c’est tant mieux.



Ainsi s’achève donc la Décade de l’Imaginaire de L’Atalante. Un bilan mitigé au niveau qualité, mais un bilan prometteur sur mes futures lectures, car il est clair qu’il faudra que je me lance dans du Dunyach, du Fakhouri, du Bordage, du Pratchett ou du Moorcock assez prochainement, tout comme il va falloir commencer bon nombre d’anthologies de fantasy qui s’offrent à moi. Ce ne sont pas des préoccupations nouvelles, mais il va quand même falloir que je m’y mette rapidement !



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American Fays

Qui croit aux fées ici ? Il parait que si on ferme les yeux, qu'on se concentre bien, et qu'on répete 3 fois "Ayoum da Ayoum Dé", une pincée de perlimpinpin dans la main droite, elles peuvent apparaitre. Pour ma part, ca n'a jamais marché... et pour vous ?



Venez, venez mes amis ! Faytes vous plaisir. C'est fay ? Ok !



Laissez vous transporter dans un univers fantasmagorique incroyable et improbable de féerie, de truands, de fays, d'êtres extraordinaires, de prohibition et de Golem destructeur !

Bienvenue en l'année 1925, à Chicago.

Al Capone et ses sbires vous attendent de pied ferme pour vous passer à la sulfateuse si votre gueule ne leur revient pas.

Les fays sont là : Vouivres, pixies, dryades, sirènes, fays du logis... En voilà du beau monde.



Les 4 anti-heros, gangsters au grand cœur et hommes de mains de Capone sont croquignoles et attachants. De vraies gueules d'amour. Et ils ne vont pas avoir une minute de répit tant les emmerdes vont s'abattre sur leurs têtes.

Quand le sort n'en fays qu'à sa tête...

Nos quatre mousquetaires du crime vont avoir fort à fayre pour se dépêtrer de leurs ennuis et vont transporter le lecteur dans un univers atypique et bien pensé.



Ajouter l'univers des fées au Chicago de 1925 est une idée sympa et originale qui aurait pu donner un bouquin grandiose. American Fays au pitch énorme choisit malheureusement de rester dans la petite lorgnette et la petite histoire. Il y avait pourtant de quoi faire avec cette richesse créative proposée par les deux auteurs. Ça appelle forcement à une suite pour développer ce joli petit monde.



Le livre se lit sans déplaisir, il est même drôle, mais il manque un peu de merveilleux justement.

L'écriture est touffue avec peu de fioritures étonnamment. L'ensemble manque un peu de souffle et de lyrisme.

C'est un univers qui doit s'installer. Qui ne se livre pas facilement. Mais qui a un goût de reviens-y.

Un joli conte de noël un peu cabossé...



Tournez la page lorsque vous entendrez la fée clochette tinter comme ceci. Cling cling !

3,5/5
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American Fays

En Résumé : J’ai passé un excellent moment de lecture avec ce roman qui offre une histoire très polar se révélant dense, entrainante au rythme tendu et sans temps morts. Le lecteur se retrouve à tourner les pages avec plaisir et envie tant l’ensemble est maîtrisé, offrant son lot de surprises et de retournements de situations. Je ferai juste une petite remarque concernant la conclusion qui, je trouve, utilise un peu trop l’apparition de personnages surprises, ralentissant ainsi les révélations, mais rien de non plus trop gênant et qui ne l’empêche pas de se révéler explosive. L’univers ne manque pas d’attrait se révélant clairement réussi, nous offrant un Chicago des années 20 entre ombre et lumière, loin de tout idéal et qui donne envie d’être découvert avec ses nombreuses références, la présence des fays, ou encore ce léger vernis Jazz qui lui offre ainsi une petite touche musicale. Un univers qui n’oublie pas non plus de mettre en avant de nombreuses réflexions intéressantes. Les personnages sont entrainants, denses et attachants, bien porté aussi par une gouaille des plus mordante. Le style à quatre mains se révèle être efficace et percutant, nous plongeant facilement das cette histoire. Un excellent roman de Fantasy Urbaine et je retrouverai avec plaisir les No Ears Fours si jamais les auteurs décident d’écrire une suite.





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Du rififi entre les oreilles

La Décade de l’Imaginaire 2014 prend ses derniers tournants et c’est une nouvelliste confirmée qui s’annonce, puisque c’est Anne Fakhouri qui propose Du rififi entre les oreilles.



D’ores et déjà, cette nouvelle a d’abord été publiée dans l’anthologie des Imaginales 2013, Elfes et Assassins, chez les éditions Mnémos et, en effet, nous y croisons des elfes et des assassins, cela tombe sous le sens. Nous suivons les No-Ears Four, bande pathétique mais efficace, soumise aux ordres du lointain Capone dans un Chicago ressemblant fort à nos années 1920, mais incorporée dans un monde féérique où les elfes commencent à se multiplier, sans oublier bien sûr d’éventuels trolls, nymphes ou lutins peu évoqués ici. Avec leur bêtise chronique et leurs airs patibulaires mais presque, ces malfrats de bas étage donnent tout loisir à Anne Fakhouri pour développer un récit rempli de sous-entendus bien trouvés.

L’auteur applique le dicton d’un des personnages, « Les mots sont des armes qui laissent des traces invisibles à l’œil nu » pour opposer la force de frappe de ces assassins à la petite semaine à un elfe européen qu’ils rencontrent pendant une de leurs affaires à régler. Les uns vivent au jour le jour la prohibition dans un contexte de misère sociale où tout est possible, l’autre est disciple de Freud et pratique à loisir la régression temporelle sur les personnes qu’il côtoie. Cette rencontre bien trouvée dans un monde original est renforcée par les multiples attaques proférées contre la psychologie de comptoir ou de canapé et contre la virilité du chef de bande.



Originale et drolatique, cette nouvelle d’Anne Fakhouri vaut son pesant d’intérêts, d’autant plus qu’elle annonce la sortie d’un roman dans ce même univers pour l’automne 2014. Justement, Du rififi entre les oreilles, gratuit en numérique, est accompagné de deux ouvrages de la même auteur : Narcogenèse à 4,99€ et sa suite directe, Le Clairvoyage à 2,99€.

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Je crois que chevalerie y sera

Pour mettre en avant les auteurs qu’ils publient depuis un certain temps, les éditions L’Atalante profitent de leur opération annuelle de la Décade de l’Imaginaire pour proposer des nouvelles numériques gratuites, pas forcément issues de leur propre catalogue. Ainsi, Je crois que chevalerie y sera est une bonne façon d’aborder l’écriture d’Anne Fakhouri, même si cette nouvelle a d’abord été publiée dans l’anthologie Lancelot de chez les éditions ActuSF.



Je crois que chevalerie y sera est une nouvelle qui, comme son titre l’indique, met en lumière la chevalerie dans toute sa splendeur ainsi que dans ses travers bien connus, thème qu'Anne Fakhouri a aussi fouillé dans une nouvelle comme Ce que chuchotait l'eau, par exemple. Cela se lit de manière très fluide, car c’est écrit à la fois dans un vocabulaire simple et dans une forme qui imite relativement bien les récits de la tradition issue de Chrétien de Troyes – le lecteur peut en ressentir les rythmes et les implicites. Bien sûr, nous avons le voyage, la quête qui le justifie et maintient sa cohérence, et enfin la découverte qui permet de ne pas rentrer bredouille. Nous suivons avant tout Gauvain sur la piste de Lancelot, mais nous croisons en chemin Morgaine, Bohort et consorts, avec peut-être bien même une métaphore de Perceval à peine voilée.

Eu égard au thème de l’anthologie dans laquelle cette nouvelle a d’abord été publiée, l’auteur y théorise quelque peu les différentes versions de Lancelot : preux chevalier, pur chrétien, ami de référence, mais aussi volage, fuyard, solitaire, etc. Sans expliquer vraiment ce qu’est cette « Brume » qui permet tout cela, Anne Fakhouri utilise cet artifice pour faire varier la personnalité du Lancelot de base à travers le temps, l’espace et l’esprit. La mise en abîme finale est sympathique, mais la résolution fait un peu trop réglée à la va-vite, alors que l’idée du personnage prenant vie aurait pu être plus porteuse.



Dans tous les cas, l’auteur cultive, à mon humble avis, le sensible, pas ce que nous pouvons sentir et toucher, mais plutôt ce que nous pouvons sentir et ressentir. Et que ce soit du point de vue de l’enfant ou du point de vue de l’amour sous toutes ses formes, Anne Fakhouri le fait très bien.



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Et d'Avalon à Camelot

Second opus faisait suite à l'anthologie « De Brocéliande en Avalon » paru en 2008, « Et d'Avalon à Camelot » regroupe les textes de dix auteurs de l'imaginaire, pour la plupart moins célèbres que leurs prédécesseurs mais incontestablement aussi talentueux. L'objectif reste le même : exploiter la matière des mythes arthuriens afin d'en proposer une nouvelle interprétation, et ce dans n'importe quel registre : épique, humoristique, tragique... La contrainte consistant à confronter ces héros légendaires à notre monde contemporain a cependant ici disparu, permettant ainsi une plus grande liberté aux auteurs qui s'en donnent à cœur joie pour le plus grand plaisir du lecteur. Outre davantage de variété dans le choix des décors et des époques, on constate aussi une plus grande diversité dans le choix des protagonistes. Si le premier volume faisait essentiellement la part belle à la triade magique constituée de Morgane, Viviane et Merlin au dépend des chevaliers de la Table Ronde, l'erreur est ici corrigée puisque plusieurs nouvelles mettent en scène aussi bien Arthur que Key, Perceval, Gauvain ou Galaad, sans pour autant négliger les figures féminines.



Comme toujours certains textes se lisent et s'oublient aussitôt tandis que d'autres laissent une empreinte plus marquée. Parmi les nouvelles les plus réussies figure à mon sens « Ce que chuchotait l'eau » d'Anne Fakhouri qui nous livre ici une aventure épique mettant en scène le chevalier Key aux prises avec une bien mystérieuse créature dans une contrée l'étant tout autant. Estelle Valls de Gomis opte pour sa part pour l'humour avec « L'histoire du Haut-Portail », un texte impliquant un Gauvain coincé au XIXe siècle et confronté aux créatures de Bram Stocker. Sara Doke réussit également son coup avec « Fata Morgana », nouvelle ne manquant pas d'originalité consacrée aux relations complexes entre les membres de la famille proche d'Arthur, le tout à notre époque et dans l'univers médical. Enfin, N. Cluzeau nous offre avec « Une légende est née » une belle conclusion à l'ouvrage sous la forme d'un hommage au personnage de Guenièvre qui s'était jusqu'alors fait discret et que l'on retrouve ici en quête de rédemption.



« Et d'Avalon à Camelot » se révèle au final une excellente anthologie, bien meilleure que celle qui l'a précédée, nous offrant des textes très variés mais tous de qualité. Une seule envie une fois la lecture achevée : se plonger à nouveau dans ces légendes arthuriennes dont on ne se lasse jamais et auxquelles Lucie Chenu rend ici un bel hommage.
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Lancelot

Lancelot du Lac est un de ces personnages de légende dont on connaît tous aujourd'hui et le nom et l'histoire. Fils du roi Ban élevé par la Dame du lac et appelé à devenir le meilleur chevalier de la Table ronde, proche compagnon d'Arthur qui échouera à s'emparer du Graal et s'éprendra de la reine, participant ainsi à la chute de Camelot, Lancelot est un personnage atypique, bourré de contradictions, sur lequel la littérature ne se lasse pas depuis des siècles de s'interroger. C'est à l'occasion du festival Zone Franche qui se déroule à Bagneux depuis maintenant cinq ans que les éditions ActuSF ont décidé de rendre hommage à ce personnage phare de la légende arthurienne par le biais d'une anthologie réunissant les textes d'auteurs français réputés dans le domaine des littératures de l'imaginaire, qu'il s'agisse de Fabien Clavel, Anne Fakhouri, Lionel Davoust ou encore Jeanne A. Debats. Des valeurs sûres, donc, qui nous font sans surprise don de nouvelles toutes plutôt sympathiques et qui feront passer aux lecteurs amateurs des littératures de l'imaginaire (et aux fans de la légende arthurienne en particulier) un bon moment de lecture.



Avant de m’attarder plus en détail sur quelques unes des nouvelles présentes au sommaire, je me permettais cela dit de soulever un léger bémol, notamment en ce qui concerne le contexte choisi par les différents auteurs qui, pour la plupart, situent l'action dans un royaume sur le déclin, pourrissant, voire déjà au-delà de toute salvation. Un choix compréhensible, même s'il aurait, à mon humble avis, pu être intéressant d'également découvrir le personnage à l'apogée de sa gloire, et non pas seulement au plus bas, rejeté et haï de tous. De même, j'ai souvent eu l'impression de toujours avoir plus ou moins à faire au même Lancelot : droit, voire parfois un peu trop rigide, preux, pieux, désespéré d'avoir échoué et trahi... Même si ce portrait est bien évidemment le reflet des nombreux écrits consacrés à la légende des chevaliers de la Table ronde de part les siècles, il aurait cela dit une fois encore été intéressant que certains des auteurs se détachent un peu plus du mythe d'origine pour donner vie à un Lancelot plus original, plus surprenant (je pense à titre d'exemple au Lancelot de « La saga du roi Arthur » de Bernard Cornwell qui dépeint le chevalier comme un véritable lâche, habile à tromper son monde et bien éloigné de la légende).



Parmi les nouvelles les plus réussies, quatre se distinguent particulièrement à mon goût : les deux premières mettent en scène Lancelot aux prises avec la légende et l'inéluctabilité de son destin, les deux suivantes prennent place dans un cadre plus contemporain et sont écrites dans un style beaucoup plus incisif et sur un ton volontiers humoristique. Avec « Le meilleur d'entre eux », Lionel Davoust amorce avec succès une véritable réflexion sur l'importance du personnage de Lancelot dans la légende. Légende dont il questionnait déjà l'essence même dans une autre nouvelle, « L'île close », dans laquelle les personnages du mythe ne cessaient de reproduire encore et encore les mêmes actes, sans pouvoir échapper au rôle que leur avait attribuée l'histoire. La nouvelle nous offre également un bel aperçu de l'amour unissant Lancelot et Guenièvre, tout en réussissant à ne pas laisser Arthur de côté. Pari tout aussi réussi pour Armand Cabasson et sa nouvelle « Le vœu d'oubli » dans laquelle on découvre un Lancelot amnésique car ayant fait le choix d'effacer sa mémoire afin de ne pas commettre l'irréparable et trahir son roi. L'auteur insiste là encore sur l'impossibilité pour le chevalier, et au-delà de tous les autres figures de la légende, d'échapper à son destin.



Les deux textes qui clôturent l'anthologie baignent dans une ambiance radicalement différente du reste de l'ouvrage et figurent à mon sens parmi les plus abouties. C'est notamment le cas du « Lance » de Jeanne A. Debats qui reprend ici le héros de son précédent roman « Métaphysique du vampire ». On retrouve donc Navarre, vampire au service du Vatican dans les années 1930, à qui on confie cette fois la mission d'aller tirer Lancelot de son sommeil éternel sur l'île d'Avalon afin de lui faire affronter une menace redoutable réveillée par un certain Hitler. Un texte bourré d'humour qui déconstruit le mythe du chevalier parfait et met en scène un protagoniste particulièrement attachant (je vous conseille d'ailleurs les autres nouvelles de l'auteur consacrée à Navarre et parue dans diverses autres anthologies, le personnage vaut le détours...). Toute aussi déjantée, la nouvelle de Karim Berrouka (« Pourquoi dans les grands bois, aimé-je à m'égarer ? ») met cette fois en cette une équipe de quatre policiers à qui l'on confie une enquête pour meurtre et qui vont finalement se retrouver en pleine forêt à assister à la lutte sans merci que se livrent depuis des siècles les chevaliers Lancelot et Gauvain.



Une anthologie divertissante rendant un bel hommage à ce personnage ambiguë de la légende arthurienne par le biais de certains des auteurs les plus en vogue au sein des littératures de l'imaginaire. A ceux qui seraient passionnés par le sujet je conseillerais également les excellents « De Brocéliande en Avalon » et d'« Avalon à Camelot », deux autres anthologies dirigées par Lucie Chenu a qui on doit d'ailleurs la postface de ce sympathique « Lancelot ».
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Elfes et Assassins

Cinquième anthologie parue dans le cadre du festival des Imaginales d'Epinal, « Elfes et assassins » nous propose de découvrir les textes de treize auteurs français, tous très réputés dans le monde des littératures de l'imaginaire, de Pierre Bordage à Fabien Clavel en passant par Xavier Mauméjean ou Fabrice Colin, qui se sont penchés sur ces deux personnages extrêmement ambiguës que tout lecteur de fantasy est amené à rencontrer de façon récurrente. Tout comme le précédent opus, « Reines et dragons », on retrouve Sylvie Miller et Lionel Davoust en tant que directeurs de publication, un duo qui fonctionne décidément remarquablement bien. La qualité est en effet au rendez-vous, et si certains textes se révèlent évidement plus réussis et plus marquants que d'autres, nous n'en avons pas moins affaire à un ouvrage très divertissant et jamais monotone ou répétitif. On retrouve ainsi avec plaisir dans quelque uns de ces textes l'univers de certains auteurs comme le Vieux Royaume de Jean-Philippe Jaworski ou encore la ville enchantée de Panam de Raphaël Albert, tandis que d'autres optent pour un cadre plus contemporain, uchronique, historique, ou encore fantastique.



Sans grande surprise, la nouvelle la plus aboutie de l'anthologie reste en ce qui me concerne celle de Jean-Philippe Jaworski (« Le Sentiment du fer ») dont le talent n'est plus à prouver mais qui parvient encore et toujours à surprendre. On y retrouve la ville de Ciudalia, décor de son premier roman « Gagner la guerre », dans laquelle on suit les péripéties d'un Chuchoteur (célèbre guilde d'assassins) chargé d'une bien curieuse et périlleuse mission sur fond de complots politiques. Du rythme, un style percutant, des retournements de situation inattendus...., les ingrédients restent les mêmes et encore une fois cela fonctionne. Parmi les textes les plus mémorables figurent également ceux d'Anne Dugüel, également connue sous le pseudonyme Gudule, (« Le sourire de Louise »), histoire glaçante d'un amour fusionnel entre une mère et sa fille qui tourne à la tragédie, ou encore de Jeanne A. Debats (« Eschatologie d'un vampire ») qui possède décidément un style très direct, bourré d'humour et d'ironie, qu'elle met au service d'une histoire originale et d'un personnage haut-en-couleur. D'autres nouvelles méritent également le détour, que ce soit pour la poésie et la profonde mélancolie qu'ils dégagent (« Sans douleur » de Fabrice Colin et « Grise neige » de Johan Héliot), ou au contraire pour leur humour ravageur (« Du rififi entre les oreilles » d'Anne Fakhouri).



Que ce soit par le biais de la tragédie, de l'horreur, de l'épique ou de l'humour, les treize nouvelles proposées dans cette anthologie ne manqueront pas de ravir les amateurs de fantasy qui auront ainsi le plaisir de se plonger dans les textes inédits de ces grands auteurs qui auront été particulièrement inspirés par le thème de cette année 2013. Voilà un bien bel hommage rendu à ces deux figures particulièrement représentatives du genre que sont l'elfe et l'assassin.
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Lancelot

En résumé : J’ai passé un bon moment de lecture avec cette anthologie qui nous propose neuf textes différents sur Lancelot, un personnage haut combien complexe et compliqué. Qu’il se retrouve dans un univers d’époque où un univers contemporain, dans l’ensemble ces neufs nouvelles se sont révélées vraiment intéressantes et efficaces même si elles ne m’ont pas toutes accrochées de la même façon. Entre humour, fantasy, onirisme ou magie chaque texte apporte sa propre pierre à la légende ainsi qu’au personnage et mérite d’être découvert pour peu qu’on s’intéresse à Lancelot. Je suis content d’avoir pu découvrir cette anthologie qui m’a aussi permis de découvrir des auteurs dont je n’avais encore lu aucun texte.





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American Fays

Ce que j’ai ressenti:…Un fayrique plaisir de lecture!!!



« La vie pulsait à Chicago, la vie bruissait. A la lumière comme dans l’ombre. »



Je ne crois pas avoir lu un roman de ce genre, aussi loufoque et féérique! Il a vraiment quelque chose de particulier, il a une force, ce roman, la force de l’imaginaire! Une fois, que le décor est posé, on est emporté entre douce folie et mafia infiltrée, et c’est ce mélange qui détonne, pour notre plus grand plaisir!



J’ai adoré retrouvé tout l’univers elfique, croiser au détour d’une rue, des Fays vengeresses, des Pixies en mode tendus, des Leprechauns en trafiquants de monnaie, des Faunes énervés et bien sur Mab, Reine de ce Peuple, aux pouvoirs extraordinaires. J’ai vraiment accrochée à cette touche de férie qui donne un coté décalé et magique à cette histoire mais, plus que tout, j’ai trouvé un vrai travail d’investissement,de vocabulaire et de champs lexicaux propres à cet univers, qui donne de jolis jeux de mots! Les auteurs s’en sont donné à cœur joie pour intégrer le fantastique dans ce Chicago revisité, et la sauce prend, car ils y croient et nous le retransmette à merveille!



Mais nous n’avons pas seulement, la douceur des contes de fays, dans ce roman, mais bien toute la violence des hommes, et ce qui se faisait de pire à cette époque dans un Chicago en pleine Prohibition: racisme, misogynie, meurtres, dessous de tables, stratégies politiques, corruption…Autant vous assurer, que l’ennui n’est pas de ses pages, ni pour le lecteur, ni pour la police!!!!



En bref, j’ai aimé ce mélange atypique, je me suis laissée séduire autant par la féérie que par cette ville riche en histoire. Le petit coté cinématographique de certaines scènes et les différentes références qui lui rendent hommage, l’originalité de ce mix rend l’ensemble, complètement addictif! Un feu d’artifice d’émotions, de magie et de clins d’œil dosés avec soin, en font pour moi un coup de cœur!



Meilleurs moments du livre:

•A un moment, nos quatre compères se retrouvent acteurs dans des contes! J’ai adoré cette revisite! Elle est originale et plein de pep’s!

•Avant même d’ouvrir ses pages, je crois que le voyage commence avec la couverture. Non seulement, elle est magnifique, mais en fait, c’est le livre-objet qui est une véritable invitation à se caler, et à découvrir ses mystères. Bravo à la maison d’éditions Critic, qui nous offre un beau cadeau, un livre de qualité autant en intérieur que dans son apparence !


Lien : https://fairystelphique.word..
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Reines et Dragons

Après trois éditions des Imaginales d’Épinal où l’anthologie était dirigée par l’organisatrice du festival, Stéphanie Nicot, celle-ci laisse la main à d’autres auteurs et charge, en 2012, le prolifique duo créateur Sylvie Miller – Lionel Davoust (et très bons nouvellistes) de faire perdurer le regroupement thématique de nouvelles qui paraît chaque année en mai. Là où Stéphanie Nicot dirigeait des anthologies titrées par des associations logiques comme « Rois et Capitaines », Sylvie Miller et Lionel Davoust ouvrent un arc d’anthologies qui vont associer une figure forte de la fantasy avec une créature fantastique. Ainsi, Reines et Dragons se place d’emblée dans cette optique très intéressante à lire comme à écrire.



[Davantage de contenus (éléments connexes, images, critique plus longue) sur ]

Comme ces douze nouvelles ont été lues au cours d’un Challenge courant sur une année entière, chacune d’elles a son propre petit paragraphe d’analyse.



Parmi les auteurs conviés à l’anthologie Reines et Dragons, il y en a peu que je ne connaissais pas d’avance ; Chantal Robillard fait partie du lot. Ecrivain, conservateur en bibliothèque et poète, elle semble avoir de multiples facettes qu’il est forcément difficile de cerner en peu de pages. Dans Le Dit du Drégonjon et de son Elfrie, elle livre une très courte nouvelle particulièrement parlée et phrasée. Ce n’est pas pour rien que la préface de Sylvie Miller et Lionel Davoust, les deux anthologistes, on nous conseille de la lire à haute voix. Ils l’ont sûrement choisi comme ouverture de leur ouvrage parce qu’elle est accrocheuse justement par cet aspect-ci et par le fait d’être très court.

Avec l’incessante complainte « Drégonjon, Drégonjon, viens nous secourir ! », Chantal Robillard prend le risque de lasser le lecteur dès le départ en ressassant cette réplique. Cela prend heureusement place dans un contexte simple à saisir : de jeunes elfes invoquent Drégonjon pour qu’elles soient sauvées de leur situation délétère. Je vous laisserai juger de la thématique choisie qui, bien que désormais convenue, a toujours besoin d’être remise en avant au vu d’un certain patriarcat latent et traditionnel. Pour autant, même si l’orientation de l’anthologie est totalement respectée avec le dragon protecteur et la reine qui s’élève, je ne cesse de me questionner sur l’intérêt de quitter un joug pour un autre, de rejeter un enfermement pour une relation peut-être trop peu définie en fin de nouvelle...



Thomas Geha, alias Xavier Dollo, est déjà un auteur que je connais davantage. La saga Alone, le diptyque du Sabre de Sang ou bien American Fays en collaboration avec Anne Fakhouri sont autant d’ouvrages très appréciés à chaque critique, le tout étant parfaitement complété par de nombreuses nouvelles dans tous les genres de l’imaginaire.

Celle qu’il a proposée à Sylvie Miller et Lionel Davoust, « Chuchoteurs du Dragon », se déroule dans un monde médiéval de fantasy, le Royaume de l’Esflamme du Dragon, où les castes sont bien segmentées et les secrets bien gardés. Nous découvrons rapidement Hiodes, reine et héroïne, dans les bras de son amant Malwenn, guerrier d’élite. Leur amour va se retrouver confronté aux rêves par lesquels le fameux Dragon se lie aux monarques qu'il a choisis.

C’est un texte relativement classique que nous livre Thomas Geha, dans le microcosme de la fantasy médiévale sur le thème « Reines et Dragons », mais efficace. Il est toujours compliqué de faire ressentir l’onirisme de certaines situations et la façon dont il le fait rapproche plutôt cette œuvre de l’univers du Sabre de sang, avant tout, avec une magie induite par les forces même qui anime son monde, qu’elles soient encore vivaces ou déliquescentes. C’est donc la trame de fond qui va surtout rester dans l’esprit du lecteur, après avoir terminé « Chuchoteurs du Dragon » : le choix des souverains par une créature fantastique au statut compliqué, le passage du titre de Chuchoteur à celui de Lié, etc.



Au tour d’Adrien Tomas, avec « Ophëa », de nous donner l’envie de découvrir sa vision des Reines et des Dragons. Il y dévoile une vision classique certes, sûrement à l’image de ses premiers romans (La Geste du Sixième Royaume ; La Maison des Mages), mais particulièrement divertissante et qui révèle, à la toute fin, un sel bien placé.

Ophëa est la jeune reine d’un royaume ayant récemment perdu son souverain, le chevaleresque Naïel, mort au combat face à la « Bête » qui terrorise les alentours. Forcée de concéder du pouvoir, Ophëa doit se résoudre, telle Pénélope dans l’Odyssée, à épouser, pour le bien du royaume, celui qui réussira à vaincre le Dragon (car c’en est un, et de belle taille) et à lui rapporter sa tête. Pour venger le souverain précédent, pour acquérir encore plus de pouvoir, pour la gloire, pour l’honneur, pour l’amour même, les seigneurs du plus puissant au plus humble défilent devant la créature pour l’affronter plus ou moins courageusement. Outre un classicisme encouragé par le thème de départ, certains pourraient tiquer sur un léger abus des comparaisons au premier abord, mais finalement le récit prend le pas sur le reste et on chevauche l’intrigue comme ces chevaliers leur monture.

La nouvelle d’Adrien Tomas suit raisonnablement une structure en trois parties cohérentes : l’exposition (une situation mal barrée qui pose un objectif clair, net et précis), le déroulement de l’action (si son état d’esprit était morne, le lecteur reprend du baume au cœur, tandis que si le début avait été déjà très apprécié, ces moments de bravoure ou de lâcheté n’en sont que meilleurs), et enfin le dénouement (que je ne dévoilerais pas ici, évidemment). L’auteur prend totalement au mot le titre de l’anthologie et son intention est tout à fait louable, car elle pourrait servir, en ce début d’anthologie, de maître étalon aux nouvelles qui suivent.



Anne Fakhouri, auteur du Clairvoyage, de Narcogenèse et d’American Fays, a l’habitude du récit initiatique et de la mise en place du sentiment amoureux ; elle utilise cela dans sa nouvelle « Au cœur du dragon ».

Jil et Œuf de Dragon font partie d’un peuple vivant au pied de montagnes habitées par des dragons plus ou moins mystérieux (il en existe plusieurs espèces ce qui complexifie l’affaire). Ceux-ci sont à la fois dangereux et pourvoyeurs de matières premières bien utiles pour le fonctionnement de la société qui les côtoient, c’est pourquoi ils constituent un défi pour les « grimpeurs », caste de casse-cous dont le rite d’initiation, d’entrée, est bien sûr de grimper dans un des repères draconiques pour en ramener un trophée. L’amitié tendancieuse nouée dès le départ entre Jil et Œuf du Dragon sera évidemment l’enjeu de cette quête.

Clairement, c’est davantage la figure du dragon dans toute sa complexité qui est développée que celle de la reine, mais ce n’est pas un constat qui pose franchement problème ici, puisque la nouvelle se fonde davantage sur la compréhension (ou non, pour le coup) de l’essence même des dragons, et de ce qui les relie à ces « grimpeurs ». Dans le style, j’ai été moins convaincu, car de ce que j’ai déjà lu d’elle, Anne Fakhouri m’a habitué à plus de répondant, humoristique par exemple ; bien sûr, il y a quelques lignes de dialogue croustillantes, mais je me demande si c’est une nouvelle à conseiller pour découvrir cette auteur, au moins pour la construction des sentiments entre les personnages, là oui.



Justine Niogret nous offre, elle, une bouffée d’air frais à respirer avec attention. Sa nouvelle « Achab était amoureux » nous étonne dès le départ avec non pas un, mais deux titres mystérieux. En effet, « Achab était amoureux » figure au sommaire, ainsi que dans la mise en page ; toutefois, le titre au début de la nouvelle est en fait « La Grande Déesse de fer de la Miséricorde » ! Apparemment, c’est la seule nouvelle de Justine Niogret à avoir vu son titre accepter par les anthologistes… et puis finalement non, voilà tout ! c’est plutôt « Achab était amoureux » qui fut retenu. Mystère de l’édition d’une anthologie...

L’auteur de Chien du Heaume et de Mordre le Bouclier, comme à son habitude, réussit dès les premières lignes à tourner le thème imposé (des reines et des dragons) dans une direction toute personnelle. Le climat est rude, la vie dure et les rencontres pas toujours heureuses. Justine Niogret cultive là le dilemme entre le confort de la proximité et l’aventure vers l’inconnu, entre l’assurance et la tentation. Le décor mis en scène autour de ce duo improbable (la jeune Reine et le sage dragon retiré du monde) est clairement beau. Et, après lecture, on comprend bien tout l’épais mystère entourant le titre de cette courte nouvelle : « La Grande Déesse de fer de la Miséricorde » expose une justification sous forme de métaphore au fait que, bel et bien, « Achab était amoureux ». Il y aura donc au moins une référence que je cerne pleinement, celle du destin liant un chasseur et sa proie, une personne et son destin, un amour et son objet.



Comme très souvent, Pierre Bordage, qu’on ne présente plus, fait une petite incursion dans la fantasy relativement classique pour offrir sa contribution à l’anthologie officielle des Imaginales. Pour le thème des reines et des dragons, c’est sa nouvelle « Morflam » qui nous narre la rencontre de l’une et de l’autre.

Aux confins du royaume de Mandraor, surgit à nouveau le dragon Morflam ; à Saordor, la capitale, la toute jeune reine Hoguilde, déjà particulièrement catégorique dans ses premiers choix politiques, doit affronter cette nouvelle menace pour son royaume avec fermeté malgré son jeune âge et surtout en s’affirmant en tant que reine. La fine fleur des chevaliers partie au combat, Hoguilde finit par fuir sa capitale et ses rencontres en chemin vont décider de sa destinée royale.

Pierre Bordage nous emmène ainsi dans un monde médiéval-fantastique assez classique avec une héroïne forte mais très peu expérimentée et ses rencontres se révèlent cousues de fil blanc. Malgré tout, il est toujours aussi fluide de lire des écrits de Pierre Bordage ; les personnalités s’installent vite et l’intrigue suit tranquillement son cours. Si tout le monde n’adhérera pas à la réflexion qui sous-tend toute la fin du récit, cette nouvelle se laissera lire sans complexe.



Charlotte Bousquet, auteur notamment de la trilogie de l’Archipel des Numinées, propose pour l’anthologie Reines et Dragons une variation déjà beaucoup moins classique et évidente que certains de ses collègues. Avec « Azr’Khila », nous plongeons dans d’antiques déserts arides et mortels.

Pour la pauvre Yaaza, femme âgée du désert, la vie n’est pas simple, c’est un euphémisme. Suite au massacre de sa tribu lors d’une razzia des cavaliers teshites avec force pillages et viols, elle se retrouve seule avec sa vieille chèvre Buruyi. Divagations et envies de vengeance se mêlent pour nous mener vers une magie vaudou autour de la déesse-reine Maysa Khila et son représentant-vautour. Le mystère emplit bien vite les pages de cette nouvelle, d'autant plus que le lecteur peut légitimement chercher assez loin la relation reine-dragon, mais au moins, grâce à Charlotte Bousquet, nous sortons largement de l'épisode classiquement classique choisi par certains de ses collègues, pour plutôt filer vers une variation atypique.

Le style de Charlotte Bousquet, dans cette nouvelle en tout cas, n’est pas fluide du tout, et ce pour une bonne raison, puisqu’elle est, semble-t-il, dans une recherche constante du mot juste ; et, de fait, l’ensemble apparaît un peu moins évident qu’à l’accoutumée dans une nouvelle normalement rapidement lue. Avec ses non-dits et ses choix scénaristiques, l’auteur donne, au fond, l’impression d’offrir deux histoires en une, avec ce choix final relevant de deux hypothèses possibles. Au lecteur d’opter pour sa préférée...



Vincent Gessler, auteur suisse de Cygnis (Prix Julia-Verlanger et Prix Utopiales européen 2012), est déjà quelqu'un de plus récent, de plus discret aussi que certains de ses camarades de cette anthologie. Plus spécialisé dans la science-fiction au départ, il tente avec « Où vont les reines » une plongée dans la fantasy bien épurée.

Alors donc « Où vont les reines » ? « Dans ton cul », dirait l’autre. Pourtant, ce n’est pas là où va être envoyée Ae par sa mère. Alors qu’elle découvre sa maternité, sa mère, la reine d’Akhit, la dépêche dans l’endroit secret où vont les souveraines chaque année à partir de leur premier enfantement. Car, en fait, les reines d’Akhit sont des tueuses de dragon et le fait de partir en étant enceinte leur accorde le droit d’atteindre un sanctuaire de dragonnes.

Sans dévoiler le dénouement, on peut regretter un petit manque d’évolution et d’enjeux que les mots choisis ne gomment pas vraiment : Ae a le mérite de découvrir de quoi nous tenir en haleine pendant une nouvelle, mais nous n’allons pas non plus énormément loin dans la réflexion autour de la situation. Heureusement, nous sommes totalement dans le thème de l’anthologie : de vraies reines, majestueuses et fortes, face à de vrais dragons, puissants et reptiliens.



Érik Wietzel est un auteur déjà bien rompu à la fantasy pure (La Porte des Limbes, Cycle d’Elamia, Les Dragons de la Cité rouge) et sa nouvelle « Le Monstre de Westerham » ne dépareille pas de ses habitudes d’écriture (en matière de fantasy, car il est aussi largement passé à l’écriture de thriller depuis).

Encore une fois, nous tombons sur une étrangeté dans le titre : « Le Monstre de Westerham » s’affiche en tête de la nouvelle et dans la table des matières, pourtant nous trouvons « Le Prix de la trahison » en haut de la mise en page. Étrange donc, sachant que les deux titres sont suffisamment mystérieux sur le ton de la nouvelle ; peut-être est-ce là un problème semblable à celui rencontré par Justine Niogret pour « Achab était amoureux / « La Grande Déesse de fer de la Miséricorde ».

D’abord, nous suivons le duo Askelle et Klarion : la première, malgré les conseils et envies de son frère, part dans la quête d’un Crâne de Valeur. D’un autre côté, nous rencontrons Ayline, souveraine d’Arnilton mais reine réfugiée à Straton, qui cherche à reconquérir sa capitale. Les deux quêtes vont inévitablement se croiser en un dénouement bien trouvé.

Érik Wietzel a suffisamment bien tourné ses descriptions pour éviter toute conclusion trop rapide et finalement, n’est-ce pas dire qu’une nouvelle est bonne quand on ne peut pas décemment en dévoiler davantage ? Il réussit quand même en quelques pages à mettre dans son récit à la fois une petite mythologie, quelques fausses pistes et une conclusion abrupte.



S'il y a bien un auteur qui sait créer des mondes imaginaires en quelques lignes, c'est bien Mathieu Gaborit. Alors découvrir une de ses nouvelles, ici « Under a Lilac Tree », est toujours intrigant.

Eveilleuse est la reine d’un monde étrange. Elle évolue entre un monde tangible et un monde intangible. Son parcours dans cette nouvelle interroge la place du lecteur et, par un onirisme trouble, fait se briser la réalité mais aussi, parfois, se flouter la compréhension. La mise en abîme de la maladie, du pouvoir des livres et de l’imaginaire rend cette nouvelle encore plus englobante et provoque la nécessité de la relire avec un œil renouvelé.

C'est donc un petit récit finalement assez compliqué dans sa structure et son style que nous livre Mathieu Gaborit (en même temps, nous ne sommes pas là que pour lire du facile et du jetable), mais un récit qui tente de nous parler de l’intérêt d’accepter le statut de Muse au nom des rêves qui en découlent, de la vie que cela promet. Ambitieux.



C’est au tour de Nathalie Dau de nous faire connaître sa vision du lien entre dragon et reine, à l’aide de son écriture d’un fantastique sensible et émouvant.

Dans « Cet œil brillant qui la fixait », c’est un peu « quand Gwendolyn rencontre Tiainrug ». Le souci, dans ce royaume médiéval-fantastique, c’est que l’une fait partie du peuple du lac et que l’autre appartient au peuple de la montagne. Tous deux sont les Créatures représentant et menant leur camp au combat, du moins normalement, car quand les sentiments s’en mêlent, peut-être que l’origine de cette guerre inepte sera enfin dévoilée.

Nathalie Dau met à profit son science du sentiment en fantasy pour distiller une nouvelle où tous les côtés habituellement niais de ce genre de romance sont parfaitement en adéquation avec la situation. Les enjeux sont clairs : que reste-t-il de nous quand les amours et les transformations ont fait leur œuvre ? Ces deux Créatures, aux mutations reptiliennes, déjouent les pronostics lancés par chacun de leurs camps.



L’anthologie met Mélanie Fazi en valeur en lui laissant l’honneur de conclure. Cette auteure aux multiples récompenses pour ses recueils fantastiques nous glisse une nouvelle fraîche et, mine de rien, contemporaine.

Dans « Les Sœurs de la Tarasque », nous suivons l’itinéraire contrarié de Rachel, l’une des sept élèves du pensionnat destiné à désigner la future femme de l’Avatar, représentant du Dragon. Le monde peut bien tourner (la technologie semble bien proche de la nôtre), il n’empêche que l’Avatar a besoin d’une mère pour ses futurs enfants et toutes les familles rêvent de placer leur fille à ses côtés. La société des Sœurs de la Tarasque sont là pour éduquer et préparer ces jeunes filles désignées. Toutefois, Rachel ne semble pas à fond pour suivre ce chemin tout tracé et ne voit pas d’un bon œil sa meilleure amie, Lénaïc, être autant sous le charme du puissant personnage masculin.

Mélanie Fazi nous livre une nouvelle au ton très jeunesse, mais elle fait passer ce ton d’une manière si fraîche qu’il paraît tout naturel. Nous sommes dans un pensionnat pour jeunes filles, alors ces petites remarques, ces petites habitudes pour des demoiselles en pleine puberté sont tout bonnement parfaites. La justesse du ton rencontre également une intrigue parfaitement calibrée pour une nouvelle. Il n’y aura donc bien que la multiplication des prénoms et l’origine du Dragon qui pourraient gêner le lecteur.



Pour reprendre quelques considérations de manière plus générale, l'avantage de ce thème, de cette nouvelle association entre une créature fantastique (Dragons) et un personnage humain (Reines), est de faire proposer, de fait, nombre de femmes fortes, ce qui change en bien de la production littéraire majoritaire, même la tendance s'équilibre. Un certain nombre de nouvelles ont mis en scène beaucoup de mensonges et de faux-semblants, à voir s'il y a derrière ce choix des volontés éditoriales au départ. Enfin, on a vu que l’octroi des titres de nouvelles a pu quelque peu bloquer, mais la construction anthologique réalisée par Sylvie Miller et Lionel Davoust a permis d’attaquer avec un texte très court (pas très immersif pour ma part, mais pas trop bloquant au moins), puis d’enchaîner avec la fantasy la plus classique, pour finir avec, à mon humble avis, les textes les plus ambitieux.

Dans tous les cas, l’ensemble de cette anthologie est plutôt de la solide fantasy, le plus souvent bien pratique pour découvrir tel ou telle auteure...

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L'Horloge du temps perdu

En Résumé : J’ai passé un agréable moment avec ce roman qui, certes, ne révolutionne pas le genre, mais nous offre une histoire simple, efficace et captivante, peut être parfois un peu traité avec facilité, mais qui se révèle un bon divertissement. L’auteur ne plonge justement pas dans la facilité nous offrant une histoire et des personnages qui ont connu une vie pas toujours facile, une histoire qui traite de façon soignée et percutante des problèmes de l’adolescence, de sa construction et son évolution mais aussi des soucis familiaux. À noter que le côté année 80 m’a bien accroché, mais cela vient sûrement du fait que j’ai connu cette époque. Les personnages sont vraiment attachants et intéressants et leurs interactions sont vraiment bien travaillées, le tout porté par une plume de l’auteur simple et efficace. Au finale une histoire simple et divertissante qui se lit facilement et rapidement, que demander de plus.



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Hantés

En Résumé : J’ai passé un bon moment de lecture avec ce thriller fantastique jeunesse qui m’a offert une histoire, soignée, complexe pour le public visé et qui s’est révélée sans temps morts, avec son lot de surprises et de rebondissements. Mais l’auteur, en plus de nous offrir une histoire captivante, nous propose aussi des axes de réflexions intéressants que ce soit sur la guerre au Rwanda, les enfants soldats, la société ou encore la famille et les amis. Les personnages se révèlent attachants et le trio de héros accroche le lecteur à travers leurs aventures. Le style de l’auteur se révèle énergique, efficace et entraine facilement le lecteur. Alors, je ne vais pas le cacher, un ou deux points m’ont dérangés, j’aurai aimé en savoir plus sur la « hantise » des héros ou encore l’héroïne un peu geek qui trouve toutes les réponses ou encore certains aspects juste esquissés ou traités rapidement, mais rien de bien gênant. Dans tous les cas si l’auteur écrit, un jour, une suite je la lirai avec grand plaisir.



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Fugue en ogre mineur

En Résumé : J’ai passé un agréable moment de lecture avec cette anthologie qui nous propose de revisiter à travers cinq nouvelles le mythe original de l’ogre, qu’il soit aussi bien métaphorique que réel ; l’ogre pouvant être à la fois le monstre connu et reconnu, mais aussi celui qui se cache en chacun de nous. Chaque texte propose ainsi une variation et une vision intéressante du mythe, entre angoisse, horreur et humour, et même si tous les textes ne m’ont pas accroché de la même façon, dans l’ensemble ce court recueil reste plutôt agréable à découvrir même s’il manque tout de même d’éléments percutants et marquants pour passer de lecture distrayante à bonne lecture.





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Reines et Dragons

Comme l'année dernière, je suis reparti cette année avec l'anthologie des dernières Imaginales. Il faut dire que le sommaire des auteurs est vraiment intéressant et en plus, cette année, l'anthologie a été dirigée par Sylvie Miller et surtout Lionel Davoust. J'avais donc hâte de voir ce qu'allaient nous proposer les différents auteurs sur le thème de cette année : Reines & Dragons. Tout comme l'année dernière cette anthologie a été lue en mini LC avec Snow que je remercie et avec qui j'ai eu de bonnes discussions argumentées sur chacun des textes. Une LC vraiment agréable et vous pouvez d'ailleurs retrouver son avis ici.







Le Dit du Drégonjon et de son Elfrie de Chantal Robillard. Une nouvelle assez courte en forme de poème qui nous conte la souffrance de certaines Elfries maltraités par leurs peuples. Il m'a fallu quelques lignes pour rentrer dans ce texte, mais uns fois dedans il s'est révélé vraiment intéressant par sa profondeur et sa critique, mais aussi par son ton ironique et acerbe des plus captivants. Ajouter à cela un côté stylistique poussé avec un texte composé sans la lettre "a" et la répétition du refrain de façon mathématique selon la suite de Fibonacci et vous obtenez un texte, sous forme de poème, vraiment surprenant et agréable.







Chuchoteurs du Dragon de Thomas Geha. Une nouvelle qui nous raconte la vie d'une reine, choisie par le Dragon, mais qui va tomber amoureuse, ce qui va bouleverser sa vie et lui dévoiler certains secrets. Je dois bien avouer que j'ai trouvé ce texte un peu convenu, il traite de reine et de dragon de façon classique et donne l'impression d'avoir du mal de sortir des codes. Attention il n'est pas mauvais, il se lit bien, mais je ne sais pas, j'attendais peut être plus. Par contre, la fin est vraiment surprenante et mélancolique et l'idée des chuchoteurs et des demidames vraiment originale, de plus la plume de Thoma Geha est toujours aussi agréable à suivre. Le texte manque peut être un peu plus de surprises.







Ophéa de Adrien Tomas. Je ne connaissais pas cette auteur mais vu que je suis reparti du festival avec son roman j'ai pris cette nouvelle comme une découverte de son style et je dois dire que je ne suis pas déçu, un texte vraiment réussi, plein de surprises et de rebondissements. La trame reste aussi plutôt classique, avec la traque du dragon pour obtenir les faveurs de la reine, mais il est traité de façon décalé et pleine d'ironie et la fin se révèle vraiment surprenante et efficace. Les personnages ne manquent pas de prestance à leurs façons et se révèlent attachants. Un peu plus d'originalité aurait encore rendu le texte meilleur, mais bon je chipote.







Au Coeur du Dragon de Anne Fakhouri. Un texte ou les dragons sont des animaux sauvages comme les autres et ou les hommes et les femmes doivent nettoyer leurs déjections et y trouver aussi des pierres précieuses et y gagne leurs noms lors de l'épreuve finale. Un texte troublant qui pose des personnages vraiment soignés et humains, l'histoire est vraiment bien construite, originale et efficace. L'univers est vraiment bien amené et surprenant. La rencontre entre l'héroïne et le marchand permet pleinement de découvrir deux mondes différents entre ceux qui rêvent et les réalistes de la vie. L'histoire d'amour et le triangle amoureux qui se dessine est loin d'être mièvre et se révèle surprenant surtout que des questions restent sans réponse sur un personnage.







Achab Etait Amoureux (ou La Grande Déesse de Fer de la Miséricorde) de Justine Niogret. Alors là je me suis posé une question la nouvelle a deux titres, est-ce une erreur de l'éditeur ou est-ce fait exprès? En tout cas moi qui cherchait de l'originalité je dois dire que j'ai été gâté par ce texte vraiment surprenant avec une jeune fille s'appelant Reine, qui chasse la baleine au lance-tartine et qui philosophe sur la vie avec un personnage nommé dragon qui dirige un café. Des personnages soignés avec une héroïne bourrue et caractérielle et un dragon amical et compréhensif, mais surtout ce qui marque le lecteur c'est ce côté drôle, poignant et surprenant différent de ce que je connaissais de l'auteur. Après, j'ai fais mes propres hypothèses pour moi la chasse à la baleine c'est un peu comme chasser un rêve et surtout j'ai trouvé que l'histoire pouvait se lire en boucle. Une fois ce texte fini relisait le début et tenez-moi au courant. En tout cas un texte vraiment original et surprenant, mais voilà, je dois bien l'avouer je ne crois pas avoir tout compris.







Morflam de Pierre Bordage. Une reine est obligée de partir à la rencontre d'un dragon pour éviter la fin de son royaume. Je n'ai pas vraiment accroché à ce texte, déjà le personnage principal est antipathique au possible, fermée et égoïste, de plus j'ai trouvé que l'intrigue en elle-même offrait une impression de déjà vue et manquait clairement d'originalité et de souffle. L'écriture de l'auteur se révèle toujours aussi simple et efficace, mais voilà comme je l'ai dit une héroïne pas attachante et un univers qui manque de profondeur font que je suis resté de marbre devant cette nouvelle.







Azr'Khila de Charlotte Bousquet. Yaaza est la dernière survivante de son peuple, ce qui en donc la reine, et elle décide d'aller se venger. Un texte nerveux dès le départ et qui monte page après page en tension et souffrance avec un style efficace et très imagé, nous dévoilant ce que doit endurer notre héroïne pour arriver à mener à bien cette vengeance. Un univers sombre dominé par la violence et l'esclavage qui colle parfaitement à l'univers. Mais je trouve dommage la conclusion finale, qui vient chercher le rebondissement de trop, jouant sur l'onirisme, ce qui, selon moi, gâche un peu cette nouvelle.







Où Vont les Reines de Vincent Gessler. Ae est une princesse et elle vient de tomber enceinte et va devoir, comme punition, affronter les dragons. Un texte vraiment intéressant et intrigant qui se concentre sur le personnage et la découverte de sa vision des dragons qui ne sont pas obligatoirement ce que l'on croit. Une épreuve qui va faire évoluer l'héroïne et la faire devenir mère et reine, deux lourds fardeaux. Ce texte repose entièrement sur l'évolution de l'héroïne qui, au fil des pages, va découvrir la vérité et se l'approprier. La conclusion va se révéler vraiment surprenante et efficace qui nous fait réfléchir. D'ailleurs après la lecture de ce texte je me demande si toutes les mères ne sont pas des reines finalement. Un excellent texte poétique et prenant du début à la fin.







Le Monstre de Westerham de Erik Wietzel. Un texte qui va se révéler vraiment intéressant malgré un début, voulu selon moi, qui cherche à perdre le lecteur. L'auteur va jouer sur les faux semblants et les tromperies de façon bien amenés et efficaces pour nous amener à une conclusion mélancolique et qui nous dévoile le véritable visage du monstre. Les personnages sont vraiment efficaces entre une reine avide de pouvoir, le dragon Klarion curieux et sa soeur Akselle qui est une vraie peste. Mon seul regret avec cette nouvelle c'est qu'au final elle se révèle sans surprises.







Under a Lilac Tree de Mathieu Gaborit. Une jeune fille, une reine, part à la chasse au dragon qu'elle doit dompter pour sauver un homme. On se retrouve ici dans de la fantasy urbaine avec un mélange de monde tangible et un monde onirique. Je n'ai pas accroché à ce texte et je ne saurai dire pourquoi, il s'agit d'un texte poétique, mystérieux, vraiment original avec pleins d'idées intéressantes, mais voilà ça n'a pas marché sur moi. Je suis sorti de ce texte j'avais l'impression d'être complètement passé à côté de quelque chose.







Cet Oeil Brillant qui la Fixait de Nathalie Dau. Nathalie Dau nous offre, comme à son habitude, un conte qui va se révéler vraiment intéressant. Les personnages sont vraiment charismatiques et l'univers guerrier entre deux peuples qui se battent depuis des années est vraiment intéressant et colle parfaitement à l'univers. Un conte qui oscille entre souffrance et amour ou va se mélanger magie, divinité et humanité. Un texte porté par la magnifique plume de l'auteur qui se révèle toujours aussi poétique et entrainante. Mon seul reproche une certaine facilité comme par exemple dans l'évasion de la princesse.







Les Soeurs de la Tarasque de Mélanie Fazi. Voilà l'un des textes, voir le texte, selon moi, le plus abouti de ce recueil. Une nouvelle très intimiste et pleine de sentiments se situant dans une sorte de couvent où se trouve une dizaine de jeunes filles et dont l'une d'elle sera choisie par le dragon pour devenir son épouse. Un texte fantastique ou l'Humain est vraiment mis en avant, on ressent pleinement les émotions à travers ce texte que ce soit la souffrance, les manipulations des jeunes filles par le dragon ou encore les premiers émois. Un texte qui a vraiment réussi à m'emporter et qui se révèle vraiment poétique et plein de mélancolie du début à la fin, rien n'est facile pour notre héroïne qui vit une sorte d'amour impossible, perdue, mais dont elle ne peut se passer. La plume de l'auteur est toujours aussi fluide, poétique et magique qui captive dès la première page et qui nous offre aussi pas mal de réflexions sur la religion, la sexualité, l'amour et l'amitié.











J'ai passé un agréable moment avec cette anthologie qui nous offre douze textes sur le thème de Reines et Dragons. Alors bien sûre toutes les nouvelles ne sont pas aux mêmes niveaux, certaines m'ont complètement emporté tandis que d'autres n'ont pas réussi à m'accrocher, mais dans la globalité j'ai passé un bon moment et je trouve même cette anthologie plus soignée que celle de l'année dernière.



Par contre, et j'ai déjà fais le reproche l'année dernière, les éditions Mnémos doivent vraiment faire attention certaines coquilles se sont glissés dans les textes, rien de dérangeant mais ça surprend toujours. Je me pose aussi la question de savoir quel est le véritable titre de la nouvelle de Justine Niogret.
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Elfes et Assassins

En Résumé : J’ai passé un moment de lecture sympathique avec cette anthologie des Imaginales, mais, j’avoue, je l’ai tout de même trouver un ton en dessous que celle de l’année dernière, ce qui m’a un peu frustré. Ça n’empêche pas cette anthologie d’avoir de très bons textes mais certains se révèlent anecdotiques voir ne m’ont pas accrochés. Dommage. Peut être cela vient du sujet aussi. Je lirai quand même avec plaisir celle de l’année prochaine.



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Reines et Dragons

Quatrième anthologie parue suite au festival des Imaginales d'Épinal, « Reines et dragons » est cette fois dirigée non plus par Stéphanie Nicot mais par L. Davoust et S. Miller. L'initiative est toujours aussi louable mais cette fois l'ouvrage se place nettement en dessous de ses prédécesseurs. Là où les thématiques de « Rois et capitaines », « Magiciennes et sorciers » et « Victimes et bourreaux » nous offraient une large palette de récits très variés, force est de constater que la plupart des nouvelles de « Reines et dragons » proposent peu de renouveau et d'originalité. Autre déception, la brièveté de l'ouvrage lui-même et surtout des nouvelles qui excèdent rarement les vingt pages. Si la longueur des textes ne me pose habituellement pas de problème, enchainer huit petites nouvelles d'affilée rend assez difficile l'immersion dans les histoires et les univers des auteurs qui auraient mérité pour la plupart d'être un peu plus étoffés pour vraiment captiver le lecteur.



Quelques textes sortent malgré tout du lot, notamment les quatre derniers, ce qui permet de refermer cette anthologie sur une note plus positive. Avec « Under a lilac tree » Mathieu Gaborit nous offre ainsi une nouvelle pleine de poésie et de mélancolie qui vous fera voir Paris autrement, de même que Justine Niogret avec « La grande déesse de fer de la miséricorde », texte très original dans lequel on reconnaît sans mal la patte et le style très cru de l'auteur de « Chien du heaume ». Mention spéciale également à Nathalie Dau qui signe avec « Cet œil brillant qui la fixait » un très beau texte mettant en scène un univers certes classique mais très immersif et des personnages attachants. Idem pour Mélanie Fazi et son prenant « Les Sœurs de la Tarasque » où l'on découvre une école de jeunes filles élevées dans l'attente du Dragon. Sans doute les deux meilleures nouvelles de cette anthologie.



« Reines et dragons » m'a donc laissé un avis plutôt mitigé bien que le concept demeure toujours aussi intéressant et que les grands auteurs français de fantasy continuent de répondre présent. Espérons toutefois un peu plus de diversité dans « Elfes et assassins » pour 2013.
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Trois battements, un silence

Dans Trois battements, un silence, Anne Fakhouri nous attache aux pas d'un certain Marco Delusi qui est retourné vivre dans la maison familiale avec le bébé changeling que les fées lui ont collé dans les pattes à la place de son fils. Un soir, ce dernier lui est mystérieusement rendu. Tout à sa joie de retrouver son enfant, disparu huit ans plus tôt, il est obligé de fuir manu militari car une horde de trolls menaçants s'approche dangereusement de la maison, sans doute pour lui reprendre. Un périple au cours duquel il va recroiser la route d'hommes et de femmes de son passé dont la mère de son fils qui l'aideront ou non dans sa noble quête de mettre son fils à l'abris. Pour cela, il lui faudra s'intéresser à ses origines car la solution semble s'y trouver.



Trois battements, un silence nous embarque dans un road trip sombre et baroque qui bouscule la féérie. Anne Fakhouri s'est réappropriée la légende de Mélusine pour donner un cadre merveilleux à son récit. Mélusine est un personnage féminin légendaire issu des contes populaires et chevaleresques du Moyen-Âge. Immortalisée par Jean d'Arras dans son roman Mélusine ou la noble histoire des Lusignans, l'autrice en reprend les grandes lignes pour nourrir son roman. Née de la fée Presine et du roi Elinas, Mélusine, accablée par la trahison de son père, a convaincu ses sœurs Mélinor et Palestine d'agir avec elle pour le punir. Or, en représailles pour cet acte, Presine la condamna à devenir serpent au-dessous du nombril chaque samedi et la défia de trouver un époux qui l'aimerait avec l'ordre de lui cacher sa nature serpentine sous peine de retrouver son tourment et d'être définitivement séparée de sa grande descendance. Une malédiction qui va d'ailleurs inspirer Anne Fakhouri car elle en imagine les conséquences sur les générations suivantes. Ainsi, tous ces Lusignan naissent et vivent dans la haine et la défiance des femmes en apparentant toute la gente féminine à cette traitresse qui aurait menti et manipulé le pauvre et innocent Raymondin de Lusignan. C'est dans ce contexte haineux que né le dernier de la lignée prénommé Marco, qui grâce à l'amour d'un oncle, va enrayer le processus et explorer le passé pour se défaire de ses chaînes décidément trop lourdes à porter.



Dès lors, Anne Fakhouri a lâché la bride à un imaginaire vagabond pour explorer l'entre-deux et emprunter des chemins réservés aux fées qui s'ouvrent sous les pas des danseurs se mouvant à l'unisson du tempo de la terre.



Dans son roman, elle réhabilite la figure de Mélusine dont le seul tort est d'avoir voulu être aimé d'un homme et d'enfanter une grande descendance. Elle est le bouc émissaire idéale pour canaliser les frustrations masculines et justifier leurs aberrations.



Par l'entremise du mythe de Mélusine, Anne Fakhouri soulève la question très actuelle du féminicide et des violences faites aux femmes.



Au son des riffs de Bruce Springsteen, Anne Fakhouri nous entraîne dans une escapade déjantée où la musique prend des airs de magie pour revisiter un imaginaire collectif qui arrive encore à nous surprendre. Une pépite du genre !
















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Trois battements, un silence

Absence depuis près de dix ans de la scène de l’imaginaire français, Anne Fakhouri faisait cette année son grand retour en fantasy avec « Trois battements un silence ». Un roman publié, hélas, de façon posthume puisque l’autrice s’est éteinte quelques mois seulement avant la publication de son livre, ce qui n’est évidemment pas sans lui conférer une aura un peu particulière. Présenté comme un « conte pour adulte », le roman met en scène un certain Marco Delusi, un homme vivant reclus dans un village du fin fond de la France et qui ressasse la disparition de son fils. Le personnage semble également être à même de discerner les créatures féeriques qui évolueraient à la lisière de notre monde et pour lesquelles il éprouve visiblement une grande aversion. Son quotidien va être bouleversé par le retour inattendu du bébé disparu il y a pourtant des années, ainsi que par une agitation manifeste de certains de ces êtres surnaturels qu’il parvenait jusqu’à présent à maintenir à distance mais qui semblent désormais décidés à passer à l’action. Pour sauver son enfant, Marco va devoir trouver des alliés et, pour se faire, se débarrasser des tropismes sexistes et violents inculqués par les hommes de sa famille. Il va lui falloir également remonter aux origines de la prestigieuse lignée dont il est issu et qui remonterait au seigneur Raymondin de Lusignan et surtout à Mélusine, puissante fée honnie par ses descendants. Le roman est divisé en sept parties plus ou moins égales qui portent chacune le nom d’un des personnages de l’intrigue, quant bien même le point de vue reste la plupart du temps celui de Marco. Ces blocs sont d’une qualité très inégale, certains traînant considérablement en longueur et donnant l’impression que l’intrigue patine, tandis que d’autres se révèlent absolument captivants. Il en résulte un roman intéressant mais un peu bancal, qui ne donne pas toujours l’impression de savoir où il va dans un premier temps mais qui parvient malgré tout à titiller la curiosité du lecteur, puis à totalement le conquérir grâce à une poignée de personnages charismatiques.



La première partie remplit à mon sens pleinement son rôle d’appât, distillant ici ou là des remarques sibyllines sur les fées ou le passé du protagoniste qui donnent inévitablement envie au lecteur de percer les secrets de la famille Delusi. L’histoire se perd malheureusement ensuite, au point d’en devenir quelque peu brouillonne et de se focaliser sur les aspects les moins captivants de l’intrigue initiale. Le récit alterne entre des flashbacks remontant à la formation du héros et censés nous ouvrir les portes du monde surnaturel que Marco connaît visiblement bien, et des passages consacrés à sa fuite et à sa recherche d’alliés susceptibles de l’éclairer sur les bouleversements en cours et de l’aider à protéger son fils. Seulement l’autrice se montre trop avare en informations, ce qui rend difficile pendant un long moment pour le lecteur de cerner les enjeux et de comprendre le rôle et les capacités de chacun des acteurs du drame en train de se jouer. A ce petit ventre-mou succède ensuite le dernier tiers du roman qui se révèle être, de loin, le plus intéressant. En effet, l’intrigue se décentre alors du regard de Marco pour se focaliser sur les deux figures qui, dès le départ, étaient celles pour lesquelles on éprouvait soit le plus de sympathie, soit le plus de curiosité, à savoir Ray, l’oncle un peu farfelu de Marco, et Mélusine, son ancêtre. Ce basculement de point de vue s’avère extrêmement salutaire pour l’histoire qui prend alors toute son ampleur et permet à l’autrice de livrer deux récits à la fois plus intimistes mais aussi plus puissants. La force du récit consacré à Ray réside dans le profond attachement que l’on ne manque pas d’éprouver pour le personnage et dans sa capacité à nous émouvoir. Une capacité dont, jusqu’à présent, les autres personnages étaient dépourvus, Marco compris.



Difficile en effet de s’attacher à cet homme pétri de colère qui déverse en permanence sa haine de tous, et surtout de toutes. On comprend très vite que le petit a grandi dans un milieu familiale malsain et violent, dans lequel les femmes sont les grandes absentes et dont les hommes ont tous été élevés dans une véritable aversion de l’autre sexe. Bien que ne s’inscrivant pas dans le schéma familial traditionnel des hommes de sa famille, Marco n’en n’a pas moins intégré certains réflexes et son regard sur les femmes s’en trouve inévitablement orienté. Cette hostilité manifestée à l’encontre de la gente féminine se révèle parfois assez lourde à supporter, d’autant qu’aucun point de vue alternatif ne vient contrebalancer la violence de la vision sexiste portée par les membres de la famille Delusi. Seul Ray semble avoir totalement échappé à ce biais, et c’est aussi l’une des raisons pour lesquelles le récit de son histoire fait figure de bouffée d’air frais. Il faudra toutefois attendre la toute dernière partie du roman pour avoir enfin le point de vue d’une femme, et pas n’importe laquelle, puisqu’il s’agit de Mélusine elle-même. Le roman prend alors effectivement des allures de conte et se voit traverser par un puissant souffle qui non seulement relance l’intérêt de l’intrigue mais surtout l’enrichit en lui donnant une profondeur nouvelle. On y retrouve la synthèse des différentes thématiques abordées par l’autrice, qu’il s’agisse de celle des rapports de domination au sein des relations hommes-femmes, de la violence que ces rapports peuvent engendrer, ou encore celui de la parentalité, des bouleversements qu’elle engendre et des émotions insoupçonnées qu’elle fait naître. Cette dernière partie, toute en finesse et en sensibilité, permet de refermer le roman sur une note d’autant plus positive que la conclusion se révèle être parfaitement à la hauteur, laissant le lecteur aux prises avec des sentiments mitigés, mélange de satisfaction et de mélancolie.



Avec « Trois battements, un silence », Anne Fakhouri signe une œuvre posthume marquante qui, en dépit d’une intrigue dans un premier temps un peu bancale et de personnages peinant à susciter l’émotion, parvient finalement à toucher le cœur du lecteur en se décentrant quelque peu du regard du protagoniste. La seconde partie du roman se révèle à plus d’un titre bouleversante et permet d’apporter une touche de nuance et de complexité bienvenue, tout en mettant en lumière deux figures jusqu’ici assez marginales mais finalement très touchantes. En dépit de ses défauts, le roman d’Anne Fakhouri nous entraîne ainsi dans une sorte de parenthèse enchantée, certes pleine de drames et de violence, mais aussi empreinte d’une poésie au charme de laquelle il est difficile de résister.
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