Nous sommes en Chine, sous le régime maoïste, en plein dans la révolution culturelle qui a duré de 1966 à 1976 et s'est achevée à la mort du président Mao. Il n'était pas bon à cette époque d'être considéré comme "intellectuel ". Tous ceux qui ne travaillaient pas de leurs mains, à la sueur de leur front entraient dans cette catégorie et étaient alors considérés comme "ennemis du peuple" et envoyés en "rééducation" à la campagne, parmi les villageois. Il s'agissait d'exterminer toute pensée allant à l'encontre de la ligne du régime révolutionnaire. Dai Sijie n'y a pas échappé et s'est inspiré de sa propre expérience pour écrire son premier roman.
Mao fit fermer les universités et envoyer les lycéens fils d'intellectuels se faire rééduquer par les "paysans pauvres". Les parents de l'auteur étant médecins, il se retrouva donc exilé dans un village de montagne : "Le Phénix du Ciel" avec un de ses amis, Luo, lui-même fils d'un éminent dentiste. Ils n'ont que dix sept et dix huit ans et savent qu'étant donné le statut de leurs parents, ils n'ont aucune chance de pouvoir retrouver une vie normale avant de très longues années. A leur âge, ils ont pourtant tout à découvrir et une grand faim d'apprendre. Soumis tout le long du jour à des travaux épuisants et parfois dangereux, vivant dans des conditions sanitaires pénibles, ils vont toutefois faire deux belles découvertes qui vont éclairer la monotonie de leur vie : une valise remplie de livres d'auteurs français pour la plupart qu'ils vont lire en cachette, et la rencontre avec la jolie fille du tailleur. Les deux jeunes gens qui sont censés être rééduqués par les paysans vont eux-mêmes "éduquer" la petite tailleuse qui jusqu'alors n'avait aucune connaissance à part celle de sa machine à coudre, grâce à la lecture de ces livres. Tous trois auront leur vie marquée à jamais par ces rencontres.
L'auteur a choisi de nous dépeindre une situation tragique, dont il a pourtant été victime lui aussi, sur un ton optimiste et souvent avec beaucoup d'humour et de légèreté. On ne peut s'empêcher de compatir au sort de ces garçons, mais le vent de liberté qui souffle sur cette histoire l'emporte sur leur souffrance. Enfermés physiquement, comme dans une prison, dans leur statut de rééduqués, ils s'en évadent grâce à la lecture des livres interdits par le parti, et à leur relation avec la petite tailleuse. Le régime maoïste absurde n'aura pas raison de leurs rêves.....C'est en finalité une belle histoire d'amour et d'amitié. L'auteur sait aussi très bien décrire les magnifiques paysages de montagne et j'ai trouvé ce livre intéressant par son côté historique, cette période de l'histoire chinoise ne m'étant pas très connue.
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