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Citations de Camille Pascal (238)


Philippe d’Orléans n’ignorait pas le torrent de calomnies que l’on versait quotidiennement sur sa tête, depuis bien avant le nouveau règne. Il avait plus souvent qu’à son tour fait les frais du petit ragoût merdeux dont la Maintenon administrait tous les jours une bonne cuillerée au vieux roi Louis XIV, son mari de pénitence. Cette vieille putain qui se donnait maintenant des airs de sainte au milieu des demoiselles de Saint-Cyr avait toujours voulu l’abattre au profit de ses pupilles, car ce ventre fripé et stérile aimait à la folie les enfants adultérins que son vieux galant avait plantés dans celui de ses autres maîtresses. 
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En cherchant bien, on trouvait aussi une hampe de bois autour de laquelle s'enroulait un grand drapeau ficelé dans sa housse jaunie par des cordelettes de chanvre qui cassaient lorsque l'on cherchait à les défaire. Alors chacun comprenait, et un silence presque religieux se faisait dans la pièce. Ceux qui étaient restés couverts au moment d'entrer dans la maison se mettaient tête nue comme à la messe. Une femme appelée à la rescousse s'occupait de déshabiller complètement ce vestige de gloire, puis on allait à la fenêtre pour le dérouler entièrement, et les trois couleurs, portant parfois en lettres d’or le nom d'un regiment dissous, claquaient au vent comme un premier coup de feu.
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Le bel abbé de Portocarrero avait le plaisir pour seule ambition, et elle le dévorait d’un feu que rien ne parvenait jamais à éteindre. Il alimentait cette fournaise avec la rage d’un inquisiteur de son pays, mais à cette différence qu’il ne tuait personne sinon de cette petite mort dont on ressuscite malheureusement trop vite. Les femmes restaient son gibier de prédilection, mais il ne dédaignait pas les hommes pourvu qu’ils soient d’aussi bonne race que ses chevaux, deux magnifiques alezans ramenés de Madrid et qu’il montait alternativement pour parcourir le cours de la Reine à la grande joie des putains et des badauds. 
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Etourderie d'éditeur ou retour du refoulé, l'histoire des maîtresses royales reste encore la chasse gardée de respectables chartistes, expertes dans l'art de la sublimation. Ce livre voudrait démontrer, au contraire, que la rigueur méthodologique élaborée par l'Ecole des Annales et ses différents héritiers permet de porter un nouveau regard sur l'histoire d'une petite maitresse en révélant des mécanismes sociaux et des pratiques politiques dont l'étude reste à entreprendre.

Faire, en un mot de la micro histoire en lieu et place de la petite histoire, ce qui rend, sur les hauteurs de la Montagne-SainteGeneviève un meilleur son.

Pour cela, il aura fallu conduire une véritable enquête dans un maquis documentaire quasi inexploité, relire d'un œil neuf des mémorialistes embaumé par une érudition pudibonde, interroger les archives de police, extirper les secrets soigneusement enfouis dans les minutes notariales et même entreprendre une véritable archéologie versaillaise.

En collectant les indices, en confrontant les témoignages, en dépouillant des archives dont l'austérité apparente rebute aujourd'hui la plupart de ceux qui prétendent écrire l'Histoire sans jamais la lire, il a été possible non seulement d'avancer des hypothèses mais de les étayer. Lentement s'est alors dessiné le portrait d'une femme insaisissable dont l'histoire était, dès l'origine, destinée à demeurer secrète, le portrait en creux d'une maîtresse royale mais aussi d'une époque, d'un système de cour et d'une économie libertine.
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Dans la cour Royale, réservée aux voitures ayant les honneurs du Louvre, la princesse attendit que le premier gendlhomme du duc d'Orléans vienne l'accueillir à la portière et la mène jusqu'au cabinet du Régent à travers les grands appartements. Chacun s'écartait sur le passage de cette furie haute comme une enfant de huit ans, maquillée aussi violemment qu'une porcelaine de Saxe et vêtue, par pure provocation, d'une robe de visite taillée dans une de ces toiles peintes des Indes dont la vente était normalement proscrite. Les lois, les arrêts, les décrets, tout cela était bon pour les gens du commun mais certainement pas pour la petite-fflle du Grand Condé.
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Les femmes admises à la Cour, même lorsqu'elles appartenaient à la clientèle de la favorite, n'étaient pas sûres. Après une passade avec le Roi, il était tentant d'exiger le renvoi de leur protectrice pour prendre officiellement sa place. Tous les biographes de la marquise de Pompadour ont dénoncé l'ingratitude de ces « petites cousines » qui, au lieu de remercier leur puissante parente de ses nombreux bienfaits, cherchaient à la supplanter dès la première occasion. La répétition de ces mésaventures n'a rien d'une cruelle fatalité. En réalité, la présence de cette jolie parente faisait partie d'un système de substitution, la Marquise délégant à des amies ou des cousines plus jeunes et moins rétives les plaisirs du Roi. Les dangers de cette première politique obligèrent à recourir à d'autres arrangements, moins avouables encore.
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Les Anglais, dont la perfidie n’était pas qu’une figure de style, travaillaient à ressusciter contre l’arrière-petit-fils la formidable coalition qui, trente ans plus tôt, avait bien failli emporter la puissance du roi Louis XIV ...
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Pour faire bonne mesure, quelques mois plus tard, le duc du Maine, tout atrophié qu'il était, épousait la petite-fille du Grand Condé, la naine la plus spirituelle et la plus méchante de tout l'univers. À ce niveau d'infirmité, ce n'était d'ailleurs plus un mariage mais une sorte de parabole, la vilenie donnant la main à la médisance.
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C'est à cet instant, dans l'éblouissement de la lumière extérieure, qu'il réalisa l'étendue de sa disgrace, car en dehors de l'Arsenal, dont rien ne l'assurait de conseryer l'usage, il ne savait pas où aller et n'avait pas un lit où dormir à Paris. Son frère, qui l'avait abandonné mais ne le quittait pas pour autant, le fît aussitôt monter dans sa propre voiture et l'entraîna chez lui, à l’hôtel de Toulouse, où il mettrait un appartement à sa disposition.

Durant le trajet qui va des Tuileries à la place des Victoires, où il fallut bien longer les façades du Palais-Royal illuminé comme pour la fête-Dieu, la phrase de leur père, le roi Louis XIV, prononcée sur son lit de douleur, résonnait à ses oreilles comme l'accomplissement d'une prophétie : « Pour grand que je vous fasse de mon vivant, vous ne serez plus rien après ma mort... »
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Un faux pas, une chute, le moindre geste déplacé ou ridicule, bref tout ce qui pouvait faire rater une présentation à la Cour disqualifiait une débutante pour le restant de sa vie et entachait le prestige de toute une famille. 
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Thiers n'ajouta rien d’autre qu’un sourire de triomphe et s'exécuta. Si le coup qu'ils préparaient à demi-mot réussissait, demain il serait ambassadeur ou député, en attendant mieux encore.

Epuisé d'avoir été tant poudré, le prince de Talleyrand ne prit pas la peine de raccompagner son hôte et s'avança en dandinant sur ses pieds de palmipède vers le salon d'angle où il avait pris l'habitude de dicter ses mémoires. Il s'assit à son bureau. Demanda au secrétaire d'entrouvrir les volets intérieurs pour garder un œil sur la place Louis-XV où les troupes royales stationnaient, quand soudain il entendit des cris et vit, sortant des jardins en courant en tous sens, des gardes Suisses désarmés et les bras levés vers le ciel. Il se retourna lentement car ce mouvement exigeait chez lui de faire pivoter son corps tout entier et découvrit le dome du pavillon de l'Horloge orné du drapeau de la Révolution et de l'Empire comme en 1815.

Puis il observa la superbe pendule au triomphe d'Apollon posée sur la cheminée qui venait de sonner les douze coups et dit à son secrétaire, dont la plume était restée suspendue :

- Mettez en note que, le 29 juillet 1830, à midi cinq minutes, la branche aînée des Bourbons a cessé de régner sur la France.
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Chaque garde national avait conservé non seulement son uniforme mais aussi un équipement payé sur ses deniers, et il en était de même de tous les anciens conscrits, des demi-soldes et des vétérans des armées de l'Empire, de tous ceux, enfin, qui, démobilisés en 1814 puis en 1815, étaient rentrés chez eux, défaits, humiliés, mais solidement armés. On prenait de vieilles escabelles pour aller chercher à tâtons derrière les corniches droites des armoires de mariage ou au-dessus du ciel de lit moutonné de poussière des fusils parfaitement huilés et emmaillotés dans leur linge comme des nouveau-nés.
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... il [faut] toujours que les acteurs, non contents de mal jouer, se donnent le ridicule de penser. 
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Au complot de l'étranger et à cette conspiration rampante, on allait opposer un coup de majesté.

Saint-Simon proposa alors à ses hôtes de passer dans la chambre, où se trouvait tout ce qui était nécessaire pour composer le mémoire qu'ils projetaient d'écrire à l'intention du Régent. Le jour commençant à décliner, les valets apportèrent de lourds flambeaux d'argent et allumèrent toutes les chandelles posées aux bras de lumière. Pendant que le duc de La Force et John Law s'installaient commodément dans de larges fauteuils, Fagon fut invité à s'asseoir à la table à écrire et à tailler ses plumes. La calligraphie d'un conseiller d'Etat étant incomparable, il lui revenait naturellement de prendre toutes les notes de séance.

Ainsi, pendant près de deux heures, Saint-Simon, une main derrière le dos, l'autre tenant une longue pipe hollandaise sur laquelle il tirait de petites bouffées, ne cessa, tout en faisant les cent pas, de dicter le résultat de leurs réflexions communes.

Lorsqu'un mot lui manquait, qu'une expression lui résistait ou que la passion l'étreignait au point de lui faire perdre le fil de sa pensée, il fixait avec vénération le grand portrait de Louis XIII suspendu dans l'entrefenêtre et rappelait, à haute voix, que sous son règne on tranchait, d'un bon coup de hache, le cou des mécontents, des conspirateurs et des nobles révoltés, puis il reprenait sa marche à travers la vaste pièce. La dictée dura jusqu'à neuf heures du soir ; il fut convenu ensuite de faire porter le mémoire à l'abbé Dubois et au garde des Sceaux.
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Ne plus être capable de plaire à un homme et rejoindre ainsi le troupeau des femmes qui avaient servi restait aux yeux de ce séducteur impénitent [le duc de Richelieu] une faute de goût si impardonnable qu’elle méritait le couvent. 
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C'est dans ce contexte que rabatteurs et pourvoyeurs vont se mettre en chasse pour trouver une doublure sexuelle à la marquise de Pompadour. Une lecture attentive des sources montre que se constitue, à cet effet, un véritable réseau avec ses fournisseurs, ses intermédiaires et ses enjeux financiers. Réseau occulte mais dont le fonctionnement présente des similitudes avec les autres circuits d'approvisionnement de la Cour.

Comme pour la viande et le poisson fournis au Roi par des sociétés de pourvoierie où se retrouvent les intérêts croisés des familles de valets de chambre et du puissant notariat parisien, les besoins sexuels du monarque sont pris en charge par les mêmes réseaux et les mêmes acteurs. Marie-Louise O'Murphy n'arrive pas par hasard dans le lit du Roi ; même si Casanova et Meusnier y voient pour l’un, «les chemins secrets de la très puissante destinée» et pour l'autre « un exemple de la bizarrerie et des caprices de la fortune ». Elle a été repérée, choisie et négociée avec soin.
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Depuis le renvoi du ministère Martignac, il [Adolphe Thiers] en était convaincu, le duc d’Orléans, fils de régicide, compagnon d’armes de Dumouriez, prince libéral et populaire, offrait un compromis possible pour une France éprise de liberté mais fatiguée des convulsions historiques. Il était l’heure pour le fils de Philippe Égalité d’entrer en scène ...
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... il ne pouvait y avoir de place, à ce moment de l’histoire de France, que pour une révolution à l’anglaise. Une révolution qui chassait un roi prisonnier d’un passé révolu [Charles X] pour en couronner un autre plus conforme aux aspirations de la nation. 
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Aussi, tout en descendant le grand escalier, elle ne cessait de répéter à propos de Pozzo :

— Il est parfait, madame de Boigne, il est parfait, c'est tout à fait l'un de nous...

La comtesse fut flattée d'être ainsi associée au parti orléaniste mais le « madame de Boigne » lui laissa un petit goût amer. La princesse se refusait obstinément à valider les titres de courtoisie, même au beau milieu d'une révolution. A tout prendre, la comtesse eût préféré «mon amie», «ma très chère», «ma bonne», plutôt que ce terrible « madame de Boigne » qui sentait la bourgeoise comme la caque le hareng. Adèle d'Osmond était issue d’une excellente famille, mais elle n’avait jamais été comtesse par son mariage, pas plus d'ailleurs que son mari ne s'appelait Boigne. Il était bêtement né Benoît Leborgne, ce qui sonnait assez mal. Elle le savait, en souffrait et dissimulait de son mieux cette vilaine cicatrice matrimoniale parmi d'autres plus secrètes encore. Madame Adélaïde venait de raviver la plaie.
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Le roi d'Angleterre promettait de s'entremettre pour obtenir de l'empereur Charles VI qu'il garantisse les droits du Régent à la couronne de France et reconnaisse enfin Philippe V comme roi d'Espagne. En échange de quoi l'Autriche se voyait gratifiée de la Sicile et de quelques duchés italiens qui allaient lui assurer cette présence en mer Méditerranée perdue depuis son renoncement aux prétentions espagnoles. Par ailleurs, et de façon à se gagner les bonnes grâces d'Èlisabeth Farnèse, la redoutable épouse de Philippe V, l'abbé et Stanhope avaient imaginé l'amadouer en prévoyant au bas du traité que son fils don Carlos, dont elle était folle, hériterait de la Toscane à la mort du grand-duc régnant.
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