Brigitte Labbé

Quelquefois, l'homme oublie que toutes les vies ont une valeur. Comme il est plus intelligent que les autres êtres vivants, comme il se sent très fort, très puissant, il lui arrive de faire n'importe quoi avec la vie. Il pense que toutes les vies lui appartiennent. Il oublie qu'il ne vit pas au-dessus des autres vie, mais avec elles, au milieu d'elles, grâce à elles.

Imaginons qu'il y a d'un côté tout ce qu'on sait et, de l'autre, tout ce qu'on ne sait pas. Du côté "on sait", on est tranquille, rassuré, on a confiance. Mais ce n'est pas là qu'on a envie de regarder : on sait déjà tout ce qu'il y a ! Du côté "on ne sait pas", on est un peu inquiet, on se demande ce qui va se passer. Mais c'est là qu'on a le plus envie de regarder ! Impossible de ne pas chercher à savoir, c'est impossible de résister.
Quand on entend du bruit derrière la porte, on est tout de suite curieux, on a envie d'aller voir, on ne peut pas résister.
Et la curiosité, c'est le début des découvertes.

Pour maintenir l'équilibre de la terreur, les humains n'arrêtent pas d'inventer des armes. Et le monde devient dangereux. Mais à cause de ces armes, on est peut-être obligé de réfléchir encore plus à la paix.

La paix, c'est aujourd'hui.
La plupart des gens détestent la guerre. Pourtant, il y a toujours une guerre quelque part. Peut-être parce qu'il y a des gens qui ont intérêt à cette guerre, pour gagner de l'argent ou du pouvoir. Il faudrait s'en méfier. Et aussi parce qu'on se dit toujours que cette guerre-là, on ne pouvait pas l'éviter, que cette fois-ci c'est la dernière.
On dit toujours qu'on prépare la paix pour demain. Pourquoi pour demain ? On sait construire la paix, et les femmes et les hommes qui veulent la paix sont plus nombreux que celles et ceux qui veulent la guerre.
Mais cela ne suffit pas. Il faut aussi comprendre que le bon jour pour construire la paix, c'est toujours aujourd'hui.

On peut aussi se poser des questions, et en poser aux autres. Et chercher ensemble des réponses... ou bien se rendre compte que, quelquefois, on ne trouve pas de réponse : derrière une question, il s'en cache une autres, et encore une autre, et encore une autre...

En voici quelques-unes, en vrac... de quoi s'occuper des heure ! "Dessinateur ou écrivain, qu'est-ce qui vous tente le plus ? Pourquoi ? Peut-on penser sans mots ? Pourquoi est-ce important de connaître beaucoup de mots, et même, de connaître le plus de mots possible ? Les images peuvent-elles nous tromper, et les mots ?

Quelquefois on se retrouve entre amis, à deux, à trois ou plus, pour regarder un film, faire un jeu, préparer un exposé ou simplement écouter de la musique. Ou on est là, ensemble, sans rien faire de spécial. Et il arrive que la conversation démarre, sur un sujet qui intéresse tout le monde.


Mon cahier goûter philo
Sans s'en rendre compte, on se lance dans de grandes discussions sur les parents, les professeurs, les amis, sur l'amour, la guerre, la honte, l'injustice...
On refait le monde ! Et le soir, quand on se retrouve seul, on y repense.

C'était vraiment bien de pouvoir parler de tout ça, même si parfois on est furieux parce qu'on n'est pas du tout d'accord avec ce que les autres disent, ou parce qu'il en a qui veulent tout le temps parler et n'écoutent rien.

Les gens courageux ont peur : ils se rendent compte des difficultés et des dangers qu'ils vont devoir surmonter.
La peur est une force qui veut nous écraser, nous paralyser, une force qui nous empêche de parler, d'agir, de réagir. Cette force, le courage réussit à la transformer : elle devient une force pour agir.

Rêver c'est penser à la réalité en la déformant.
Et c'est magique!

Le rêve, ça donne envie du futur. Mais ça ne suffit pas. Ne faire que rêver, ce serait comme mettre de l'essence dans une voiture et ne jamais appuyer sur l'accélérateur pour qu'elle avance !

L'homme qui ne prend pas le temps de penser a du mal à faire des projets. Il n'espère pas grand chose du futur. Pour penser, il faut du temps. Du temps libre, du temps vide. Ce temps, on peut le trouver quand on a rien à faire. Mais ces moments-là sont rares.

On nous dit que prendre son temps, c'est le perdre. Et on nous dit que prendre son temps, c'est important.
Ce n'est pas toujours facile de s'y retrouver.

A chacun son opinion ?
"Je ne suis pas d'accord avec toi. Pourquoi dis-tu qu'acteur, ce n'est pas un vrai métier ?
- C'est comme ça."

"C'est comme ça". Clac. Une réponse comme une porte qui claque au nez.
" Laisse-le, à chacun son opinion."
"A chacun son opinion." Clac.
Quatre mots qui sonnent la fin de la discussion. Chacun repart chez soi, avec son opinion. "A chacun son opinion". ; "c'est comme ça" ; "c'est vrai pour moi" ; "à chacun sa vérité" ; "c'est mon choix" ; "c'est le tien".... Toutes ces phrases veulent plutôt dire : chacun chez soi, et que chacun y reste. Et on finit par se parler seulement pour se demander l'heure, le menu du dîner, les notes qu'on a eues, pour s'informer des contrôles à venir et de la météo de demain. Qui a envie de vivre dans un monde où on ne parle que pour échanger des informations ?

Certains souvenirs pèsent lourd, parfois tellement lourd qu'ils empêchent de bouger, de courir, de rire, d'être heureux, de croire à l'amour, d'accorder sa confiance à un ou une amie, de remonter sur un vélo, d'organiser une fête, de s'aimer soi-même....
Comme ce serait bien de pouvoir se dire : "ça, ça et ça, je l'oublie ; ça, ça et ça, je m'en souviens !". Mais c'est impossible : on ne peut pas décider d'effacer des souvenirs, on ne peut pas décider d'oublier.

Penser que la violence a des raisons, c'est penser que la violence a le droit d'exister, c'est croire que la violence est un langage, un moyen de communiquer.

Trop loin
"Non, non, tu ne me déranges pas, je suis à la caisse du supermarché, on peut se parler". Romain enfonce ses écouteurs dans ses oreilles et commence à emballer ses courses. "Ce soir, oui, pourquoi pas, on pourrait se retrouver devant le cinéma".... Comme Romain ne voit pas que la caissière lui tend le ticket, elle le pose sur la tablette, devant sa caisse. "Non, ce serait mieux d'aller à la séance de 22 heures, ça nous laisse le temps de dîner avant". Romain aperçoit le ticket et tend un billet de 20 euros en levant les yeux au ciel. "Comment, ton régime ? Mais on peut quand même dîner, non ?". Romain, énervé par sa copine qui ne veut manger que du fromage blanc le soir, ne s'aperçoit pas que la caissière lui tend la monnaie.

Pour Romain, la caissière n'existe pas. Ni bonjour, ni regard, ni sourire, rien. Il est loin d'elle, terriblement loin. Il a mis une distance infinie entre lui et elle, il ne fait aucune place à la caissière. Et on comprend ce qu'elle ressent : elle se sent méprisée par ce client qui fait comme si elle était invisible.
Attention
Romain ne fait pas exprès, il a la tête ailleurs, il ne cherche pas du tout à faire du mal à la caissière. N'empêche, le mal est fait
Le respect, c'est justement ne pas avoir la tête ailleurs. Etre attentif, pour ne pas, sans s'en rendre compte, tomber dans le mépris.

Respecter.... l'inconnu

Viviane sait, à l'avance, que si une personne âgée monte dans le bus, elle lui laissera sa place. Viviane n'a pas besoin de connaître celui qui prendra sa place, elle n'a pas besoin de l'aimer, ni d'en avoir peur, ni de le plaindre, ni de l'admirer... Non, rien de tout ça. Lorsqu'on respecte quelqu'un, on n'a pas le coeur qui bat plus vite, on n'a pas la chair de poule ou les jambes toutes molles.
Le respect ne vient pas d'un sentiment, on ne le ressent pas tout à coup, comme on ressent la peur ou la joie. Le respect est déjà là, en soi. La preuve, on peut respecter un inconnu qui n'est pas encore monté dans le bus.

Respecter.... le respect.

Et on va s'imaginer qu'en disant merci au charcutier, bonjour au chauffeur de bus, qu'en couvrant soigneusement ses livres au début de l'année, qu'en manifestant pour les baleines et qu'en laissant les piétons traverser la rue, on baigne dans le respect.
On s'imagine qu'en se faisant obéir, on se fait respecter.
On s'imagine qu'en se faisant craindre, on se fait respecter.
Confondre le respect avec la politesse, le soin, l'obéissance, la peur ou d'autres choses c'est embêtant : à force de ne pas respecter le mot "respect", le respect, le vrai, on ne saura plus ce que c'est.

Mais quelle drôle d'idée de penser qu'il faudrait avoir honte de pleurer ! Quand on est atteint, le cacher ne rend pas plus fort. Est-ce qu'on a honte de saigner quand on est blessé ?
Pleurer, oui, c'est craquer, c'est le signe qu'on n'en peut plus, qu'on n'a pas la force de supporter quelque chose. On peut toujours dire que c'est une faiblesse. Mais croire que l'on n'a pas de faiblesses, voilà la faiblesse vraiment grave.
Pleurer, c'est s'avouer à soi-même et avouer aux autres que l'on n'est pas invincible, c'est laisser sortir de soi des sentiments, des vrais. Pleurer, c'est partager nos malheurs avec d'autres. On peut essayer de se retenir pour ne pas faire de peine aux autres. Mais s'ils ont de la peine en nous voyant pleurer, c'est qu'ils nous aiment, et s'ils nous aiment, ils peuvent partager nos malheurs, nous aider à les surmonter. Nos larmes ont le courage de leur demander cela.

Dans le monde confiné

Planète Terre. Printemps 2020.

Dans le monde confiné, des centaines de millions d'êtres humains veulent :
des livres
des films
des poèmes
des chants
des danses
des musiques
des pièces
de théâtre
des dessins
des photographies
des tableaux
...

Des centaines de millions d'êtres humains comprennent que les artistes savent agrandir, démultiplier, ouvrir le monde.

Finalement, ce n'est pas la mort qui fait peur. Ce qui fait peur, c'est de continuer à vivre séparé des gens qu'on aime.

ETOILE

Diamants
posés
sur une
toile
noire
au-dessus de nos têtes.
Rêves
enfouis
tout au fond de nos coeurs.
Une étoile
filante,
un voeu
secret...

La bonne étoile,
celle qui fait du bien.


Définition : un point dans le ciel, qui brille dans la nuit.

Quelques mots voisins : Astre, lumière, voie lactée, soleil, espace, temps, météorite....