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Citations de Anne Savelli (43)


Sur le quai de Calais en direction de Boulogne la traque des clandestins soleil vent solitude.

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Dans combien de casiers, dans combien de tiroirs est encore rangée ta fiche signalétique ?
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Des phares, des chapelles, des dolmens devenus calvaires, des mausolées de granits ; des ponts, des fortifications, un golfe, des dédales ; des îles, toujours des îles, reliées, séparées et des marais, estuaires, des maisons troglodytes : voilà ce qui, équivoque, sale et mouille les terres, efface les frontières de la pierre à l'écume.
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Samedi soir – Métro La Chapelle, sur le quai. Expérience inédite, je sors du cinéma et me retrouve de nuit sur ma ligne de jour. À travers la verrière, en attendant la rame qui ne vient pas, je surprends les pièces éclairées dont je ne distingue rien le matin. Salon chatoyant, jouets, rideau jaune. Tentures au mur, ficus, tableaux. À ma gauche, la pointe illuminée du Sacré-Cœur. Devant moi, les arbres aux dents jaunes flashés par les spots. Nous attendons toujours. Et que suis-je allée voir pour la quatrième fois, délaissant les films de la rentrée qui pourtant me tentaient ? Fenêtre sur cour, sans blague, c’est maintenant que le lien se fait.
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En haut, longer le trottoir jamais net, papiers dans le caniveau, véhicules échoués, passer devant les murs anonymes en mauvais crépis, les portes fermées, les volets écaillés. Remarquer le rien : là, une flaque d’eau, ici, une latte qui manque dans la zébrure des persiennes, deux fils pendent sur ce qui fût une sonnette
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Bien sûr, ce qui frappe avant tout, c’est l’espace réservé, le plus vaste du monde dit-on, trois mille mètres carrés pour les chaussures qui s’y déploient, c’est le mot. Aucun entassement, aucun empilement mais des modèles distingués d’un coup d’œil parce qu’on les hisse, bien séparés les uns des autres, sur des présentoirs circulaires.
Talons hérissés, les brides font des fouets solides.
Après les couloirs, les carreaux de faïence de la station de métro, c’est tout de suite le – 1, sans prendre par le hall. Pas de fenêtre : on entre dans une boule à facettes, se perd dans un labyrinthe dont les murs sont des fauteuils, banquettes, colonnes et miroirs, sentiers qui conduisent d’une marque à l’autre. Il y a là une boutique de cirage et accessoires divers, un comptoir où boire des jus de fruits, des cabines privées où l’on balance son pied nu, dodu, attendant la sandale qui coûte son mois de salaire à la vendeuse.
Pointe et cambrure, orteil rouge sang.
Massage sur rendez-vous.
Fait-on ici dans la demi-mesure ? Parfois. Mais c’est surtout le temple des panthères, des tissus tigrés, œillets ou paillettes on ne sait plus, fausse ou vraie fourrure on oublie, spartiates tressées dorées à boutons de nacre. On y trouve une chaussure de vair (un seul exemplaire à la vente) ; des souliers à rabot pour cou-de-pied trop fort ; à languettes mutantes, à lacets de cuir souple pour chevilles enchâssées.
À genoux.
Plie.
Et des escarpins d’astronautes.
La queue serpente il faut attendre sagement soi et sa carte bleue pour accéder enfin à ces salons privés. Surprise : le lieu, disent ses concepteurs, a été pensé comme une bibliothèque.
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La gare de l’Est, l’horloge : tant d’heures depuis Franck, vingt-quatre par jour pendant vingt ans : la grande aiguille a franchi cent soixante quinze mille fois le chiffre 12, ça ne veut rien dire, on n’est pas redevable du temps qui passe, ni même de la mémoire des disparus. Ils sont nus dans nos têtes, nos chers disparus, si doux à nos souvenirs, blottis en chien de fusils dans un coin, là, protégé sous le matelas de méninges, sous le tissu qu’on appelle dure-mère, peut-être à cet endroit où l’os pariétal s’incurve en coquille d’œuf et forme comme un dernier refuge. Avant Franck, il n’y a rien, après Franck, il y a le monde sauvage qui vous tire à hue et à dia. (TB)
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On sait exactement combien de temps cette page et combien ce passage et ces mots difficiles à lier, prononcer, les voilà qui s’éloignent, ouf, ne pas se relâcher, ne pas croire qu’on domine et butter sur la suite, plus fluide pensait-on
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Tu aimes qu’on te regarde, rien à faire.
Tu ne sais pas comment regarder ailleurs.
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La victoire, qu’est-ce que c’est ? Ce que disent Halsman et Monroe au crayon rouge comme dans les poses, c’est la complète indifférence de la femme en demande devant l’homme de pouvoir. Cause toujours. Non seulement je ne t’écoute pas mais je le dévoile au monde, en fais un sujet de reportage. Je détaille l’histoire de mon corps qui avance, qui fend l’air, j’en décrypte les expressions. Les hanches ? Aiguës. Les jambes ? Une posture d’escrime. Si je m’approche, ce n’est pas pour t’offrir quelque chose, crois-moi, même à te laisser supposer. Quant à toi, protégé par ton éphéméride, ton porte-plume, c’est-à-dire : rien, de ton bureau tu es obligé de sourire puisque la scène est dans le journal. Puisque c’est de l’humour, une blague, argument que vous utilisez tous pour nous fermer la bouche en public, en soirée, quand vous lancez une pique sexiste. C’est dans Life. Imparable. Alors, qu’est-ce que ça fait de jouer mon rôle ? Fatigant pour les maxillaires, non ?
Hélas, c’est à nouveau de la fiction.
Au fond tu restes aveugle quand je révèle le mode d’emploi.
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Mardi – Un ciel blanc de chaleur, déjà, des jointures que l’on serre. Dans le virage qui mène à Stalingrad un store enrouleur me fait de l’œil (c’est possible). Je prends ce vélo suspendu au balcon du cinquième et hop, à la mer. J’emporte la gare et les rails au cas où et cette cheminée de nickel. La superposition des façades opposées dans un reflet de vitre est encore balnéaire.
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TROISIÈME SEMAINE – DES ODEURS
Lundi – Une de ces fenêtres donnant sur les voies de la gare du Nord, là où les immeubles se serrent, se ressemblent et manquent de tomber brisés sur les rails. Leurs habitants, des plongeurs en apnée dans le tremblement, forcés d’aimer ou de haïr les trains dès la naissance. Quels rêves s’y fabriquent, où sont leurs chambres ?
Lundi bis – Fenêtre incrustée dans la pierre, rurale, de gagne, fenêtre de Monte Cristo donnant à son tour sur la gare face aux immeubles cloués plus haut.
Mardi – De la voiture, 8 mai oblige, mais le trajet est le même. Une femme de profil se penche pour boucler sa valise dans une pièce sombre du premier étage. Souvenirs assourdis de Béziers, rideaux, voilages, voitures faisant vibrer les vitres.
Mercredi – Un monde fou ce matin. Quelle fenêtre va apparaître au-delà des visages, des métros que l’on croise ? Une ligne pure, aquatique puis un panier d’osier, le reflet file et je ne retiens rien. Une voisine du haut de l’œil me scrute. Fesse à demi sur le siège, vite, la gare.
Jeudi – Trouver une fenêtre transversale alors que l’air sent le savon, le muguet. Un vitrail noir domine l’eau placide du canal, une église du 10e jamais vue sous cet angle.
Vendredi – Comme le narrateur de la Recherche, courir des deux côtés du train sans pouvoir choisir. C’est le premier très beau jour de l’année et les Orgues se volatilisent sous les arbres. Même les immeubles de Stalingrad ont des accents romains. Les gares se joignent dans un seul mouvement du rail.
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Bonjour, madame.
Toi, tu as simplement dit bonjour, un bonjour clair, joyeux. Elle t’a reprise. Elle t’a semblé grande et glacée. Vous vous êtes regardées, chacune d’un côté de la table. Peut-être as-tu répété sa phrase, ou peut-être pas, tu ne t’en souviens plus, et voilà qui ne change rien. Au rez-de-chaussée de cette maison immense, si vaste que tu t’es perdue, dans cette pièce où oeuvraient une femme de ménage et une cuisinière – le jardinier tondait la pelouse, tu l’entendais par la fenêtre, tout le monde travaillait, vraiment, tu n’as vu qu’elle, la mère de ta première meilleure amie. Tu as compris que la guerre était ouverte, et que tu n’étais pas dans le bon camp.
Bonjour madame : qu’est-ce que c’est que cette phrase, au juste ?
Mal élevée. Ni chic ni bien élevée cette petite, même blonde, même en tête de classe. Les mères en fourrure ne parlent pas fort mais leur silence dit ce que perçoit la fille : je ne te connais pas, je te juge sur le compte en banque, sur le patrimoine supposés, symboles d’une appartenance. Rester entre pairs pour ne pas risquer de se sentir soi-même jugé, nu, réduit à un corps quand on peinerait à justifier son utilité, son mérite s’il fallait les revendiquer : ce serait là ce qui bloque ou est-ce autre chose ? J’ai un QI ras les pâquerettes et l’impudence de te le montrer, voilà ce qu’entend la fille dans le dédain qui s’affiche. Tu t’en aperçois ? Qu’est-ce que ça peut faire ? Tu es quantité négligeable. Tes bonnes notes ne vont pas durer. Tu ne battras pas mon fils (ma fille / mes enfants et ceux de mes amis) ad vitam æternam. Tu retourneras à ta classe et le mot n’est pas le même, le sens est déplacé.
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Avec les cheveux blonds on voit bien les poux qui cavalent mais on ne voit pas les lentes, pense l’enfant. Blond blanc, blond vénitien, blond doré ou blond scandinave des petites filles riches de la classe, une enfant française porte des anglaises blondes. Les anglaises, ça n’existe pas sans un fer. Pour des boucles enroulées comme le papier tue-mouche il faut un fer. Friser, défriser, si je parle des poux ça te défrise ? Porter des anglaises, des fers. Une enfant française joue avec sa langue. Elle sait qu’il faut se taire quand on pense poux et papier tue-mouche, quand la phrase arrive. Ne porter ni anglaises ni jupon de dentelle. Qu’on lui coupe la tête.
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Devant les préfabriqués des sixièmes-cinquièmes du collège littéraire, les mères attendent, leurs fils surtout, fascinés. On dirait qu’il y a une grotte entre les bâtiments, le littéraire, le scientifique, qu’on peut se faire renvoyer si on se fait prendre, ventre couvert de terre. On irait où, alors ? Dans l’établissement privé où bifurquent les mauvais élèves dont les parents ont les moyens ?
(de l’autre côté, passé sous le grillage, est-ce qu’on peut entendre la sonnerie, secouer son tee-shirt, revenir à temps ?)
Le collège littéraire est en perte de vitesse face au scientifique, il faut couper des têtes en fin de cinquième, en fin de troisième ensuite.
Il y a encore le lycée international, mythique, invisible, magnétique : un grillage lui-même.
C’est une ville de bonnes notes, qui brille aux concours, tient son rang.
De l’autre côté, c’est comment ?
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On imagine les parfums, le foulard, la bague. On n’en imagine pas davantage, ou alors le prix, la griffe en toutes lettres, l’intimidation qu’ils provoquent. Figés, évanescents, gainés dans leur XIXe siècle, sous la chape du XXIe, les grands magasins seraient-ils restreints à ces seules images ? Envisagés comme des espaces clos avec fondations, trouées vers le ciel, pourrait-on leur prendre, leur voler quelque chose ? Examiner ce qui circule dans les rayons, va-et-vient d’étage en étage, ce que personne jamais ne voit ? Apurer les comptes, ne conserver que cette trame : les souvenirs, l’entêtement ; les fantasmes du bout du monde ; leur peu de poids ; le temps perdu. Embusqué dans les angles morts, considérer l’inerte, les conditions d’embauche, les horizons d’attente, les sorties de secours.
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C'est dans le magasin désert que le réalisateur la cadre finalement en entier. Là où personne n'a plus à faire, dans le luxe de l'espace retrouvé, du silence qui s'impose, Simone a tout loisir d'observer ce que, obnubilée par les clientes, les vendeuses, elle n'a pas eu le temps de détailler : les mannequins suspendus à deux mètres, les panneaux qui annoncent les soldes (les soldes... soupire-t-elle, et l'on sent qu'elle avait oublié jusqu'à leur existence), les indications et slogans, notes qu'on accroche partout ("raffinement, jeu de lumières, élégance et dentelles, twin-set, mousseline"). C'est le lieu qui nous parle, maintenant, tandis qu'en voix off Simone Signoret analyse ce qui la sépare de nous, les femmes quotidiennes. Ou plutôt des autres, ces femmes quotidiennes que nous ne serons pas.
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L’univers, jusque là réduit à la proximité de la ville sentinelle ceinte de murailles, s’était ouvert brusquement, semblable aux rêves décousus d’espace que l’on fait, ceux qui gardent au matin ce goût de lune étrange. (TB)
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la rue plutôt la rue hurlais-tu face à la brasserie.
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Une minute complices c’est ainsi que tu te le représentes et le maton aussi incrusté dans la pierre, derrière nous, qu'il bruine, qu'il s'évapore, se déleste un instant du soupçon qui lui pèse.
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