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Citations de Evguénia Guinzbourg (43)


Evguénia Guinzbourg
En définitive, la différence entre "les contre-révolutionnaires trotskistes" et nous tenait toute à l'époque de l'arrestation. Eux, avaient été arrêtés à un moment où les peines courantes ne dépassaient pas cinq ans; nous, avions été arrêtés pendant la période culminante de l'activité des hommes de Iéjov et Béria; on donnait alors déjà dix ans ; plus tard, on infligea même vingt et vingt-cinq ans. Le résultat n'était pas sans paradoxe. Les premiers condamnés avaient, d'une manière ou d'une autre, participé à l'opposition, et le fait est que, parmi les déportés pour "activités contre-révolutionnaires trotskistes", on rencontrait des militants qui avaient jadis mal voté ou s'étaient abstenus lors des votes. Nous, malgré les graves inculpations qui pesaient sur nous, et le régime sévère de détention auquel on nous avait soumis, nous étions des communistes orthodoxes, des fonctionnaires du parti, des intellectuels révolutionnaires; aucun de nous ne s'était rangé du côté de l'opposition. Mais qui se souciait encore de ces bizarreries ? (chapitre "le camp de transit", page 371)
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Avec un cynisme qui désarmait et n'étonnait plus personne, le médecin du camp faisait son "diagnostic" d'après la condamnation. Les travaux forcés les plus durs, qui exigeaient une santé de "première catégorie", étaient réservés aux "politiques". Aucune de nous n'y échappa. Même Tania Stankovskaia fut, quatre heure avant sa mort, jugés "en condition de santé de première catégorie". (Chapitre "le camp de transit", page 372)
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Pendant plusieurs années il n’eut plus à la place de l’ulcère béant qu’un petit bleu opiniâtre. Mais peu avant le début de 1960, à la suite du surmenage moral et du choc physique représenté par la réhabilitation et le retour sur le continent, cet ulcère trophique se rouvrit en vertu de mystérieuses lois naturelles et s’étala à nouveau, béant, sur sa jambe. Comme un sceau, le sceau avec lequel tant et tant de détenus étaient morts à la Kolyma. A la fin de 1959, deux jours avant sa mort, Anton, hospitalisé à l’Institut thérapeutique de Moscou, disait avec un sourire amer : « On reconnait les anciens d’Auschwitz, et de Dachau à leur numéro tatoué sur le bras. Les anciens de la Kolyma, on peut les reconnaître à cette marque tatouée par la faim ». (Extrait du Chapitre « L’ire et l’amour de nos seigneurs… »)
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Aux cabinets, nous avions l’occasion d’élargir un peu nos horizons en matière de nouvelles politiques. Le morceau de journal qu’on nous donnait comme papier hygiénique pouvait se révéler extrêmement intéressant. Le seul journal permis en prison était « L’ouvrier du Nord », le quotidien de Iaroslav. Aux cabinets, il n’était pas rare de tomber sur des morceaux de la « Pravda » ou des « Izvestia ». Nous lisions attentivement ces articles, en tirant toute une série de déductions de phrases les plus souvent incomplètes. (chapitre « Jour après jour, mois après mois », page 257 dans la collection Points).
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[...] ... Les maîtres de la morgue étaient des truands. Des apaches patentés. Ils trouvaient trop fatiguant de recoudre les corps après les autopsies et de creuser des tombes assez longues pour les contenir. Alors, ils vidaient les cadavres et les coupaient en morceaux pour les entasser ensuite dans un trou rond très peu profond situé derrière l'éminence où grimpaient les mélèzes.

Je rencontrai un matin ce cortège funéraire. C'était l'aube, et j'avais dû courir à la pharmacie plus tôt que de coutume. Trois truands tiraient de longs traîneaux iakoutes remplis de viande humaine dépecée. Des jambons gelés, bleuis, pointaient sans pudeur vers le ciel. Des bras coupés traînaient dans la neige. De temps en temps, des morceaux d'entrailles tombaient à terre. Les sacs prévus par le règlement pour l'ensevelissement des détenus étaient fort raisonnablement utilisés par les truands dépeceurs comme monnaie d'échange pour différentes opérations commerciales. J'avais donc devant les yeux dans toute sa nudité le rituel des enterrement à Belitchié.

Ce fut la première et unique fois de ma vie où j'eus quelque chose comme une crise d'hystérie. Je me rappelai l'expression HACHOIR A VIANDE souvent appliquée à nos camps de redressement par le travail. La vue des traîneaux iakoutes avec leur chargement substituait tout à coup au sens figuré une réalité matérielle à trois dimensions : les voici, les morceaux de viande humaine prêts à entrer dans le hachoir géant ! Avec horreur et stupéfaction, je m'entendis suffoquer de rire et sangloter tout haut. Puis je fus prise de vomissements incoercibles. Je ne sais plus comment je me traînai jusqu'à mon pavillon. ... [...]
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[...] ... je fréquentais avec assiduité les cours d'instruction politique d'Evdokia Ivanovna, m'y rendant même après une garde de nuit, et d'autant plus volontiers qu'elle donnait malgré tout quelques bribes d'information puisées dans les journaux récents, auxquels nous n'avions pas accès.

J'ai gardé un souvenir très net de l'un de ses cours, consacré à l'étude d'un rapport de Molotov (= membre du bureau politique du Parti et ami personnel de Staline ; il représentait celui-ci lors de la signature du fameux traité de non-agression réciproque entre l'Allemagne et l'URSS). Il y était question du rôle positif joué par le régime hitlérien dans le renforcement de l'économie allemande. Le chômage avait disparu, de nouvelles autoroutes avaient été construites. Huit ans de national-socialisme avaient transformé un pays ruiné, écrasé par le traité de Versailles, en l'un des Etats européens les plus avancés.

Là-dessus, Evdokia Ivanovna baissa un peu la voix et nous conseilla d'un ton confidentiel de ne plus employer, étant donné nos rapports actuels avec notre puissant voisin, le terme de "fascistes", et de le remplacer par l'expression "les nationaux-socialistes allemands." Tandis qu'un bon clin d'oeil rusé laissait entendre que cette petite politesse nous rapportait de gros avantages dont les hitlériens, dans leur naïveté, ne se doutaient sans doute même pas.

... Ainsi s'écoula cette année, la plus tranquille peut-être que j'ai passée au camp. Sous le harnais d'un travail usant mais malgré tout supportable. Dans la touffeur puante de notre merveilleuse baraque 7. Dans l'angoisse chaque nuit renouvelée d'un transfert possible. Sous l'égide de ces deux puissances cardinales : l'Ourtch et la Kavétché.

Cependant, le temps précipitait son cours. Le mois de juin 1941 approchait. ... [...]
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[...] ... Je n'aurais jamais cru que Iaroslavski, considéré comme la conscience du parti, pût construire d'aussi faux syllogismes. C'est de sa bouche même que j'entendis pour la première fois la théorie, qui eut une si large diffusion en 1937, selon laquelle "l'objectif et le subjectif sont, en substance, la même chose." Que vous ayez commis un délit ou bien que vous ayez, par négligence ou manque de vigilance, porté de l'eau au moulin de celui qui l'a commis, vous êtes également coupable : même si vous n'étiez absolument au courant de rien. Pour ce qui me concernait, voici la suite logique de ce qui en résulta : Elvov avait fait dans son étude des erreurs théoriques, qu'il l'eût fait à dessein ou non, cela n'avait pas d'importance ; je travaillais avec Elvov, je le savais auteur de cet article et je ne l'avais pas démasqué : c'était de la complicité avec l'ennemi.

Au manque de vigilance que m'avait attribué le consciencieux et humain Sidorov, succéda la nouvelle définition de mes crimes. Elle était pire que "l'attitude conciliatrice" de Beiline : Iaroslavski m'accusait de "complicité avec les ennemis du peuple." Ainsi, on mettait les petits points sur les i : la complicité avec l'ennemi était passible de poursuites pénales.

Je perdis le contrôle de mes nerfs. Je commençai à crier contre ce vieil homme respecté de tous, je tapai du pied ; j'aurais été capable de le frapper à coups de poing si son énorme bureau ne nous avait pas séparés. Oui, j'étais arrivée à un tel point de désespoir que je commençai à lui jeter au visage des questions trop simples, que dictait le bon sens. A cette époque, ces questions-là étaient plus que jamais considérées comme de mauvais goût : tous devaient montrer qu'ils tenaient les syllogismes les plus absurdes comme la synthèse de la pensée de tous. Dès que quelqu'un posait une question susceptible de dévoiler l'insanité de certaines idées, les autres s'indignaient et se moquaient de lui comme d'un idiot.

Mais j'étais dans un état de rage tel que je me permis de crier à Iaroslavski :

- "D'accord, je ne l'ai pas critiqué ! Et vous ? Non seulement vous ne l'avez pas critiqué, mais vous avez vous-même patronné la publication de son essai dans l'"Histoire du Parti." Pourquoi est-ce à vous de me juger, plutôt que le contraire ? J'ai trente ans, vous en avez soixante. Je suis membre du parti depuis peu, vous êtes la conscience du parti. Pourquoi est-ce moi que l'on doit tourmenter alors qu'on vous laisse derrière votre table ? Vous n'avez pas honte ?" ... [...]
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Quand on vit pendant des années dans un monde de tragédie, on finit par s'accomoder d'une souffrance si constante, et on apprend même à lui échapper de temps en temps. On se console en pensant que la souffrance met à nu l'essence des choses, qu'elle est le prix dont on achète une vision de l'existence plus profonde et plus proche de la vérité.
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[...] ... "Carcérales" ... Les affreuses bêtes qu'on appelle "carcérales" ... Nous traînerons avec nous cette définition, comme un poids écrasant, pendant près de dix ans. Nous sommes les plus méchantes des méchantes, les plus criminelles des criminelles, les plus malheureuses des malheureuses ; le comble du mal.

Nous ne nous rendîmes pas compte immédiatement de la gravité de notre situation. Ce n'est que plus tard que nous comprîmes que, si à Iaroslavl [en prison] nous étions toutes placées sur le même plan, ici, dans un nouveau cercle de notre descente, l'égalité n'existait pas : les déportés se trouvaient répartis en différentes catégories, suivant la fantaisie des bourreaux.

Pour la première fois, nous entendîmes parler des "artistes des moeurs." C'était l'aristocratie du camp : les détenus qui avaient commis des crimes dans leur service mais non des crimes politiques. Eux n'étaient pas des "ennemis du peuple", mais de simples dilapidateurs des deniers publics, concussionnaires et prévaricateurs. (Nous ne ferions connaissance des véritables détenus "de droit commun" que plus tard. Dans le camp de transit, il n'y en avait pas.)

Les "artistes des moeurs" étaient fiers de ne pas appartenir au groupe des "ennemis du peuple." Ils expiaient leurs fautes par un travail acharné. Certains postes exécutifs, dans le camp, étaient occupés par des détenus : c'était aux "artistes des moeurs" qu'on les confiait. La plupart des starostes, des chefs d'équipe, des chefs de groupe et des plantons se recrutaient parmi eux.

Ensuite venait la hiérarchie compliquée de "l'article 58" : les politiques. Le paragraphe 10 était le moins grave ; il s'appliquait aux "conteurs de blagues", aux "bavards", à ceux que la terminologie officielle qualifiait d'"agitateurs antisoviétiques." Les condamnés pour "activités contre-révolutionnaires" occupaient plus ou moins la même position : il s'agissait, pour la plupart, de sans-parti. On leur confiait un travail moins dur et, parfois ils pouvaient même occuper certains postes administratifs réservés aux déportés. Il en était rarement de même pour les déportés "soupçonnés d'espionnage." Jusqu'à notre arrivée, les pires criminels étaient les condamnés pour "activités contre-révolutionnaires trotskystes." On leur réservait les plus pénibles travaux, en plein air ; on ne les admettait pas aux "postes administratifs" ; et parfois, les jours de fête, on les mettait au cahot.

Notre arrivée leur rendit courage. ... [...]
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Toutes les autres éducatrices étaient des contractuelles, arrivées souvent depuis très peu de temps. Il y avait parmi elles des femmes charmantes, et je leur était reconnaissante du tact avec lequel elles évitaient de souligner ma qualité de paria. Mais je ne pouvais me lier d’amitié avec elles. Elles me paraissaient plus enfants que nos pupilles. Certes, elles avaient vécu la guerre, l’évacuation, la famine, mais sorties de là, elles ne savaient rien. Leur naïve confiance à l’égard de la propagande officielle était si forte que ce que leurs yeux voyaient à la Kolyma, elles ne le croyaient pas. Les phrases imprimées dans le journal faisaient sur elles plus d’effet que ce qu’elles voyaient dans la rue. C’est avec une extase quasi religieuse qu’elles apprenaient aux enfants la chanson si répandue à l’époque : « Le premier faucon est Lénine, le second est Staline. » En tout cas elles avaient un sentiment de la réalité nettement moins développé que, disons, la petite Lida Tchachetchkina, née à Elguen, qui avait déjà été par deux fois séparée brutalement de sa mère et qui, depuis six ans qu’elle était sur terre, avait vu je ne sais combien de mètres de barbelés, des dizaines de chiens-loups et autant de miradors. (Extrait du chapitre « Noble labeur », dans lequel l’auteure raconte son retour au monde « libre » et son travail d’éducatrice).
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Evguénia Guinzbourg
Par-delà les fenêtres se dressent les grands arbres sombres ; j'entends avec émotion le murmure secret et frais des feuilles. Je crois l'entendre pour la première fois. Que ce bruissement de feuilles me touche !

Souvenir du goulag, alors qu'on la fait sortir de sa détention pour la conduire au tribunal politique où elle sera peut-être condamnée à mort.
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Alors venaient des « pourquoi ? » et des « comment ? » sans fin, auxquels il était presque toujours délicat de répondre. C’est qu’il était diablement observateur, ce gamin ! La discordance entre les principes qu’on lui inculquait et ce qu’il voyait dans la vie réelle l’entretenait dans une inquiétude perpétuelle.
« Les éducatrices disent toujours qu’il ne faut pas s’assoir par terre, qu’on peut attraper du mal et se salir…
- Bien sûr. », acquiescé-je tout en pressentant vaguement un piège derrière cette phrase innocente. En effet, la voici. Comment se fait-il donc qu’Edik ait vu de ses yeux dans la rue, un soldat-escorteur qui criait : « Assis ! » à une colonne de zeks nouvellement débarqués et que tous se soient assis par terre ? Justement il venait de pleuvoir. Certains zeks se sont retrouvés le derrière dans des flaques. « Ils vont avoir attrapé du mal, n’est-ce pas ? C’était un mauvais homme, cet escorteur, n’est-ce pas ? » Le plus souvent j’élude ce genre de questions. Je détourne la conversation vers d’autres sujets. (…). Mais cette fois, il insiste : « C’était un mauvais homme, cet escorteur, n’est-ce pas ? » (Extrait du chapitre « Noble labeur », dans lequel l’auteure raconte son retour au monde « livre » et son travail d’éducatrice, ici à propos d’un enfant de six ans)
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Parce que chez nous, hein, c'est dialectique: aujourd'hui distinguée, demain reléguée...
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— Dix ans ! Dix ans ! Pourquoi ? Comment osent-ils ? Les bandits !
— C’est bien ma chance de tomber encore sur une bonne femme avec un gosier pareil. Tais-toi, je te dis ! Je sais que tu n’es pas coupable. Si tu avais été coupable, ils t’auraient donné bien plus de dix ans.
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Au long de toute ma détention, j’ai pu établir une loi infaillible : plus la prison est sale et infâme la nourriture, plus les gardiens sont libres et grossiers, moins la vie des prisonniers est en danger, et vice-versa ; plus la prison est propre et la nourriture convenable, plus les gardiens sont polis, plus la mort menace. 
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De grandes salles remplies de monde se transformaient en confessionnaux. Bien que l’absolution ne fût concédée qu’avec une grande parcimonie (très souvent, les déclarations de repentir étaient jugées « insuffisantes »), le torrent des repentirs grossissait de jour en jour. Chaque réunion avait son plat du jour. On se repentait de ne pas avoir compris correctement la théorie de la révolution permanente ou de s’être abstenu lors du vote sur la plate-forme de l’opposition, en 1923. On se repentait d’avoir été sensible aux « survivances » du chauvinisme de grande puissance et d’avoir sous-estimé le second plan quinquennal. On se repentait d’avoir connu personnellement quelque « pécheur » et d’avoir admiré le théâtre de Meyerhold. Se frappant la poitrine, les coupables criaient bien haut qu’ils avaient fait preuve de myopie politique, qu’ils avaient manqué de vigilance, qu’ils s’étaient montrés conciliants à l’égard d’individus douteux, qu’ils avaient porté de l’eau au moulin du coupable, qu’ils avaient fait preuve de libéralisme pourri. Ces formules, et bien d’autres du même genre, retentissaient sous les voûtes des édifices publics.

La presse, elle aussi, regorgeait d’articles en forme de mea culpa.
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Dis, ma fille, toi aussi tu es traktyste ?
- Non, grand-mère Nastia. Je suis une femme comme toutes les autres. Professeur et mère de famille. Toutes ces absurdités, ce sont les enquêteurs et le juges qui les ont inventées ; ce sont de mauvaises gens. Il faut tenir le coup, grand-mère ! Je pense que tout s’éclarera…
Grand-mère Nastia acquiesce d’un mouvement de sa tête, qu’un mouchoir recouvre jusqu’aux sourcils.
- Bah… Pour moi aussi, vois-tu, ils ont dit et écrit : traktiste. Et moi - crois moi – je te le dis comme devant Dieu : je ne me suis jamais approchée d’un de ces maudits-là. Qui a inventé ces histoires ? Chez nous, les vieilles on ne les met pas sur les tracteurs…
On entend quelques éclats de rire dans la cellule. (la vieille Nasti est accusée de trotskisme mais ne comprend pas de quoi il s’agit et croit qu’il lui est reproché quelque chose en lien avec les tracteurs - chapitre « La tour Pougatchev », page 203 dans la collection Points).
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Mes enfants, orphelins de père et de mère. Sans défense, si jeunes, si naïfs ; élevés dans l’idée de la bonté humaine. Je me souviens qu’une fois vassia me demanda : « Maman, quel est l’animal le plus féroce ? » Combien j’ai été sotte ! Pourquoi ne lui ai-je pas répondu que l’animal le plus féroce, celui qu’il faut craindre plus que tout, c’est l’homme ? (chapitre « Les orphelins », page 134 dans la collection Points).
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La première partie de ma vie, brisée en février 1937, ne fut en cette dernière année, qu’une suite d’incroyables contradictions. J’étais consciente d’aller tout droit au précipice. Les procès se succédaient : le procès Zinoviev-Kamenev, l’affaire Keremovo, le procès Radek-Piatakov. La lecture des journaux brûlait, blessait, brisait le cœur . Après chaque procès, les choses allaient plus mal. Bientôt se répandit la terrible accusation d’ "ennemi du peuple". Par une logique infernale, chaque région et République devait avoir son quota d’ "ennemis" pour ne pas se montrer en retard sur la capitale. Exactement comme toutes les autres campagnes : la campagne pour l’engrangement du blé ou la livraison de lait (chapitre « La dernière année », page 34 dans la collection Points).
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En 1937, quand commmença mon calvaire, je n’avais guère plus de trente ans ; j’ai dépassé depuis longtemps la cinquantaine. Dix huit ans de cette période, je les ai passés là-bas. Les sentiments et les pensées les plus variées m’ont tourmentée pendant ces années, mais ce qui dominait était la sensation de stupeur. Il me semblait que tout était absurde. Et je crois que c’est cette stupeur qui justement m’a aidée à revenir vivante : le fait que je me suis trouvée dans la position à la fois de victime et d’observateur. (Préambule, page 7 dans la collection Points).
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