Citations de Françoise Cloarec (92)
Elle est hors du temps, étrangère aux autres, perdue dans ses fantasmes de gloire mondiale et d'opulence.
Quand rien de tout cela ne se produisit, il apparut qu'il n'y avait en elle nul ressort de résistance, elle avait dépensé, généreusement prodigué, toute la substance de son âme dans une oeuvre qui maintenant se dressait, détachée d'elle, dans sa splendeur.
Il ne restait plus que l'esprit dépouillé et le corps usé d'une pauvre vieille femme qui avait été un génie, une sainte et une héroïne.
Il faut toujours se méfier des opinions qu'on a, parce que ce sont des opinions qu'on reçoit, qu'on a apprises et qui nous sont diffusées aussi bien par les livres, l'école, l'université, la télé, les médias...et elles brouillent toute approche du pathologique ou de l'esthétique...Ce n'est pas parce qu'on est fou qu'on est génial. Par contre, il y a des potentialités, qui ne se seraient jamais manifestées s'il n'y avait pas eu de catastrophes schizophréniques.
Jean Oury, Création et schizophrénie.
"Nos amours plombent parfois presque autant que des haines"
Marie Laurencin et Nicole Groult se sont créé un univers féminin bien à elles, un havre de douceur. Leur complicité tendre et rieuse n'inquiétait personne. Et puis, quelle importance la sentimentalité entre femmes.
André Groult adorait Marie... Il ne l'a jamais prise au sérieux, même quand elle a gagné des fortunes avec ses toiles.
Ce n'est pas parce que Nicole aimait Marie qu'elle se masculinisait, elle portait d'élégantes robes, des escarpins, adorait les hommages venant des hommes.
Séraphine grandit comme grandissent les petites filles de la campagne, le regard vers le ciel, vers les arbres, vers la lumière, mais la mémoire est déjà bien lourde.
Il la regarde droit dans les yeux, n'essaie pas de lui plaire, juste de retenir son attention. Son regard la caresse déjà.
Séraphine peint sans relâche dans son appartement-atelier. Le jour, elle fait ses "travaux noirs", en gagnant sa vie comme bonne à tout faire, mais le soir ce sont ses travaux de couleur.
Il y a du tigré, du moucheté, du velu, du chevelu, du rayé, de l'écailleux, du cachemire, des pois, du bariolé, dans les tableaux de Séraphine. On dirait que ça ondule dans les nervures, que ça vibre dans la ramure, que ça grouille dans les fleurs, dans les arbres, les feuilles, les fruits. Des insectes, des oiseaux, des plumes, faisans, paons, pintades apparaissent, se bousculent. Séraphine fait vibrer les teintes, superpose les couches, les empâtements.
Elle se permet tout.
Les couleurs triomphantes, les formes surtravaillées, avec de plus en plus de finesse, se posent, se superposent. Il y a du tigré, du moucheté, du velu, de chevelu, du rayé, de l’écailleux, du cachemire, des pois, du bariolé, dans les tableaux de Séraphine. On dirait que ça ondule dans les nervures, que ça vibre dans la ramure, ça grouille dans les fleurs, dans les arbres, les feuilles, les fruits. Des insectes, des oiseaux, des plumes, faisans, paons, pintades apparaissent, se bousculent. Séraphine fait vibrer les teintes, superpose les couches, les empâtements
Des dizaines de milliers de malades isolés dans les hôpitaux psychiatriques meurent de faim, de tuberculose et autres fléaux. Ils sont abandonnés de leur famille, n’ont plus de contact avec le monde extérieur, voient tous leurs appels échouer.
Dans ces établissements, pendant la guerre, 4500 malades sont morts d’inanition, victimes de l’indifférence générale. Indifférence envers ces « gens de rien ».
"Dans le monde où je suis, il n'y a ni dessus, ni dessous : il y a la vérité qui est terriblement cruelle. C'est tout."
Antonin Artaud, lettre asile de Ville-Evrard.
Séraphine est venue à la peinture en sortant du couvent. Comme on entre en religion, l'acte de peindre est-il pour Séraphine un moyen de suivre le chemin de l'illumination, de trouver l'extase mystique ?
Qels sont les véritables sujets des toiles de Séraphine? Les fleurs, les feuilles, les arbres. Des fleurs qui s'apparentent à des plumes, des plumes qui font penser à des lyres, des roses, des dahlias, des boutons-d'or, des buissons ardents, des pommes, des cerises, des lilas. D'aspect duveteux, sensuel et chaud. Des matières souples, riches et limpides. De quoi est faite la sève qui irrigue la végétation de ces compositions imprévues?
Séraphine n'est pas une habitante célèbre, pas encore, mais les gens parlent d'elle. Elle attire la curiosité, la sympathie, mais aussi la malveillance et la médisance. Les habitants la voient se presser dans les rues, toujours affairée, encombrée de ses longues jupes noires. Elle ne porte que du noir. Sur ses blouses, elle noue un caraco, une petite pèlerine grise ou noire en laine des Pyrénées. Elle superpose plusieurs longues jupes qui balaient les pavés. Séraphine pose sur ses cheveux orange un canotier verni, noir bien sûr.
(..) Séraphine s'évade de partout, de sa place de domestique, des conversations qu'elle a avec les gens, de la réalité quotidienne. Elle vit ailleurs, dans un monde bien à elle. Elle vit sa passion pour la peinture librement, sans faire de compromis, sans s'occuper de ce qui se fait ou ne se fait pas.
Elle vit, elle peint.
De son enfance, presque rien.
Nous connaissons son prénom, ce prénom d'anges de la première hiérarchie, les anges les plus proches de la présence divine. Ardents
L’union va durer un an, puis Sonia Terk deviendra Sonia Delaunay en épousant le peintre Robert Delaunay.
« Notre mariage pris fin au bout d’un an. Un de mes amis se pensait plus capable que moi de rendre ma femme heureuse, et je n’avais nullement envie de
m’opposer à leur bel avenir. »
C’est grâce à Sonia que Uhde rencontre le Douanier Rousseau.
Le métissage discret de Camille, qui l'avait autrefois séduit, il en a cherché les traces sur leurs enfants et aujourd'hui leurs petits-enfants. Il aime cette lumière venant de loin qu'ils portent en eux.
Nicole admettait qu'il était difficile d'être toujours la plus forte : il ne faut pas croire que ce soit la meilleure place, disait-elle à ses filles. Les faibles, ce sont eux qui vous bouffent.
Sa manière de peindre ressemble à unechorégraphie lente.Le fusain ou le crayon grattent sur la feuille,caressent,reviennent,hésitent,gomment,. Ils trace de grandes lignes,recule,s'arrête,se rapproche,,ferme un oeil puis l'autre. Il s'approche encore,regarde,recule,s'arrête,regarde mieux,découpe le champ de son regard avec les mains pour isoler une partie de la toile qu'il retourne. Si elle résiste, tient au regard à l'envers,tout va bien.D'un geste familier il frotte son chiffon. La pâte se mélange.
« Marthe n’est pas celle que l’on croit, je vois bien qu’il y a du secret. Je cherche la Maria qu’elle a voulu taire dans les toiles, dans sa famille, dans les livres, dans les articles. » (p. 38 & 39)