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Critiques de Edna O’Brien (366)
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Girl

C’est un camion qui l’emmènera sur les routes tortueuses d’une jungle épaisse. C‘est dans un camp qu’on la retiendra prisonnière, sur le sol boueux d’un enfer qu’elle ne soupçonne pas. Comme 275 autres de ses camarades soumises à la folie des hommes.



Boko Haram, souvenir brûlant d’une actualité terrible, est resté dans les mémoires pour un de ses actes odieux le plus retentissant : l’enlèvement de 276 lycéennes âgées de 12 à 16 ans, dans la nuit du 14 au 15 avril 2014. Avec l’horreur comme mot d’ordre, ce mouvement sectaire d’obédience islamiste enchaînera durant des mois les exactions d’une violence extrême : rapts, massacres ou viols terrorisent les habitants du Nigéria ou du Mali, dont ils font leurs victimes. Dans une volonté djihadiste d’instaurer l’État islamique d’Afrique de l’Ouest, ce groupuscule mortifère signifie « l’éducation occidentale est un péché ». Les établissements scolaires qui n’appliquent pas la charia font donc partie de leurs cibles favorites. C’est celui de Chibok qui créera un émoi international, rassemblé sous la bannière #Bringbackourgirls, « Rendez-nous nos filles ».

Cinq plus tard, alors qu’une centaine d’entre elles sont toujours portées disparues, c’est la célèbre autrice irlandaise Edna O’Brien qui s’empare du sujet, enquêtant sur place pour récolter des témoignages directs et disséquer le calvaire de ces jeunes filles. "Girl" est l’une d’entre elles, personnifiée par le personnage de Maryam.

« Des hommes s’affairaient, la racaille en treillis, des armes partout, des couteaux à la ceinture et leurs braguettes ouvertes. »

De son supplice, rien ne nous sera épargné : violée, violentée, exploitée, "Girl" supporte son corps brisé et son ventre arrondi par les méfaits de ses tortionnaires. Son bébé sera sa boussole de l’espoir, celle qui lui indiquera le chemin vers la liberté. Mais Maryam, adolescente martyrisée, ne connaît pas encore les intégrismes familiaux qui régissent les traditions de son village. Girl est le roman de toutes les oppressions des femmes.

« J’étais une fille autrefois, c’est fini. Je pue. Couverte de croûtes de sang, mon pagne en lambeaux. Mes entrailles, un bourbier. »

Un roman coup de poing, au rythme haletant, tout aussi terrible que splendide, qu’on lit le souffle coupé.
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Girl

« J'étais une fille autrefois, c'est fini. Je pue. Couverte de croûtes de sang, mon pagne en lambeaux. Mes entrailles, un bourbier. Emmenée en trombe à travers cette forêt que j'ai vue, cette première nuit d'effroi, quand mes amies et moi avons été arrachées à l'école. »



C'est à cela que l'on reconnaît les grands écrivains : leur capacité à embrasser une vie qui n'est pas la leur, une souffrance qui n'est pas inscrite dans leur chair, sans perdre en acuité ou véracité. Ce que fait là Edna O'Brien est un tour de force : raconter le calvaire d'une lycéenne nigériane enlevée par Boko Haram, son enlèvement, ses viols répétés, son accouchement, sa fuite puis son retour chez elle avec le poids du déshonneur et de la honte, sans que jamais le lecteur ne se sente voyeur ou n'y voit qu'une supercherie littéraire factice.



Edna O'Brien ne prétend pas raconter le drame des lycéennes nigérianes en mode journalistique ( survenu 2014 – médiatisée avec le hashtag #bringbackourgirls ), bien qu'elle ait enquêté sur place, recueillant des dizaines de témoignages. Non, elle se glisse dans la peau d'une rescapée, ses mots en bandoulière pour nous proposer un roman comme un hurlement dans la jungle, un roman furieux, suffoquant. le simple témoignage d'une personne ayant vécu le drame est transcendée par la forme. Récemment, je m'étais plongée dans 19 femmes, les Syriennes racontent, de Samar Yazbeck, tout aussi terrible, mais trop répétitif, trop sec pour aller au-delà de la simple compassion. Avec Girl, on est dans de la littérature dans ce qu'elle a de plus universel et de plus nécessaire.



Je n'avais jamais lu cette auteure et j'ai été très impressionnée par son écriture, notamment lorsque Mariam fuit dans la forêt : le monologue se fait hallucinée avec des envolées quasi fantastiques. C'est très puissant. Tellement sonnée par la magnifique style que, parfois, je suis passée à côté des émotions. La fin m'a cependant cueillie. Les vingt dernières ligne sont sublimes et j'ai pleuré sous cette lumière inattendue dans un récit glaçant qui étreint l'horreur jusqu'à l'os.



Un roman impressionnant sur la résilience et la force des femmes à se relever de l'oppression pour accéder à leur propre liberté. le roman d'une guerrière de 88 ans.
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Girl

Je ne note pas ce livre à sa valeur, mais par rapport à mon ressenti.

Il m'a été conseillé par mon libraire et mon amie bibliothécaire.

Il a été encensé par la presse et par les lecteurs de Babelio.

Il est de grands sujets forçant un respect inconditionnel qui s'étend aux romanciers qui les élisent pour thèmes : ce sont ceux qui traitent du viol systématique de toutes les valeurs relatives à la dignité humaine.

L'auteure, âgée aujourd'hui de 89 ans, a pourtant consacré plusieurs années de sa vie, avec honnêteté et persévérance, à l'histoire cruelle et sordide de ces lycéennes nigérianes enlevées par les troupes de Boko Haram afin de servir d'esclaves sexuelles aux soldats combattant pour le djihad.

On peut voir son travail comme un hommage aux souffrances et au courage des victimes. Il y a du vrai dans cette vision des choses.

Mais quelque chose en moi se rebiffait à l'idée de cette lecture universellement recommandée : je n'avais pas envie de m'immerger dans un univers que j'avais déjà l'impression de ne connaître que trop par de nombreux articles et témoignages qui m'avaient considérablement affectée (je ne sais même pas si les hauts faits des hommes me révoltent encore, tant ils sont universaux, récurrents, sortes de potlachs qu'ils s'offrent à eux-mêmes avec les vies et la dignité d'autrui dans la liesse de leurs fêtes exterminatrices, comme s'ils étaient au maximum de leur être dans le sang, la violence ou le sacrifice : non, je ne suis plus qu'atterrée.)

A tel point que je me demande parfois si l'injonction de se tenir informé(e) comme relevant d'une obligation citoyenne et morale est bonne pour la santé et ne contribue pas essentiellement à accentuer la mainmise des médias sur nos vies, nos humeurs, nos comportements, à nous rendre tous sensibles aux mêmes choses au même moment, créant une uniformité morose et triste.

Car tous nous subissons ce flot continuel d'images mortifères de l'agonie de notre prochain, et nous indignons en permanence, mais peu d'entre nous, et c'est bien compréhensible, avons la trempe, comme mère Teresa ou soeur Emmanuelle, de tout laisser là et de courir au secours de nos frères. Nous en sommes donc réduits à remâcher notre impuissance dans un conformisme délétère. Nous courons le risque de peu à peu nous endurcir. Le malheur des autres devient notre pain quotidien, nous vivons avec lui dans une grisaille permanente mais jusqu'ici préservés du pire.

Non que je prône l'ignorance comme souverain bien et cataplasme pour nos nuits tranquilles. Ce serait absurde et tout aussi consternant.

La solution ne consisterait-elle pas en une information moins intrusive, non continue, permettant une implication plus active de chacun ?

Mais je reviens à "Girl".

Je n'avais pas l'envie de lire sous une forme romancée cette affreuse épopée, de me soumettre à l'obligation d'approbation systématique de l'opus dénonçant l'abomination sous sa forme la plus bestiale : car comment avoir le front de ne pas aimer les oeuvres qui ont choisi le camp du Bien ou de les critiquer ?

Je suis comme la mule qui refuse d'avancer ; le chameau qui blatère et conteste (est-ce qu'un chameau conteste ?)



Pourtant j'ai quelques arguments :

Je pense (ou plutôt ressens) par une sorte de respect devant l'horreur vécue, que cette barbarie, cette atteinte à l'humanité, ne se prêtent pas au roman, ou pas encore. Oui, c'est trop tôt pour qu'on s'en empare comme d'un vulgaire fait divers, qu'on l'utilise comme le sujet d'un livre. D'autant qu'il s'agit là d'une récidive et que l'auteur a déjà traité le sujet des crimes contre l'humanité à travers son livre "Les petites chaises rouges" ( Crimes de Sarajevo et Srebenica).

Je pense (ou plutôt ressens) que le malheur avec un M aussi majuscule que possible, est un sujet trop commode : les manifestation de l'horreur ne manquent pas dans l'actualité et il suffit de se baisser pour se servir. Et l'on est presque assuré(e) du consensus autour de l'oeuvre : qui aura le front de critiquer celui, celle qui s'est placé(e) d'office du côté du bien ?

J'attends pour l'évocation des crimes contre l'humanité des témoignages comparables à ceux de Primo Levi ou de Charlotte Delbo qui seuls, en tant que victimes, possèdent la légitimité de narrer l'inénarrable des camps avec les moyens qu'ils ont choisis : sobriété, réserve pudique pour Primo Levi ; sidérant chant poétique célébrant subtilement la vie au milieu de la machine de mort broyeuse d'êtres, pour Charlotte Delbo.

Ce droit à l'expression romancée, Scholastique Mukasonga entre autres, bien que résidant en France au moment du massacre perpétré au Rwanda, le possède aussi, elle dont 37 membres de sa famille furent assassinés en 1994 durant le génocide des Tutsis.

J'attends que des écrivaines, des poétesses nigérianes surgissent, qui expriment ce qu'elles ont vécu avec leurs mots, la fibre unique de leur être : quelques jeunes filles ont déjà témoigné. J'espère que d'autres suivront.

Ce livre ne m'a apporté aucun élément factuel que je ne connaissais déjà. Maryam, l'héroïne fictive imaginée par Edna O'Brien pour représenter toutes les captives de cette secte sanguinaire, est une "femme puissante" selon l'acception de Marie NDiaye , une femme au destin hors du commun et qui résiste, et qui survit. Mais son récit, matériellement irréprochable puisque élaboré par une auteure qui a longuement investigué, et donc véridique , est justement trop accaparé par la description de l'enchaînement inéluctable et prévisible des évènements ; il ne contient pas, précisément parce que Maryam est une héroïne-type, la voix singulière de chacune de ces femmes. L'angle de la narration ne retrace que l'épopée collective. S'il s'agit bien là d'un génocide, chacune eut son propre vécu de la nuit noire en plein jour : il mérite d' être restitué par leur chant personnel, dans toute l'horreur de la solitude intérieure. Le reste appartient à l'histoire.

La folie des hommes, leur barbarie, on en a eu tant de compte-rendus que l'imagination supplée sans peine aux intervalles restés disponibles, et l'imagination ne se trompe guère.

Je dis là ce que je ressens, que nul ne s'en offusque. Ce roman ne m'a pas plu, il était comme une relecture d'une barbarie sans cesse recommencée et déjà connue.

Est-il possible qu'un jour une nigériane nous offre un chant de douleur atroce et de beauté rédemptrice ? Je le souhaite de tout coeur.
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Girl

Dans un cri halluciné, une jeune nigériane raconte son calvaire et celui de ses camarades enlevées dans leur classe par le groupe armé djihâdiste réputé être le plus féroce du monde. Des jeunes filles qui pour les quelques survivantes qui échappent à leurs bourreaux sont confrontées à leur retour au village à l'opprobre des leurs.



À presque quatre-vingt-dix ans, parce qu'elle est allée enquêter sur place, au Nigéria, Edna O'Brien réussit à traduire la souffrance assourdissante de très jeunes femmes, victimes d'un combat qui bien sûr les dépasse, mais aussi de traditions qui veulent qu'une fille violée est une fille souillée indigne d'une quelconque considération.

Même s'il se termine sur une note lumineuse, le roman d'un supplice qu'on pense ne plus jamais pouvoir l'oublier.
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Girl

Maryam fait partie des lycéennes nigérianes enlevées par Boko Haram en 2014. Emmenée dans un camp loin de son village, elle devient esclave sexuelle avant d'être mariée à un combattant de l'organisation et de tomber enceinte. Lorsqu'elle parvient enfin à s'enfuir, son retour, après un périple dont elle réchappe par miracle, ne se passe pas du tout comme elle s'y attendait : son village a été détruit, nombre de ses proches ont été tués, les survivants la suspectent elle-même de radicalisation, craignent des représailles liées à son évasion, et traitent en paria cette fille désormais objet de honte.





Si Maryam est un personnage fictif, tout est véridique dans ce roman construit sur une longue et sérieuse documentation, à partir de multiples rencontres et témoignages. Le récit, éprouvant, n'épargne rien du calvaire de ces filles. L'indicible est dans chaque page et c'est les dents serrées et le coeur bien accroché qu'il faut traverser l'enfer à leurs côtés.





Aucune n'a pu jusqu'ici s'exprimer. Ce livre leur donne la parole, exposant au grand jour la barbarie terrifiante dont elles sont les victimes, mais aussi, les difficultés de leur reconstruction dans une société où elles n'ont plus leur place : un livre courageux, porté par la belle écriture d'Edna O'Brien, dont l'oeuvre a prouvé son engagement pour la cause des femmes en général. Coup de coeur.


Lien : https://leslecturesdecanneti..
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Les petites chaises rouges

Dans un petit village perdu d'Irlande, au début des années 2000, arrive au pub un individu étrange, imposant, à la crinière blanche.

Il vient du Montenegro, s'appelle Vladimir Dragan.

Il cherche un endroit pour s'installer et exercer son art de guérisseur;

Ce sera chose faite. La consultation de soeur Bonaventure constitue ma scène préférée ainsi que celle où il est inquiété par un agent dans les bois.

Fidelma, une jeune femme en mal d'enfant va se laisser manipuler et envoûter par cet homme qui ne restera pas longtemps inconnu malgré son habileté à tromper son monde.

Il sera arrêté et démasqué en tant que le fameux boucher des Balkans, Radovan Karadzic, responsable du siège inhumain de Sarajevo, du massacre de Srebrenica....

Le travail d'Edna O'Brian est remarquable car elle nous livre un roman avec un personnage étrange et d'autres qui gravitent autour.

Elle nous montre bien les deux faces du personnages : le bourreau et le poète. J'ai envie d'ajouter une troisième, le manipulateur.

Elle ne nous livre pas les éléments en bloc, elle alterne les évènements qui se passent en Irlande imaginés par l'auteure et le passé de l'homme faisant malheureusement partie de l'Histoire bien réelle celle-là.

J'ai beaucoup apprécié le roman mais ai été parfois un peu déroutée par l'étrangeté, l'ambiance de certains chapitres en Irlande.

Le titre choisi rappelle la commémoration du siège de Sarajevo où 11541 chaises rouges ont été alignées dans la grand-rue pour rendre hommage aux victimes. Parmi elles 643 petites chaises rouges représentaient les enfants abattus.

Dans notre région, fin des années 1990, nous avons accueilli quelques Kosovars dans nos villages et nos écoles. La petite fille qui était dans ma classe dessinait des scènes atroces et plongeait sous les bancs dès qu'elle entendait un avion. Il a fallu quelques mois pour qu'elle s'apaise.



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Fille de la campagne

Dans ses mémoires, Edna O'Brien rapporte une vie consacrée largement à l'écriture, le parcours d'une Fille de la campagne qui est aussi celui d'une femme libre et indépendante qui n'a pas cédé à la pression d'une société conservatrice, prenant le risque d'être ostracisée.



Le désir de devenir écrivain d'Edna O'Brien nait alors qu'elle très jeune et vit dans un village irlandais qui compte de nombreux débits de boisson et pas une seule bibliothèque. Un endroit où si les hommes ne sont pas particulièrement pieux, les femmes prient avec ferveur ; elle parle de la bigoterie, de l'ignorance et de la pauvreté du pays. Après des études de pharmacie à Dublin, Edna, qui espère encore être « admise dans le monde des lettres », devient chroniqueuse pour un journal féminin. C'est à cette époque qu'elle rencontre son futur mari (ils vont avoir deux fils et se disputer leur garde lors de leur divorce quelques années plus tard) et écrit un premier roman, Les filles de la campagne. Ce livre fait scandale et rend son mari jaloux mais marque le début de sa réussite littéraire et de son ouverture au monde.



Une ouverture concrétisée par la rencontre de beaucoup d'hommes célèbres, intellectuels, comédiens ou politiciens. « Des amants ou des frères », selon son expression, dont Edna décrit longuement (un peu trop) les faits et gestes dans ces mémoires non dénués de lyrisme, d'humour et de sensibilité, témoignage éclairant de la vie intellectuelle irlandaise (et anglaise) des cinq dernières décennies. Edna en observatrice privilégiée de la vie sociale et politique de son pays y évoque, entre autre, l'IRA et la guerre avec les Anglais qu'elle qualifie d'« entre carnage et contre-carnage » et une Irlande sous la domination d'une Eglise catholique ubiquitaire (et entachée : le rapport Ryan et Murphy dénoncera, bien plus tard, les actes dont se sont rendus coupables certains religieux envers des enfants). Une vision sans concession de son pays dont Edna O'Bien rappelle qu'il a aussi engendré d'immenses auteurs, comme James Joyce, Samuel-Beckett ou Oscar Wilde, pour ne citer qu'eux.



Challenge MULTI-DÉFIS 2021
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Les petites chaises rouges

Quand le doc arrive à Cloonoila, un petit village irlandais, personne ne sait qui il est, mais il fascine immédiatement tous ceux qu'il croise. Ainsi, l'homme qui dit s'appeler Vladimir Dragan et avoir été médecin au Monténégro est bien accueilli par les villageois. Certains l'aident à trouver un logement et un endroit pour exercer ses talents de guérisseur. Cette médecine alternative qu'il pratique avec succès lui fait croiser des femmes. Beaucoup sont attirées par lui, surtout Fidelma, qui est mariée et qui tombe de haut quand la véritable identité de Vlad est révélée à tous. Un calvaire qui n'est qu'à son début.



Edna O'Brien a choisi de délocaliser en Irlande la fugue du criminel de guerre serbe, Radovan Karadzic. Coupable de nombreux crimes - dont le siège de Sarajevo pendant trois longues années : 11541 morts dont 600 enfants symbolisés par des petites chaises rouges, et de la purification ethnique de Srebrenica : huit mille Bosniaques exécutés pendant quatre jours et quatre nuits - Karadzic est un médecin ordinaire et plutôt placide, poète à ses heures (étonnante d'ailleurs cette attirance pour la poésie d'hommes capables du pire, Staline était aussi un poète reconnu), qui est devenu à 45 ans un être sanguinaire, comme si les guerres des Balkans avaient libéré chez lui et chez d'autres des siècles de haine.



Mêlant réalité et fiction, Les petites chaises rouges est aussi l'histoire d'une femme, une innocente qui a croisé le mal absolu, qui, malgré la culpabilité et la honte d'avoir aimé un monstre, a la volonté de se retrouver, tout en sachant que ses questions resteront sans réponses - l'abomination ne peut avoir d'explication, ni de justification. Un magnifique roman, dur, touchant et inoubliable.

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Les petites chaises rouges

Un mystérieux étranger suscite fascination--voire admiration --- lorsqu'il pénétre dans le pub de ce petit village perdu d'Irlande ..

Il en impose avec sa silhouette à la Raspoutine..

Il se dit "guérisseur ", venu du Monténégro , "réussit "à calmer les hésitants et les méfiants en soignant Soeur Bonaventure , l'une des quatre nonnes du couvent très proche.





Quant à la belle Fidelma, on peut parler de coup de foudre.



Mariée à un homme plus âgé qu'elle , elle tombe sous le charme, aveuglée par le plaisir et de mirifiques et aléatoires promesses!

Las! Peu de temps après , l'idylle s'interrompt brusquement .

Victime de sa naïveté ,dupée par son désir pour un effroyable menteur : "La Bête de Bosnie", inculpé de divers crimes, génocide, nettoyage ethnique, massacres, tortures, détention de gens dans des camps et déplacement de centaines de milliers d'habitants .......choc, répugnance, incrédulité .......la belle Fidelma n'a d'autre choix que la fuite à Londres :" Dans tous mes rêves, il y a du sang".......

D'entretien en entretien , devenue une moins que rien, elle finit par travailler la nuit pour un salaire de misére , hantée par son passé , entourée de réfugiés, qui, comme elle, subissent un quotidien dévasté par la barbarie sociale .

Beaucoup avaient fui l'horreur du pays où elles ne pourraient jamais revenir.

Toutes charriaient des souvenirs et l'essence de leur premier pays, connu d'elles seules .

"La peur qui comprimait toute leur vie se trouvait maintenant comprimée dans cette urgence d'attraper un bus ou un train pour permettre à un mari, une mère ou un cousin d'aller travailler ".



Elles étaient les gens de la nuit , à un pas des fantômes et étrangères les unes aux autres.

Elles couraient comme si elles fuyaient des catastrophes ......

Un ouvrage puissant, à l'écriture parfaitement maîtrisée , éblouissante , travaillée , qui nous offre une histoire de honte, d'effroi le plus profond, passant de l'horreur à la romance, du réalisme le plus cru à la naïveté et à l'audace , une compassion précieuse et infinie, à la rédemption et l'expiation ...... En multipliant les points de vue tout en préservant une écriture admirable, soignée, au lyrisme flamboyant dont on aimerait citer nombre de phrases tellement elles sont belles !

C'est un livre bouleversant traversé par la souffrance d'un peuple dans un pays contraint par la religion où les femmes comptaient moins que les bêtes !

Entre force du Mal et sa Dualité , le portrait déchirant d'une femme rongée par la culpabilité , une femme qui se bat seule jusqu'au bout .



Pour moi, un chef d'oeuvre et un véritable coup de coeur, j'aime les romans Irlandais et remercie les amies de Babelio qui m'ont incitée à le lire !

Mais ce n'est que mon avis, bien sûr !



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Girl

Il faut une empathie extraordinaire pour se glisser dans la peau de ces filles incarcérées par Boko Haram. Edna O’Brien est loin de son Irlande natale et rien, si ce n’est sa curiosité, sa sensibilité et son humanité de grande écrivaine, ne la prédispose à raconter cette histoire de survie. Son récit est glaçant. Dans les camps des djihadistes, le sourire est une invitation au viol et le mariage, même au plus infâme des tortionnaires, peut se révéler salvateur. On suit ses mésaventures avec angoisse et l’impression d’assister à un interminable chute de Charybde en Scylla. Puis viendra le salut, des nomades, des autorités puis des religieuses, qui lui apportent la seule chose dont elle et son bébé ont vitalement besoin : la sécurité. On ressent la pudeur de l’auteure, son humilité devant les vies déviées de ces filles que rien ne préparait à l’horreur. Plus que le martyre des camps, c’est l’épreuve du retour qui est la plus cruelle. Le risque, pour O’brien, eut été de juger les faits abominables avec son regard d’européenne. Un écueil qu’elle évite grâce à ses trois ans d’investigation et sa soif de comprendre (si tous les écrivains pouvaient se donner ce mal…). Les référents culturels changent, et nos regards s’en trouvent bouleversés. Quoi, la jeune fille abusée est considérée par sa famille comme souillée ? On la rejette, on la répudie, on songe à tuer son enfant illégitime ? C’est l’intolérable vérité décrite par l’écrivaine. Les exactions des djihadistes surviennent comme une loterie perverse ; bienheureuse celle qui s’en sortira indemne. Si le livre d’O’Brien sonne parfois comme une leçon bien apprise, et qu’il pâtit un peu de son académisme, il n’en reste pas moins un témoignage juste et poignant sur cet épisode sombre de l’histoire du Nigéria.
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Les petites chaises rouges

Fidelma, "la femme du marchand de nouveautés", cède au charme de l'inconnu lorsqu'elle rencontre un homme dont elle ne sait rien et qui vient d'arriver dans son petit village de Cloonoila. Hélas pour elle, il s'agit de l'un des responsables des crimes commis pendant la guerre de Bosnie (1992-1995) alors réfugié en Irlande pour échapper à la justice. Cet homme que l'auteure surnomme la "Bête de Bosnie" n'est autre qu'une incarnation de Radovan Karadžić, le "Boucher des Balkans".



Ce portrait de femme aurait pu être mémorable, une femme amoureuse d'un monstre dont elle ignore tout, jugée, rejetée et isolée, en voilà une bonne histoire. Le problème c'est que je n'ai pas du tout adhéré à l'écriture d'Edna O'Brien. Je l'ai trouvé décousue, désuète et la surabondance de détails m'a beaucoup gênée, je me suis perdue dans une interminable galerie de personnages. Que cela soit dans le village de Cloonoila en Irlande ou à Londres, l'auteure nous égare dans les histoires parallèles de toutes les personnes que Fidelma est amenée à croiser. Pratiquement chacune de ces trajectoires pourrait faire l'objet d'un roman ; en revanche faire un roman avec un patchwork de personnalités bancales ou déracinées avec comme seul fil conducteur le destin d'une femme traumatisée cela m'a paru trop brouillon. Le personnage de Fidelma aurait mérité d'être analysé plus en profondeur, on ne sait pas vraiment ce qu'elle ressent, culpabilité, amour, haine, dégoût, tout est ébauché, abordé en surface seulement. Hélas donc, je suis restée sur ma faim.
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Girl

Cela faisait très longtemps que j'avais envie de découvrir la plume d'Edna O'Brien.

Je pense que je n'ai pas forcément commencé par son roman le plus facile, car dès la première phrase « Girl » vous prend à la gorge :

« J'étais une fille autrefois, c'est fini. Je pue. Couverte de croutes de sang, mon pagne est en lambeaux. Mes entrailles un bourbier »

Dès le début du livre, le ton est donc donné, car il s'agit clairement d'un roman sans concession, avec un style âpre, dur, qui ne vous laisse pas indemne à l'issue de sa lecture.

Même s'il s'agit d'un roman, Edna O'Brien s'est inspirée de faits réels qui se sont déroulés au Nigeria. En 2014, une centaine de djihadistes de Boko Haram (nom qui signifie « l'éducation occidentale est un péché ») avaient enlevé 276 jeunes filles.

Edna O'Brien va donner la parole à Maryam, qui va être la porte-parole de ces jeunes filles qui ont vécu l'enfer.

J'ai été très touchée par son histoire, et il est impossible d'être indifférente quand on mesure son calvaire qui ne va hélas pas se terminer lorsqu'elle va retrouver sa famille.

Bouleversant.



Challenge Multi-Défis 2022

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Les petites chaises rouges

J'ai ouvert ce livre, l'inconnu m'a été présenté, planté là au bord de l'eau, "visiblement fasciné, barbu, avec un long manteau noir et des gants blancs". Le décor est planté. Une écriture qui coule comme "le courant de l'eau qui rugit", une écriture racée, précise, argumentée et soutenue par un vocabulaire choisi. Je n'ai pas lâché ce livre. J'ai vécu tour à tour le mystère entourant cet étranger, puis le charme et le pouvoir qu'il a dispensé, l'amour, la vérité, la haine, l'effroi, l'oppression, la culpabilité, le combat, la vie tant bien que mal. Un livre fort ou la puissance des mots traduit et décrit une fresque ou le roman s'agrippe à l'histoire sans en changer le sens, ou l'histoire s'impose au roman pour en construire la trame. Inoubliables ces petites chaises rouges.
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Les petites chaises rouges

Un style différent des autres de ses livres, mais on y retrouve son Irlande dans sa réalité et son humanité. Le sujet est grave, il est traité de façon originale avec le succession de rencontres. L'héroïne subit le pire et se reconstruit lentement, elle change de vie, c'est une véritable mutation dans la douleur. Des phrases télégraphiques, beaucoup de gens différents où la souffrance est la base. Un bon roman, qui "décape" et change .

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Tu ne tueras point

Quelle critique acerbe de la société irlandaise des années 80-90!

Edna O'Brien, écrivain irlandaise notamment connue et critiquée dans son pays pour ses convictions féministes, dépeint dans ce roman de 1997 le désarroi d'une jeune fille de 14 ans, originaire de l'Irlande rurale, qui se retrouve enceinte, dans ce pays où l'avortement est illégal (la loi a maintenant été "assouplie").

Mary, un jour, est violée par son père; à cet instant-même, elle sait qu'elle a toujours su que ça arriverait, peut-être même est-ce arrivé avant.

Ces viols se font répétitifs, et Mary décide d'aller au couvent, prétexte pour échapper à ses parents. Sa mère meurt peu après, et contre son gré, elle accepte de retourner auprès de son père, jusqu'à ce qu'elle tombe enceinte.

Mary est ainsi: une jeune fille calme, affectueuse, mais dotée d'une forte volonté. Elle refuse ce bébé, s'enfuit, parvient à aller à Londres pour se faire avorter, mais... je ne dévoilerai pas la suite.

Edna O'Brien y dépeint l'emprise des hommes - hommes de loi, chefs de famille -, mais aussi de la société sur la vie personnelle et sexuelle des femmes. En 1990, Mary, mineure, n'est pas libre de son corps, et se retrouve entre les mains de ces adultes, hommes et femmes, qui sous prétexte de vouloir son bien ou sous couvert de religion, décident de son sort.

Bien sûr, des voix s'élèvent contre la condamnation dont elle est menacée, suite à sa tentative d'avortement, mais se heurtent à ceux, majoritaires, qui ne veulent pas briser l'harmonie de leur village, ni tacher leur pays.

Le roman se découpe en chapitres dont les personnages sont ceux gravitant autour de Mary de près ou de loin. Par ce procédé, la jeune fille semble ne pas être maître de ses choix et de son destin. Certains personnages sont détestables, comme Roisin, impitoyable opposante à l'avortement et chef de troupe; le père quant à lui peut s'avérer autant cruel et grossier que désespéré et même doux, envers ses juments; enfin, Luke, le jeune musicien que Mary rencontre à Galway, est comme elle pur, innocent et victime de cette société bien-pensante que l'auteur critique froidement.

Ce roman est inspiré d'un fait divers datant de 1992; malheureusement, ces dernières années, des scandales ont à nouveau éclaté en Irlande à propos d'avortements refusés à des femmes victimes de viols ou dont la vie était menacée par une grossesse à risque.

Une lecture forte et bouleversante.
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Les petites chaises rouges

Imaginez-vous un instant dans cette petite ville d’Irlande ; vous êtes belle, mariée à un homme plus âgé que vous et vous n’arrivez pas à concevoir d’enfant, c’est l’histoire de Fidelma.



Un jour, arrive un étranger du Monténéro, homme élégant, grand, beau cheveux longs, barbe blanche qui ouvre un cabinet de sexothérapie ; Vladimir Dragan, homme séduisant qui va attirer bien des convoitises féminines et dont la jeune et jolie Fidelma va tomber amoureuse et devenir la maîtresse !



Mais un jour, Vladimir Dragan (dont ce n’est pas le vrai nom) recherché par toutes les polices est arrêté, il est emmené à La Haye où inculpé pour génocide, il devra répondre de ses crimes.



Fidelma, est enlevée ensuite par trois hommes étrangers ; dès lors, elle va fuir et se réfugier à Londres…



Ce livre qui s’inspire d’une histoire vraie (cf la quatrième de couverture) nous entraîne dans la désillusion de Fidelma. Elle a aimé un homme passionnément sans connaître son passé, mais elle est rongée par la honte, le remords et la terreur…



C’est un beau roman qui bien que soulignant l’atrocité des crimes de guerre et la cruauté d’un homme, nous parle aussi d’amour. Celui d’une femme qui par naïveté s’est retrouvée mêlée à un drame… Comment peut-on se pardonner d’avoir aimé un monstre.



Bref, un beau roman, dur et bouleversant…



À lire assis(e) sur une chaise rouge, en se régalant d’un fish and chips accompagné d’une pinte de bière…



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Girl

Difficile de présenter un livre qui l'a été déjà par de nombreux lecteurs, qui ont utilisé ( et ils ont eu raison ) les mêmes phrases chocs écrites par Edna O'Brien.

- Girl -, c'est, comme son titre ne manque pas de l'indiquer, un mot "emprunté" à la célèbre formule qui a fait le tour du monde et dont Michelle Obama a été l'un des étendards " BRING BACK OUR GIRLS ", en référence à ces plus de 200 malheureuses lycéennes enlevées par les djihadistes de Boko Haram en 2014 au Niger.

Cinq ans après, l'auteure donne la parole à l'une d'entre elles, mais ce une est le porte-voix de toutes les autres, de ces femmes qui, dans une société ultra patriarcale passent du rang "d'otages consenties" à celui " d'otages asservies, endoctrinées, avilies, violées, torturées, humiliées, mutilées, engrossées ou tuées."

Comme disait, je ne sais plus qui (qu'il ou elle m'excuse) " en dessous du lumpenprolétariat - prolétariat en haillons -, il y a les femmes."

Cette histoire nous le montre avec force réalisme, sans pathos, sans auto-apitoiement, d'où une résonance particulière dans le coeur du lecteur, que cette souffrance infligée à des "enfants".

De son enlèvement dans son internat, à son séjour dans le camp djihadiste, jusqu'à sa fuite et à son retour "triomphal" parmi les "siens" avec "Babby", l'enfant de la honte et du déshonneur - attention ! Les héros ne sont plus toujours ce qu'on voudrait qu'ils soient -, Edna O'Brien occulte volontairement toute date, tout repère temporel. Le lecteur est aussi désorienté dans le temps et l'espace que l'est la victime-narratrice, dont le récit découverte nous permet de voir à travers son regard... celui des autres. Celui des fous de Dieu, celui de ceux qui les fuient, qui en ont peur, celui de ceux qui trahissent, qui vendent leur âme au diable, celui de la famille, des proches, des amis, et celui d'une société, de ses institutions et de ses plus hautes autorités.

Et il n'y a pire regard pour une victime innocente qu'un regard qui change, qui vous juge et vous transforme en coupable.

Dans l'actualité, on sait, ou plutôt on ne sait pas ce qu'il est advenu de ces jeunes filles si ce n'est qu'elles n'ont pas été libérées à ce jour, et que des "communiqués" de Boko Haram voudraient laisser penser qu'elles se sont ralliées à l'islamisme radical.

En tous les cas, ce livre a le mérite de leur donner une voix, de les rappeler à notre souvenir, de nous interpeler - et Dieu sait si nous en avons besoin -. Il a le mérite surtout, de les garder en vie.
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Girl

Encore un roman inspiré de l’actualité, et basé sur des témoignages. L’héroïne est l’une des jeunes lycéennes enlevées par Boko Haram en 2014, emprisonnées dans un de leur camp où elles seront traitées comme de la marchandise, bêtes de somme, esclaves sexuelles, converties de force, et pour certaines d’entre elles, vendues à quelques riches émirs du Golfe.



Mais le roman esquisse avec beaucoup de pudeur et de délicatesse ces conditions de vie dans le camp des Islamistes et ne s’attarde pas longtemps sur cet épisode, et c’est tant mieux. La jeune fille se refuse à abandonner tout espoir, à s’avouer vaincue et réussit à s’enfuir. On la suit alors dans sa course à travers l’Afrique si inhospitalière, puis à la capitale où elle sera reçue par les huiles avec tous les honneurs, jusqu’à son retour au village où les ragots font office d’information et où la lâcheté des villageois, et des membres de la famille, les pousse à des actes ignobles.



C’est un roman initiatique où la jeune fille se révèlera une femme forte, prête à lutter pour sa liberté et pour son enfant. Un roman très lumineux.



J’ai beaucoup aimé le ton du récit, sans blablas, sans clichés, sans bling-bling ni misérabilisme ou sentimentalisme. J’y ai retrouvé l’Afrique telle que je l’ai connue, une Afrique à travers les yeux d’une Occidentale … Une Afrique avec ses travers, sa corruption mais une Afrique dynamique, jeune et optimiste. L’Afrique que j’aime et à laquelle je crois !

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Girl

Ce roman nous livre un précieux témoignage sur le calvaire qu’ont vécu les filles enlevées par Boko Haram. Bien que le personnage de Maryam soit inventé, les faits, quant à eux, sont malheureusement réels et véridiques…



Grâce à un solide travail de recherches et à des témoignages, l’auteur nous emmène dans un univers rempli de violence, terriblement noir. Il faut avoir le cœur bien accroché pour tourner les pages car on assiste à une véritable déshumanisation. C’est horrible, on accompagne ces filles dans leur descente aux enfers, dans leur quotidien sans espoir. Juste pour vous illustrer la violence de ce livre voici les première phrases de l’ouvrage :



«J’étais une fille autrefois, c’est fini. Je pue. Couverte de croûtes de sang, mon pagne en lambeaux. Mes entrailles, un bourbier. Emmenée en trombe à travers cette forêt que j’ai vue, cette première nuit d’effroi, quand mes amies et moi avons été arrachées à l’école…»



Ce livre ne relate pas uniquement les violences infligées par les djihadistes mais montre à l’aide du personnage de Maryam comment les survivant(e)s de Boko Haram sont vu(e)s comme des coupables et non des victimes. Car c’est une réalité, une fois la liberté retrouvée beaucoup sont rejetés voire soupçonnés d’être des infiltrés pour le compte de Boko Haram.



Il faut saluer le travail de l’auteure irlandaise qui, a quasiment quatre-vingt dix ans, donne la parole à ces mères, ces filles, ces femmes enlevées, violées, mutilées par la secte de Boko Haram. Pour moi, ce livre est un ouvrage qui doit être lu pour que nul n’ignore ce qui se déroule à quelques heures d’avion seulement de la France car nous ne sommes rien ni personne pour s’autoriser à prendre une vie.



Bref un livre que je vous conseille si vous avez les tripes bien accrochées…
Lien : https://ogrimoire.com/2019/1..
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James & Nora

[ Emprunté à la Bibliothèque Buffon – 21 septembre 2021]



En plus d’avoir depuis …une éternité dans ma liste de « classiques à lire », Le « Ulysse », je n’ai toujours pas lu la moindre ligne de James Joyce. J’espérais quelque peu que l’enthousiasme d’Edna O’Brien pour cet écrivain qu’elle découvre avec passion, dans les années 50, m’en donnerait l’envie !



Au final, ce ne fut pas concluant du tout, en dehors du texte de Pierre-Emmanuel Dauzat, in-fine, qui analyse en détails et décortique la complexité de l’œuvre de Joyce et surtout la quasi-impossibilité de sa traduction…commentaire introduit par une citation très significative de Marina Tsvetaieva :

« Je ne me laisserai pas séduire par ma langue

Maternelle, par son appel lacté.

Peu importe la langue dans laquelle

Je serai incomprise du passant »



Même si le texte d’Edna O’Brien a de l’intérêt et parfois de la drôlerie, il me laisse assez indifférente et ne m’incitera pas plus à aborder la « prose unique » de Joyce, dont la personnalité ne m’attire guère, en dehors de son obsession, et de ses recherches exigeantes pour l’Ecriture…



En dehors de cela, je reprends les propres mots de son admiratrice même : « … des tartines de refoulement sexuel et d’égocentrisme vertigineux » !!!...(p. 52)



Des parents peu accordés ; une préférence pour son père, en dépit de ses nombreux travers, ; un attachement contrarié à sa mère…et avec tout cela, des rapports des plus voraces et partagés avec les femmes : entre « muse », déesse ou catin… !!



Ici, il s’agit de son « amour » paroxystique, et continuellement ambivalent pour la femme de sa vie, Mona… Par ailleurs, ce qui habite essentiellement son existence, c’est L’ECRITURE…le travail sur la , les langues…



Texte sûrement éclairant, pour les lecteurs assidus de Joyce, ou curieux confirmés de son œuvre… Quant à moi, je regrette de rester « mitigée » et me sens toujours à grande distance des écrits de cet écrivain irlandais, oeuvrant sur une planète complètement étrangère à la mienne, ce qui me fait terminer par une phrase de Pierre-Emmanuel Dauzat, avec laquelle je suis en accord absolu!!



« Il faut imaginer le texte de Joyce en mobile de Calder ou de Niki de Saint-Phalle, où l'oeuvre n'a qu'un sens éphémère au gré de l'angle de vue (...) (p. 78)”



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Ils ont écrit sur des écrivains....

Ronsard a écrit trois volumes de vers pour trois femmes différentes. La première et la dernière, Cassandre et Hélène, ne l’approchèrent point ; l’une parce qu’elle était trop belle et l’autre parce qu’elle était hideuse. C’est du moins ce qu’en disent ceux qui les ont connues ; mais Ronsard, ne voulait rien d’elles que leurs noms à mettre en sonnets, fit Cassandre plus belle encore que Cassandre, et daigna donner à Hélène tout ce que Dieu lui avait refusé. Aussi nous les voyons toutes deux incomparables.

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