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Citations de Benito Pérez Galdós (30)


Allant chercher de l'eau pour mon maître, j'assistai à l’acte d'amener le pavillon qui flottait encore sur le coutelas, l'un des rares restes d'armature qui étaient encore debout avec le mat de misaine. Ce morceau de tissu, déjà troué en mille endroits, signe de notre honneur, qui rassemblait dans ses plis tous les combattants, descendit du mat pour ne plus jamais y remonter.

L'idée d'un orgueil vaincu, d'un esprit ayant fourni des efforts qui succombe devant des forces supérieures, ne peut trouver d'image plus parfaite pour se représenter aux yeux humains que celle de cette oriflamme qui s'abat et disparaît comme un soleil qui se couche. Celui de cet après-midi très triste, touchant le terme de sa carrière au moment de notre reddition, éclaira notre drapeau avec son dernier rayon.

Le feu cessa et les Anglais pénétrèrent dans le bateau vaincu.
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Marcial, comme je le dis, transformait les noms en verbes et ceux-ci en noms sans consulter l'Académie.

Aussi appliquait-il le vocabulaire de la navigation à tous les actes de la vie, assimilant le navire à l'homme, en vertu d'une analogie forcée entre les parties de celui-là et les membres de celui-ci.

Par exemple, parlant de la perte de son œil, il disait qu'il avait fermé la coupée et, pour exprimer la fracture de son bras, il disait qu'il s'était retrouvé sans le bossoir de bâbord. Pour lui, le cœur, siège du courage et de l'héroïsme, était la soute à poudre comme l'estomac la soute à biscuit.
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Mais, malgré ces désastres, notre alliée, l’orgueilleuse France, ne paya pas aussi cher que l'Espagne les conséquences de cette guerre. Si elle perdait le meilleur de sa marine, sur terre, elle obtenait pendant ces mêmes jours des triomphes éclatants. Napoléon avait transporté en peu de temps la Grande Armée des rives de la Manche en Europe centrale et mettait en exécution son colossal plan de campagne contre l'Autriche. Le 20 octobre, la veille de Trafalgar, Napoléon assistait au camp d'Ulm au défilé des troupes autrichiennes dont les généraux lui remettaient leur épée et, deux mois plus tard, le 2 décembre de la même année, il gagnait dans les champs d'Austerlitz la plus brillante action de son règne.

Ces triomphes atténuèrent en France la perte de Trafalgar; le même Napoléon demanda aux journaux de ne pas parler de l'affaire et, quand il se rendit compte de la victoire de ses implacables ennemis les Anglais, il se contenta de hausser les épaules et de dire : «Je ne peux pas être partout. »
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A propos de ma naissance, je n'imiterai pas la plupart de ceux qui racontent leur propre vie, commencent par nommer leur parentèle, le plus souvent noble, du moins toujours titrée, quand ils ne se disent pas descendants de l'empereur de Trébizonde lui-même.

Pour ma part, je ne peux orner mon livre de noms propres prestigieux et, en dehors de ma mère, que je n'ai connue guère longtemps, je ne sais rien sur aucun de mes ascendants, si ce n'est sur Adam dont la parenté me semble indiscutable.
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Je sus que nous étions perdus dans le visage de mon maître, dans la sublime colère de Uriarte, dans les jurons des marins amis de Marcial et l’idée de la défaite m'angoissa.

La ligne de l'escadre combinée était brisée en divers points et à l'ordre imparfait avec lequel elle s'était formée après le virage en rond succéda le plus terrible désordre. Nous étions enveloppés par l'ennemi dont l'artillerie lançait une épouvantable pluie de balles et de mitraille sur notre navire de même que sur le Bucentaure. L’Agustîn, le Héros et le Leandro se battaient loin de nous, avec une certaine aisance, tandis que le Trinidad comme le navire amiral, sans pouvoir disposer de leurs mouvements, pris dans une terrible escarmouche par le génie du grand Nelson, luttaient héroïquement, non plus en cherchant une victoire impossible mais mus par le désir de périr honorablement.
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Combattu ainsi, sans pouvoir se permettre de faire les mêmes dégâts, l'équipage, cette âme du vaisseau, se sentait périr, agonisant avec un courage désespéré, et le navire lui-même, ce corps glorieux, tremblait sous le coup des balles. Moi, je le sentais frémir dans la terrible lutte : ses membrures grinçaient, ses baux éclataient, ses épontilles grinçaient comme des membres tordus par la douleur, et le pont trépidait sous mes pieds en palpitant bruyamment, comme si l'indignation et les souffrances de l'équipage se transmettaient à la totalité de l'immense corps du vaisseau. Pendant ce temps, l'eau pénétrait par les mille trous et crevasses de la coque criblée de balles et commençait à inonder la soute.
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J'aspire à ne dépendre de personne, pas même de l'homme que j'adore. (...) Je ne vois pas le bonheur dans le mariage. Je veux, pour le dire à ma façon, être mariée à moi-même, et être mon propre chef de famille. (...) Je proteste, j'ai envie de protester contre les hommes qui se sont pris le monde entier pour eux, et nous ont laissé seulement les chemins étroits où ils ne savent pas aller.
(traduction libre à partir du texte original: Aspiro a no depender de nadie, ni del hombre que adoro. (...) No veo la felicidad en el matrimonio. Quiero, para expresarlo a mi manera, estar casada conmigo misma, y ser mi propia cabeza de familia. (...) Protesto, me da ganas de protestar contra los hombres que se han cogido todo el mundo por suyo, y no nos han dejado a nosotras mas que las veredas estrechas por donde ellos no saben andar.)
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Il soutenait qu'en ce qui concerne les relations entre hommes et femmes il n'y a pas d'autre règle que l'anarchie, si toutefois l'anarchie constitue une règle ; que l'amour souverain ne doit se soumettre qu'à ses propres lois, et que les restrictions imposées de l’extérieur à sa toute-puissance ont pour seul effet d'appauvrir notre race et d'entrainer l’anémie de l'humanité.
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[J'] examinai un à un mes compagnons de voyage. Que d'expressions et de visages différents ! Certains ne semblent absolument pas se préoccuper de ceux à côté desquels ils sont assis ; d'autres regardent les passagers avec une curiosité impertinente ; certains sont joyeux, d'autres tristes ; celui-ci baille, celui-là rit.

Malgré la brièveté du trajet, tous désirent qu'il se termine au plus vite. En effet, parmi les mille contrariétés de l'existence, aucune ne surpasse celle d'être une douzaine de personnes à se regarder sans dire un mot, à se compter réciproquement le nombre de rides ou de grains de beauté, ou à constater tel ou tel défaut dans le visage ou les vêtements des uns et des autres.

Cette brève rencontre de personnes que nous n'avons jamais vues et ne reverrons sans doute jamais est singulière. Quand on monte, on en rencontre certains ; d'autres viennent ensuite alors que nous sommes déjà dedans ; certains descendent alors que nous restons ; puis finalement nous descendons tous.

Cela imite la vie humaine, où naître et mourir sont comme les montées et les descentes dont je viens de parler, car les générations de voyageurs se renouvellent sans cesse dans le petit monde dans lequel ils vivent. ils montent, ils descendent ; ils naissent, il meurrent. Combien de gens sont passés ici avant nous ! Combien de gens viendront après !
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On a du mal à croire que les extravagances imaginées par un fou ou un menteur parviennent au fil du temps à devenir des réalités merveilleuses. Depuis que j’ai remarqué cette coïncidence, je ne condamne plus radicalement aucune utopie et tous les menteurs me semblent des hommes de génie.
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La plus grande vérité qu'on a dite sur terre est celle-ci: Nibil novum sub sole (Vulgate, Ecclesiaste, signifiant rien de nouveau sous le soleil). Par laquelle on exprime qu'il n'y a aucune aberration humaine qui n'ait pas un précédent. L' homme est toujours identique, et il n'y a pas plus de péchés aujourd'hui qu'hier.

L'invention en matière de perversité est nulle ... et si nous avions le livre des entrées de l'enfer, nous nous ennuierions en le lisant, tellement il est monotone.

Celui qui comme moi a passé tant d'années à examiner la conscience des criminels et des égarés ne s'effraie de rien ...
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Quelle étrange ressemblance ! ...

Il ne manquait à Bringas que le regard profond et tout ce qui est propre à l'esprit. Il lui manquait ce qui fait la différence entre un homme supérieur, qui sait faire l'histoire et l'écrire, et l'homme commun qui est né pour réparer une serrure et clouer une moquette.
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Elle portait une bandelette noire bien serrée sur le front par-dessus un mouchoir noir, et noirs aussi étaient la mante et le vêtement; mais le tout mieux drapé que ceux des autres anciennes. Avec cet attifage et l’expression sentimentale et douce de son visage, dont les lignes étaient bien composées, elle ressemblait à une sainte Rita de Casia, qui irait dans le monde en pénitence. Il ne lui manquait que le crucifix et la plaie au front, bien qu’une petite verrue de la grosseur d’un pois chiche, rond, violet, située au milieu de l’entre-sourcil, pût en donner l’apparence.
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Laid et long comme une feuille entière de petites images ou comme une romance d’aveugle, l’édifice bifrontin, avec sa tour barbienne, la petite coupole de la chapelle de la neuvaine, ses toits irréguliers, ses murs découpés badigeonnés d’un ton d’ocre, ses cours fleuries, ses ferrures rouillées sur la rue et son campanile élevé, présente encore un ensemble gracieux, piquant, galant pour le dire en un mot. C’est un petit coin de Madrid que nous devons conserver avec amour, comme des antiquaires soigneux, parce que le rococo monumental est aussi un art. Admirons donc ce San-Sebastian, legs des temps anciens, une image ridicule et grossière si l’on veut, mais conservons-la comme un joli magot.
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Quant à l'Eglise, il la considérait comme une bien mauvaise blague, que les temps anciens délivrent aux présents, et que ceux-ci supportent par timidité et manque de caractère.
Traduction du contributeur à partir du texte original: Respeto a la Iglesia, teniala por una broma pesada, que los pasados siglos vienen dando a los presentes, y que éstos aguantan por timidez y cortedad de genio.
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La femme de noir vêtue, plus que vieille, prématurément vieillie, faisant partie de la classe des nouvelles, ne mendiait qu’accidentellement, parce qu’elle ne venait à la mendicité qu’à des laps de temps plus ou moins longs et le plus souvent disparaissait, sans doute parce qu’elle trouvait une bonne occasion ou quelques âmes charitables qui la secouraient directement; elle répondait au nom de la seña Benina (d’où l’on conclut qu’elle s’appelait Benigna) et elle était la plus silencieuse et la plus humble de toute la communauté, si l’on peut dire ainsi, bien élevée, de bonnes manières, avec l’apparence de la plus grande soumission à la volonté divine. Jamais elle n’importunait les paroissiens qui entraient ou sortaient. Dans les répartitions, si léoninement qu’elles fussent faites, on ne la voyait jamais protester, et jamais elle ne s’associait aux réclamations de la bande tumultueuse et démagogique de la Burlada, ni de loin ni de près. Avec tous elle tenait le même langage affable et courtois; elle traitait la Casiana avec considération, avec respect le boiteux, et n’était en confiance, sans s’écarter des termes de la plus rigoureuse convenance, qu’avec un aveugle du nom d’Almudena, dont, pour l’instant, nous dirons seulement qu’il était Arabe du Sud, à trois journées au delà de Marrasach. (Souvenons-nous-en.)
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Vous ne m'aurez pas..., là-dedans il y a tous vos péchés, votre acharnement contre les pauvres, votre avarice, les intérêts que vous sucez et tous les chiffres qui vous trottent dans la tête pour gagner de l'argent...Si je dormais là, à l'heure de ma mort, je verrais sortir de tous les côtés des crapauds à la bouche énorme, des grosses couleuvres qui s'enrouleraient autour de moi, des diables hideux avec des grosses moustaches et des oreilles de chauve-souris qui se saisiraient de moi et me traineraient de force en enfer. Allez au diable et gardez vos matelas, moi j'ai un grabat fait de sacs de chiffons, avec une couverture dessus et c'est un vrai paradis... Vous le voudriez pour vous...voilà ce qu'il faut pour dormir à poings fermés. (p.70)
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J'en suis certain - ajouta le Don Juan déchu, en enlevant ses bottes et en mettant les pantoufles que Tristana, pour dissimuler sa stupéfaction, était allée chercher dans la chambre voisine. J'ai beaucoup de flair pour ce genre de choses, et celui qui pourra me tromper et se moquer de moi n'est pas encore né. Tristana, tu as trouvé par là une amourette; je m'en suis aperçu, ces jours-ci, à ton agitation, à ta façon de regarder, ces cernes de tes yeux, à mille et un détails qui ne m'échappent pas.
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J'en arrivai à croire que sans pousser le libertinage jusqu'à l'extrême je n'étais pas assez homme.
traduction proposée à partir du texte original: Llegué a creer que si no extremaba el libertinaje no era bastante hombre
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La mitraille anglaise déchirait ainsi la voilure comme si de grands ongles invisibles la réduisaient en miettes. Les morceaux morts, les bouts de bois, les gros haubans sciés comme des flèches; les poulies qui tombaient, les morceaux de voilure, les fers, cordages et autre déblais déplacés par le canon ennemi emplissaient le pont là où il y avait à peine la place de se mouvoir. Chaque minute tombait sur le sol ou dans la mer une multitude d'hommes pleins de vie. Les blasphèmes des combattants se mêlaient aux lamentations des blessés si bien qu'il était impossible de savoir si ceux qui mouraient insultaient Dieu ou si ceux qui se battaient l'appelaient avec angoisse.
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