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Critiques de Arthur Koestler (166)
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Un testament espagnol

Un testament ou les pensées d'un homme incarcéré et qui s'attend à être fusillé à n'importe quel moment.

J'ai trouvé ce texte, ces souvenirs, ces pensées et ces analyses éclairantes et parfois émouvantes.

Comme souvent, la nature se révèle dans le meilleur ou le pire dans ces situations où des hommes assoient leur pouvoir sur d'autres hommes.

Alors oui ce "testament" est écrit alors qu'Arthur Koestler est libre après 4 mois de captivité mais il tente d'être le plus près possible de ce qu'il a ressenti pendant cette période terrible d'incertitude.

C'est un texte vivant, le plus honnête possible, touchant et pince-sans-rire à plusieurs égard.

Un témoignage qui marque.
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Les call girls

Les call-girls: Arthur Kœstler

Le prologue ou entrée en matière de ce roman est assez surprenant puisqu’on découvre Jésus invectivant son Dieu qui l’a abandonné alors qu’il monte au Golgotha sous le poids de sa croix, l’accusant de ne point s’apercevoir des abominations ni de la désolation du monde qu’il a créé. « Eli, Eli, comment peux-tu supporter de voir cela ? O toi obscur esprit, vapeur du désert, ignoble absence, ô tu n’existes pas, tu n’as jamais existé. Rien qu’une parabole, et ma mort, encore une parabole… ! fait l’auteur s’exclamer Jésus agonisant.

Le professeur Hector Burch, spécialiste du comportement, accompagné du frère Tony Caspari et de Harriet Epsom se rendent en car au village de montagne de Schneedorf en Suisse pour un colloque pluridisciplinaire organisé par le professeur Nikolai Borisovitch Solovief.

Au cours de la conversation qui bat son plein à l’intérieur du bus, Harriet déclare en une métaphore qui donne son titre au roman, que toutes les sommités universitaires et autres éminents spécialistes qui toute l’année durant parcourent le monde de séminaires en congrès, ici présentes sont les call-girls de la science ce qui fait sourire d’assentiment Hector et Tony.

Au total, ils sont une douzaine à se retrouver dans le décor alpestre du Kongresshaus de Schneedorf, accueillis par le directeur des lieux Gérald Hoffman. On note quelques personnalités très charismatiques comme le professeur Otto von Halder , un roi Lear personnifié pour qui c’est l’agressivité qui caractérise l’Homme, et un certain Valenti , neurochirurgien nobélisé et chasseur de lolitas impénitent.

Le but de ce rassemblement de sommités mondiales dans leur spécialité : envisager le devenir du monde et en faire élaborer un plan de sauvegarde face à la démence suicidaire de l’homme. Rien que cela !

Ainsi pendant les beaux jours d'un été qui précède une troisième guerre mondiale, douze intellectuels de renom se réunissent pour aborder ces sujets.

Tout commence comme il se doit par les saturnales rituelles du cocktail de bienvenue afin de faire connaissance, quoique, aujourd’hui, les présentations ne soient guère nécessaires, la plupart des invités s’étant déjà rencontrés ailleurs dans les mêmes circonstances.

Nikolai, russe émigré aux États-Unis, l’organisateur, est un personnage étonnant, prix Nobel de physique, pianiste réputé, adepte comme les pythagoriciens des mystères orphiques, pythagoriciens pour lesquels le mystère ultime étaient les formes géométriques et les relations mathématiques. Il est un bon vivant et sa femme Claire le qualifie d’hédoniste mélancolique.

C’est lui qui ouvre la séance par une allocution de vingt minutes. Dans un langage aussi simple que précis, il rappelle les principaux facteurs qui rendent invraisemblable la survie de l’humanité. La conférence, selon lui, a une triple tâche : analyser les causes de la maladie humaine, proposer un premier diagnostic de la situation actuelle, explorer les remèdes possibles.

À la suite les débats s’engagent, philosophiques et scientifiques et rapidement en plus des duels de personnes, il se forme deux clans farouchement opposés sur le constat. Certains participants, les moins audacieux, se contentent pour l’heure d’une vocalisation subliminale ou d’un comportement verbal intériorisé ! Par contre von Halder persiste à penser et le proclame haut et fort que la tragédie de l’homme est de naître avec des instincts de meurtrier, propos que Harriet confirme en précisant que la tragédie de l’homme, c’est aussi d’avaler goulûment des croyances pour lesquelles il doit tuer et se faire tuer avec un admirable esprit de sacrifice, les critères de la logique ne s’appliquant pas ici parce que le dévouement et l’esprit de sacrifice obéissent à l’émotion et non à la raison.

Solovief abordant la question sous un autre angle explique : « Les dauphins voyagent beaucoup, mais quand ils rencontrent un dauphin étranger dans l’océan, ils n’ont pas besoin d’interprètes. Or l’humanité est divisée en 3000 langues différentes ce qui provoquent des divisions entre les groupes humains. Le langage est le principal agent qui fait triompher les forces de rupture sur les forces de cohésion d’un bout à l’autre de l’histoire de notre espèce. » Plus tard évoquant les découvertes de la physique moderne, il rappelle la phrase de Niels Bohr qui disait que « plus c’est fou, plus c’est beau ! »

Pour le Dr Valenti, l’homme tel qu’il est, est une bévue de l’évolution dont le résultat est que le cerveau ancien et le cerveau neuf, l’émotion et la raison, coexistent péniblement, quand ils ne sont pas en conflit ! Il existe une dichotomie dans les fonctions du cortex ancien et du néocortex qui expliquent les différences entre comportement émotionnel et comportement intellectuel. Ainsi l’homme serait un raté de l’évolution, une sorte de monstre : monstre admirable qui bâtit des cathédrales et compose des symphonies, mais un monstre quand même, affligé d’impulsions innées qui le poussent irrésistiblement à se détruire.

Par son humour, son information, les perspectives scientifiques qu’il ouvre et les réflexions qu’il suscite, ce roman d’Arthur Kœstler ne peut que passionner les lecteurs curieux des espoirs fondés sur la science. Sous une forme légère, l’auteur traite de sujets graves. Un livre étonnant aux dialogues soutenus et percutants, qui à chaque page fait réfléchir. Donc à lire absolument.

Extrait : « Parce que l’on est obsédé par les horreurs qui menacent l’humanité, faut-il s’interdire le plaisir d’être en vie ? » Il semble bien que cette sentence optimiste reflète la pensée ultime d’Arthur Kœstler.







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Le Zéro et l'infini

Roubachov est un ancien de la révolution et du parti communiste soviétique.

Il s’est battu, il a eu des responsabilités…

Mais les temps au changé.

Il faut accabler ceux qui sont maintenant des contre-révolutionnaires.

Ceux qui sont « contre » Staline et la nouvelle garde du parti.

Emprisonné, Roubachov doit-il s’incliner ? avouer ? se révolter ?



Véritable plongée dans un système totalitaire à l’arithmétique spéciale.

L’individu est un voire zéro car quand on divise par le peuple par un million, il ne reste rien. Rien qui n’a de valeur.

Roubachov sait que sa vie est en jeu. Il est condamné d’avance.

Il a le choix entre un traitement administratif ou un procès.

Un procès de l’ère Stalinienne.



Dans sa cellule, il se souvient quand lui-même, pièce du jeu politique, il excluait ceux qui déviaient de la « doctrine » d’alors.

L’isolement le conduit à réfléchir sur la révolution, le mouvement, la politique, le peuple.



À quel moment, la « raison » révolutionnaire s’est-elle dévoyée ?

Le parti a-t-il jamais compris et représenté le peuple ?

La fin justifie-t-elle les moyens ?

Moyens effroyables. On a fusillé, envoyés dans des camps pour prétendu sabotage, contre-révolution.



> Il n’existe que deux conceptions de l’éthique humaine, et elles sont diamétralement opposées. L’une est chrétienne et humaniste, elle proclame que l’individu est sacro-saint et affirme qu’on n’a pas le droit de faire de l’arithmétique avec du sang. L’autre repose sur le principe fondamental que le but collectif justifie les moyens, que non seulement il autorise, mais exige qu’on soumette l’individu à la communauté, de toutes les manières possibles, qu’on en fasse un cobaye ou un agneau sacrificiel



Quels genres d’homme peut sortir de cela. Qui est l’ « homme nouveau soviétique » ?



> Nous savons que l’histoire ne se soucie pas de la morale et qu’elle laisse des crimes impunis, mais que toute erreur a des conséquences et se paie jusqu’au septième descendant.



Le livre a une portée plus universelle que la simple peinture des purges staliniennes.

Il est beaucoup question de l’usage global de la violence, du rapport au peuple, de la capacité du peuple à résister, de sa maturité face aux changements de la société



> Tout progrès technique entraîne une complexité accrue du processus économique, l’apparition de nouveaux facteurs et de nouvelles intrications que, dans un premier temps, la masse n’est pas capable de discerner et de comprendre. Tout progrès technique subit entraîne donc dans un premier temps une régression intellectuelle relative des masses, une chute du thermomètre politique de la maturité



Vaste sujet que la maturité du peuple



> Le niveau de maturité politique d’un peuple détermine la dose de liberté individuelle qu’il est capable de conquérir et de conserver



Roman de son époque, il est pourtant terriblement contemporain



> Nous sommes indiscutablement confrontés ici à un mouvement pendulaire de l’histoire, de l’absolutisme à la démocratie et, dans l’autre sens, de la démocratie à la dictature absolue.


Lien : https://post-tenebras-lire.n..
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La Treizième Tribu : L'Empire khazar et son h..

Voici un livre d’histoire qui fit couler plus d’encre qu’il n’en utilisa lui-même ! Et pour cause : il développait l’hypothèse que la majorité des juifs d’Europe (Ashkénazes) n’avaient à peu près aucun lien historique avec la terre d’Israël…



Mais il faut d’abord présenter son auteur, Arthur Koestler. Juif hongrois né en 1905 dans l’ancienne Autriche-Hongrie, il adhère d’abord au sionisme, séjourne quelques temps dans un kibboutz puis rentre en Europe, rejoint le parti communiste et devient un agent secret du Komintern. Il couvrit la guerre d’Espagne et faillit être fusillé par les franquistes. Réfugié en France où il fut fort mal accueilli et interné, il aggrava son cas en se livrant à une dénonciation en règle du stalinisme dans ‘le zéro et l’infini’, ce qui lui vaudra l’hostilité du monde littéraire français, Sartre et Beauvoir en tête. Il s’expatriera une nouvelle fois vers l’Angleterre, dans l’armée de laquelle il s’engagera pour le reste de la guerre. Ce n’est qu’après 1945, et après bien des détours, qu’il s’intéressera à l’histoire de son peuple. Et une évidence le frappa alors : il y avait quelque chose qui ne collait pas dans son histoire a démographique. Un énorme bond en Europe de l’Est, à peu près à la période où, quelques centaines de kilomètres plus à l’est, le dernier royaume juif du monde s’effondrait…



Le livre est donc en deux parties. La première retrace l’histoire de l’empire Khazar en se basant sur les (très) rares informations disponibles, et la relie autant que possible à ses voisins de l’époque (Arabes, Byzantins, tribus slaves, Varègues, Petchenègues…) La deuxième est consacrée à ses théories sur l’origine des Ashkénazes.



Ce qui est intéressant dans la première, c’est donc le gros effort de recontextualisation, notamment sur l’arrivée des Varègues (c’est-à-dire les Vikings). Apprendre que ces derniers avaient intégralement pillé les rives sud de la Caspienne a été pour moi une grosse surprise ; je n’avais pas idée qu’ils avaient poussé aussi loin. De même, l’histoire des tribus slaves est retracée avec un effort perceptible pour exploiter le peu de sources disponibles. Pour le reste, l’histoire des Khazars en elle-même n’est connue que par une poignée de correspondances diplomatiques et de mentions dans les chroniques arabes et byzantines de l’époque ; on retrouve donc toujours les mêmes références dans tous les livres qui leur sont consacrés. L’archéologie n’a pas donné grand-chose, un barrage soviétique ayant noyé le site de leur capital, Itil.



La deuxième partie est plus complexe. La démonstration et les efforts de Koestler méritent le respect, mais ses faiblesses sont évidentes. Sans un outil comme l’ADN, permettant de retracer les différentes populations et d’évaluer l’apport de chacune, l’esprit le plus brillant est condamné aux spéculations. Depuis, les analyses réalisées ont largement invalidé ses théories, et montré que si un apport khazar est bien retraçable parmi les Ashkénazes, il est minime.



Cependant, on notera que Koestler démontre avant tout de manière éclatante à quelle point le royaume khazar devait représenter un phare dans la nuit pour un peuple juif partout ailleurs en bute aux persécutions et aux mesures discriminatoires. Que nombre d’entre eux s’y soient installé est donc une possibilité – même si encore une fois totalement impossible à prouver. La Khazarie a donc très bien pu être la matrice des Ahkénazes, quand bien même elle ne leur aurait apporté que peu de sang nouveau.
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Face au néant

J'ai lu ce livre dès sa parution. Je viens de le relire avec beaucoup d'intérêt. Des textes découlant de conférences faites par l'auteur. Des idées à méditer, de la clairvoyance sur l'avenir de nos sociétés. La dernière partie sur Gandhi donne le vertige : une réflexion sur le pouvoir et les faiblesses humaines.
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Le Zéro et l'infini

Super livre car c'est mon papa et ma maman qui me l'ont offert pour mon anniv (🎉) mais aussi pcq la couverture est top. Gros point négatif il y a zéro dessins à l'intérieur et comme je sais pas lire ca rend l'expérience un peu insipide. Allez bisous
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La tour d'Ezra

Rappels historiques :

En 1909, le premier kibboutz (village collectiviste) fut fondé en Palestine par des sionistes socialistes. En 1917, le ministre des Affaires étrangères britannique prôna la création d'un foyer national pour le peuple juif en Palestine (déclaration de Balfour).

En 1923, Hitler et ses partisans échouèrent lors de la tentative de putsch dit 'de la Brasserie'. En 1933, Hitler devint Chancelier. En novembre 1938, les nazis organisèrent des pogroms contre les juifs d'Allemagne et de ses nouveaux territoires (Nuit de Cristal du 9 au 10 novembre). Dans le Reich, les persécutions à l'encontre des Juifs s'amplifièrent ensuite.

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L'histoire du roman :

En 1937, Joseph et d'autres juifs arrivent en Palestine pour y fonder un nouveau kibboutz. Certains fuient les persécutions croissantes en Europe. Pour se défendre contre de probables attaques d'arabes voisins, ils bâtissent une palissade autour du village et une tour de guet en son centre : la tour d'Ezra (du nom d'un prêtre juif qui, selon la Bible hébraïque, a mené 5 000 exilés judéens de Babylone à Jérusalem en 459 avant J.C.).

Nous suivons la genèse de ce kibboutz et la vie de Joseph pendant trois ans.

Inspiré par son expérience, l'auteur décrit la difficile cohabitation entre les autochtones arabes et les nouveaux colons juifs. Déjà, dans chaque camp, certains veulent se débarrasser des autres par la force, rendant inopérantes les initiatives des partisans du dialogue. Koestler semble faire partie de ces derniers, voire croire à une possible cohabitation pacifique entre juifs et arabes en Palestine. Si c'est le cas sur ce dernier point, L Histoire ne lui a pas donné raison pour le moment… En décembre 2022, des extrémistes de droite racistes et des ultraorthodoxes juifs entrent au gouvernement de Nétanyahou ; Israël intensifie sa colonisation illégale en Cisjordanie ; en octobre 2023, tsahal bombarde Gaza et ses habitants...

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« La Tour d'Ezra » est un très bon roman d'Arthur Koestler.

De cet auteur, je préfère cependant les essais (en particulier son excellent 'Les Somnambules' consacré à des découvertes astronomiques du XVIème siècle) et les récits strictement autobiographiques ('Un testament espagnol').

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La tour d'Ezra

La Tour d'Ezra / Arthur Koestler (1905-1983)

Comme des voleurs dans la nuit…

En cette nuit de 1937, une colonne de camions tous feux en veilleuse se dirige sur une mauvaise piste de Galilée vers une zone de collines non loin du lac de Tibériade. Dina et Joseph, installés inconfortablement sur une bâche recouvrant la benne de leur camion, plaisantent et se font rappeler à l'ordre par Siméon qui réclame le silence.

Partis à deux heures du matin de la colonie de Gan Tamar située à une vingtaine de kilomètres, ils sont 150 hommes et femmes dont 120 de la colonie de Gan Tamar les accompagnant pour l'installation du camp de base fortifié. Beaucoup sont des « sabras », des jeunes nés en Israël. Les autres viennent pour la plupart d'Europe centrale, ayant fui les pogromes et autres autodafés, notamment la jeune Dina qui est restée marquée à tout jamais. Des membres de l'Haganah dirigés par un certain Bauman, organisation paramilitaire juive assurant la protection des colonies rurales (kibboutzim), les accompagnent.

le pays sous mandat britannique depuis 1923 subit la révolte des Arabes et les Anglais ne se préoccupent pas vraiment du sort des Juifs en général ni du lieu de la future colonie hébraïque en particulier, que les nouveaux colons rejoignent, animés par le rêve romantique et romanesque du Retour pour réaliser une utopie sociale, après deux milles ans d'exil. L'endroit a été acheté aux chefs de villages arabes par le Fonds national et déjà, avant même d'être arrivés, ils ont la tête pleine de projets. La future nouvelle colonie s'appellera la Tour d'Ezra.

Il faut savoir que bien que légalement achetée, la zone est contestée par certains villageois et c'est aujourd'hui la troisième tentative pour s'y rendre, la première ayant échoué sous une volée de pierres, la deuxième, il y a trois mois, sous les balles avec deux futurs colons tués.

le Mukhtar de Kfar Tabiyeh et son fils n'en croient pas leurs yeux au petit matin quand ils aperçoivent sur la colline de l'autre côté de la vallée qu'ils surplombent, la tour de guet installée et les jeunes colons vaquant à l'installation du camp tels des fourmis. En effet, c'est vers cinq heures du matin, juste avant le lever du jour, que la colonne de camions arrive à destination. Aussitôt le chef des nouveaux colons, Ruben, distribue les tâches.

Les colons sont pour l'instant 25, vingt hommes et cinq femmes. 12 femmes et 3 bébés les rejoindront plus tard. Les membres de ce groupe se connaissent depuis des années, années au cours desquelles ils ont appris à vivre ensemble. Ils sont Polonais, Russes, Anglais…etc.

le soir venu, les colons prennent un peu de repos avant la veillée nocturne et les conversations vont bon train quand est évoquée l'éventualité d'une attaque par les Arabes. Pour Siméon, la seule réponse à la violence et la violence : oeil pour oeil, dent pour dent ! La morale n'a pas à intervenir ici, et pour des raisons purement logiques, ils doivent opposer la terreur à la terreur.

La soirée se termine au son de la cornemuse et la danse de la « horra », une « horra » débridée, sauvage et joyeuse. C'est vers minuit qu'éclate le fracas des premiers coups de feu tirés contre la palissade du camp. Branle-bas de combat, chacun à son poste au son des cris et ordres hurlés dans « cette langue ancienne qui n'avait jamais été aussi mélodieuse qu'ainsi criée à travers le vent et la pluie dans la nuit, une langue sauvage et tragique mal faite pour des propos frivoles. » Une phrase du livre restée célèbre et que j'ai souvent entendue.

Il est cinq heures trente du matin, le soleil se lève, on déplore la mort du jeune Nephtali touché par une balle. Une journée s'est achevée. La première.

Ainsi se résume cette première partie de 100 pages sur les 435 du livre, une présentation qui permet de comprendre la suite de ce roman passionnant, fascinant et émouvant, émouvant surtout lorsque l'on a connu la vie en kibboutz comme ce fut mon cas par deux fois en 1963 et 1967 durant les mois d'été au cours desquels j'ai pu également parcourir l'ensemble du pays du nord au sud, et notamment la Galilée dans la région où se passe l'action du livre, et également le Néguev.

Une année a passé et les tensions avec les Arabes voisins se sont calmées. Joseph, le savetier, tient un journal et nous relate la vie de la colonie en cette année 1938, comme la constitution de leur quatuor à cordes, la location du tracteur aux Arabes de Kfar Tabiyeh contre une somme modique, l'arrivée de nouveau colons pour arriver à 41 membres, le nombre de 200 étant prévu pour la fin de l'année, la construction en dur du pavillon des enfants et de l'étable, alors qu'eux-mêmes vivent encore dans des baraques en bois, les relations hommes femmes au sein de la communauté, les questions politiques animant follement les conversations quand il s'agit de considérer l'attitude des Anglais. Et puis les relations toujours incertaines et agitées avec le monde arabe en général, quand bien même les rapports avec le village de Kfar Tabiyeh se sont apaisés. de nombreux thèmes animent la suite de ce livre magnifique, comme l'histoire de la ville de Tel-Aviv, les racines du conflit israëlo-palestinien, la vie dramatique de Dina, l'épopée des Juifs de Boukhara en Asie Centrale, le rôle de l'Haganah et de ses branches spéciales clandestines, l'Irgoun et le groupe Stern, qui agissent en coulisse.

1939 : les colons de la Tour d'Ezra, sont à présent au nombre de 300. C'est une oasis hors d'atteinte des ouragans qui bouleverse le monde avec une furie sans cesse accrue. Leur hymne se veut être le Cantique des Cantiques.

Extrait :« Exilés en Égypte il y a des millénaires, puis à Babylone, puis sur tout le globe, entourés d'étrangers hostiles, il s'est développé chez le Juifs des traits particuliers…Ils formaient la cible naturelle de tous les mécontents parce qu'ils étaient si exaspérément si anormalement humains…Privés d'un foyer dans l'espace, il leur a fallu s'étendre dans d'autres dimensions…Un pays est l'ombre que projette une nation ; pendant deux mille ans, nous avons été une nation sans ombre. »

A travers ce livre, véritable témoignage, c'est toute l'histoire de la naissance de l'Etat d'Israël et d'un peuple qui retrouve enfin sa patrie perdue après une errance de deux mille ans que nous retrace Arthur Koestler (1905-1983). La communauté socialiste d'Ezra s'est peu à peu courageusement établie sur une colline aride et désertique de Galilée. Il a fallu lutter sans cesse pour conserver cette parcelle de terre " symbole ", contre les intempéries, la maladie, la solitude, enfin, le découragement. Il a fallu survivre pour montrer aux autres nations qu'un Etat nouveau peut resurgir de ce désert. Koestler n'était pas seulement un incomparable analyste du monde concentrationnaire. Romancier vigoureux de la taille d'un Malraux, témoin lucide de son temps, essayiste, ce fils de famille juive hongroise était aussi un prophète.En effet, l'État d'Israël est né après la guerre, en 1948.

J'ai lu ce livre pour la première fois en 1963 de retour d'un séjour en Israël, puis en 1973 et je relis en ces jours d'octobre 2023 marqués par la tragédie des kibboutzim proches de la bande de Gaza.

Il est dommage que ce beau livre d'Arthur Koestler qui a vécu dans une colonie agricole (kibboutz) dans les années 20, soit aujourd'hui complètement éclipsé par le reste de son oeuvre et notamment « le zéro et l'infini ». Un beau roman humaniste dont on retiendra l'appel à la paix et la coexistence pacifique entre les hommes.







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Le Zéro et l'infini

Livre siderant sur le totalitarisme et son emprise sur la pensée. Décidément la réalité est plus incroyable et fascinante que la fiction ( ça reste un roman tout de meme)Je l ai lu d une traite comme un thriller facon"page turner" voici une vingtaine d année

Je n ai pas essayé un autre Koestler et c est un tord...mais ce bouquin c'est comme un Everest de la littérature, l impression qu on est au sommet, qu on n ira plus jamais plus haut.

Enorme

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Spartacus

Quand on a pour objectif de lire un péplum, on réfléchit d'abord à ceux qui nous viennent immédiatement à l'esprit. Mon amour pour les Nobels me guidait naturellement vers le Quo Vadis de Sienkiewicz, grand best-seller à son époque… sauf que je l'avais déjà lu et que je n'aime pas trop me répéter dans mes lectures, il ya tant à découvrir. Une figure s'imposa rapidement : Spartacus, le gladiateur révolté. La couverture du roman parla bien à ma mémoire qui gardait en elle quelques images de l'adaptation cinématographique avec Kirk Douglas : des combats avec filet, fourche, bouclier et tout l'attirail.



Je n'ai sans doute pas pu aller plus loin que ces quelques images étant enfant, la violence de ce genre de film ayant dû m'interdire une vision en intégralité, même si la vigilance parentale était plus lâche à mon époque. D'où ma surprise à la lecture du livre de Koestler ! Aucun combat entre les différents gladiateurs ici, mais bien la fuite face à la violence et le fait de s'entretuer que le public avide de sang leur imposait.



J'ironise bien sûr, cette fuite est épique et cette liberté n'est gagné qu'au prix de combats successifs face à l'oppresseur politique et militaire, mais il s'agit de combats militaires, de batailles rangées, pas de spectacles. Les affrontements successifs sont parfois assez répétitifs et lassants, mais le message adressé est de plus en plus clair. Koestler est un ancien militant communiste, né à Budapest. Il quitte le parti en 1938 à la suite des procès de Moscou et en opposition avec le stalinisme. Spartacus est publié en 1939…



Comment ne pas donc voir dans cette belle idée de départ de la lutte des esclaves qui finit par se transformer en tyrannie une transposition trait pour trait de la trajectoire de l'idéologie marxiste et de sa réalisation concrète manquée dans le communisme russe ? Le message parait évident… mais n'est-ce pas aussi l'histoire qui pousse à ce parallèle, dans son éternel recommencement ? Car l'histoire de Spartacus et de sa révolte n'est pas une fiction. La guerre servile qu'il a mené contribuera à fragiliser une république romaine remplie d'injustice et d'inégalités…. et à faire tomber le peuple dans les bras de l'Empire. Et comment ne pas y voir aussi un parallèle avec cette Révolution Française qui accouche d'une première république dans le sang…. pour se réfugier elle aussi dans les mains de l'empereur pour le retour à un ordre rassurant ?



Cette lecture date de plusieurs mois et mes impressions sont donc trop floues pour constituer une critique cohérente. Au-delà de certaines lenteurs du récit, ce roman m'aura plongé dans des réflexions politiques et historiques bien plus profondes que celles que je m'attendais à trouver dans un péplum. Comme pour tous les genres littéraires, il est dangereux de généraliser, les plus grands représentants de chaque genre le sont souvent devenus parce qu'ils savaient apporter plus que les autres, refléter à travers eux bien plus loin que le sable des arènes et le sang des combattants.

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La lie de la terre

La lie de la terre /Arthur Koestler

Il y a des livres que l’on relit cinquante ans après. Et on a l’impression de ne les avoir jamais quittés. C’est le cas de ce récit autobiographique du grand écrivain et aventurier que fut Arthur Kœstler. Il faut savoir que toute la vie et l’œuvre de Kœstler furent liées aux turbulences du XXé siècle.

Cette histoire donc est son histoire. Alors qu’il passe des vacances tranquilles dans le midi de la France, la deuxième guerre mondiale éclate. Hongrois de naissance donc neutre, mais résident en Angleterre et écrivant pour des journaux anglais et américains , il est arrêté comme nombres d’étrangers en ce mois d’octobre 1939. Il règne alors une ambiance terrible en France où tout étranger est suspecté d’appartenir à une cinquième colonne imaginaire. Pas si imaginaire que cela en vérité. Mais la cible n’est pas la bonne. Nombre de Français coopèrent avec le régime nazi après que Chamberlain et Daladier se soient agenouillés devant le Führer. A noter en particulier le politique de Georges Bonnet, alors ministre des affaires étrangères puis de la justice, qui pratique une politique xénophobe et antisémite, complice de Von Ribbentrop pour tenter de trouver une solution au « problème juif » en France. Pétainiste il put mettre en action sa politique pronazie. Après la guerre, il s’exila en Suisse avant de revenir et se faire élire député de Dordogne de 1956 à 1968. En toute tranquillité.

Je cite : »…les conditions de vie des Allemands nazis étaient plus confortables dans les camps que celle des Allemands antinazis. Les premiers étaient protégés par la Croix-Rouge internationale et la crainte de représailles sur les français prisonniers de guerre en Allemagne… »

« …Il est intéressant de remarquer que pratiquement la xénophobie française n’était qu’une variante nationale, un ersatz de l’antisémitisme allemand… »

Parqué sans raison spéciale dans un premier temps avec des milliers d’autres étrangers au stade de Roland-Garros, Kœstler subit les affres de la faim et du froid et puis c’est la déportation vers Le Vernet au fin fond de l’Ariège, dans un camp de concentration terrible, mais où heureusement on n’extermine pas.

Ce récit est très intéressant dans sa description de l’état d’esprit en France en ces premiers jours de guerre alors que le Führer vient d’envahir la Pologne. Il est un hommage aux persécutés, aux traqués et aux indésirables de toute l’Europe en raison de leur origine et de leur croyance. Nous sommes en 1939 et ce petit nombre d’hommes courageux croyait à la liberté face à la montée du fascisme européen.

Kœstler est un habitué des camps : en effet, lors de la guerre d’Espagne, il fut arrêté par la police franquiste pour avoir écrit des propos désobligeants dans un journal anglais sur le contingent italo-allemand venu prêté main forte au Caudillo pour écraser les républicains. Il sera condamné à mort et n’aura la vie sauve qu’après une longue détention et un échange de prisonniers à la fin de cette guerre civile.

Ce livre et écrit avec précision, intelligence, et parfois humour. Les analyses politiques et psychologiques sont profondes et justes. Nombres d’événements passé sous silence de cette période sombre, triste et honteuse de l’histoire de France sont exposés là : c’est une mine d’informations que pour la plupart j’ai découvertes. La désagrégation puis l’effondrement total de l’administration française en ces derniers mois de 1939 sont particulièrement bien explicités qui aboutissent à des situations ubuesques mais graves et tragiques pour les ressortissants étrangers.

Je cite : « Pour un prisonnier du Vernet, essayer de prouver son innocence équivalait à se taper la tête contre un mur…Il n’y avait aucun corps responsable à qui s’adresser…Les dossiers du Vernet ne furent jamais ouverts jusqu’au jour où la Gestapo arriva qui, elle, ouvrit les dossiers. » On connaît la suite : Pétain livra les prisonniers au Führer. Excepté quelques rares qui étaient parvenus à partir avant, grâce à des appuis internationaux, notamment des écrivains, des journalistes etc..

Je cite : « le crime fut consommé lorsque Philippe Pétain, maréchal de France, accepta le paragraphe du traité d’armistice, qui demandait l’extradition des réfugiés politiques, tandis que ses lèvres séniles bredouillaient une « paix dans l’honneur » !!!

C’est un livre fort, très fort qu’il faut absolument avoir lu. Que l’avenir nous préserve d’un retour de ce genre de situation !



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Le Zéro et l'infini

Le Zéro c'est l'individu, ramené à son néant indistinct, broyé par l'Infini du totalitarisme qui a tout pouvoir sur lui.

Ce roman commence par l'arrestation de Roubachov, ancien n°2 du Parti, et montre comment il sombre progressivement dans le renoncement, l'abdication, les ténèbres du fond de la cave où il est interrogé, sous la lumière éblouissante de la lampe braquée sur lui. Plus rien n'a de sens, ni son passé, ni ses aveux, la vérité n'existe pas dans cet État qui n'est jamais nommé mais dont les sources d'inspiration, en 1940, sont aisément identifiables. Les bourreaux d'un jour sont les victimes du lendemain, on trompe ses amis comme ses ennemis et pour ne même pas sauver sa peau. Dans l'alternance des pensées, des interrogatoires et du journal de Roubachov, l'auteur donne à voir un monde aux valeurs fluctuantes, où chacun joue sa vie sur des détails insignifiants, pensant toujours obéir à sa propre ligne mais sans jamais savoir si elle suit ou dévie de celle qu'il faut suivre absolument. Ainsi se trouve mise en évidence une partie des rouages sur lesquels repose le totalitarisme et qui n'a pas manqué d'inspirer George Orwell dans ses deux ouvrages majeurs. Les pensées du personnage reposent sur une grande base théorique, mais son propre questionnement ne manque pas d'interroger le lecteur sur les limites et l'absurdité des comportements humains, d'autant plus proches de zéro qu'ils croient tendre vers l'infini.
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Spartacus

Spartacus / Arthur Kœstler



Je viens de relire pour la troisième fois l’œuvre magistrale d’Arthur Kœstler éditée pour la première fois en 1939 et rééditée plusieurs fois. La dernière réédition date de 2006. Très belle et scrupuleuse reconstitution historique mais pas seulement, ce roman raconte l’histoire épique d’un impossible rêve de liberté, celle de la révolte servile de Spartacus le Thrace et des siens, gladiateurs, esclaves et tous les laissés pour compte. En 73 avant J.C., soixante-dix gladiateurs décident de s’enfuir de l’école de Lentulus afin de ne plus combattre contre les fauves lorsqu’ils sont vainqueurs. Et la horde de belluaires va grossir au cours de pérégrinations à travers la Campanie et la Lucanie jusqu’à compter plus de 6000 esclaves. Les faits ont été relatés avec soins par les historiens antiques tels que Florus, Appien et Eutrope. Pendant trois ans, les légions romaines vont être taillées en pièces par cette armée de va-nu-pieds, redoutable, courageuse mais souvent indisciplinée et rétive, emmenée par Spartacus.

Mais en 71, dans la région du Brutium, les troupes de Crassus vont avoir raison des procrastinations de Spartacus. Six mille esclaves seront crucifiés tout au long de la Voie Appia entre Rome et Capoue.

Aujourd’hui, le nom de Spartacus est symbole de révolte, de révolution et de liberté. Né libre en Thrace vers 100 av J.C., il fut fait prisonnier et enrôlé de force dans la légion romaine, puis vendu à Lentulus qui en fit un gladiateur. La personnalité de Spartacus est complexe et composite. Révolté mais avec des faiblesses, une certaine indécision liée aux doutes qui l’assaillent quant à l’attitude à adopter avec ses hommes : toutes ces données expliquent l’échec de cet homme courageux qui en vérité pécha par idéalisme excessif en voulant créer la cité utopique de ses rêves. Il eut fallu qu’il devînt un dictateur pour venir à bout de ses troupes désobéissantes. Il refusa de se laisser aller à une tyrannie implacable et impitoyable : en hésitant, il condamna la révolution.

Au fil des chapitres, Kœstler tisse une trame idéologique qui fait de ce roman très bien écrit une œuvre de référence, un chef d’œuvre aux accents philosophiques. C’est un récit d’aventures autant qu’une tragédie politique, presque classique, une histoire saisissante de cruauté et de brutalité.

Quelques extraits : « Ce sont les circonstances qui font les héros et l’inverse n’est pas vrai. Seulement, les circonstances choisissent aussi l’homme qui convient. »

« L’héroïsme est le produit de l’inaptitude de l’homme à soutenir son idéal contre des forces étrangères. »

« Maint ami du peuple s’est mué en tyran, mais l’histoire ne saurait citer un tyran qui ait fini dans la peau d’un ami du peuple. »

« Un tyran plein de bonnes intentions est infiniment plus dangereux qu’un fauve carnassier… »

Grandiose.

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Le Zéro et l'infini

J'ai lu avec beaucoup d'intérêt dans cette nouvelle traduction ( j'avais lu le livre une première fois il y a 30 ans et je me souvenais presque de rien, j'ai eu un peu honte...). Le personnage principal est isolé dans une cellule, en attendant d'être - longuement, très longuement- interrogé par le NKVD. Il communique ponctuellement avec ses voisins en tapant sur les murs et cela donne lieu aux rares dialogues détendus (si non peut dire) du livre. On est à Moscou dans les années 1930, ce sont les procès de Moscou. Enfin on le suppose car le livre donne tantôt des éléments précis sur l'URSS, et parfois se situe dans un pays à la limite de l'invention. Staline est d'ailleurs appelé N°1 dans le livre. La Sibérie n'est pas nommée en tant que telle. J'imagine que cela contribue à la portée universelle de ce livre qui précède 1984 dans la dénonciation puissante du totalitarisme, même si le livre n'englobe pas exactement nazisme et stalinisme.

Le livre constitue une vaste et ambitieuse réflexion sur les moyens que l'on peut employer au nom de ses idées, dans le cadre par exemple d'une révolution. Il y a vraiment des pages exceptionnelles à ce sujet. On sera presque surpris de voir Dostoïevski (celui de Crime et Châtiment) cité dans le texte pour argumenter en faveur de l'humanisme, quand on a pris l'habitude, récemment de limiter ce grand auteur à ses sentiments excessivement nationalistes.

Le livre est incontestablement beau et tragique. J'ai été sensible aux pages décrivant par ailleurs les amours du narrateur avec une secrétaire, moment de poésie douloureuse dans un univers terrifiant.

Toutefois je n'ai pas été sensible à toutes dimensions du livre et j'ai trouvé un peu datées certaines pages qui tendent à ressembler à une dissertation de philosophie.

Néanmoins j'ai été impressionné par cette dénonciation puissante du totalitarisme soviétique.
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Le Hasard et l'infini

Le discours de la science, sous-engeance du discours capitaliste et précurseur de la parlotte technologique, entérine le déni de la castration et le fantasme d’accès à une vérité pleine et unanimement déclinable à chacun. Il se gausse de tous les phénomènes qui ne se laissent pas capturer dans son champ. Lorsque le discours de la science se heurte à l’impossible de la méthode scientifique, aucun de ses adeptes ne remettra en cause cette méthode. En revanche, il tiendra la valeur du phénomène pour nulle ou proposera de ranger le phénomène dans la catégorie des expériences occultes, c’est-à-dire des expériences qui seront matériellement explicables lorsque les progrès du discours scientifique auront encore abrasé un peu plus la liberté des choses à ne vouloir rien dire.





Arthur Koestler a rédigé deux courts essais consistant en une interprétation philosophique d’expériences scientifiques dont l’objectif était de prouver statistiquement la télépathie. L’expérience est la suivante : des images sont projetées sur un écran devant des individus représentant des « émetteurs » tandis que, dans des cabines isolées, un échantillon de récepteurs doit essayer de reconstituer l’image projetée par des mots ou des dessins. Le tri des résultats est plus délicat. De premiers biais peuvent intervenir dans l’interprétation des dessins et des mots dont le degré de pertinence avec l’image réellement projetée peut être plus ou moins grande. L’évaluation statistique vise ensuite à estimer si le nombre de « réussites » est supérieur à celui qu’aurait pu donner le simple hasard. Dans ce cas, les « scientifiques » estiment que la télépathie est scientifiquement prouvée, donc qu’elle existe, évidemment. Tout phénomène à l’ère scientifique se trouve dans la même délicate situation que le chat de Schrödinger : inexistant tant que l’œil scientifique ne s’est pas posé sur lui.





Si Koestler introduit heureusement quelques interrogations sur le hasard dans les deux premières parties du livre (comment le distinguer de la chance, par exemple), le dernier chapitre rédigé par Robert Harvie s’y consacre plus complètement. L’orientation du chapitre reste malheureusement toujours portée par l’envie de résoudre, c’est-à-dire de faire entrer un phénomène dans une catégorie close pour ne plus avoir à y penser. Nous pensons alors à ce formidable passage des Shadoks :

« Pour les aider à se débarrasser de tout ce qu’il ne fallait pas savoir, les Shadoks avaient créé l’Antimémoire. C’était un grand machin à base de mécaniques subtiles, telles que poubelles à tiroirs, concasseurs de connaissances, broyeurs à savoir, etc. On le promenait de chaumière en chaumière et il récupérait tout ce que les Shadoks pour leur hygiène culturelle étaient obligés d’oublier. Quand par maladresse, paresse ou inadvertance, le Shadok, dans un moment d’oubli en quelque sorte, se souvenait de quelque chose, l’Antimémoire rappliquait dare-dare. On lui disait "je veux pas le savoir" et l’Antimémoire aussitôt jetait ça dans ses tiroirs. Le reste du temps, il vivait dans les champs où il ruminait de la mathématique et de la cybernétique, de la logique formelle et du calcul différentiel. La civilisation shadok grâce à ses soins allait bon train. L’Antimémoire grandissait en âge et en vigueur. Ce n’est que beaucoup plus tard qu’il prit le nom d’ordinateur ».





Robert Harvie porte son espoir sur les dernières spéculations de la physique tutti quantique pour tenter d’intégrer les phénomènes qui échappent encore au discours scientifique. La tentative semblera réussir si le phénomène en est réduit artificiellement à des données quantitatives, au prix d’accommodements rendant la science toujours plus bancale. Ains, le discours scientifique continuera de perdre en crédibilité à mesure qu’il refusera d’accepter que son locuteur, le scientifique, ne puisse accéder à l’entière objectivité de son étude des choses, étant lui-même toujours séparé des choses par le langage qu’il utilise pour les décrire.

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Le cheval dans la locomotive : Le paradoxe ..

Ils ne sont pas si nombreux les écrivains qui ne se contentent pas d'imaginer des fictions, mais tentent aussi de réfléchir à la condition humaine en rédigeant de véritables thèses nécessitant des années de travail et d'immenses lectures touchant de nombreux domaines de la connaissance : philosophie, science, sociologie. Arthur Koestler est de ceux-là. J'ai découvert Arthur Koestler non pas en lisant ses romans politiques comme « Le zéro et l'infini » mais par son essai « Les somnambules » qui traite de l'histoire de la science astronomique. C'est ce livre qui m'a donné envie d'en savoir plus à propos de cet auteur et de découvrir ses autres essais. le thème de son ouvrage « Le cheval dans la locomotive » a particulièrement attisé ma curiosité compte tenu de ce qu'il se passe aujourd'hui dans le monde. Rappelons d'abord que cet ouvrage a été publié pour la première fois en 1967. L'auteur y défend l'idée selon laquelle l'homme serait un être inachevé, encombré d'un cerveau ayant subi un développement trop rapide qui ne lui permet pas d'opérer une liaison satisfaisante avec son cerveau primitif reptilien qui vient encore perturber son comportement. Koestler est fasciné par ce dualisme qui fait de l'homme un janus écartelé entre le génie et la folie. L'évolution a-t-elle commis une erreur ? L'humanité est-elle condamnée à ce que ses ailes de géants l'empêchent d'avancer entre un progrès scientifique exponentiel et un progrès moral qui stagne ? L'auteur tente d'apporter des éléments solides et scientifiques pour appuyer sa thèse et aussi pour exposer une solution. L'ouvrage est divisé en trois parties de longueur sensiblement égale ; l'ordre, le devenir, le désordre. Chacun des chapitres expose une critique des approches scientifiques permettant de décrire l'homme. Il critique par exemple le behaviorisme qui prétend pouvoir rendre compte du comportement humain et animal sans recourir au concept philosophique d'esprit ou de conscience. À l'appui de son raisonnement, il donne des exemples concrets notamment sur la manière dont est compris le langage par le cerveau, non pas comme une suite de mots, mais comme un ensemble d'idées appartenant à un contexte. Il se lance également dans une théorie personnelle d'explication de la structure globale du vivant et de la matière : la théorie du Holon (c'est quelque chose qui est à la fois un tout et une partie). Ainsi de chapitre en chapitre on passe des facteurs de la créativité humaine à la critique du darwinisme, car selon l'auteur le fait d'expliquer l'évolution par des mutations dont certaines sont conservées parce qu'elles apportent un avantage concurrentiel dans la lutte pour la vie n'est pas une explication suffisante. « On ne saurait avoir une mutation A se produisant seule, la conserver par sélection naturelle, puis attendre des milliers d'années pour que la mutation B viennent la rejoindre, suivie par C beaucoup plus tard, et par D. Chaque mutation se produisant seule, disparaîtrait avant de ne jamais pouvoir se combiner à d'autres ». Page 131 « Beaucoup d'organes sont choses fort complexes et, pour introduire dans leur fonctionnement un perfectionnement quelconque il faudrait espérer des modifications simultanées dans plusieurs caractères différents… et c'est là, semble-t-il, ce qu'on n'attendrait pas de la seule influence du hasard ». Page 133



Ce n'est que dans les derniers chapitres que l'auteur aborde son idée principale, qu'est-ce qui fait la folie des hommes, qu'est-ce qui explique que l'homme soit le seul animal capable de tuer ses congénères ? Un instinct interdit aux animaux sauvages de s'entretuer avec des animaux de leurs espèces (sauf cas exceptionnel), l'homme lui ne semble avoir que très peu d'interdits en ce domaine au point qu'il organise même des massacres de masse, génocide, sacrifices humains etc…



Les prophètes, les philosophes ont depuis plus de 2000 ans tenté de trouver un remède à la violence humaine, sans y parvenir. La raison de cet échec tient d'après l'auteur, à une série d'erreurs en ce qui concerne les causes qui ont poussé l'homme à faire de son histoire le gâchis que l'on sait. La première de ces erreurs est d'accuser de tout le mal l'égoïsme et la cupidité, autrement dit les tendances de l'affirmation de soi, les tendances agressives de l'individu. Arthur Koestler pense que les tendances à l'intégration sont incomparablement plus dangereuses que les tendances à l'affirmation du moi. Page 235.



Voici comment il explique son idée : dans les holocaustes de l'histoire, les poussées d'agressions individuelles égoïstes n'ont joué qu'un petit rôle ; les massacres ont toujours été, avant tout, des offrandes aux dieux, au roi, à la patrie ou au bonheur futurs de l'humanité. Les crimes de violence commis pour des mobiles personnels égoïstes sont historiquement insignifiants par rapport à ceux que l'on a perpétrés par esprit de sacrifice à un drapeau, un chef, une croyance religieuse ou une conviction politique. Quelle que soit l'époque considérée, ancienne, moderne ou préhistorique, tout indique que la tragédie humaine a pour cause le dévouement plus que la violence. « Le pire des fous est le saint enragé », cet épigramme de Pope s'applique à tous les grands moments de l'histoire (Page 236).



Je tente de résumer sa pensée en disant que les causes de la cruauté et de la folie des hommes c'est l'égoïsme, la cupidité, mais surtout les croyances religieuses et l'idéologie politique.



Autrement dit, l'auteur soupçonne qu'il y a quelque chose de détraqué dans l'esprit humain et cela depuis toujours. L'auteur se demande si « l'homme ne recèle pas dans son crâne un défaut de construction qui le menace d'extinction… Un tel soupçon vient en premier lieu de la rapidité extraordinaire de la croissance du cerveau humain dans l'évolution… et l'insuffisance de la coordination entre l'archicortex et le néocortex, entre les zones de notre cerveau qui sont phylogénétiquement anciennes et les zones nouvelles, spécifiquement humaines, qui ont été superposées aux premières avec tant de hâte. Une dichotomie dans le fonctionnement du cortex ancien et nouveau qui pourrait rendre compte des différences entre son comportement émotif et son comportement intellectuel. (page 275)



Tout se passe comme si l'homme était doté d'un cerveau surpuissant dont il ne maîtrisait pas le mode d'emploi. La vision de l'auteur est assez pessimiste, il cite Hegel : “Ce que l'expérience et l'histoire nous enseignent, c'est que les peuples et les gouvernements n'ont jamais rien appris de l'histoire ni jamais agi d'après des principes déduits de l'histoire” Page 327. Clairement Arthur Koestler pense qu'une guerre nucléaire n'est pas à exclure avant la fin du siècle.



Cependant il pense qu'il n'est pas utopique de vouloir guérir l'homo sapiens. Les progrès de la science laissent penser que cela pourrait être une solution. Il envisage la modification du comportement humain par un traitement chimique du cerveau. Il reconnaît que cette perspective n'est pas idéale, qu'il faille compter sur la chimie moléculaire au lieu de renaître spirituellement, mais il pense que nous n'avons pas le choix. (Page 339)



Comme le lecteur, dit-il, j'aimerais mieux mettre mon espoir dans la persuasion morale par la parole et par l'exemple. Malheureusement nous sommes une race de malades mentaux et en tant que tels, sourds à la persuasion. (Page 339).



Cette vision de l'humanité est celle qu'un auteur génial, érudit et très documenté pouvait avoir dans les années soixante compte tenu de l'état des connaissances et de l'état des sciences à l'époque. On aimerait avoir son avis aujourd'hui. Arthur Koestler est décédé le 1er mars 1983 à Londres.



— “Le cheval dans la locomotive — le paradoxe humain”, Arthur Koestler, Les belles lettres (2013) 372 pages.
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Spartacus

A travers cette fresque historique relatant la révolte des esclaves menée dans les années 70 avant J.C. par deux gladiateurs du cirque Lentulus, Spartacus, le thrace, et Crixus, le gaulois, Arthur Koestler évoque une tentative remarquable de création d'une ville libre nommée " la cité du soleil", fonctionnant en marge de la société romaine de l'époque, mais aussi son impossibilité à tenir sur la durée et bien évidemment sur les conséquences de cet échec sur les populations concernées et sur les meneurs. Ces derniers, après la destruction de cette "cité du soleil", prirent alors des chemins différents.

Cette révolte avortée, à laquelle s'étaient joints les citoyens les plus pauvres de Rome, restera pourtant dans l'Histoire de l'Antiquité l'image d'une des premières secousses marquantes, par sa durée, son organisation et la personnalité de ses instigateurs, auxquelles le monde romain eut à faire face de l'intérieur. et qui révèlera la fragilité de cet empire.

Au delà de la narration de cet évènement historique, l'auteur incite le lecteur à une réflexion sur le véritable sens de la liberté et sur ses limites.

Un très beau livre.
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La Treizième Tribu : L'Empire khazar et son h..

Au temps de Charlemagne, la partie de l’extrême est de l’Europe allant du Caucase à la Volga était dominée par un puissant état appelé l’empire Khazar, suzerain d’une vingtaine de petits royaumes bulgares, polonais, magyars ou rhus qui lui versaient tribu. À cette époque, les armées du califat, qui étaient parvenues à franchir les montagnes du Caucase, furent stoppées net par les armées khazars. Il s’ensuivit un conflit qui dura plus de cent ans. Ils permirent ainsi un certain répit à l’empire romain d’Orient en bloquant cette avancée à l’est pendant qu’à peu près à la même époque, Charles Martel en faisait autant à l’ouest du côté de Poitiers. Les Khazars étaient un peuple nomade. Ils avaient la réputation de ne jamais se laver, de porter les cheveux longs (blonds aux yeux bleus pour les « Khazars blancs » et bruns aux yeux sombres pour les « Khazars noirs ») et de pratiquer des sacrifices humains. Pris entre l’autorité de l’empereur byzantin chrétien et le calife musulman de Bagdad, la Khazarie finit par adopter la religion juive, histoire de conserver son indépendance. Mais la montée en puissance du peuple russe et surtout les grandes invasions mongoles signèrent la disparition de leur empire et leur éparpillement en Pologne et en pays magyar principalement.

« La treizième tribu » est un essai historique qui, s’il apprend pas mal de choses sur une des véritables origines du peuple juif, n’en demeure pas moins basé sur des sources peu fiables voire contradictoires (lettres de voyageurs, de diplomates, voire témoignages de seconde main…). Il reste certainement beaucoup à découvrir sur le sujet. Le lecteur y découvrira combien ces temps pouvaient être barbares. Ainsi les Khazars se débarrassaient-ils des gens qu’ils jugeaient trop intelligents. « Si tu en sais trop, on te pendra. Si tu es trop modeste, on te marchera dessus », disaient-ils. Il pourra revoir également pas mal d’idées reçues. À cette époque, le prosélytisme religieux était courant, la mixité aussi, tout comme les viols de captives. Résultat plus de peuple élu ni de race pure, mais une immense majorité de gens métissés. Koestler prouve ainsi que l’idée d’une « race » juive issue uniquement de Palestine est un leurre. Si les Séfarades (juifs d’Espagne puis du Maghreb peuvent se prétendre d’une lointaine origine moyen-orientale), les Ashkénazes (descendants directs des Khazars éparpillés en Europe de l’Est) sont d’ascendance turco-mongole, voire aryenne d’Inde. Rien n’est simple en ethnologie historique. Ouvrage intéressant pour une première approche du sujet.
Lien : http://www.bernardviallet.fr
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Le Zéro et l'infini

L’action se passe dans un pays totalitaire qui n’est pas nommé mais dont on peut deviner qu’il s’agisse d’un Etat de l’ancien bloc soviétique. L’auteur s’est inspiré des procès de Moscou de 1936 à 1938 qui ont eu pour but de supprimer des opposants potentiels à Staline, et d’anciens compagnons de Lénine.

Le héros, Nicolas Roubachof, est arrêté et emprisonné pendant tout le roman et il se remémore sa vie alors qu’il est dans sa cellule. S’est l’occasion pour lui à la fois de refaire sa vie mais surtout de s’interroger comme jamais il n’a été amené à le faire avant. Car si Roubachof est aujourd’hui une victime comme une autre du régime, il fut avant l’une de ses chevilles ouvrières, un terrible membre actif. « Vendu » par sa secrétaire, sa fidélité au parti est mise en doute, il se défend très peu et est jugé. Celui qui participait avant aux atrocités du régime est désormais vu comme un opposant à ce même régime. C’est désormais à lui d’en connaître le côté répressif. C’est clairement l’arroseur arrosé.

Ecrit entre 1938 et 1940 en allemand, publié en anglais en 1940 au Royaume-Uni, ce roman n’est paru qu’en 1945 en France. Il demeure très actuel par la morale qu’il contient : tout régime peut tomber et broyer ses membres.
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Un testament espagnol

Coup de coeur pour ce témoignage de première main par un de ces hommes comme on n'en fait plus à la Kessel, auteur, journaliste, viscéralement politique et engagé dans les tremblements telluriques de son temps.

C'est d'un lieu et d'un temps où les oscillations de l'histoire ont connu une violence particulièrement dévastatrice que nous écrit Koestler: la guerre d'Espagne, dans iaquelle il se plonge pour une mission journalistique qui se confond avec son engagement politique (Koestler a été, comme beaucoup à l'époque, au parti communiste allemand).

Arrêté et mis en prison, isolé, sans possibilités de communiquer, laissé sans défenses aux mains des brutes, il témoigne du quotidien de ces mois de détention et de ce qu'ils génèrent d'angoisse, de vide, de sensation d'être mort vivant.

Son témoignage qui s'ouvre en prise directe avec l'Histoire avant son arrestation bascule dans un récit intimiste dans lequel l'auteur se met à nu sans faux semblant, dans un récit glaçant et qui résonne profondément chez le lecteur.
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