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3.7/5 (sur 20 notes)

Nationalité : France
Biographie :

Éric L’Helgoualc’h est né en 1980. Il a longtemps travaillé dans le web et la communication avant de se consacrer à l’écriture. Son premier roman, La Déconnexion, est paru aux éditions du Faubourg en août 2020.



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Présentation du roman par l'éditeur : "- une une excellente maitrise langagière, - une intrigue "ultra" contemporaine, - une histoire à rebondissement.... "


Citations et extraits (9) Ajouter une citation
Les plus fanatisés voyaient en lui une sorte d'imam caché du nationalisme identitaire parti s'initier à la guérilla urbaine pour mieux préparer la résistance sur le sol français...

On entendait la petite musique de la conspiration. Une escouade d'enquêteurs s'était mise à décortiquer la vie du disparu pour y découvrir les preuves d'une machination. Les participation de son fond d'investissement dans des start-up israéliennes..., sa présence épisodique au dîner du Siècle suffit à faire monter l'âcre fumet du complot.

Fasciné par les trésors de dialectique jetés dans cet abîme de bêtises, je passais des heures à tout lire et regarder, les vidéos, les tweets, jusqu'aux commentaires d'un long billet de blog écrit par un géopolitologue amateur "non soumis à la doxa mondialiste" qui présentait l'affaire comme une sombre histoire d'oléoducs impliquant des barouzes turcs, des indépendantiste kurdes, les services français et un businessman aux tendances islamophobe instrumentalisé par le Mossad. Je pensais avoir touché le fond lorsque j'ai appris que le hashtag #MadElias était installé en tête des tendance Twitter... Hitler comme personne à la tête de toute une division nazie... atteignit en quelques heures les trois millions de vues sur Youtube. Mon ancien ami était devenu un mème. Lui-même qui avait bâti sa fortune sur l'essor des réseaux sociaux, théorisé ce mouvement, fourni les moyens de son prodigieux déploiement, voilà qu'il se retrouvait à son tour au cœur du vortex.
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Cherche du côté de la mère: je n'avais pas oublié les conseils de ma chère commanditaire. De ce point de vue-là, le résultat de mon entrevue avec Georges Lahoud dépassait ses espérances. Cette tension latente entre Elias et Leïla, ces frottements entre deux êtres au tempérament abrasif, il suffisait d’en récupérer la limaille et de la plonger dans l’élixir de la psychanalyse pour en obtenir de l'or. Le gamin épris de science quand sa mère ne jure que par la littérature. L’étudiant surdoué à qui elle interdit de faire Polytechnique pour ne pas le voir défiler en uniforme et qui finit en treillis, les armes à la main. L'enfant d'un couple de révolutionnaires arabes qui épouse une héritière de l'aristocratie française. Le fils d'une militante marxiste devenu multimillionnaire à vingt-cinq ans, philanthrope conservateur à quarante. p. 188
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Ma déception fut encore plus vive quand il m'apprit qu'il avait décidé de renoncer à l'astrophysique pour se spécialiser en informatique. Aujourd'hui encore, ce mot fait surgir en moi la vision de moustachus en chemisette capable d'atteindre une forme de jouissance en disséquant des notices techniques de commutateurs et des plans de cartes mères. Des types étrangers et solitaires à jamais enfermés dans leur bulle régressive, chez lesquels chaque apparition de Dark Vador gainé de cuir noir provoque un émoi insidieusement homéorotique.
Comme si le grand ordonnateur de l'univers avait oublié, en les programmant, d'installer le logiciel des rapports humains...

Comment aurais-je pu imaginer qu'il faisait partie d'une avant garde ? Ils étaient quelques-uns comme lui a préparér l'avènement de monde nouveau. Bientôt la terre entière se mettrait à genoux devant ces tycoons en baskets, qui finiraient par transmuer la norme succession des 0 et des 1 en promesse de vie éternelle.
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Pourquoi se jeter dans un tel bourbier quand on se fait une si belle place dans le monde ?..., il fallait être pauvre pour commettre un geste désintéressé.
Qu'un homme s'en aille combattre le terrorisme islamiste en Syrie, ça ne leur semblait ni plus ni moins insensé que toutes les calamités qui s'étaient abattues sur le pays depuis trois ans...
Tout le monde gardait en mémoire les massacres qui avaient ensanglanté Paris deux ans plus tôt, mais c'est l'assassinat d'un prêtre dans une petite ville normande qui continuait de marquer les esprits, avec ce côté "c'est arrivé près de chez vous" qui rend l'horreur plus palpable...
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INCIPIT
Quand on perdit la trace d’Elias Naccache dans le chaos du conflit syrien, quelque part dans les ruines de Raqqa, sa disparition eut suffisamment d’écho pour qu’un magazine versé dans le glamour et les destins brisés me confie le soin d’écrire son portrait. Le public voulait comprendre comment un homme tel que lui, devenu millionnaire après la vente de sa première start-up, avait pu disparaître dans des circonstances aussi extravagantes. On s’était aperçu dans les rédactions qu’il existait peu d’informations fiables à son sujet. On disait qu’il s’était fait évincer de la direction de son fonds d’investissement par ses propres associés. Qu’il vivait reclus dans un monastère transformé en bunker sophistiqué. Qu’il avait développé une passion pour les armes à feu. Qu’il se préparait en secret à la guerre civile attisée par ses amis d’extrême droite. Jamais il n’avait pris la peine d’opposer le moindre démenti. Pour avoir œuvré à la plus formidable explosion d’ego de l’histoire, il avait compris que dans cette ère nouvelle, l’ultime luxe serait le silence.
Je me suis donc lancé dans l’exercice périlleux consistant à retracer sa vie sur la foi de quelques témoignages. J’avais pour m’aider le soutien ambigu du souvenir. Elias et moi avions noué à l’adolescence des liens d’amitié qui avaient survécu aux aléas de l’âge adulte. Comme tant d’autres avant nous, nous avions pris à vingt ans la route de Paris. Sa réussite avait été fulgurante. La mienne, toute relative, plus longue à se dessiner. Nous avions continué à nous voir par intermittence, jusqu’à ce que ses choix politiques nous éloignent pour de bon.
Je me suis mis au travail quelques semaines après sa disparition. Mon portrait est paru deux mois plus tard, en décembre 2017, huit pages sur papier glacé entrecoupées de publicités pour des montres de luxe. Je n’en avais pas terminé avec lui pour autant. Au début de l’année suivante, dans des circonstances évoquées plus loin, j’ai fini par accéder à un pan méconnu de cette histoire.
Ce livre est le fruit de cet éclairage nouveau. J’y décris le déroulement de mon enquête initiale, tout en explorant certains aspects de la vie d’Elias qui m’avaient largement échappé. Ce récit peut être vu comme la version optimisée d’un programme défaillant. Je m’y suis autorisé un ton plus personnel. Les détracteurs habituels de mes romans, ceux qui m’ont reproché mes excès dans la mise en scène de soi, ne manqueront pas d’y voir une nouvelle preuve de narcissisme. Après la parution d’un de mes livres, un commentaire m’a beaucoup amusé, d’autant qu’il visait juste : « Écrirait-il une biographie de Vercingétorix qu’il ne pourrait s’empêcher de se peindre en combattant d’Alésia, se demandant s’il tient correctement son épée pour la photo, si le grand moustachu hirsute qui agite sa hache à côté de lui a compris qu’il baisait sa femme ou s’il a bien fait de reprendre du sanglier. »
Bien vu, camarade critique ! Quel autre motif vous pousse à noircir des centaines de pages sur la vie d’un autre, sinon l’envie de vivre par procuration des choses qui vous seront à jamais interdites ? Dans chaque biographe, il y a un contemplatif saisi de vertige devant l’existence d’hommes et de femmes voués à la démesure. Plutarque devait s’ennuyer ferme dans son magistère de prêtre d’Apollon pour consacrer tant d’années à la vie des gloires de son temps, un ramassis de démagogues et de conquérants sanguinaires. Stefan Zweig était un Austro-Hongrois raffiné, baignant dans la poésie et l’opéra, attiré par des figures louches de prophètes, d’aventuriers et d’explorateurs. Je ne suis pas de la trempe d’un Zweig, et le personnage principal de cette histoire n’a sans doute rien d’un héros selon ses goûts, mais je n’ai pas peur, au moment d’entamer ce récit, d’assumer pleinement cette part de fascination.

Une flèche perforant la brume comme un rêve vaporeux. Le dialogue des cloches dans le lointain. Un vol d’étourneaux. L’automne qui glisse sur le bocage. Un concentré de campagne française. Cette France de publicité pour des produits gastronomiques où des gens continuent de vivre. Certains matins, on n’y voit rien à cinquante mètres, si ce n’est le clignotement d’une barre d’éoliennes alignées au bord du lac. Pour les paysans du coin, derniers témoins d’un merveilleux païen condamné à l’oubli, un monde de lunes rousses, de floraisons miraculeuses et de chats-huants traversant les nuits d’équinoxe, c’est la promesse d’un hiver glacial qui s’étalera jusqu’au premier redoux de mars.
Ainsi parlent les vieux du café d’en face, englués dans une éternelle partie de belote. Il arrive, c’est inévitable mais de plus en plus fréquent, qu’un d’entre eux en vienne à « casser sa pipe ». Depuis la fenêtre de mon bureau, je vois passer au ralenti le convoi funéraire, suivi d’une grappe de silhouettes voûtées qui luttent avec la dernière énergie contre le champ d’attraction du cimetière. Le soir, je les retrouve au Roncevaux, attablés devant un tas de cartes et une tournée de kirs, seigneurs imperturbables dans leurs costumes sombres. La mort d’un homme qu’ils ont dû croiser tous les jours pendant plus de soixante ans n’a pas l’air de les affecter plus que ça. J’entrevois des abîmes de haines recuites, querelles de murs mitoyens, passions dévorantes nées d’un bal de la Saint-Jean et tenues sous silence pendant un demi-siècle, paternités coupables enfouies dans la mémoire de vieilles nourrices. Les ferments habituels du drame paysan qui font le sel des sagas familiales tant prisées par ma mère. Si j’avais encore mes entrées à la Maison de la Radio, je rédigerais illico une chronique au vitriol pour écorner le mythe de la solidarité rurale, antidote supposé à l’anonymat des villes.
Vingt ans passés loin de ceux qui m’ont vu grandir et voilà que j’en parle comme Ovide en exil évoquant les mœurs des tribus locales du haut de sa supériorité romaine. Moi aussi, j’ai vécu comme une punition la série de catastrophes intimes qui m’a poussé à quitter Paris pour retourner vivre là où j’ai grandi, à Saugé-le-Château, petite ville au croisement de la Mayenne, du Maine-et-Loire et de l’Ille-et-Vilaine. De mon enfance à Saugé, j’ai gardé une certaine aversion pour la vie de province. Après m’être cru installé dans la capitale, copropriétaire d’un trois pièces et d’une carte de membre du Silencio, j’ai le sentiment d’avoir été rejeté sur les rives du bassin parisien. D’être aussi inutile qu’un gadget en plastique charrié par la marée comme il en flotte au large des côtes chiliennes, un amas de la superficie d’un pays, presque un continent – j’ai vu pendant ma cure un documentaire sur le dispositif de ramassage dérivant inventé par un jeune ingénieur pour sauver les milliers de goélands qui meurent chaque jour d’avoir avalé des capsules de bouteilles usagées.
Suis-je moi aussi devenu un déchet toxique ? Pour peu qu’on jouisse d’une mince parcelle d’exposition médiatique, on voit passer sur Twitter un tel flot d’insultes qu’on finit par penser qu’elles contiennent une part de vérité. Ma courte expérience de la célébrité a culminé au milieu des années 2010, quand j’animais une pastille radiophonique sur France Inter. Cinq minutes durant lesquelles j’épinglais les travers de mes contemporains à coups d’aphorismes roublards, en affectant l’air détaché du majordome stoïcien qui réajuste sa cravate en plein naufrage du Titanic. Un producteur m’avait repéré au cours d’une émission où j’étais venu défendre mon dernier roman, tout juste auréolé du prix de Flore. J’avais, comme on dit, crevé l’écran, improvisant avec un artiste de stand-up ce qu’un site spécialisé dans l’actualité des médias devait décrire comme « un numéro de duettistes désopilant » au détriment d’un candidat à la présidentielle. À l’issue de cette prestation, un ponte de Radio France avait eu l’idée, pour pimenter la matinale en perte de vitesse, de me confier une chronique « poil à gratter ». Il avait fait le pari qu’un romancier à la cote frémissante, auquel on prêtait « un regard acerbe et décalé sur la société », secouerait un auditoire lassé des attaques à sens unique des humoristes en place.
Je me suis acquitté de ma tâche avec sérieux et abnégation, tapant fort et large, affichant une prédilection pour mes semblables, ces affreux bobos caricaturés en cœur de cible de la station, même si mon spectre était plus généreux, embrassant aussi bien les ayatollahs du marché libre que les adorateurs transis du peuple-roi. Bref, une chronique bien dans le ton d’une époque qui réserve un sort privilégié à ceux qui attisent les flammes, vestales modernes incarnant l’esprit de la cité, libre de sa parole et égalitaire dans ses détestations successives. J’avais ce talent, on m’a payé pour l’exercer, et plutôt bien d’ailleurs.
À présent, ce potentiel de toxicité, illimité à en croire l’intéressée, j’en use essentiellement aux dépens d’Adèle, mon ex-femme, celle que j’appelle désormais « la mère de mes enfants ». La jeune étudiante en lettres avec laquelle j’ai parcouru les cimetières en déclamant des poèmes devant les tombes de mes chers auteurs morts. Celle dont j’ai adoré chaque parcelle de peau dans la ferveur des premières nuits. Celle qui a guidé mes débuts d’écrivain en supportant d’une humeur égale mes bouffées d’enthousiasme et mes crises d’inspiration. Celle qui m’a laissé seul sur la piste lorsque j’entamai ma glissade sur les neiges artificielles d’une célébrité de saison, glissade pathétique d’où surnage le souvenir de coucheries fugitives et de matins honteux. Pas le premier ni le dernier des gentilshommes de province à Paris qui finisse essoré par la machine à la première occasion de briller.
C’est fou le nombre de sollicitations dont vous pouvez faire l’objet quand votre voix touche subitement plusieurs millions d’auditeurs. Après mes débuts à la radio, chaque fois que je me rendais à une soirée, les invités murmuraient sur mon passage. Les femmes riaient de ma conversation, ce qui était de plus en plus rar
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Au bout d'une semaine d'un tel traitement, je commençais à saturer. Et pourtant, j’avais pris l'habitude de vivre avec le personnage médiatique d’Elias Naccache. Vingt ans que ça durait. Vingt ans que ses tribulations venaient se rappeler au bon souvenir de mon moi adolescent pour lui demander: et toi, qu'as-tu fait de tes rêves? Vingt ans que j’étais «jaloux de lui», comme le prétendait Adèle. Jaloux de sa renommée et de ses millions, mais surtout de ses incarnations successives. Il y avait d'abord eu le petit prince de l’internet, puis le reclus aux tentations mystiques, avant le retour en grâce ou plutôt en disgrâce, vu les ennuis que lui avait valus son engagement comme pourvoyeur d'opinions radicales. J’avais beau trouver ces idées détestables, elles avaient beau être à l'origine de notre brouille, il y avait dans son combat un mépris pour l'adversité et un côté punk qui chatouillaient en moi une attirance ancienne pour les postures de maudit. p.30
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À la même époque, je lui ai demandé s’il n'avait jamais eu envie de monter une nouvelle start-up comme son copain Ambrosini. Il m'avoua qu'en tant qu'entrepreneur, il avait brûlé tout son kérosène. La majeure partie de son temps, il la consacrait désormais à défendre ses convictions. Il avait voulu retrouver l'impression de peser sur le cours du monde. Le sentiment d'être utile. À l'âge où le commun des mortels songe à épargner pour la retraite, il s'était demandé comment dépenser au mieux son argent. Alors il avait saisi cette occasion offerte aux millionnaires de sentir à nouveau leur cœur qui bat sous leur portefeuille: il était devenu philanthrope. p. 160
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Qu’est-ce qui vous pousse à noircir des centaines de pages sur la vie d’un autre, à part l’envie de vivre par procuration des choses qui vous seront à jamais interdites ?
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Quand on perdit la trace d’Elias Naccache dans le chaos du conflit syrien, quelque part dans les ruines de Raqqa, sa disparition eut suffisamment d’écho pour qu’un magazine versé dans le glamour et les destins brisés me confie le soin d’écrire son portrait. Le public voulait comprendre comment un homme tel que lui, devenu millionnaire après la vente de sa première start-up, avait pu disparaître dans des circonstances aussi extravagantes.
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