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Citations de Frédéric Vitoux (146)


...la présence immuable des animaux, les chiens, les chats, Bebert et les autres, toujours comme une gràce, une magie, un mensonge qui vous délivrent un instant de l'abominable pesanteur des hommes!
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En un mot, si l’humour n’est pas digne d’être pris au sérieux, on ne voit pas très bien ce qui mériterait de l'être.
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En recevant ce jour-là à déjeuner Gioacchino Rossini et Henri Beyle, le comte et la comtesse Nencini accueillaient le compositeur le plus illustre de leur temps et un Français qui, aussi obscur et dépourvu de réputation qu’il fût, avait été reçu les mois précédents par la meilleure société milanaise, s’était lié d'amitié avec l’abbé di Breme qui en régentait les esprits, avait séduit le poète Silvio Pellico (qui allait bientôt devenir dans sa forteresse du Spielberg le prisonnier politique le plus pleuré d'Europe) et avait même durablement impressionné le célébrissime et sulfureux Lord Byron un soir d'octobre à la Scala.

Mais le comte et la comtesse Nencini mesuraient-ils vraiment ce privilège ?
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Sa voix tremblait d'admiration et de passion. Et il aurait été bien impossible de savoir si cette admiration, cette passion s'adressaient à la seule comtesse Nencini ou au tableau qu'il avait accroché en face de son lit.

Et Beyle crut apercevoir là un trait du caractère italien. Un Français affichera dans son salon la peinture dont il s'enorgueillit. Un Italien qui aime un tableau l'accroche en face de son lit pour le voir en s'éveillant et son salon reste sans ornement ! Il veut du plaisir et pour lui le paraître n'est rien.
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Pour Céline les animaux sont ceux d'abord qui ne parlent pas, qui ne mentent pas. Ils ont pour eux la grâce, le mystère, la connaissance intuitive des choses, une forme d'innocence. ils rappellent à l'homme les échos affaiblis d'un paradis perdu. Depuis le petit chien de son enfance, Céline avait cessé de partager sa vie avec des animaux domestiques. Il n'adoptera le fameux chat Bébert que bien plus tard, sous l'Occupation.
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Dès qu'il n’était pas tenu de séduire, dès qu'il ne cherchait pas à briller dans un salon, Beyle retrouvait ses esprits et son esprit, son naturel et son goût des paradoxes, son intelligence si vive et son sens de la formule, qu’il dilapidait avec la plus parfaite prodigalité.
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Il pleuvait d'une petite pluie chaude et lourde, le 4 juillet [1961] au matin, quand Céline fut inhumé dans un caveau provisoire au cimetière de Meudon. Ils n'étaient pas cinquante à l'accompagner [le souhait de Céline]. Les vieux amis. Les fidèles. " Un enterrement incomparable que méritait Céline " dira Lucien Rebatet.
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J'ai parfois songé à écrire un petit traité relatif aux insultes, ou du moins à rassembler un florilège de celles-ci. En soulignant ce principe fondamental de la répétition des attaques.

Trois exemples me viennent à l'esprit.

L'injure la plus terrible, celle de Jules Renard à l'un de ses détracteurs dont le nom a disparu (tant mieux pour lui !) : « Vous ne direz jamais autant de mal de moi que j'en penserais de vous, si je pensais à vous. »

La plus drôle, celle de Gabriele D'Annunzio à l'adresse de Marinetti, l'apôtre du futurisme : « Un crétin traversé par des éclairs d'imbécillité. »

Et la plus impitoyable ou la plus clairvoyante, chacun en jugera, celle de Claudel exaspéré par les surréalistes qui s'acharnaient contre lui dans leurs manifestes d'adolescents provocateurs : « Des imbéciles qui voulaient se faire passer pour des fous. »
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Une observation m’a toujours amusé - ou attristé, selon mon humeur : les tournées de films, quand sont recrutées des centaines de fîgurants pour incarner, un ou deux jours durant, les soldats d'une armée, une foule avec ses bourgeois et ses ouvriers ou encore des prisonniers rassemblés dans un camp, sous la surveillance de gardiens...

Eh bien, à la pause, au moment des repas, ces figurants à qui ont été confiées, de façon arbitraire, des tenues d'offciers ou de simples soldats, de notables ou de prolétaires, de bagnards ou de geôliers, se regroupent spontanément entre eux. Ah ! non, un lieutenant ne va tout de même pas fraterniser avec un trouffion, un notaire avec un charpentier, un repris de justice avec un représentant de l'ordre ! À chacun sa place ! À chacun son grade, sa classe ou son statut !
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Existait-il un homme plus sociable et généreux que Diderot ?

Gaffeur peut-être, à l'occasion, mais empressé à se faire pardonner.

Autant il détestait les mondanités, les vains bavardages, « cette langue froide et vide de sens qu'on parle aux indifférents », autant il était disposé a consacrer du temps à ses amis, à converser avec eux.

Si ses livres, ceux que l'on ne cesse aujourd'hui de lire ou de relire, nous touchent à ce point, c'est qu'ils semblent écrits en forme de longues conversations. Diderot considérait ses lecteurs comme des proches, dignes de ses confidences — et ses Salons ne dérogeaient pas à cette forme-là.
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Seul m'émeut le silence qui rode autour de mon grand-père et surtout de mon père.

Seul m'obsède le silence qu'il observait quand nous nous disputions en famille à propos de cette fichue assiette du chat, lui qui répugnait à parler de sa vie, de son enfance, de tout ce qui avait pu le blesser, lui le fils unique d'un couple déjà âgé à sa naissance.

Mais peut-on faire d'un silence le sujet réel d'un livre ?
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— À propos, savez-vous quel est le poisson le plus vorace ?

Bien entendu, nous n’en avions aucune idée et nous observions un silence attentif.

S'agissait-il d'une question sérieuse ou d’une blague ?

— Eh bien, c'est la sardine.
Après un moment de stupeur ou d'incrédulité, de notre part, il enchaînait : — La sardine, oui, et vous savez pourquoi ?
Non, nous ne le savions pas.
Il faisait durer l’attente.
— Parce que la sardine, une fois que ça a dîné, ça r'dine !

Et il partait d’un bon rire qui entraînait les nôtres.

Ses calembours ou ses jeux de mots étaient, je le reconnais, consternants. Mais plus ils sont consternants et plus ils me mettent en joie. La preuve : je n'ai jamais oublié cette sardine.
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A chaque instant, Céline s'engage. Coups de tête, coups de folie, échappatoires, délires. Dans l'armée, vers Londres, en Afrique noire, à New York, à Leningrad. Il rêve toujours de grands espaces. [...] Oui, jusqu'en 1951, l'installation à Meudon, la vieillesse, la fatigue venues précocement après la prison et les épreuves danoises, Céline bouge.
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Un jour, les huit ou dix nieces de Mme de Montcertin lui demandèrent ce que c'était que l'amour ; elle répondit :

« C'est une vilaine chose sale, dont on accuse quelquefois les femmes de chambre, et quand elles en sont convaincues, on les chasse. »

STENDHAL, Souvenirs d’égotisme
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(...) le philosophe mourut subitement, le 31 juillet 1784, vers midi, alors qu'il était à table. Personne ne pouvait donc lui reprocher d'avoir refusé l'extrême-onction. Comment en aurait-il eu la possibilité ?

Ce fut dans la Chapelle de la Vierge de l'église Saint-Roch que se tint, le 1er août, la cérémonie funéraire. Falconet, paralysé depuis plus d'un an, ne pouvait assister aux obsèques de son ancien ami. Avait-il même été tenu au courant, en temps voulu, de sa mort ? Mais, en un sens, Diderot retrouva Falconet dans cette église - la seule pour laquelle le sculpteur avait longtemps travaillé, comme concepteur de ses travaux d'embellissement, dans les années 1750.

La Chapelle de la Vierge, dans le prolongement théâtral et mystérieux de la nef, avait requis tous ses soins. Il avait lui-même sculpté le groupe de Marie et de l'ange Gabriel, au moment de l'Annonciation.

Cette rencontre m'émeut au plus haut point : une chapelle décorée par Falconet, la seule dans Paris, la seule au monde, où les obsèques de Diderot se déroulèrent avant que son corps ne reposât dans un caveau, sous son dallage.

Un hasard ? Sans aucun doute.

Personne, parmi les proches ou la famille du défunt, n’avait prémédité cela.

Personne, à ma connaissance, n'a jamais souligné non plus cette présence de Falconet ou de ses œuvres, là où Diderot allait tirer sa révérence à notre monde.

Mais c'était un signe tout de même de ce qui avait uni autrefois les deux hommes.

Dans la Chapelle de la Vierge se mêlèrent, ce jour-là, les ombres du sculpteur et du philosophe.
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Diderot est un gentil, comme on dit. Il aime ses amis, il est prévenant à leur égard, il se met en quatre pour leur rendre service, il est disposé, parfois, à sacrifier ses œuvres personnelles ou le temps qu'il devrait leur consacrer pour les offrir à ceux qui lui sont chers sous la forme de longs et éblouissants monologues.

Falconet n'est pas un gentil — ou un être sociable. Ceux qu'il considère comme ses amis, il les supporte - et c'est déjà beaucoup ! Les autres, il les rejette, un point c'est tout. Prévenant, non, il ne l'est certes pas davantage. Et l'on se persuaderait sans mal qu'il se mettrait en quatre, lui, pour éviter de rendre service - ou plutôt pour ne jamais se laisser distraire de son travail en cours.

Pourtant, c'est Diderot le gentil qui prend l'offensive et c'est Falconet, qui ne l'est pas, qui doit se défendre. Par tous les moyens s'il le faut.

Il faut bien l'admettre : les méchants, ou plutôt ceux qui ne sont pas aimables ou ne se soucient pas de l'être, sont en règle générale beaucoup plus reposants que les gentils. Ils ne demandent rien aux autres et il ne faut surtout rien leur demander en retour. Ils se replient dans leur caverne, ils hibernent, ils ronchonnent. En un sens, ils ne font de mal à personne puisqu'ils ne vont à la rencontre de personne.

On connaît cette apostrophe familière lancée à celui que l'on soupçonne d'intentions agressives à son égard :
- Alors quoi, tu me cherches ?
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Falconet au travail se bat contre la matière. Il s'affronte au marbre, à l'argîle, il fait couler du bronze dans ses moules. Il sait d'expérience que ses ouvrages sont périssables. Uniques et périssables. Les vicissitudes de l’Antiquité lui ont donné maints exemples de saccages ou de disparitions sans recours.

Diderot, lui, ne s'attache pas à la matérialité périssable de l'écrit, du manuscrit. L'imprimerie est passée par là. Il restera toujours trace de ses ouvrages. Autrement dit sera à jamais préservée l'intégralité de ses œuvres de l'esprit. Du moins de celles qui auront déjà été publiées de son vivant, nous y reviendrons. Pour paraphraser un célèbre dicton, les statues, comme les paroles, volent, s'envolent et se brisent, les écrits restent et resteront.
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Peut-on parler d'affections imaginaires ?

Notre littérature est nourrie de ce senriment-Ià, de cette imaginaire-là. Combien de romans pour nous rappeler que l'on ne tombe pas amoureux d'une femme mais de l'image d'une femme ou de l'idée d'une femme ? « II est plus facile de mourir pour une femme que d'en rencontrer une qui le mérite », disait-on au XVIIIe siècle. Affirmation parfaitement misogyne et que l'on serait en droit d'inverser, j’en conviens. Ce qui ne change rien à cette évidence : il est plus facile de mourir pour l'idée d'un être humain que pour un être humain.
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La vie de Céline ? Elle commence donc le 27 mai 1894, à quatre heures de l'après-midi. Cette affirmation n'est pas toutefois rigoureusement exacte. Louis-Ferdinand Céline est né bien plus tard, le 5 octobre 1932 très précisément, le jour où les éditions Denoël mirent en vente le premier roman d'un inconnu qui venait de choisir ce pseudonyme, Céline, au-dessus de la couverture du "Voyage au bout de la nuit". Non, le 27 mai 1894 est né simplement à Courbevoie Louis-Ferdinand Destouches, fils de Fernand Destouches et de son épouse, née Marguerite Guillou.

page 17
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Dès lors, La Religieuse en 1759, Le Neveu de Rameau qu'il commence à écrire en 1762, Le Rêve de D'Alembert en 1769 ou Jacques le Fataliste en 1771, il les gardera pour lui, dans ses papiers, ou pour le bonheur de quelques privilégiés (les abonnés de la Correspondance littéraire en particulier) à qui il les fera lire, rien de plus.

Si Diderot ne s'était pas réconforté par la douce musique de la postérité, que lui serait-il resté de ses années de labeur ?

Ses propres livres n'existaient encore qu'à l’état de manuscrits, à la merci du moindre accident, une perte, l'incendie de son bureau, la distraction ou la négligence de ses héritiers, que sais-je !... La postérité, il l'implorait de porter ses livres vers ses lecteurs tant attendus, ses premiers lecteurs, et qui vivraient forcément après lui.

Il faisait appel à elle, il n'avait d'autres recours.

Et cet appel a été couronné de succès.

On n'a cessé de lire et relire Diderot.
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