« Ce n’est qu’à ce moment que je remarque un détail – et pas des moindres. Sur la croupe du cheval de trait, une boule de poils chocolat ronfle allègrement. Avec les pattes qui pendent de chaque côté du percheron, Kelpie dort à poings fermés. L’équidé est assez grand pour l’accueillir, même si son équilibre est plutôt précaire. Si le cheval faisait le moindre mouvement brusque, il volerait très certainement au sol comme un sac à patates.
Si on m’avait dit que je le verrais un jour dormir sur le cul d’un canasson, j’aurais sans doute ri à m’en décrocher la mâchoire. Vraisemblablement, Cassie pousse les gens qui l’entourent à faire des choses extraordinaires avec un naturel presque terrifiant.
La preuve, je suis là. »
Le temps aurait dû s’arrêter. Au moment où nos lèvres se sont touchées, c’était comme si deux parenthèses s’ouvraient et qu’au milieu, nous étions là. Ensemble.
J’ai travaillé aux quatre coins du pays, une maigre valise sous le bras, telle une âme errante incapable de satisfaire sa soif de découverte.
Les codes ne doivent pas t'empêcher de vivre, chérie. Tu n'es pas obligée d'attendre le deuxième soir pour coucher et, Bon Dieu, tu n'as pas à avoir si peur d'un «non»» Tu vis à Grenoble, pas dans un village de cent personnes ! Tu as déjà assez souffert comme ça. Ne te rajoute pas un boulet de plus à la cheville. Les regrets, c'est encore pire que les mauvais souvenirs.
« J’ai la chance d’être au contact des chevaux à longueur de journée, et je me fous de savoir combien je gagne. J’ai travaillé aux quatre coins du pays, une maigre valise sous le bras, telle une âme errante incapable de satisfaire sa soif de découverte. »
« Je voudrais pouvoir la forcer à me pardonner sans avoir à prononcer ces foutus mots qu’elle attend avec une telle obstination. Ils ont quitté mes lèvres tant de fois qu’ils n’ont plus vraiment de sens pour moi, aujourd’hui. »
J’attrape son verre et penche le nez au dessus du liquide non-identifié qui se trouve à l’intérieur. C’est orange, collant, et visiblement trop sucré pour que je ne finisse pas diabétique après 3 gorgées.
« J’ai toujours été seule, mais il y a des souvenirs plus durs à chasser que d’autres. Avant d’être habituée à la solitude, il faut l’apprivoiser. La comprendre… ou du moins, essayer. »
En réalité, on ne mesure pas la distance qui nous sépare des choses.
« Il mériterait pourtant d’être aimé, de trouver une famille et quelqu’un capable de le comprendre. Sûrement pas de mourir dans une cage, seul et rejeté parce qu’il est différent ! »