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3.39/5 (sur 33 notes)

Nationalité : Italie
Né(e) à : Rome , le 16/09/1947
Biographie :

Elisabetta Rasy est une écrivaine et journaliste italienne.

Elle se consacre à la littérature féminine et féministe, et a écrit plusieurs ouvrages de fiction, parfois avec des passages autobiographiques.Ses œuvres sont traduites en plusieurs langues. Elle est la mère du poète Carlo Carabba.

Elle a fondé avec Pier Vittorio Tondelli, Jay McInerney et Alain Elkann la revue Panta, et collaboré avec des journaux tels que La Stampa, Panorama, l'hebdomadaire Sette du Corriere della Sera.

Comme critique, elle a su appréhender et rendre hommage aux différents aspects des femmes qui écrivent, de vrais classiques du 20e siècle aux démarches moins évidentes. Elle s'est consacrée, par exemple, à faire des portraits littéraires de Carson McCullers, Flannery O'Connor, Anna Akhmatova, Marina Cvetaeva, Edith Wharton, Nina Berberova, Ágota Kristóf, Zhang Ailing, Jamaica Kincaid, parmi les italiennes, Elsa Morante, Anna Maria Ortese et Cristina Campo et pour les peintres Frida Kahlo et Emilia Zampetti Nava.
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Elisabetta Rasy - Un hiver à Rome .
Elisabetta Rasy vous présente son ouvrage "Un hiver à Rome" aux éditions Seuil. Traduit de l'italien par Nathalie Bauer. http://www.mollat.com/livres/rasy-elisabetta-hiver-rome-9782021084429.html Notes de Musique : ?The Flames of Rome? (by Kai Engel). Free Music Archives.

Citations et extraits (143) Voir plus Ajouter une citation
Je repensais à ma guerre, celle que j'avais menée pour surmonter mon dégoût face à la bouche qui vomit le cerveau, aux jambes et aux bras qui vous restent dans la main après les amputations, à l'horreur des plaies infectées et des os visibles sous les escarres, à la peau racornie par les brûlures, à l'odeur de cadavre se dégageant des corps en vie, à la puanteur d'égout imprégnant les draps, aux insupportables gargouillements dans la gorge des moribonds, aux gémissements sans fin.
Autrefois, j'aimais danser, je ne danserai plus, ai-je songé dans l'attente de tes nouvelles.
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Vincenzo et elle s'étaient aussitôt entendus sur ce point : il devait y avoir chez eux un endroit, un recoin éloigné de leur petit appartement, où conserver ce qu'on ne veut pas posséder mais qu'on ne veut pas non plus perdre. Un endroit heureux où le nec tecum sine te (ni avec toi ni sans toi) cessât de constituer une contradiction au moins dans le monde inanimé. Pas un lieu de vieux bibelots ou de cadeaux importuns ceux-ci étaient jetés avec une active régularité - , non, ce devait être la caverne des rencontres conclues ou manquées.
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Elle ne se rappelait ni la surprise, ni les sentiments de culpabilité, ni les bras musclés de Vincenzo, ni la souplesse imprévisible de ses grandes mains, ni sa langue péremptoire, ni l'autorité de son corps inlassable. Elle ne conservait que le souvenir d'une animation, d'une animation hors de l'ordinaire, comme si la vie avait soudain correspondu à l'idée de la vie, à ses attributs rhétoriques de vitalité, ardeur souffle constant et béatifiant.
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Dans cette maison, on ne parlait pas plus de la Rhodésie que de Naples. Fiammetta et moi étions encore trop jeunes pour les confidences familiales, le monde des adultes était pour nous imprononçable et surtout inexplicable. L'oubli forcé, les coupures et les silences remplaçaient, chez l'une comme chez l'autre, la mémoire quotidienne de la famille, la vie qui s'écoule sans interruption. C'était le silence, je le devinais déjà à cette époque, qui me liait à elle. Sa grand-mère n'était pas expansive, elle m'intimidait.
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Tu sais, elle était connue en France, c’était une
professionnelle admirée, et tout le monde la respectait
malgré son caractère un peu ombrageux. Mais personne ne
l’appelait Marie Rose, comme ses amies napolitaines. À Paris,
elle avait définitivement adopté son autre prénom, qu’elle
utilisait pour signer ses photos. Les Français, disait-elle,
croyaient qu’il s’agissait d’un prénom et d’un nom. Alba Rosa,
à jamais Alba Rosa. Tel était le legs d’Eugenia.
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Elle avait promis de m'écrire, mais elle n'en fit rien ; moi non plus, d'ailleurs, car j'ignorais son adresse d'été. Je demeurai en ville, avec pour toutes perspectives quelques promenades sur le plat littoral romain. De Naples, personne ne dit mot. Mon arrière-grand-mère était morte. Mon père s'était installé à Londres, d'où il m'envoyait cependant de longues, de merveilleuses lettres, qui ne mentionnaient ni le passé ni le futur, comme si ces deux termes ne nous concernaient pas. J'avais recommencé à jouer au ballon dans la rue avec les enfants du quartier. L'été, même dans notre terne banlieue, Rome était beaucoup plus belle que l'hiver, car terreuse, brûlée et privée de parfums ; et moi, j'étais de bonne humeur. Mais pas un jour ne s'écoula sans que mes pensées ne volent vers Fiammetta, dont j'attendais passionnément le retour. De la grâce perdue, il ne restait plus que le mystère de Fiammetta ; l'éloignement m'attacha plus étroitement à elle, comme à un éclat aveuglant dans la luminosité sans reflet de l'été romain.
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C’est alors que j’ai réclamé à Nicola son Kodak, je lui ai dit
que je voulais essayer, que je croyais avoir compris comment
on procédait : un œil regarde ce qu’il voit dehors, l’autre œil
ce qu’il voit dedans. Tu veux me tirer le portrait ? J’ai éclaté
de rire, et il m’a imitée. Dans ce cas, retournons auprès des
blessés, a-t-il proposé. Non, je ne veux pas photographier les
blessés. Les médecins ? Le capitaine sicilien qui est ton ami ?
Non, lui non plus. Je veux photographier une femme, une
femme en guerre. Comme il me dévisageait, incrédule, je lui
ai expliqué que j’entendais photographier ma camarade de
chambre, l’infirmière bénévole Eugenia Alferro. Il a dit :
Choisis qui tu veux, une fois rentré chez moi je développerai
la photo et je te l’enverrai. Puis il me tendit son Kodak.
Nous t’avons rejointe dans la cour, où tu faisais la lessive,
penchée sur un baquet. Tu ne voulais pas qu’on te prenne en
photo, tu as objecté que tu avais honte, que tu étais toute
débraillée... Mais ce n’était pas vrai, tu n’étais jamais
débraillée, pas même à ce moment-là, au-dessus du baquet
d’eau sale. Allons à l’ombre, as-tu dit. Non, il faut que tu sois
à la lumière, regarde vers la lumière, t’ai-je ordonné.
Tu l’as fait et tu as fermé les yeux.
Non, ne ferme pas les yeux.
Je ne peux pas faire face à la lumière, les yeux ouverts.
Pourquoi, tu es un hibou ?
Tu as éclaté de rire, puis tu as porté une main à ton front,
comme une visière.
Maintenant tu as l’air d’un soldat au garde-à-vous.
Tu as recommencé à protester, tu as prétendu que tu
n’étais pas assez belle pour une photo, qu’il y avait des
choses plus sérieuses à la guerre... Alors je t’ai fait taire,
Nicola m’a aidée à te convaincre, tu as ri une nouvelle fois
par timidité, tu as fléchi un peu le buste, comme si tu voulais
te retourner. Ne bouge pas, t’ai-je dit, et tu t’es immobilisée,
la bouche à moitié ouverte sur tes petites dents blanches,
pas vraiment en un sourire, plutôt en une question, mais, les
lèvres désunies, tu avais l’air de sourire. J’ai pris la photo et
j’ai eu l’impression de t’avoir capturée, à jamais avec moi.
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Pendant le trajet, j’avais vu les montagnes pour la
première fois. Je ne les imaginais pas comme ça. Il y a bien
un volcan à Naples, mais il évoque la demeure d’une vieille
divinité, non un lieu naturel. Et puis le Vésuve ne modifie pas
la couleur de la mer et du ciel ; mieux, la montagne et ce qui
l’entoure paraissent juste encadrer le golfe. Le bleu l’emporte
sur tout et, même lorsqu’il vire au violet et au gris, les jours
de tempête, on sait qu’il reviendra et on l’attend. Ce n’est
pas le cas des montagnes du Nord. La route que j’ai
empruntée avec le chauffeur de l’ambulance a grimpé dans
les bois, et une cime surgissait à chaque virage. C’était peut-
être toujours la même, mais je voyais chaque fois un sommet
différent. Le chauffeur riait de mon étonnement : étant du
coin, il s’en amusait. Je ne comprenais pas ce qu’il me disait,
car il parlait dans son dialecte. Je faisais semblant de saisir et
souriais, raison pour laquelle j’ignore à présent les noms de
ces montagnes. Elles étaient vertes, mais aussi rouges, roses,
brunes comme les pierres d’un collier, et, au lieu d’être
domptées par le bleu du ciel, elles ne cessaient d’en modifier
les nuances. Si le Vésuve est un triangle, celles-ci avaient
d’innombrables formes étranges, comme si le vent les
modelait chaque nuit. Les nuages les étêtaient ou les
couronnaient d’une manière toujours différente.
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Moi, en revanche, je savais un tas de choses sur la
Première Guerre, certainement beaucoup plus que sur la
Seconde. Ma grand-mère paternelle était une aristocrate
napolitaine très désargentée, mais l’autre était une paysanne
très dynamique de la basse plaine romagnole. Un peu
mythomane, elle ne pensait qu’à la politique et aux meetings,
et la Grande Guerre constituait sa légende principale. Elle
différait en tout de ma grand-mère napolitaine, y compris par
son physique : autant l’une était grande, et désormais
monumentale, autant l’autre était petite, recroquevillée par
la vieillesse – elle avait également la tête ronde et le visage
plat, comme certaines figures du peuple de Masaccio.

Je savais aussi qu’il y avait eu des infirmières bénévoles
au cours de ce conflit. Ma grand-mère romagnole avait été
l’une d’entre elles, ce qui, à cause des amours de guerre,
avait beaucoup compliqué son existence, celle de ma mère et
par conséquent la mienne. Les histoires de guerre n’ont pas
de fin.
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Mais dormir était impossible, les détonations se succédaient. Après une
explosion plus forte, elles se sont éloignées. Tout a plongé
dans le noir. Dans le noir, je t’ai entendue soupirer. Puis le
silence s’est fait. Tu as de nouveau soupiré. Je me suis glissée
dans ton lit.
Tu ne m’as pas renvoyée. Je suis restée à tes côtés sans
bouger, écoutant tes soupirs. Cependant tu as cessé de
soupirer. Ta respiration s’est calmée, et je me suis dit que tu
t’étais endormie. J’étais immobile près de toi, dans la chaleur
du lit, mais je ne parvenais pas à trouver le sommeil, et pour
une fois cela m’a réjouie. Tu as émis un faible gémissement,
comme si tu pénétrais dans un rêve compliqué. Alors je me
suis tournée vers toi et je t’ai étreinte. Tu ne m’as pas
repoussée. J’ai déposé un baiser léger sur tes yeux : tes
orbites étaient salées, à croire que tu avais pleuré, mais je ne
t’avais jamais vue pleurer. Peut-être avais-tu pleuré dans le
noir, à cause de ces détonations qui nous avaient réveillées
d’un coup. Je t’ai embrassée plus fort sur les yeux et les
joues, puis j’ai commencé à te caresser. Je voulais juste
adoucir ton sommeil par quelques caresses, mais j’ai
continué. De toute mon existence, je n’avais jamais rien senti
de plus lisse et de plus doux que ta peau. J’étais incapable de
m’arrêter : rien n’était plus soyeux que les parties profondes
de ton corps, celles que la nourrice qualifiait de honteuses.
Mes mains s’égaraient et s’impatientaient dans le choix des
caresses.
Tu avais beau être immobile, ton souffle n’était plus
régulier, et j’ai compris que tu faisais semblant de dormir. Tu
m’as caressé prudemment la tête, comme si tu craignais de
me heurter, ta paume allait et venait du front jusqu’à la
nuque. Je t’ai dit : Tu sais, je ne suis pas un de tes blessés. Tu
as eu un petit rire et tu t’es détendue. J’ai déposé un baiser
au coin de ton œil droit, puis sur la joue gauche, enfin sur la
bouche, toute la bouche.
Je n’avais jamais embrassé quelqu’un comme ça, mais ce
n’était pas difficile. Toi aussi tu m’as embrassée et t’es serrée
contre moi, comme jamais je n’aurais cru que deux corps
pouvaient se serrer. Dans l’étreinte, j’étais parcourue de
frissons qui m’ont étourdie. Tu étais également étourdie,
nous étions si étourdies que nous nous sommes endormies
alors que la première lueur du jour, une lueur faible et
grisâtre, pénétrait par la fenêtre. Elle était restée ouverte et
l’air était frais, mais nous étions en nage. Je me suis réveillée
dans la chambre inondée de lumière, et tu n’étais pas là. Tu
étais partie sans m’appeler.
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