Intéressant de voir comment évoluent les rapports de ces sept femmes lorsque l'homme qui les reliait disparaît soudainement. Ni tout à fait amies, ni tout à fait ennemies, toutes rivales à des degrés divers, elles tissent de nouveaux liens et se rapprochent, comme pour combler le vide laissé par Vittorio, sans pour autant se départir de leur hypocrisie.
J'ai aimé les différentes voix de ce roman, parfois affectueuses, souvent fielleuses, et sans concession sur les défauts des unes et des autres. L'atmosphère est oppressante, on sent tout le poids du carcan familial. Toutes s'interrogent sur les raisons de cette disparition, mais à aucun moment leurs réflexions ne laissent percevoir le dénouement ironique de cette comédie grinçante.
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Un beau livre, léger, au parfum d'Italie. L'histoire d'un amour d'une vie, vécue par intermittence de l'enfance à l'âge adulte et qui s'éteint. Olivia est la fille de gros entrepreneurs riches de Bologne et Valerio est le fils de leurs domestiques. Ils grandissent ensemble, déjà amoureux, jusqu'au jour où la mère de Valerio divorce, suit son amant – un escroc qui décèdera rapidement – dans les quartiers populaires de Rome où Valério grandit dans un contexte plus rude. Olivia l'y rejoindra à l'occasion s'encanaillant avec bonheur. Ils se retrouveront à l'aube de l'âge adulte pour vivre leur amour mais il ne la suivra pas à Paris. Ils se marieront et auront des enfants chacun de leur côté avant de se perdre et de se retrouver et de se perdre encore. Manon, formidable grand-mère de Olivia. C'est aussi une peinture de l'Italie entre 1975 et 2013 avec sa corruption, le berlusconisme, l'immoralité (même le père jardinier de Valerio humble, simple, apparemment honnête et licencié pour avoir volé une montre ( ce que nul ne croit), montre effectivement volée qu'il lèguera à son fils). Une Italie où tout reste en demi-teinte, même l'amour car Valerio, devenu riche après avoir épousé la soeur d'un de ses amis, appartenant à une famille de promoteurs, est incapable de larguer toutes les amarres pour aller au bout de son amour et lorsqu'il s'y apprête enfin, il recule car c'est la prison qui l'attendrait. Lâches ces personnages ? Pas vraiment, humains plus qu'humains, vrais, incapables de transcender les inévitables défaites de l'existence.
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Le début de L'équilibre des requins est un peu brouillon, impression qui heureusement, se dissipe assez vite. C'est le genre de roman qui s'apprécie sur la longueur avec une une progressive compréhension des sentiments de son héroïne, contaminée par une vague de dépressions autour d'elle et qui tente de survivre malgré tout. Avec une mère suicidée, un père en vadrouille autour du monde et obsédé par les squales, la pauvre Sonia est déjà passablement perturbée. Quant aux hommes qui chauffent épisodiquement son lit, ils ne sont pas très vaillants non plus. Et pourtant, le roman de Caterina Bonvicini ne se complait jamais dans des atmosphères sombres. Mélancoliques plutôt, avec des bouffées de bonheur qui réchauffent le coeur, et une envie de vivre chevillée au corps. Joliment construit, entre les vidéos marines envoyés par le père, la lecture des lettres de la mère, les errements de son ex-mari et de ses amants, le livre suit l'itinéraire en zigzag d'une Sonia qui explore jour après jour les charmes cachés de Turin. Impossible de ne pas s'attacher aux pas de cette femme dont la vraie fragilité est de trop donner d'elle-même pour combler le mal de vivre de ceux qu'elle aime. Un beau personnage pour un roman vif, chatoyant et souvent drôle, qui refuse la grisaille du quotidien.
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Très bonne lecture grâce à Caterina Bonvicini qui raconte l’histoire des femmes liées à Vittorio. Il y a ses filles, sa mère, son épouse, sa sœur et sa maîtresse. On se croirait presque dans un jeu de sept familles. Alors qu’elles l’attendent toutes autour d’une table pour partager un repas (épouse et maîtresse incluses, oui, oui), Vittorio envoie un message à l’une d’elle pour dire qu’il ne viendra pas. Il part pour un an, pour prendre des vacances. Le choc passé, la vie, ma foi, poursuit son cours.
J’ai bien aimé ce livre dont je n’avais pas entendu parler et que je n’avais pas vu passer ici, merci @placeronde pour tes conseils, et que je considère être une sorte de huis clos. J’entends les puristes crier au scandale: effectivement, on n’est pas chez Sartre, l’histoire se déroule dans différents lieux mais on reste prisonniers des pensées de ces personnages qui ne tournent qu’autour de Vittorio et des autres femmes qui occupent sa vie. Ces pensées évoluent lentement au fil des jours qui passent et rendent le souvenir de cet homme plus trouble. Les rapports changent, eux-aussi, à mesure que s’efface la bataille pour gagner son attention. L’autrice jongle entre les différents points de vue avec brio, ce qui en fait un texte réussi.
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Soir de noël, sept femmes attendent Vittorio, l’homme qu’elles ont en commun. Il y a sa mère, sa sœur, sa femme, son ex-femme, ses deux filles et sa maîtresse. Vittorio se fait attendre mais pendant la soirée, il envoie un SMS à sa mère : « J’ai besoin de prendre une année sabbatique loin de mon travail, loin de ma vie ». Les sept femmes ont du mal à y croire, une enquête commence. Mais elles qui se vouaient une haine, une rivalité forgée autour de Vittorio se retrouvent esseulées et leurs relations entre elles risquent bien de changer…
Passant du point de vue d’une femme à l’autre, Caterina Bonvicini peint un portrait de famille grinçant et émouvant où les personnages féminins sont racontées avec autant d’humour que d’humanité. C’est aussi l’occasion pour l’auteure de décrier notre société à l’esprit étroit dans laquelle les normes et les conventions ne seraient là que pour empêcher le regard des autres.
J’ai beaucoup aimé le travail d’écriture de l’auteure changeant de style selon le personnage féminin qu’elle raconte donnant à l’histoire une modernité et un réalisme selon les générations des personnages.
Un roman choral aussi drôle que touchant jusqu’au dénouement ironique mais très contemporain.
Un régal de lecture où on rit, où on se pose des questions sur soi, où on voit la vie telle qu’elle est se dérouler devant nous. Un roman qui donne le sourire et qui nous fait dire vivons comme on est au lieu d’essayer de vivre sans se faire juger par la société !
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« Le lent sourire » parle de l’amitié au sens profond du terme, le partage, l’accompagnement jusqu’à la mort. Mort très présente, le cancer qui va bouleverser un groupe d’amis dans la première partie du livre. Pourquoi ce titre : « Le sourire lent est le sourire de la fin, la vie qui se ralentie, qui décélère jusqu’à l’immobilité peu à peu ». Des amis au temps de l’insouciance, certains de leur avenir, rien ne peut leur arriver…Mais Lisa est frappée par la maladie en pleine jeunesse. Ils sont tous présents, les amis les vrais, ils l’entourent, la cajolent, se relaient à tour de rôle auprès d’elle, ils se soutiennent et craquent dés que la porte de l’hôpital se ferme. Ils iront jusqu’au bout. Mais ce drame finira par les séparer, « chacun doit se réfugier dans son propre destin pour atténuer la douleur ». Cette première partie est écrite à la première personne du pluriel, ils font bloc. Mais un personnage se détache Clara qui lors de ses visites à l’hôpital rencontre Ben, lui aussi est au chevet d’Anna, son ex-femme de 20 ans plus jeune que lui. Ben n’est pas dans le même état d’esprit. Plus âgé que sa femme, il a toujours voulu la modeler, la posséder mentalement. Elle a pourtant besoin de lui, mais il ne sait pas donner. Deux comportements diamétralement opposés, vont-ils se comprendre… Livre tendre qui parle avec pudeur de cette maladie. L’auteur utilise des phrases courtes qui vont à l’essentiel, beaucoup de rythme, des surnoms : la patate pour la tumeur, la galopade pour le rire, la larmoyade pour les pleurs, et tant d’autres… Très beau livre , un bon moment de lecture
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Décidément, la jeune Caterina Bonvicini se complait dans les ambiances tristounettes, qu'elle s'efforce toujours de relever avec sa plume ironique, faussement insouciante. Après L'équilibre des requins (excellent souvenir), voici Le lent sourire, évocation de la vie d'un groupe de trentenaires frappé par la mort d'une des leurs, vaincue par le cancer. Le lent sourire, c'est celui de cette jeune femme sur son lit d'hôpital, dernière coquetterie avant le grand saut. Le livre est racontée par Clara, son alter ego, avec laquelle elle entretient une relation fusionnelle depuis le collège. La narratrice surfe entre présent et souvenirs, faisant resurgir des scènes dignes d'une comédie italienne. Mourir à trente ans ? Ce n'est pas sérieux, ce n'est même pas envisageable. Alors, elle fait l'éloge de l'amitié, la Bonvicini, témoigne des moments doux qui ne durent pas, des instants fous qui restent dans la mémoire. Nous nous sommes tant aimés, on pense à Scola, bien sûr, quand on est heureux et qu'on ne le sait pas. A ce récit, enlevé et délicat, Caterina Bonvicini colle en parallèle une autre histoire, celle d'un vieux chef d'orchestre antipathique, un certain Ben, qui voir sa dernière compagne, soprano brillante, décliner et s'incliner aussi devant la Camarde. Mourir à 30 ans, ce n'est pas sérieux, même pas envisageable. Clara et Ben se rencontrent. Début d'idylle ? C'est à voir. Un nouveau départ, en tous cas. Il n'est pas mal du tout, ce Lent sourire, mais son aspect artificiel gêne quelque peu. L'émotion est tenue à distance, les ficelles trop apparentes, mais bon, ne chipotons bas, le livre se dévore sans déplaisir aucun. Et on peut même l'aimer. Un peu.
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On découvre les portraits de 7 femmes qui entourent un homme qui a disparu. C'est l'occasion d'un exercice de style puisqu'à chaque femme est associé un style d'écriture (à la 1e personne, à la 2e, à la 3e etc.).
Les portraits sont vivants, et la ville de Milan est mise à l'honneur.
C'est une lecture agréable mais qui sera vite oubliée j'ai peur.
#défi "Plumes féminines 2024"
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La vie du jeune Valerio n'est pas simple. Issu d'une famille modeste – son père est jardinier chez les Morganti- il grandit dans un milieu bourgeois qui n'est pas le sien, aux côtés d'Olivia, qui, elle, appartient au clan des Morganti, riche famille de Bologne. Jusqu'à l'âge de dix ans, ils partagent les mêmes jeux et fréquentent la même école.
Suite à la séparation de ses parents, Valerio part vivre à Rome avec sa mère. Il retrouvera Olivia lors de la fête de ses 18 ans. La relation de Valerio et Olivia connait beaucoup de turbulences. Leurs chemins se séparent puis se croisent sans qu'ils parviennent à mener une vie commune. La différence de milieu social y est pour beaucoup, avec la pression des familles.
Caterina Bonvicini, qui a grandi à Bologne, s'attache à décrire les années de plomb avec les enlèvements et les assassinats qui la caractérisent. Ce sont celles de sa propre enfance, puisqu'elle est née en 1974. C'est la première partie du roman. L'auteur choisit des épisodes marquants dans la vie de ses personnages pour découper son récit. La deuxième partie est consacrée au début des années Berlusconi, 1993-94, à Rome. Les protagonistes ont 18 ans. En troisième partie, à Cortina, en 2001, ils ont trente ans et un enfant chacun. Puis en 2013, à la quarantaine, Valerio a atteint la position sociale dont rêvait sa mère, mais au sein d'une société corrompue, et au prix d'un mariage de convenance. Quant à Olivia, elle n'a pas fait grand chose de sa vie. Elle a multiplié les relations sans lendemain, s'est mariée plusieurs fois. Sa famille est ruinée. Tous deux sont en fin de compte assez amers.
L'écriture de Caterina Bonvicini est fluide et agréable. C'est toujours Valerio le narrateur. L'atmosphère du pays est bien rendue, avec sa mentalité machiste, et le contexte, à chaque époque, est rappelé par des références pertinentes. La maison Morganti à Bologne, au cœur de cette histoire d'amour impossible, n'est toutefois pas suffisamment décrite. On peut le regretter.
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J’ai beaucoup aimé cette histoire d’amour impossible entre Valerio et Olivia qui démarre quand ils avaient 5 ans: lui fils des employés de maison, elle héritière de l’empire familial.
Leurs vies vont se croiser, se décroiser, s’effilocher, se racommoder pour s’ancrer et devenir un vrai amour. Tout se passe avec en arrière plan les années berlusconiennes. On voit à quel point la richesse des uns se fait sur le dos des autres: pots de vin, marchés fictifs, détournement des allocations européennes....Pour autant Valerio qui critique cela, sera celui qui rejoindra le club des nantis/pourris pour montrer qu’il peut se hisser au niveau de sa belle. Olivia parce que n’ayant pas de vraies contraintes refusera toujours ces règles et choisira l’anti-conformisme, sans renier ses racines. Dur dur de s'aimer dans tout cela!
De manière très ironique et réaliste, l’auteure réussit à nous emporter dans une belle histoire d’amour d’aujourd’hui.
Un bon 4 étoiles!
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Les femmes de… Une jolie construction littéraire. Un homme disparaît et les femmes de sa vie – sa mère, sa sœur, ses deux épouses successives, ses deux filles, sa maîtresse – dans de courts chapitres nerveux font évoluer le récit, dévoilent leur personnalité, se heurtent et se réconcilient. L’auteure, avec un talent certain, trace ainsi le portrait peu amène de plusieurs générations, de ce que sont les ambitions et les préoccupations de ces femmes et réussit ainsi une belle satire sociale dans un Milan, aimé et détesté tout à la fois. Le portrait demeure froid, à la lisière parfois d’une certaine misogynie. Aucun des personnages n’est vraiment attachant, si ce n’est peut-être Vittorio à a qui la parole est finalement donnée et que nul ne connaissait réellement. Une manière de décrire cette dérive possible du monde moderne où les êtres avancent, projettent dans leurs proches ce qu’ils sont eux-mêmes, ce qui les arrangent afin de construire artificiellement le décor de leur existence. Bref, une agréable lecture d’été qui ne laissera cependant que peu de traces.
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L'equilibrio degli squali.
On découvre Sofia par son formulaire d'admission aux urgences, suite à une overdose. Le pourquoi de sa tentative de suicide est le sujet du roman. Quatre hommes dans sa vie : un ex-mari maniaco-dépressif, deux amants, et un père océanographe qui se trouve à l'autre bout du monde, et qui ne trouve rien de mieux que de lui faire parvenir un paquet de lettres écrites par sa mère avant qu'elle ne se suicide.
Mélange de gravité et d'humour, l'auteur tisse son roman en articulant un récit à la première personne, des fragments de lettres, la retranscription écrite des vidéos de son père, et des dialogues passionnants. Une construction habile qui rend la lecture de ce roman très dynamique.
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L'auteur nous fait découvrir un roman fort sur un sujet très délicat: la mort mais surtout tout le processus du deuil. Les parties consacrées à la mort de Lisa sont vraiment très poignant, superbement écrit, une superbe déclaration d'amour et d'amitié de la part de sa meilleur amie Clara. Celle-ci relate ses meilleurs souvenirs avec Lisa et leur groupe d'amis. Plusieurs années sont racontées, décrites dans les moindres détails avec beaucoup d'humour et surtout de la douleur. La douleur d'avoir perdu un être irremplaçable! Le livre ouvre la porte sur la vie mais il ne met pas de côté le très très très long processus du deuil et tout ce qu'il inclut.
Le point négatif de ce livre, les autres parties du livre sont consacrées au deuil d'un homme, chef d'orchestre qui a perdu son dernier amour. Incroyable mais pourtant je n'y vois aucune émotion, aucun intérêt, vraiment dommage. Mais là c'est un avis très personnel.
C'est en tout cas un superbe roman, une vraie découverte littéraire! Je le conseille vraiment.
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Ce roman est un croisement familial, 3 voix se partagent la narration : la fille, Sofia, dépressive et qui cherche à se reconstruire, ou à se construire tout court; son père, qui lui adresse de l'autre bout du monde de petits films sur la vie des requins; sa mère, morte quand Sofia était encore petite, mais qui a laissé un paquet de lettres que Sofia découvre -et lit.
si le thème central et porteur est la dépression (celle de Sofia, celles de ses amants, celle de sa mère, dans une autre mesure, celle de son père), on ne perd pas de vue l'espoir de l'équilibre, plus que la chute, l'espoir d'une renaissance, plus que d'une re-chute.
c'est d'ailleurs par la découverte de son père, de sa mère, que Sofia parviendra à se retrouver, un peu, et à espérer chercher cet équilibre rare et fragile...
Pas fantastique ni hyper prenant, mais intéressant, même si vouloir traiter la dépression dans toute sa complexité m'apparait un peu trop compliqué; vouloir mêler dans le même roman autant de personnages dépressifs (il n'y en a pas un seul de "normal"!!!) pour essayer d'expliquer les différentes formes que la dépression peut prendre, ça me parait un peu "lourd". mais bon... sympa quand même!
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J'avais été très attiré par l'idée de base de ce roman qui n'est pas sans rappelé le scénario d'un film. Bien que j'ai apprécié ma lecture elle n'a pas été complètement à la hauteur des attentes que j'avais. Je m'attendais à plus d'humour et de piquant mais finalement le cynisme l'emporte. l'écriture est très maitrisé et l'ambiance italienne accompagne le lecteur tout au long du roman.
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