Citations de Frédéric Dard (2228)
Nous étions assis dans la chambre à coucher d'une concierge de la rue Godot-de-Mauroy, sur deux chaises cannées, entre une cheminée où trônait une oeuvre d'art en plâtre de Paris authentique qui représentait un petit chat dans un sabot, et une console en faux marbre véritable où des fleurs en celluloïd, tellement bien imitées qu'elles avaient l'air artificielles, agonisaient sous trois centimètres de poussière.
Ma stupeur n'a d'égale que celle de Beethoven le jour où il apprit qu'il faisait de la musique et non de la peinture comme on le lui avait laissé entendre
J’aime beaucoup les fous. Trouvant la réalité invivable, ils se sont construit d’autres vérités plus conformes à leur esthétique. Ce qui revient à proposer la folie comme forme de liberté.
Toutes les princesses de rêve finissent avec la bouille de Mme Pipi.
Moi qui suis un homme libre (du moins autant que faire se puisse), je ne m’embarrasse pas de ces agressions endémiques que représentent les bandoulièries (De bandoulière) kodakeuses ou nikonesques. Ces forçats de la pelloche me font pitié, quelque part, d’être sans cesse aux aguets pour flasher. Ne regardant qu’en fonction d’un objectif et jamais pour le compte de leur émotivité personnelle.
Tout était bien qui finissait mal. Il semblait que le pauvre Président fût atteint d’un mal consécutif sans doute à l’âge et au surmenage, contre lequel personne ne pouvait rien. Tout homme illustre cesse un jour, car tel est le socialisme divin qui nous nivelle en fin de vie, grands et petits et nous engloutit pêle-mêle dans la fosse commune afin que nous restituions à la terre ce que les nécessités de notre durée lui ont dérobé. Le Fameux entrait en délabrance et devait s’y résoudre. Un autre allait bientôt prendre sa place, il n’y aurait que l’embarras du choix.
Tout le monde applaudit, sans rechigner, conscient de ce qu’il est préférable d’arriver en retard au Caire qu’en avance au paradis.
— De quoi souffre-t-il, au juste ?
— D’élasticité mentale. Les symptômes sont très divers. Ils vont de l’oubli total de choses importantes, jusqu’à l’autotransgression de la volonté. Il peut donner des instructions en formelle contradiction avec sa ligne de )conduite, ne pas tenir ses engagements préprésidentiels, par exemple faire une politique capitaliste, ordonner des interventions militaires saugrenues, renverser des alliances, faire couler des bateaux, suivre le Tour de France, renoncer à des options politiques qui lui étaient capitales auparavant, se désintéresser du chômage, se…
(1985)
C’était son jour de congé et il devait emmener ses chiares au Luxembourg. Je lui ai conseillé de les flanquer, tous, dans une maison de redressement et de ne plus me bassiner les couilles avec ses proliférances de lapin.
— Vous raffolez des adverbes, ronchonna l’Illustre.
— Ils permettent de mieux cerner la langue, plaidai-je. Je trouve le français trop évasif.
— S’il ne l’était pas, la politique ne constituerait pas une carrière, objecta mon fabuleux voisin.
Toujours, tu verras : on conjugue ses efforts ; plus aisément que le verbe moudre.
j ’ai dans l ’idée, tu vois, que ceux qui meurent sans avoir vu la mer ne vont pas chez le Bon Dieu.
Ça le vexé trop qu ’on ignore son chef-d’œuvre.
Il fume un cigare gros comme ma cuisse en exhalant un nuage bleu-noir qui fait ressembler le bureau du Boss à la cité de Longwy.
Abdulah possédait un permis de port d'arme, au titre de je ne sais quoi. La crosse de son révolver, en bois d'acacia ciselé, était ouvragée comme un meuble Renaissance et comportait un minuscule compartiment secret dans lequel il gardait sa "coke". Quel flic se serait avisé d'aller chercher de la cocaïne dans une arme ?
Les fous sont les vrais seigneurs de cet univers, parce qu'ils échappent à toutes les lois humaines. Ils sont murés dans leur vérité absolue et quand vous frappez à leur lourde, c’est comme si vous attendiez que la Seine s’arrête de couler pour la traverser à pied sec.
Oui, je suis très troublé.
C'qui m'donne à hésiter d'en c'qui la concerne c'est son parfum, avoue Alexandre-Benoît. Elle s'asperge de trop, la mère. Tu t'croirais à Grasse un jour de tremblement de terre qu'aurait brisé les bonbonnes.
Dans le fond, Gaston, ce ne serait-il pas cela, le bonheur ? Une vie close, réduite à l’excès ? Un petit job immobile, une ébriété endémique, le cul à portée de main…
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Comme tous les gens dans l’ennui, il avait besoin de s’en prendre à quelqu’un de son infortune ; je comprenais sa réaction. Les autres sont notre seul exutoire possible, le réceptacle et la cause de presque tous nos maux. Nous n’avons qu’eux pour nous décharger des tourments qu’ils nous créent.
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Baudelaire a écrit un texte fameux sur la griserie. Un texte à la con, selon moi qui n’engage personne. Un texte comme quoi la vie est si tant tellement brève et merdique, inhospitalière affreusement qu’on doit passer son temps terrestre à se griser : de vin, de poésie, de tout ce qu’on voudra, mais se shooter coûte que coûte pour ne plus voir ça et filer dare-dare au trépas sans regarder les gens du voyage, ni le compartiment fumeur, non plus que le paysage du long de la voie. Il fleurdumalait à tout-va, le pauvre Charly ! Mort à 46 piges, faut dire. Donc : pressentiment d’une fin précoce, ça tu peux y compter. Il le sentait qu’il allait paumer le meilleur, ne jamais connaître le bel âge du renoncement ; la griserie d’acceptation. Cette « démarche »-là lui est passée au-dessus de la tronche.
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t’auras beau retourner sept fois ta langue dans la bouche de ta voisine et sept fois ta bitoune dans ton Eminence, mais deux hommes intelligents, d’idées opposées, trouvent beaucoup plus de choses à se dire que deux cons appartenant à un même parti.
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On ne se méfie pas suffisamment des sanguins, San-Antonio. On les croit gentils et ce sont les pires. Leur amour du cassoulet inspire confiance, mais leurs flatulences sont nocives.
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Heureusement que l’informatique permet de plus en plus de rester chez soi. Bientôt personne décarrera plus de sa boutique. On se terrera dans son alvéole, à balancer des messages, des données, des coderies en tout genre. On gagnera son bœuf avec son ordinateur, on se reproduira grâce à lui, on vivra de lui et par lui, tu verras. L’existence sera plus qu’une mémorisation de la vie. Y aura même plus mèche de se branler : on n’aura plus de bite.
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Partout que tu vas dans les grandes villes, c’est le même enlisement. Plus la vie va rapidement, plus les déplacements sont durailles. On perd sa jeunesse et, qui piset, sa vieillesse pour se rendre d’un point à un autre. Heureusement que l’informatique permet de plus en plus de rester chez soi. Bientôt personne décarrera plus de sa boutique. On se terrera dans son alvéole, à balancer des messages, des données, des coderies en tout genre. On gagnera son bœuf avec son ordinateur, on se reproduira grâce à lui, on vivra de lui et par lui, tu verras. L’existence sera plus qu’une mémorisation de la vie. Y aura même plus mèche de se branler : on n’aura plus de bite.
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L’avantage, avec les personnes placides, c’est qu’elles sont un tout petit peu moins chiantes que les autres du fait qu’elles jactent avec précaution. Le con bavard, vibrionnant, est le pire de tous car sa connerie te fait l’effet d’une ruche en activité.
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L’avantage, avec les personnes placides, c’est qu’elles sont un tout petit peu moins chiantes que les autres du fait qu’elles jactent avec précaution. Le con bavard, vibrionnant, est le pire de tous car sa connerie te fait l’effet d’une ruche en activité.
O combien de martins-pêcheurs, de martiens prêcheurs et de capitaines partis faire des courses à la Samaritaine...
Une tendresse curieusement teintée de haine. Ou plutôt non, il le haissait affectueusement, voilà !
Cet homme s'appelle Béru. Il est âgé d'une quarantaine d'années et ses parents étaient des gens rigoureusement normaux. Son père était garde-champêtre, sa mère garde-barrière, sa sœur aînée est garde-malade, son plus jeune frère est garde-côte et lui, mesdames messieurs, il es garde-manger !