AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Critiques de Cécile Oumhani (39)
Classer par:   Titre   Date   Les plus appréciées


Mémoires inconnues

Ce recueil, finaliste du prix Mallarmé 2019, nous entraîne sur les traces du passé, des empreintes de vie, fugaces ou encore dans « l’espace d’une question sans réponse ».

Cécile Oumhani explore ce passé à petites touches impressionnistes et nous donne à entendre des voix inconnues, comme celles de ces femmes qui « cherchent le passé/ dans leurs tasses de café ».

A travers cinq textes brefs, l’auteure nous fait entrer dans la nuit roumaine, là « où les vies s’égrènent, lentes répétitions d’espoirs bâtis par la nuit ». La nuit transforme tout, elle a ses couleurs, ses propres sons, fait entendre la musique d’un mariage.

Sur la route, on croise aussi des chevaux et des roulottes de bois, et ces visions « demeurent installées dans la nuit, signes fugitifs de mille strates logées dans l’épaisseur de nos vies ». Ainsi restent les traces, comme étoiles filantes, de ces gens croisés sans les connaitre.



Quelques-uns des poèmes sont proposés en deux versions : en anglais et en français. Comme « La photo » qui fait revivre des visages d’enfants près de leur mère. « Images précieuses restées des années à la dérive/ dans la profondeur du cours de mes jours/ portées par sa voix. » Et ces voix du passé sont « une promesse à tenir/ et une énigme à résoudre. »



Les mots de Cécile Oumhani sont choisis, ils ont leur subtilité et, parfois, se mêlent à des mots hindis : dhobi, juttés ou diwan.

Grâce à l’écriture, tout en finesse, nous traversons les nuits aux « incessants bruissements », et nous voyageons dans ces lieux obscurs où résonnent les voix du passé, ces lieux où « les langues sont des fleuves, les langues sont des montagnes ».

Cette méditation poétique est délicatement accompagnée de 6 encres de l’artiste plasticienne Liliane-Eve Brendel.

Une lecture emplie de douceur et de nostalgie avec le désir de découvrir d’autres textes de Cécile Oumhani.

Commenter  J’apprécie          410
L'Atelier des Stresor

C’est tout en nuance et poésie que Cécile Oumhani nous conte, en procédant par touches successives, comme le font dans leurs tableaux, le peintre Stresor et sa fille, qui épousera la passion de son père, la vie de cette famille d’artistes du XVIIème siècle à Paris. Et ce n’est qu’avec la touche finale que l’ombre et la lumière dans lesquelles baigne leur vie en révèlent toute la profondeur.

De cette belle évocation de la vie de Henry Strésor, Cécile Oumhani a fait un poème, un livre historique et un roman.

Commenter  J’apprécie          290
Une odeur de henné

Kenza, proche de la trentaine est médecin à Tunis et toujours célibataire. Indépendante, elle ne cherche pas - et repousse même - les avances des hommes qui l'entourent; son ambition, faire de la recherche...Ses parents, un père éduqué et une mère villageoise, la pressent pour qu'elle prenne un époux et s'inscrire ainsi dans la tradition de la femme mariée qui devient mère par la suite et s'accomplit dans cette vie. Seule sa grand mère Khadidja semble comprendre la crise intérieure que vit sa petite fille. Mais la possibilité d'obtenir une bourse pour un an d'étude à Paris et le mariage arrangé qui se profile, vont bouleverser son avenir et ses valeurs intimes, lui offrant le choix de la résignation ou celui de l'affranchissement de la tradition.



Entre descriptions très poétiques - des paysages notamment - et celles beaucoup plus froides des sentiments, Cécile Oumhani évoque les tiraillements de la jeunesse tunisienne, éduquée et intellectuelle. Comment concilier tradition familiale et épanouissement personnel, respect des coutumes et ambition professionnelle, comment s'abstraire de la famille et s'affirmer en tant qu'individu, indépendant et libre ? Des questionnements qui sont le fil conducteur de ce court roman.

Une odeur de henné dont le titre évoque la préparation au mariage, quand les paumes des mains des futures mariées sont ornées de dessins et d'arabesques à valeur symbolique, illustre le trouble que peut ressentir la jeunesse tunisienne, séduite par la réalisation individuelle et le besoin de l'ailleurs, dans une société encore très patriarcale et traditionnelle.

Un roman intéressant dans un style quelquefois poétique mais qui dans l'ensemble reste un peu distancié et épuré.
Commenter  J’apprécie          250
Les racines du mandarinier

Merci à Bretzel qui lors de la chronique d'un autre roman des éditions Elyzad, m'avait conseillé Cécile Oumhani. Merci car je viens de tourner les dernière page et ce fut un ravissement.

Deux étudiants se rencontrent à Paris et tombent en amour avec pour grande passion la littérature. Marie et Ridha. Lui est Tunisien et il décide un jour de venir s'installer au Pays où toute sa famille à lui l'attend.



Seulement Marie va découvrir un autre Ridha, voué entièrement à elle alors qu'ils vivaient à Paris, dans son pays, retrouvant sa famille et ses amis, rien n'est plus pareil. Pour elle, il la délaisse alors qu'elle a tant besoin de compagnie, de présence, sa manière d'être avec elle n'est plus la même. Et puis il y a cette fameuse cousine Fadhila qui tourne autour du couple.



Très vite il trouve du travail comme professeur, éloignés de la famille, ils se retrouvent tous les deux dans une ville de l'arrière pays. " Marie savoure leur complicité, la tendresse de son bras sur son épaule, son regard qui devine ce qu'elle n'a pas dit. " Elle veut y croire, et tombe enceinte. Mais rapidement elle vit l'ennui au fil de ses journées moroses sans compagnie, sans âme avec qui partager ses joies et ses peines, ses passions... Sa maison est son seul univers. Sa belle mère vient à son aide les derniers temps de la grossesse, qui est quelque peu difficile, mais comme elle confiera plus tard, elle aurait dû venir bien avant....



L'enfant né, un joli garçon met le papa en joie, la maman est différente, quelque chose s'est brisée en elle. Et elle va devoir laisser son fils à sa belle mère pour se faire soigner. Et ne le reverras jamais.



L'auteur donne voix à Marie qui raconte sa détresse dans ce pays qui n'est pas le sien avec ce bien-aimé qu'elle ne retrouve pas, qu'elle croit avoir perdu. Puis quelques années plus tard, à Sofiane, ce jeune homme cultivé de 22 ans qui n'est que le fils du couple meurtri, qui ne s'est pas compris et à Oumi Saïda, la belle mère de Marie.



Ce récit est magnifique tout en poésie et élégance. C'est le premier roman de Cécile Oumhani que je découvre et je suis sous le charme de sa plume, sa délicatesse à fleur de mots. Merci à elle pour ce merveilleux texte emprunt de sensibilité et d'amour.

Petit mot de fin, la collection poche de cette maison d'édition que j'affectionne est à croquer, très belle .....
Commenter  J’apprécie          185
L'Atelier des Stresor

Voilà un joli petit ouvrage que j’ai découvert cet été au Festival Voix de la Méditerranée de Lodève cet été.

Henry Strésor est un jeune peintre qui se forme dans l’atelier des frères Le Nain. Nous sommes en 1637 à Paris et il entend ces mots résonner doucement à son oreille : Il nous plairait que vous restiez…

Henry va donc devenir l’élève de Louis Le Nain et parfaire sa connaissance de la peinture, lui qui a fui, plus jeune, la Prusse dévastée par les guerres et les épidémies de peste, puis La Haye où il a fait trois années d’apprentissage.

« Le matin, il entre parmi les premiers dans l’atelier des frères Le Nain, affamé de l’odeur des huiles sur la toile et de ces pigments qu’il va mélanger puis étaler. Le monde se crée et se recrée à l’envi ici sous les combles. Les formes émergent, la vie dont il est assoiffé explose au grand jour. »

Fasciné par les toiles des frères Le Nain, il apprend à leur contact et à celles des autres élèves, comme cet Israël Silvestre qui croule sous les liasses de dessins qu’il a rapportés de Rome.



Mais Henry cache pourtant un secret. Un secret laissé là-bas, dans son Allemagne natale, et qui ne lui laisse aucun répit. Son frère Mathias était lui aussi très doué pour la peinture. Si seulement il était revenu à temps … « Il était torturé par des souvenirs indicibles que n’estompait plus le travail routinier imposé par le maître. Seules des couleurs nouvelles parviendraient à les chasser. Il sait qu’il ne s’est pas trompé en cédant à cette soif d’ailleurs qui le tenaillait. »



Heureusement il y a la maison de Louis Buart qui le loge pour le réconforter. Louis Buart est maître-peintre de son état. Il lui a proposé de travailler avec lui. Et Henry se sent tout de suite très bien dans cette demeure, aux côtés de Magdeleine, l’épouse de Louis, mais surtout de la belle Catherine, sa fille …



Henry Strésor est connu pour son tableau Le Mangeur d’huîtres passé à la postérité. Cécile Oumhani s’est librement inspirée des rares éléments biographiques le concernant, mais aussi des informations sur sa fille, Anne-Renée, très douée également pour la peinture, et qui va devenir l’une des premières membres de l’ancienne Académie royale de peinture et de sculpture. La seconde partie racontera en effet l’histoire d’Anne-Renée, de sa « vaine fierté » à être « une des premières femmes reçues à l’Académie royale », l’admiration autant que la curiosité teintée de méfiance qu’elle suscite, puis son choix de rejoindre les religieuses de la Visitation de Chaillot, dont Cécile Oumhani imagine les raisons.



Avec beaucoup de style, l’auteure, qui a bénéficié d’une résidence d’écriture au Musée-Promenade de Marly-le-Roi en 2010, à l’invitation de la Maison de la Poésie de Saint-Quentin-en-Yvelines, pour évoquer la vie d’Henry Strésor, nous la restitue tout en finesse et sensibilité. Un livre à recommander à tous les amateurs de peinture autant que d’histoire, comme à tous les lecteurs en quête d’une belle écriture.


Lien : https://www.biblioblog.fr/po..
Commenter  J’apprécie          172
Les racines du mandarinier

En quittant son Nord natal pour suivre son mari en Tunisie, la douce et blonde Marie se coupe de ses racines. Elle découvre un pays où les hommes et les femmes ne mènent pas la même vie. Tandis que les femmes restent confinées à la maison, la rue appartient aux hommes et Marie doit se plier à la tradition, supporter de rester seule tandis que son mari sort. Alors Marie s'ennuie à mourir et s'isole encore plus en s'enfermant dans son monde intérieur. Dans ces conditions, la jeune femme arrivera-t-elle à s'enraciner en terre étrangère?

Dans ce roman où on s'aime comme on se déchire, les destins se croisent et se cherchent à travers l'absence et l'exil. Une histoire intéressante, lue avec plaisir même si je n'ai que moyennement apprécié l'écriture parfois alourdie par des envolées poétiques trop alambiquées à mon goût.
Commenter  J’apprécie          150
Tunisie, Carnets d'incertitude

Le format du livre, voisin de celui d’Actes Sud, n’est pas sans rappeler un carnet de voyage.



Le livre débute par l’immolation de ce jeune tunisien, marchand de légumes, déclencheur des évènements. Ce printemps tunisien était porteur de tant d’espoir, où ils ont appris que l’on pouvait dire non. « Maintenant on a le droit de dire non ! ».



Les phrases de Cécile Oumhani sont lancées sur la feuille par un besoin, une nécessité impérative de ne pas oublier, suivre les évènements de ce printemps tunisien 2011. Phrases courtes, voire très courte genre style télégraphique pour certaines. Fontaine des Innocents. Faire ce que l’on peut là où l’on est.

L’urgence est là, il faut écrire la peur, la crainte, l’espoir, l’amour, la beauté. La poésie est omniprésente.

Ses écrits sont comme un remède à l’éloignement de ce pays qui fait partie de ses racines, même si ce n’est pas son pays natal. « Pas celui où je suis née. Mais pourtant indissociable de ce que je suis. »

Cécile Oumhani reprend ses écrits en 2013 après le meurtre de Chokri Belaïd « Ainsi ils ont tué Chokri Belaïd. Agresseurs anonymes. Un tireur embusqué au moment où l’opposant laïque sortait de chez lui. » Le chapitre sur le salafiste remontant la file d’attente résume le nouvel état des lieux. La déception est là, la peur est revenue. Et si tout était à refaire ?



Un livre que je n’ai pas lu d’une seule traite car ces phrases méritent que l’on s’y arrête. Un livre d’urgence plein de mots qui ricochent plein de poésie. Un beau et bon livre.




Lien : http://zazymut.over-blog.com..
Commenter  J’apprécie          140
Le café d'Yllka

Après quinze ans passés en Allemagne, Emina revient à Skopje dans sa famille maternelle.

A l'âge des premiers émois amoureux lorsqu'éclata la guerre en Bosnie, elle vit son père partir rejoindre les combattants et sa vie basculer le jour où il lui fallut quitter sa maison. Commença alors un périple qui la mena d'abord à Sarajevo puis en Croatie et enfin en Allemagne.

Si Emina et son petit frère arrivèrent sains et saufs chez des cousins d'Yllka en Allemagne, celle-ci ne les rejoignit pas et ses enfants ne surent jamais ce qu'il advint de leur mère restée à Sarajevo pour attendre son mari.



Je vous invite à découvrir, si ce n'est déjà fait, une écriture toute en délicatesse, celle de Cécile Oumhani qui, partant d'un visage croisé dans un aéroport "l'ombre d'une tragédie logée au fond des yeux", a su décliner une variation pudique sur la guerre et les déchirements propres à l'exil. Un thème auquel s'associent les inévitables interrogations liées au sort des disparus, au travail de deuil, au retour sur les lieux de souffrance à la recherche de la mémoire. Retour redouté, questionnements sans réponse, fragilité des souvenirs d'enfance, c'est à l'odeur du café que sa mère préparait que s'accroche Emina dans un improbable espoir de la retrouver.



Les petits arrangements que passent les enfants avec l'absence et la violence sont particulièrement émouvants et sont autant de petites notes de sensibilité auxquelles le lecteur se cramponne avec eux afin de faire face à la tragédie. Le pire n'est jamais loin mais toujours suggéré avec sobriété.

Un petit livre de 124 pages que j'ai refermé la gorge nouée.




Lien : http://moustafette.canalblog..
Commenter  J’apprécie          100
Le café d'Yllka

J'ai toujours été, à choisir, un amateur de pavés, car je pensais en avoir pour mon argent alors que les romans à l'épaisseur inférieure à un centimètre me renvoyaient à un a priori idiot que l'auteur ne s'était pas foulé et que j'allais engloutir sans passion une nouvelle où le ratio signes/prix m'était clairement défavorable. Et puis, dans les titres des éditions Elyzad, une claque il y a quelques mois avec ce premier roman d'Emilienne Malfatto.



C'est donc sans craintes et le coeur léger que j'ai entrepris de lire Le café d'Yllka de Cécile Oumhani sur les bons conseils de ma libraire, à une semaine d'une rencontre organisée en librairie avec l'éditrice et l'autrice. Et je vais finir par croire que cette maison d'édition aime me briser le cœur et m'arracher de la compassion !



C'est cette fois dans les Balkans qu'une femme revient des années après les conflits qui firent exploser la Yougoslavie et mirent à feu et à sang les Balkans, poussant les familles rescapées des bombardements à s'enfuir d'abord à Sarajevo puis, pour échapper aux snipers, à s'exiler vers la Croatie et les pays d'Europe.



Elle vient d'Allemagne sur les traces des souvenirs qu'elle conserve de son enfance au pays, afin de rencontrer un frère de sa mère de qui elle fut séparée pendant ce conflit meurtrier qui s'est produit il y a quelques décennies à peine, et pour laquelle elle ne sait pas si elle est morte ou vivante.



Bref mais intense, c'est en conclusion ce que je pourrais vous dire de ce petit roman de 120 pages qui m'a beaucoup touché par la délicatesse de son récit, qui parvient à transmettre cette douleur de la séparation et le traumatisme de la guerre sans avoir recours à l'emphase. Une belle et douloureuse découverte.
Commenter  J’apprécie          90
Les racines du mandarinier

Un attroupement, des cris. Au milieu d'un groupe d'hommes, une femme seule, hurle et se défend comme un beau diable. « La femme tunisienne est une lionne ! » me lance mon ami amusé. C'est alors que je réalise que les femmes de ces tunisiens qui m'accompagnent dans nos visites, nos promenades ne sont jamais de la partie, jamais avec nous, dévolues à la bonne marche d'un intérieur qu'elles ne quittent pas.

Pourtant leurs maris sont cultivés, la plupart ont étudiés leur médecine ou leur droit en France et n'ont en tête que le mot Démocratie alors que leur pays tarde à appliquer une totale égalité entre hommes et femmes. le poids de la tradition, de la religion pèse sur le dos de toutes ces compagnes cloîtrées et qui paradoxalement pour la plupart acceptent et confortent ces usages tribaux.

Tel est le thème de ce beau roman de Cécile Oumhani auquel s'ajoute le fait que l'épouse de cet universitaire rentré au pays après des études en France est elle-même française et tente de s'adapter à la vie en Tunisie. C'est aussi en grande partie le thème de la BD « l'arabe du futur ».

Il y a un mot qui revient très souvent dans la belle prose de Mme Oumhani, c'est « bribes » et en effet, c'est par bribes de vies qu'elle va nous livrer cette douloureuse histoire peinte avec délicatesse, douceur et élégance.
Commenter  J’apprécie          90
Une odeur de henné

Après ma découverte des éditions Elyzad grâce au titre de Leïla Sebbar, Fatima ou les algériennes au square, c’est avec plaisir que j’ai renouvelé l’expérience avec cette maison d’édition tunisienne que je vous encourage à découvrir.



Dans ce livre, nous partons à la rencontre d’une femme, d’une religion et, surtout, du choc des cultures.

Kenza est une jeune tunisienne de trente ans, instruite, médecin de campagne, qui n’est toujours pas mariée et vit encore chez ses parents. Femme indépendante, elle a grandit entre un père instituteur et son bureau rempli de livres et une mère ancrée dans la tradition. Mais un jour, tout son équilibre est bouleversé lorsqu’un ami de la famille fait officiellement sa demande. Pour elle, ces fiançailles arrangées sont une opportunité : elle va ainsi pouvoir partir un an pour des recherches scientifiques à Paris. Une occasion à ne pas manquer pour une trentenaire tunisienne avide d’émancipation.



Ce livre est un petit bijou littéraire, où le style est aussi excellent que le contenu. Le personnage de Kenza représente l’envie de liberté qui est inconsciemment bridée par la tradition culturelle et religieuse. En Tunisie, la jeune femme est plutôt étonnante puisque presque vieille fille et particulièrement instruite et utile à la société. Mais à Paris, quel choc pour elle de découvrir que les femmes peuvent regarder les hommes dans les yeux, qu’elles peuvent sortir seules le soir sans besoin de rentrer préparer le repas, etc.

Le choc des cultures est le sujet fondamental du roman. Peu à peu, Kenza va subir une transformation radicale en décidant de porter le voile et de se renfermer sur elle-même. L’amour qui se met sur son chemin va engendrer de la culpabilité envers tout le système culturel et religieux dans lequel elle baigne depuis sa naissance.



L’auteur nous offre un livre court et passionnant sur les traditions musulmanes et leur appréhension dans pays occidentaux. Le plus de cette histoire est d’aborder le sujet du côté d’une musulmane et non d’un français.

Le style d’écriture est fluide et poétique, ce qui rend la lecture très agréable.



En conclusion, je vous conseille vivement ce livre mais aussi cette maison d’édition tunisienne, Elyzad, qui vous proposera une littérature orientale de très bonne qualité !
Commenter  J’apprécie          80
Tunisian Yankee

Comment ne pas d’abord parler du bel objet qu’est ce livre, avec son épaisse couverture à rabat et son beau papier ? Un écrin à la hauteur de son contenu, indéniablement !

D’une plume aussi forte que raffinée, Cécile oumhani nous dresse le portrait de Daoud qui, après avoir rêvé d’émigration, le subit plus qu’il ne le vit, en fuyant, sans un aurevoir, sans se retourner.

Couché sur un lit d’hôpital de fortune, en proie aux pires souffrances, il se souvient. De Mouldia qui l’a élevé, de son père tyrannique, de ses amis militants, des émeutes, de son premier amour, de celui qui l’attend là-bas, à New-Tork. Autour de lui, la guerre fait rage et ne l’épargne pas, lui Daoud devenu Dawood.

On tremble avec lui, de rage et de peur. On espère avec lui, haletants, malgré les balles qui sifflent et les chirurgiens épuisés qui amputent.

Il nous semble bien entendre la chanson « Smyrneiko Minore » au fil des pages et on éprouve avec Daoud cette émotion qui nous empoigne le coeur.

Parce que oui, c’est de cela qu’il s’agit : Cécile Oumhani tient notre coeur entre ses mains tout au long de ce roman.

Et il résonnera longtemps en nous, c’est certain.
Lien : https://livresetbonheurs.wor..
Commenter  J’apprécie          70
Une odeur de henné

Kenza est une jeune femme médecin dans un hôpital de campagne en Tunisie. Depuis toujours, elle se sent différente, de sa famille et de ses connaissances au village. Grâce à son père cultivé, elle a pu étudier et choisir un métier qu'elle aime. Mais maintenant qu'elle est médecin, sa famille entend bien la faire rentrer dans le droit chemin : prendre un mari, faire des enfants et tenir une maison. Kenza se révolte d'abord et finit par accepter de se fiancer à condition qu'elle puisse partir un an à Paris pour travailler dans la recherche. Kenza vit alors une année riche en découvertes, chocs culturels et émotions. Va-t-elle trouver la liberté qu'elle recherche ?



Une odeur de henné, publié en 1999, est le premier roman de Cécile Oumhani. Ce n'est pas le premier que je lis de cette auteure franco-britanno-tunisienne : j'avais beaucoup aimé Le Café d'Yllka, publié aux éditions elyzad. C'est avec plaisir que j'y ai retrouvé la même belle écriture poétique et imagée :



"Elle marche, portée très loin de la foule qui se bouscule par la perspective qui s'ouvre à elle. La clameur des étourneaux nichés dans les ficus de l'avenue principale accompagne sa rêverie et l'isole des passants. Elle accueille l'éclat des gerbes de rose et de glaïeuls aux étals des fleuristes comme une autre bouffée de joie venue célébrer une journée très particulière. Elle repousse avec insouciance les œillades des jeunes gens. L'arrogance de ces hommes qui remettent en question son droit de marcher seule dans une rue ne l'irrite même plus. Elle est déjà ailleurs, chargée d'une mission autre, sous des instances dont ils ne soupçonnent pas l'existence."



Le personnage de Kenza ne peut que toucher le lecteur, et surtout une lectrice. Elle est jeune, belle et intelligente, elle se révolte contre sa condition de femme destinée à se marier, à élever ses enfants et à s'occuper de sa maison. Elle est écœurée, et le lecteur comme elle, par toutes les odeurs qui lui rappellent cette condition : l'odeur des tajines, des pâtisseries que les femmes cuisinent à longueur de journée, l'odeur du sang du mouton que l'on égorge et l'odeur du henné que l'on applique sur les mains des jeunes fiancées.



Alors, quand elle se rend à Paris, on pourrait croire qu'enfin, elle trouve cette liberté tant souhaitée. Pourtant, le choc est rude : elle est surprise par le comportement des hommes et des femmes dont les différences semblent gommées (le compagnon de son amie française, Claire, cuisine !), gênée par la spontanéité des rencontres, des contacts. Et surtout, elle est troublée par la naissance de sentiments inconnus envers un homme, Jacques, qu'elle rencontre. Pour se protéger, elle se renferme sur elle-même et sous le foulard et la tunique noire qu'elle choisit de porter.



Puisque ce n'est pas à Paris qu'elle trouve la liberté, elle choisit de quitter ce pays qui n'est pas le sien et de retourner auprès de sa famille et de son fiancé qui l'attend. Elle accepte en toute conscience son mariage, sans pour autant perdre la liberté de ses pensées. Alors, on peut être déçu ou interloqué par cette fin, car on n'aurait pas fait les mêmes choix que Kenza, et pourtant on admire son courage.



Ce roman fait la part belle aux femmes, à travers le personnage rebelle de Kenza mais aussi de Khadija la bédouine, sa plus proche amie et son exemple, qui ne quitte jamais ses pensées. Il y a aussi Faten, l'amie égyptienne qui partage la chambre de Kenza à Paris, soumise à la volonté de son frère au Caire qui l'oblige à porter le foulard, et qui ne fera pas les mêmes choix que Kenza. C'est aussi un roman universel qui aborde des questions toujours actuelles : la condition des femmes, leur droit à l'éducation, le port du voile. Une très belle lecture que je vous conseille vivement !
Lien : http://leschroniquesassidues..
Commenter  J’apprécie          70
Le café d'Yllka

Après une quinzaine d'années passées loin de son pays natal, Emina retourne chez son oncle Feti en ex-Yougoslavie. Ensemble, ils évoquent le souvenir de la mère d'Emina et sœur de Feti, disparue en pleine guerre balkanique, et dont il ne reste que quelques lettres. Dans un carnet, Emina cherche à retrouver et réunir ses souvenirs. Elle y parle de ses premières amours, de sa sortie de l'enfance, de sa cousine plus âgée, mais aussi de la guerre, des bombardements, des tirs de snipers dans les rues de Sarajevo, de son père parti les défendre à la guerre, et surtout de sa mère, qui pour protéger Emina et son petit frère, les a envoyés loin du conflit, tout en restant attendre le retour du père. Qu'est-elle devenue ? Est-elle morte ? C'est une réponse à ce doute qui la retient dans le passé qu'Emina est venue chercher dans son retour aux sources.



Quelques mots sur l'auteur : Cécile Oumhani, née en 1952 en Belgique, est une poète et romancière franco-britanno-tunisienne qui a déjà publié de nombreux ouvrages.





C'est avec une très belle écriture imagée que Cécile Oumhani parvient d'emblée à nous plonger dans le récit. On entend les sirènes annonçant un bombardement proche ou le sifflement d'une balle qui passe tout près, on voit les immeubles détruits par les obus, on s'enfonce avec Emina dans les caves en attendant un court répit.



Les personnages sont attachants : le père qui joue de la guitare dans la cave pour rassurer ses proches, Alija le petit frère qui n'abandonne jamais son chat et Yllka, cette mère courage qui jamais ne pleure de peur de montrer ses faiblesses. Enfin, Emina ne peut que nous toucher dans sa recherche de cette mère perdue, dans cette quête impossible qui l'empêche d'avance et la bloque dans son passé.



Si l'image de sa mère est floue, comme le sont les souvenirs d'Emina, c'est par les odeurs et les gestes, qu'elle s'en rappelle. Certains passages m'ont particulièrement enchantée : l'écriture y est poétique et les images très belles.



Si Emina n'a pas existé, elle est pourtant une image de toutes ces personnes qui ont perdu des proches dans une guerre absurde, qui n'ont jamais eu de nouvelles et qui se demandent s'ils sont morts et comment. Ce court roman, qui se lit d'un bout à l'autre sans pouvoir s'arrêter, est universel et m'a profondément touché. Pas étonnant que, paru en 2008, il ait reçu le Prix Littéraire Européen de l'ADELF (Association Des Écrivains de Langue Française) en 2009.



Je tenais à dire quelques mots sur l'édition de cet ouvrage car j'ai été impressionnée par la qualité : une très belle couverture à rabats et un papier épais de qualité qui font du livre un très bel objet et ne donne que plus envie de le lire. Allez donc voir le catalogue des éditions elyzad.
Lien : http://leschroniquesassidues..
Commenter  J’apprécie          70
Le café d'Yllka

Avant de commencer cette chronique, je tiens à remercier Libfly et Elyzad pour ce partenariat.



Mais qui est cette femme croisée dans un aéroport par Cécile Oumhani avec dans son regard, ses gestes, un tragédie enfouie au plus profond d'elle-même ? Emina revient dans son pays, quelques années plus tard. Sa patrie, la Yougoslavie, sa religion, musulmane, son enfance, la guerre. La fuite et la séparation ponctuent ces mois de combats vécus dans cette région avant de la quitter définitivement en train. Elle revient pour essayer de retrouver la trace de sa mère Yllka, qui l'a éloignée avec son petit frère des violences de cette tragédie et son père, parti une arme à la main pour les défendre.



Ce court roman, qui se lit d'une traite, est non pas le témoignage d'une seule personne, mais celui de tout un peuple, qui aura subit les horreurs d'une guerre inutile. Dans ce récit plein de poésie se trouve la souffrance infinie, irréparable, insondable de la perte d'un proche. Cette fille qui revient veut savoir, renouer avec une histoire que plus personne ne connaît, beaucoup tentent d'oublier, peu s'en souviennent, et les autres... sont morts. L'écriture, magnifique, presque lyrique, ajoute du poids à la douleur de la survivante. Au fur et à mesure, elle comprend qu'elle ne reverra pas sa mère, mais elle cherche à vivre ses derniers instants. Par une seule fois, il n'est question de « pourquoi ». Elle accepte, alors qu'elle n'est qu'une enfant, la guerre. Elle refuse, par contre, le « comment ». Comment son père et sa mère auront disparu ?



L'auteur nous propose ici un récit profond, difficile, sans haine, et plein d 'espoir, et manie la plume d'une très belle manière pour un témoignage poignant. Ces enfants des années 90 se trouvent au centre d'une équation, devenu adulte aujourd'hui, ils essayent de vivre avec un facteur inconnu, ce que sont devenus leurs parents, ils ont perdu leurs racines et tentent de construire leur avenir avec u chaînon manquant.



Ce roman se découvre dans la collection Éclats de vie.



Je remercie Libfly et Elyzad pour ce partenariat.
Lien : http://skritt.over-blog.fr/a..
Commenter  J’apprécie          70
Tunisian Yankee

J'ai tourné les premières pages dans la pression de devoir terminer ce livre pour le lendemain matin, alors j'allais participer à une rencontre avec l'éditrice et l'autrice herself. Je l'ai terminé dans la douce chaleur des premiers rayons du matin, dans la pression d'enfin savoir comment cette folle épopée allait s'achever, moi qui m'était laissé embarquer dans ce roman sans aucune résistance.



Il y a un siècle, Daoud grandit en Tunisie et très tôt, est séparé de sa mère qui est répudiée par son mari alors qu'elle refuse d'accepter une seconde épouse à ses côtés. Livré à lui-même sous le regard bienveillant de leur domestique, qui le voit grandir comme son propre petit-fils, il découvrira les airs et les récits du Monde aux côtés d'un explorateur russe l'ayant pris sous son aile, et rêvera de devenir aviateur.



Amoureux, il suivra les traces de celle qu'il aime mais que son monde lui interdit de fréquenter parce qu'il n'est qu'un petit tunisien. À Naples, il partira consoler son chagrin dans le nouveau monde, là-bas, de l'autre côté de l'Atlantique, et arrivera à Ellis Island le coeur emballé par une belle italienne. Pourtant, même en Amérique, il restera le petit tunisien, Dawood, tout juste bon à partir combattre pour son nouveau pays dans un conflit mondial qu'il s'enlise en Europe.



Et quelle aventure ! J'ai sauté le pas dans la vie de cet incroyable garçon tunisien devenu un homme chaleureux, amoureux et rempli d'idéaux. C'est un superbe roman où la beauté des amours même déchus entrent en collision avec les récits de cette effroyable guerre des tranchées, qui se répondent jusqu'à ces dernières pages qui laissent songeur. Il est déjà l'heure d'aller échanger avec l'autrice.
Commenter  J’apprécie          50
Les racines du mandarinier

Un livre que j'ai littéralement dé-vo-ré!

On suit Marie, jeune étudiante dans cette fin des années soixante, amoureuse de Rihda.... jusqu'en Tunisie où il l’emmènera pour l'épouser.

On vit ce bouleversement culturel, cette incompréhension avec elle, mais aussi cette découverte de saveurs, de couleurs, de richesses d'un pays méconnu...

Il n'y a pas ici qu'une histoire d'amour loin de là....je ne vous dévoile pas tout.

L'écriture de Cécile Oumhani est belle, très belle...elle m'a emportée loin, très loin avec Marie...j'ai pu sentir les parfums des jardins, voir les couleurs...ses descriptions étant si fines, de mots savamment choisis...un délice!

Bref...j'attends ma commande chez mon libraire avec grande impatience...Le café d'Yllka, Madame Oumhani je vous suis!
Commenter  J’apprécie          51
Une odeur de henné

Une belle plume. Je trouve que l'auteur a très bien réussi à rendre compte de cette quasi-schizophrénie qui touche les Tunisiens, surtout les jeunes, avec ces va-et-vient permanents entre tradition et modernité.

Il est aussi question du voile dans ce livre et je trouve que la manière dont l'auteur a abordé le sujet a le mérite d'être originale.
Commenter  J’apprécie          50
Les racines du mandarinier

L'amour comme une déchirure. Pour Marie, le choc est brutal : la Tunisie que lui avait vanté Ridha la laisse de côté. Les femmes sont mises de côté, annihilées...et jugées folles si elles ne savent pas s'adapter.



Que reste-t-il des idéaux, du rêve de multi-culturalité dans un pays où il faut souvent renoncer, y compris à son propre fils ?



Cécile Oumhani cisèle son histoire dans une dentelle précieuse, tisse le lien mère-fils (y compris "contre" la tradition), évoque dans une langue poétique le choc des cultures (Occident/Orient) et la relation homme-femme, prolonge le regard sur le Maghreb et ses traditions, dessinant en creux la confrontation entre des êtres différents, façonnés par leur héritage familial.



Une belle lecture, en douceur, où j'ai trouvé des mots justes et des émotions sincères.
Commenter  J’apprécie          40
Le café d'Yllka

A l’origine de ce texte, une jeune inconnue aperçue par l’auteure, Cécile Oumhani, dans le hall d’un aéroport. Elle ne saura jamais quel couloir la jeune femme a emprunté et vers quelle ville cette dernière s’en est allée : Pristina ou Sarajevo. Cécile Oumhani a donc tenté de reconstituer l’histoire de cette inconnue, lui a offert une vie de papier, en prenant pour point de départ l’indicible tristesse qui noyait son regard. Ainsi, le roman s’ouvre à Budapest, en Hongrie, dans ce même aéroport où la réalité a cédé le pas à la fiction, où la jeune inconnue s’est effacée pour donner naissance à Emina. Notre personnage vient de Munich et se rend à Skopje où elle espère retrouver sa mère, Yllka. Si revoir cette mère perdue est vital, il s’agit également pour l’héroïne de retrouver sa terre maternelle, celle d’avant la fuite, avant la destruction. Un pèlerinage s’amorce, placé sous le signe du souvenir.

Le Café d’Yllka est un roman de l’exil qui mêle deux époques : nous suivons Emina, adulte, qui revient dans son pays natal et nous partageons en même temps une partie de son adolescence, du début du conflit à sa fuite, par le biais du journal qu’elle a écrit alors. Ces passages ne sont pas sans rappeler Le Journal de Zlata et, comme lui, mettent en évidence l’absurdité de la guerre ressentie par une jeune fille qui ne demande rien d’autre que de vivre, normalement, sa vie d’adolescente. Les souvenirs affleurent : les jours passés dans la cave à se cacher du soleil, les bonbons donné par Yllka et restés longtemps dans une poche de pantalon, les refus de s’endormir de peur que les obus en profitent pour s’abattre sur la famille, la mort de sa cousine Ismeta, devenue « une enveloppe chiffonnée toute tachée de sang »… L’adolescente ne pleure pas, elle veut faire comme sa mère. Et les mots, enfin, les derniers qu’elle lui adressera, à elle, sa fille chérie, et à son petit frère, Alija : « Il faut que vous partiez. » C’est un roman de la quête, quête de soi, quête de l’absente, dans lequel l’héroïne questionne sans accuser. Il n’y a pas de violence dans ce roman parce que l’écriture est on ne peut plus poétique. Il n’y a pas de haine non plus, mais seulement le constat de meurtrissures indélébiles.


Lien : http://aperto.libro.over-blo..
Commenter  J’apprécie          32




Acheter les livres de cet auteur sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten

Lecteurs de Cécile Oumhani (103)Voir plus

Quiz Voir plus

La Saga Harry Potter (Difficile)

À qui appartient le sang dont les vêtements du Baron Sanglant sont tachés ?

Mimi Geignarde
Nick-Quasi-Sans-Tête
La Dame Grise
Le Moine Gras

15 questions
245 lecteurs ont répondu
Thème : Harry Potter : Coffret, Tomes 1 à 7 de J. K. RowlingCréer un quiz sur cet auteur

{* *}