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Critiques de Gabriela Wiener (28)
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Portrait huaco

Portrait huaco n'est pas un roman. Gabriela Wiener est une journaliste et éditorialiste péruvienne vivant en Espagne.

Portait huaco est son premier texte. Gabriela Wiener nous livre un texte âpre, cru, voir violent. Ce texte est servi par une écriture puissante et nerveuse.

Dans le cadre de son travail, Gabriela Wiener est à Paris et va visiter le Musée du Quai Branly.

Elle est ébranlée par deux choses : d'abord par une statuette préhispanique en céramique représentant un visage indigène. Puis par le nom de la salle du Musée : Charles Wiener.

Charles Wiener qui est l'arrière- arrière grand père de l'autrice.

Charles Wiener est un explorateur du 19ème siècle qui a failli découvrir le Machu Picchu mais qui est surtout un pilleur d'objets inca .

Pour Gabriela Wiener c'est le début d'une recherche sur son passé et ce qu'elle est.

Réflexion sur le deuil, la famille, la bâtardise, le désir, le sexe.

Cette réflexion peut nous bousculer car Gabriela Wiener ne cache rien de ces addictions sexuelles, ni des différences de cultures, de race. Idem pour le colonialisme et le post colonialisme

Néanmoins il reste la force d'un texte vivant sur l'identité, sur nos filiations, nos dérives, nos vulnérabilités peut être.

Une découverte étonnante.

Merci aux Editions Métailié et à la Masse Critique de Babélio pour cet envoi
Lien : http://auxventsdesmots.fr
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Portrait huaco

Gabriela Wiener est une journaliste et écrivaine péruvienne, installée en Espagne depuis plusieurs années. Selon l'histoire familiale, elle et les siens descendent de Charles Wiener, explorateur autrichien naturalisé français, connu pour « avoir failli » découvrir le Machu Picchu. Ce qu'il n'a pas manqué de faire, en revanche, c'est de piller (enfin, à l'époque on appelait ça « découvrir » et « fouiller ») les tombeaux incas pour en ramener des milliers d'objets en France et les présenter lors de l'Exposition universelle de Paris de 1878.

En visitant la salle du musée du Quai Branly qui abrite aujourd'hui la collection Wiener, Gabriela s'interroge sur cet ancêtre et sur ses motivations et, en observant les statuettes en céramique qui lui renvoient sa propre image, elle s'interroge sur l'ambivalence de sa propre identité en tant que descendante d'une lignée issue d'une part d'un explorateur blanc pilleur d'héritage culturel, et d'autre part d'une indigène dont on ignore tout mais dont il est certain qu'elle faisait partie d'une civilisation massacrée par le colonisateur espagnol puis dépossédée de son patrimoine par des étrangers à partir de l'indépendance du pays.

A ce noeud de questionnements se mêlent les interrogations, plus intimes, de l'auteure à propos de son « ménage à trois » et de sa relation polyamoureuse avec un mari et une amante, et ses réflexions concernant son père récemment décédée et la double vie qu'il menait avec maîtresse et autre enfant.

« Portrait huaco » me laisse un peu mitigée. Tout ce qui concerne les zoos humains, le pillage culturel, le paternalisme et le racisme de l'Europe post-coloniale envers l'Afrique et l'Amérique du Sud m'a énormément intéressée, d'autant plus qu'il n'est pas habituel de lire le point de vue d'un ressortissant de l'une de ces ex-colonies. Intéressant aussi de réaliser que ce racisme est encore très présent en Espagne (les Latino-américains y sont traités de « Sudacas », ce qui n'a rien de bienveillant). Ensuite, les réflexions de Gabriela Wiener sur le deuil et la famille ne m'ont pas plus captivée que ça. Et quant à sa sexualité (décrite parfois crûment), pardon, mais je m'en fiche, je n'avais pas envie ni prévu de lire ses ébats et débats sur le sujet. Même si je comprends bien que cela rejoint aussi les thèmes de l'identité, de la racisation et du rejet qui traversent tout le livre.

Malgré que tout cela soit un peu « fouillis », toutes ces réflexions peuvent faire écho à nos propres vies. Il faut aussi reconnaître que l'écriture est puissante, intelligente, bouillonnante, décomplexée, et que le livre pousse à envisager d'autres points de vue et à se questionner sur les thèmes qu'il aborde.



En partenariat avec les Editions Métailié.
Lien : https://voyagesaufildespages..
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Portrait huaco

Gabriela Wiener, dont on ne sait si elle nous livre là un récit ou une autofiction, visite le musée du quai Branly et la collection Wiener, cet explorateur qui a manqué de peu la découverte du Machu Picchu et dont elle est la descendante métisse.

Cette visite est l’occasion pour elle de questionner les thèmes de la filiation, de la loyauté à ses origines, du pillage colonial des biens culturels et religieux, plus largement du traitement des personnes non blanches dans le processus colonial et post-colonial.

Sa grande originalité est de partir d’elle-même, de son arbre généalogique sans cesse contesté, de sa vie amoureuse et sexuelle mouvementée, pour tenter de répondre à ces questions. Vivant en trouple avec un mari « huaco » comme elle, et une jeune femme blanche, elle expérimente en direct les effets de ses questionnements et de ses errances, sans pouvoir éviter les déchirures affectives qu’ils provoquent.



Passionnée par les thèmes explorés, j’ai cependant été décontenancée par l’extrême fluidité du propos, qui passe d’un sujet à l’autre comme dans une conversation à bâtons rompus. Cela donne un côté très vivant à ce livre, mais cela m’a parfois perdue. Il reste un des livres les plus originaux lu récemment sur ces questions ! Merci à Metaillié et NetGalley France pour cette lecture.
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Portrait huaco

J'ai d'abord pris ce livre pour un roman, avec une forme étonnament vivante et riche, et des détails tellement précis que j'ai été vérifier ... et l'histoire, au moins le volet historique, est en fait réel et documentaire.

J'aimais beaucoup l'idée d'une construction romanesque aussi détaillée, mais la réalité se montre pleine de rebondissements aussi.

J'ai plus accroché aux aspects coloniaux du récit qu'aux aspects romantiques/sentimentaux/sexuels, mais tout cela tourne finalement autour de l'identité, ressentie ou perçue, et propose une vision cohérente.

Les moments historiques sont hallucinants - enlèvements, zoos humains, pillages sans réflexion - et la réflexion qu'ils suscitent mérite d'être menée avec un soin approfondi.
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Portrait huaco

« Nous ne cessons jamais de chercher ce que nous avons été pour commencer à être ce dont nous rêvons. »



Au-delà de sa quête personnelle de filiation Gabriela Wiener, d’une écriture mordante servie par une connaissance pointue du sujet traité, exhume avec force détails l’emprise de l’Europe sur les peuples colonisés du monde en général et du Pérou en particulier dévoilant sans ambages les vols d’enfants où la mère est culpabilisée, les ignobles et réels zoos humains ainsi que les pillages des trésors archéologiques des anciennes civilisations décimées.



Son arrière-arrière-grand-père, Charles Wiener Juif autrichien, naturalisé français va se transformer du jour au lendemain en Indiana Jones sans grands égards. Il n’enverra pas moins de 4.000 objets à Paris. Lors de ses expéditions, dans la foulée, d’un coup de braguette tragique il va générer une descendance « péruvienne » dont Gabriela serait issue.

De cette recherche identitaire germe par instant un imbroglio familial digne du roman célèbre de Gabriel Garcia Marquez « Cent ans de solitude ».



Portrait huaco n’est pas un récit d’aventures mais une douloureuse aventure intérieure pour Gabriela où les traumatismes d’être une « chola », ni très blanche mais pas assez noire, « celle couleur de peau qui fait de moi une indienne en Espagne et au Pérou une couleur de porte », l’humilie et la désinhibe totalement. Sa décolonisation du désir engendre un malaise malsain parfaitement traduit : « J’ai besoin d’énormément de sexe pour oublier à quel point je m’aime peu, à quel point j’ai été peu aimée. Cette nécessité d’être consolée grâce au sexe, ça n’érotise pas en fait, ça effraie, plutôt. »



Le portrait huaco n’est qu’une statuette en céramique d’un visage humain préhispanique comme son aïeul en a tant déterré mais son effet miroir dans les yeux de Gabriela à réellement crée la panique.



C’est un roman d’une force rare, à l’ambiance rude et tendre à la fois, c’est le cri d’une femme érudite qui retentit sur l’histoire de nombreux pays qui ont vécu la contrainte et la violence de plusieurs générations de colonisateurs et de pilleurs.



Je remercie Babelio de cette découverte dans le cadre d’une masse critique et les éditions Métailié de m’avoir adressé cet ouvrage à la couverture attirante.



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Portrait huaco

Roman j'imagine très fortement inspiré de la vie de l'autrice, sans doute la forme roman est-elle là pour une certaine liberté de création et d'interprétation. Deux parties, d'abord celle au Pérou où Gabriela tente de comprendre comment Charles Wiener a pu y laisser un enfant illégitime et comment son père a pu, pendant des années mener une double vie ; puis la seconde : retour en Espagne auprès de sa fille, de son mari et de sa femme, car Gabriela vit un polyamour, et pas mal de questions autour de l'exil, de l'immigration, de l'amour, la fidélité...



Ce court roman est très dense, en à peine 160 pages, il évoque tout ces points, brosse un résumé de la vie de Charles Wiener, né juif autrichien en 1851, naturalisé français en 1878 après son exploration au Pérou pour le compte du gouvernement français, converti au catholicisme, puis diplomate en Amérique du sud. Ses collections sont aujourd'hui au musée du quai Branly. "L'Européen a laissé derrière lui un enfant péruvien qui à son tour a eu dix enfants, parmi lesquels mon grand-père, qui a eu mon père, qui m'a eue, moi, qui suis la plus amérindienne des Wiener." (p.35)



Il parle aussi du père de Gabriela, de sa double vie, de son autre femme et son autre fille. Puis l'autrice parle d'elle, de son foyer, du racisme dont elle souffre en Espagne, sa peau marron et son type péruvien ne passent pas auprès de tous les Espagnols. C'est usant et déprimant de se sentir rejetée uniquement sur ce genre de critères, il faut une grande force pour surmonter et même faire preuve d'humour : "Il [un ami péruvien] m'a dit, Gabriela, tu t'es rendu compte qu'on leur fait peur ? Et moi, qui n'avais pas fait attention, qui ne connaissais que le regard de mépris de la blanchité de mon pays, j'ai regardé pour la première fois les visages des hommes et des femmes espagnols qui étaient autour de moi, et j'ai dû reconnaître qu'il avait raison. J'ai vu qu'ils serraient discrètement leurs sacs. Que le bruit que nous faisions les dérangeait un peu. Et cette simple découverte m'a remplie d'un petit pouvoir inattendu." (p.127)



Il y a de très belles pages sur l'amour -fût-il poly-, sur le deuil, la famille. Des questions ou réflexions importantes et sur ces sujets et sur le racisme, le sexe, le désir, l'héritage colonial. Bien que cette histoire se passe dans un autre pays colonisateur, il a de fortes similitudes avec la France, son passé, ses colonies, le racisme qui ose désormais se montrer, qui a pignon sur chaîne de télé et journaux, l'homophobie, la peur de l’autre, de la différence... Gabriela Wiener écrit un roman qui remue, qui pose des questions surtout celle sur notre humanité, notre humanisme et notre envie de vivre ensemble et de découvrir autrui.
Lien : http://www.lyvres.fr/
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Portrait huaco

[L'autrice] questionne au passage avec une grande intelligence l’hérédité, l’amour, sa relation à son père et son identité de jeune Péruvienne vivant en Espagne.
Lien : https://www.lesinrocks.com/l..
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Portrait huaco

« Mon visage ressemble beaucoup à celui d'un portrait "huaco". Chaque fois qu'on me le dit, j'imagine Charles en train d'agiter son pinceau sur mes paupières pour en ôter la poussière et estimer la date à laquelle j'ai été modelée. On appelle "huaco" toute pièce de céramique préhispanique modelée à la main, de formes et de styles différents, peinte avec délicatesse. Cela peut être un objet de décoration, ça peut faire partie d'un rituel ou tenir lieu d'offrande dans un sépulcre. On les appelle "huacos" car ils ont été trouvés dans les temples sacrés appelés "huacas", enterrés à côté des gens importants. Ils peuvent représenter des animaux, des armes ou des aliments. Mais parmi tous les "huacos", le portrait "huaco" est le plus intéressant. Un portrait "huaco" est comme la photo d'identité préhispanique. L'image d'un visage indigène tellement réaliste que nous pencher pour en observer un revient, pour beaucoup d'entre nous, à nous regarder dans un miroir brisé par les siècles.

Mes céramiques préférées sont les mochicas, ce sont les plus sophistiquées, capables de développer avec des sculptures un récit telle une BD en trois dimensions. Ce sont les séries télé de l'Antiquité. Les Mochicas sculptaient tout particulièrement des dieux égorgeurs et les "huacos" érotiques c'était leur cinéma porno, le kamasutra andin. Baiser et couper des têtes, il n'y a pas grand chose d'autre dans la vie. Mon grand-père Félix, le père de ma mère, est né dans la région dont les Mochicas sont originaires, au nord de la côte péruvienne. La première fois que j'ai montré à ma petite amie espagnole la série des « huacos » érotiques, elle a cru me reconnaître dans toutes les femmes en terre cuite qui avalent des pénis plus grands que leurs corps, jouissent à quatre pattes et mettent au monde des enfants.

Dans mes veines coule un mélange pervers de pilleur « huaquero » et de « huaco », voilà ce qui me scinde en deux. » (p.58)

Un roman puzzle, à l’image de ces pièces, statuettes, bustes ou têtes, de céramique craquelée ou recollée, dont il est question dans cette citation, ou, plus sûrement, une confession, la tentative, pour une auteure qui porte le même nom que la narratrice du récit, de recomposer sa propre histoire, à partir de ce qu’elle découvre du passé de son ancêtre, pour mieux comprendre ce qu’elle vit, entre désir et fureur, dans le présent ? Dans tous les cas, Gabriela Wiener nous offre, avec ce texte plein de passion, l’une des œuvres les plus originales de cette rentrée, conjuguant héritage familial et héritage colonial, faisant résonner dans une chambre d’écho paradoxal la recherche des traces de Charles Wiener ou l’infidélité de son propre père et l’évocation des troubles qui agitent sa vie de polyamoureuse, partageant ses désirs dans un ménage à trois avec un homme et une femme, dans un équilibre rendu fragile par la jalousie.

Tout commence au Musée du Quai Branly, quand Gabriela Wiener découvre, dans la salle qui porte le nom de son ancêtre, Charles Wiener, des statuettes qui lui ressemblent, et puis plus loin, une vitrine annonçant une « Momie d’enfant », mais qui s’avère vide, comme si s’y révélait une disparition métaphorique, l’image même du vol opéré par les archéologues, ces hommes qui subtilisent le passé des peuples pour nourrir leurs collections et leur propre gloire. Cette visite du musée inaugure, dès lors, une enquête sur la personnalité de Charles Wiener, juif autrichien exilé en France, devenu explorateur en Bolivie et au Pérou, qui se vanta d’avoir été à deux doigts de découvrir le Machu Picchu, et qui rentra en France pour y exposer son énorme récolte de pièces archéologiques au cours de l’Exposition universelle de 1878, également connue pour avoir été l’une des premières manifestations à proposer un zoo humain. L’aïeul archéologue, pilleur d’un riche patrimoine préhispanique, mais aussi prétentieux et hautain, apparaît, à ce titre, exemplaire d’une époque où l’Europe traitait sans vergogne les populations de ses colonies avec un mépris et un racisme dont les traces demeurent encore si puissantes aujourd’hui, bien visibles, en particulier, dans le regard que portent toujours, ainsi que l’auteure en témoigne, les espagnols sur les « sudacas », ces femmes sud-américaines immigrées dans leur pays, à l’instar de l’auteure. Un Charles Wiener qui devait laisser également, fruit d’un amour passager, un enfant bâtard au Pérou, ouvrant dans ce pays une lignée qui porterait son nom et dont Gabriela est une des descendantes.

Rappelée au Pérou par la mort de son père, la narratrice y connaît une brève aventure avec un homme, une passade qu’elle vivra ensuite comme une trahison à l’égard de cette relation à trois, jusque-là si harmonieuse, qui la lie à son mari indien et à sa compagne européenne, nouant dans le texte l’interrogation sur son sang mêlé de « huaquero » et de « huaco », la conscience de cette identité déchirée, et l’aveu de ses angoisses, de sa peur de la solitude, lorsqu’elle n’arrive plus à partager de relations sexuelles harmonieuses avec aucun de ses deux partenaires. C’est là, la grande force de ce texte, que de proposer cette intuition que la fragilité du polyamour, l’hostilité sociale à l’égard des liens bisexuels pourraient bien se renforcer de cette peur du métissage et du retour des fantasmes coloniaux dans notre réalité. Servi par une écriture pleine d’audace et de fougue, qui s’abstient, pour notre plaisir, de toute pudeur, le récit de Gabriela Wiener stimule ainsi notre réflexion, comme une contribution intime et littéraire au questionnement sur l’intersectionnalité. Le premier roman d’une journaliste, aussi précieux qu’une statuette inca… Et si un jour le nom de Gabriela Wiener, écrivaine talentueuse, surpassait dans la mémoire des hommes celui de l’archéologue Charles Wiener ?

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Portrait huaco

Gabriela Wiener [...] se livre à une introspection mémorielle et à une déconstruction familiale liée au pillage de l’identité précolombienne par les colons espagnols.
Lien : https://www.marianne.net/cul..
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Portrait huaco

Gabriela Wiener profite la mort de son père pour faire un récit où se mêlent l'histoire de son aïeul Charles Wiener, explorateur et voleur de reliques péruviennes, la bigamie de son père, et son histoire polyamoureuse avec Jaime et Roci.

Réflexion passionnante sur le colonialisme, postcolonialisme, fouilles archéologiques, spoliation et racisme d'un côté, et la déception avec soi-même en se rendant compte que ses principes sur le polyamour et les relations sont fragiles et capricieuses.
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Portrait huaco

“Portrait huaco” est le premier roman de Gabriela Wiener (Lima, 1975). La journaliste et écrivaine y aborde des sujets sensibles comme la colonisation ou la restitution des œuvres d'art.
Lien : https://www.lalibre.be/cultu..
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Portrait huaco

Dans le très brillant Tu quitteras la terre, l'auteur péruvien Renato Cisneros enquêtait sur la généalogie de sa famille, y dénichant quelques secrets bien cachés. De la même nationalité, Gabriela Wiener s'interroge à son tour, dans Portrait huaco, sur son présumé ancêtre, explorateur européen dont le passage au Pérou s'est soldé par des exhumations d'objets Incas (pillages serait un terme plus approprié) qui composent désormais la collection Wiener au musée parisien du quai Branly, mais aussi par une descendance. Et voici Gabriela Wiener, écrivaine et journaliste installée en Espagne, qui remonte le temps et essaie d'en savoir plus sur cet aïeul revendiqué par sa famille même si un doute demeure. Mais cette quête n'est pas le seul sujet de Portrait huaco, plus proche d'une autofiction que d'un roman, car l'autrice y évoque sa vie polyamoureuse, plus ou moins bancale, et aussi la figure de son père, qui menait une double existence. L'intérêt du livre est assez inégal, parfaitement passionnant quand il évoque les zoos humains des expositions universelles ou encore ce racisme scientifique qui a longtemps perduré en Europe. Un peu moins captivantes sont les pages les plus intimes, souvent crues, dans lesquelles le lecteur devient un voyeur malgré lui, même si, dans un autre registre, la recherche d'identité de la narratrice parlera à chacun. Un peu décousu, Portrait huaco confirme cependant, à sa manière, la puissance et l'absence de complexes des romancières latino-américaines actuelles.



Un grand merci à NetGalley et aux excellentes éditions Métailié.




Lien : https://cinephile-m-etait-co..
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Portrait huaco



J’entame cette fois ma rentrée des Editions Métailié avec le premier des quatre titres prévus à leur programme, comme chaque année, qui l’œuvre d’une autrice péruvienne : Gabriela Wiener. Elle écrit depuis l’Espagne où elle habite désormais et trace ici un roman autobiographique ou autofictionnel, on ne sait pas vraiment. Enfin, si l’on se penche sur sa wiki biographie, et lisant les quelques lignes dévouées à sa vie privée, on dira que ce roman penche davantage sur le récit autobiographique. Néanmoins, par principe de précaution, je pars du fait qu’il s’agit d’une (auto?) fiction, a minima.





Son nom de famille, Wiener, qui est son nom de jeune fille, n’a rien de péruvien et si l’on consulte la page Wikimedia de toutes les célébrités portant le même nom, on s’apercevra qu’ils sont toute une foultitude de Wiener plus ou moins connu. Parmi eux, Charles Wiener, non pas le graveur belge, mais son homonyme, l’explorateur d’origine autrichienne naturalisé français. Tout part de cette homonymie entre cet explorateur et l’autrice, unis par un lointain lien de parenté, dont elle n’est pas forcément fière, ce qui relève de l’euphémisme. Ce n’est rien de le dire puisque dès ce chapitre liminaire, en visite au musée du Quai Branly, devant les antiquités rapinées par son aïeul, l’autrice attaque en force en révélant justement sa qualité de vulgaire pilleur d’antiquités incas. En remettant en cause la légitimité de cet homme, juif et viennois d’origine, largement salué par ses paires à l’époque, nous n’allons pas simuler la surprise quant à ce dernier point, Gabriela Wiener va entreprendre des fouilles archéologiques sur ses propres racines, elle fille de Chola, à la peau si brune.



Roman des origines, roman de l’identité, en se penchant sur la vie de cet ancêtre dont elle tient son nom, elle considère d’abord d’un point de vue historique, les interrogations sur ses qualités ethniques au sein du monde : femme, autrice, péruvienne, métisse, indigène, mais aussi hispanophone, bisexuelle, fille, mère, sœur, héritière, compagne, sud-américaine exilée dans une Espagne raciste. Sa première préoccupation, c’est d’abord de symboliquement restituer au Pérou tous les objets subtilisés par notre explorateur d’un autre temps, remettre les choses à leur place même si les musées français sont d’un autre avis. Puis de reconstituer sa filiation, et son identité actuelle.



Le bien-fondé de Charler Wiener, dans sa posture d’explorateur est dès le début remise en cause, sa place en tant qu’aïeul sera discutée pendant le long du roman, et passer au second plan. Il y a la dimension personnelle de Gabriela Wiener, et la dimension générale de cette féministe racisée, qui évoque sa condition de femme maltraitée par une société blanche et patriarcale, tout ce que représente Charles Wiener, voleur de patrimoine, et pire, voleur d’enfant. Un homme qui exerce une forme de violence, parfait représentant de cette violence coloniale encore perpétuée en Espagne comme en France, une violence patriarcale d’une société aux schémas simplistes et préremplis. On observe lentement que se libérer de cette ascendance dérangeante, l’homme a poursuivi son rôle du parfait, petit colonisateur en abandonnant femme et enfant au pays, est le but même de ce roman : un travail d’émancipation qu’elle a commencé avant d’arriver en Espagne, qu’elle a poursuivi sur ce ring de boxe, là où les Américains latins restent encore pris à partie.



L’écriture de Gabriela Wiener est fantastiquement éloquente et pittoresque, elle est celle d’une femme dont l’écriture est sa forme d’activisme, pour faire éclater les cadres, elle vit ainsi en trouple (couple +1), dans le pays colonisateur devenu pays d’adoption où sa couleur de peau la fait passer pour les boniches de service, celles dont les familles de moyenne catégorie employaient au noir. Son pays d’origine n’est pas en reste, la violence est celle que l’on subit, le vol, racisme. Comme elle l’a dit de sa propre mère, fille d’Indienne, Gabriela Wiener construit son propre mythe personnel, d’abord à travers son identité familiale, fille d’un couple mixte, puis à travers son identité personnelle, femme métissée au Pérou, femme noire en Espagne, artiste, bisexuelle, refusant de choisir entre deux amours, une femme ou un homme. C’est ce portrait huerta, de cette femme qui sait aussi user d’ironie, dépassant le racisme pur et dur, le renvoyant dans sa propre médiocrité, celle du nazisme. Si légalement les formes de racisme sont punissables, il n’empêche que toutes les lois du monde ne sauraient y mettre un terme ou un frein, l’auteure use aussi de son pouvoir – rabaissement, humiliation moquerie – pour le traiter à sa façon, le niveler à sa vulgarité, son inconsistance.



Avec le temps, je suis de plus en plus réceptive à ces ouvrages qui ont une dimension féministe, il faut dire que j’aime assez comme Gabriela Wiener tourne son homonyme en dérision, démontant minutieusement sa pseudo postérité, lui qui a œuvré toute sa vie pour marquer l’histoire de sa personne, et finalement la mythologie ou mythomanie de ce parait parangon du sauveur blanc. La meilleure phrase qui le caractérise c’est encore celle-ci : « son plus grand mérite est de ne pas avoir trouvé Machu Pichu, mais d’avoir été à deux doigts de le faire« . C’est un récit qui opère une remise en place salutaire de mensonges qui ont été ténus lieu de vérité historiques, un peu comme ces légendes urbaines dont on parle comme des vérités avérées.
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Portrait huaco

"Nous ne cessons jamais de chercher ce que nous avons été pour commencer à être ce dont nous rêvons."

Cette phrase extraite d'un texte que Gabriela lit à sa troisième séance de décolonisation du désir résume, me semble-t-il, le propos principal d'une longue tirade existentielle, fiévreuse, crue, qui m'a donné le tournis.

L'auteure saute allégrement de l'Espagne au Pérou, du 19ème siècle à aujourd'hui, du polyamour assumé au féminisme décomplexé, du racisme au questionnement sur la lignée . Je fus souvent perdu, m'échinant à tirer un fil fuyant dans ces élucubrations hétéroclites.

Je ne me suis senti à l'aise avec cette écriture volcanique que dans la critique d'un suprémacisme abject, qui parque des êtres curieux dans des zoos humains, champ d'éclosion d'un racisme scientifique.

Ce livre scintillant n'était pas pour moi; je laisse à d'autres, moins pudibonds notamment, le soin de lui tresser des lauriers qu'il mérite. Métailié, spécialiste de la littérature latino-américaine publie un premier roman absolument singulier. L'enthousiasme de l'éditeur est manifeste, au point d'assurer un large service de presse à l'attention des babelpotes, comme en témoigne les critiques postées avant moi.
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Portrait huaco

Intéressant le point de vue de Gabriela Wiener, elle a le courage de mettre en lumière à la fois le passé de son ancêtre, de son histoire. Il est plus que nécessaire d’admettre les erreurs de jugement. Ils sont le reflet d’un courant de pensée qu’il faut absolument remettre en question.


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Portrait huaco

Je ne serai pas allée vers ce livre s’il ne faisait pas parti du Prix du roman Ovillois.

Ce livre va nous faire voyager du Pérou à l’Espagne en passant par la France.

Gabriela Wiener, vit en Espagne avec un journaliste péruvien et une espagnole. Elle va devoir retourner au Pérou, son père étant mourant. Malheureusement, elle arrivera trop tard. Celui-ci lui a laissé un livre que son arrière arrière grand-père Charles Wiener a écrit.

Charles Wiener est parti exploré la civilisation inca, où il fera des recherches archéologiques et ramènera en Europe pleins d’objets dont certains seront exposés au Musée du Quai Branly à Paris.

Est-elle une descendante de Charles Wiener ?

Gabriela Wiener partira en quête de ses origines. Quel secret familial va-t-elle découvrir ?

Dans ce livre, l’autrice nous parlera de sa vie personnelle, de polyamour, de secret de famille, de violence, de racisme et de recherche d’identité.

Une lecture agréable.

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Portrait huaco

C’est avec un ton très direct que Gabriela Wiener nous livre ses réflexions et sentiments sur son présent. Cette proximité permet très vite de rentrer dans son intimité et dans les doutes qui l’habitent.



Elle interroge progressivement tous les cercles relationnels de sa réalité. Il y a d’abord la famille dont la porte d’entrée est la visite au Musee du quai Branly et cet « illustre » ancêtre. Le regard actuel sur un colonisateur est loin des éloges et elle propose une critique plus fouillée sur cet homme et ses attentes. Arrive la question de l’autre, cet étranger qui veut être accepté dans ce qu’il considère être la société de référence. Ce rapport de forces est le fil rouge du récit qu’il s’agisse de sa relation avec son propre père qui a entretenu une vie cachée ou de son propre trouple.



Après la famille, elle parle de ses histoires d’amour, de sa sexualité, de ses choix de vie, de son image professionnelle. On se rapproche de son intimité et toutes les dimensions évoquées sont liées. Comme l’indique le titre, ce récit est un portrait d’une femme d’aujourd’hui qui a un pied entre plusieurs mondes. Elle est liée au nouveau continent et à l’ancien, à un homme et à une femme. Le livre n’est jamais complaisant et est très pertinent sur ces nœuds, parfois entourés de fantasmes et de mystères, qui nous composent : la sexualité, le désir, la création de soi, la famille.
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Portrait huaco

Dans Portrait huaco, Gabriela Wiener, autrice et journaliste péruvienne installée en Espagne, revient sur son passé familial. Et quel passé ! : un illustre arrière-arrière grand père pilleur d'objets incas ayant eu (peut-être...) une descendance avec une péruvienne, un père aimant mais ayant mené une double vie pendant des années.



L'autrice évoque la difficulté d'être une femme métisse coincée entre deux cultures, les ravages du racisme et du colonialisme comme les musées européens plein à craquer d'œuvres volées aux colonisé.e.s !! Elle s'interroge également sur les difficultés qu'elle traverse dans sa relation polyamoureuse et son rapport à la sexualité.



Le passé et le présent s'entremêlent dans cette autofiction foisonnante, pas toujours simple à suivre, mais qui a le mérite de nous faire réfléchir sur la manière dont nous sommes coincé.e.s par des schémas racistes et patriarcaux toujours d'actualité qui nous limitent dans ce qu'il y a de plus intime en nous.

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Portrait huaco

" Un arrière - arrière grand-père est à peine un vestige dans la vie de quelqu'un, mais pas lorsque cet ancêtre a importé en Europe rien moins que quatre mille pièce précolombiennes " Gabriela, journaliste, écrivaine est a Paris en voyage professionnel et à cette occasion,elle découvre la collection de Charles Wiener au musée du quai Branly.



Ce dernier, cet ancêtre était un huaquero de renommée internationale du dix neuvième siècle.



" J’appelle huaqueros, sans euphémisme aucun, les pilleurs de sites archéologiques qui déterrent des biens culturels et artistiques et s’en servent pour faire du trafic, encore aujourd’hui. Il peut s’agir de grands intellectuels ou de mercenaires, ils peuvent emporter des trésors millénaires dans des musées d’Europe ou les installer dans les salons de leurs maisons coloniales à Lima. Le mot huaquero vient du quechua huaca ou wak’a, c’est ainsi qu’on désigne dans les Andes les lieux sacrés qui aujourd’hui, pour la plupart, sont devenus des sites archéologiques ou de simples ruines."



A la mort de son père, Gabriela lit le livre qu'il lui a laissé, écrit par Charles Wiener. ET donc 150ans plus tard, elle se demande qui était cet homme à l'origine professeur d'allemand discret qui c'est pris pour Indiana Jones ? Celui qui s'est d'abord nommé Karl Wiener, juif autrichien ?



Tout au long de ce roman, sous une plume brut et crue nous découvrons autant cet huaquero que cette femme, Gabriela qui s'aime peu et se noie dans le sexe car c'est pour elle, sa "manière de résister, son pouvoir", ce qui d'une certaine façon remplace le manque.

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Portrait huaco

Gabriela Wiener, désormais madrilène, mère de famille, polyamoureuse mariée à un journaliste péruvien venu avec elle en Espagne, et à une espagnole rencontrée par la suite, doit rentrer au pays pour la mort de son père. Elle arrivera trop tard pour assister à ses derniers instants, mais découvrira qu'il lui a laissé un livre, Pérou et Bolivie, récit de voyage, rédigé par son arrière-arrière grand-père, Charles Wiener, venu "explorer" la civilisation Inca, étant à deux doigts de découvrir, selon ses dires, le Machu Picchu, mettant enceinte une jeune péruvienne avant de s'en retourner en Europe, avec moult objets, et bien plus.



Elle le connaît bien, cet ancêtre, dont elle a justement vu certaines des œuvres qu'il a ramenées d'Amérique du Sud au quai Branly, dans un espace qui lui est dédié. Puis la mort de son père, et la lecture de cet ouvrage dans son ensemble, vont la perturber au plus haut point, la mener à de nombreux questionnements sur elle-même : ses origines, ses amours, sa vie de "chola", au Pérou, puis plus encore en Espagne.



En un bref mais intense récit autobiographique, qui entremêle de nombreuses thématiques - racisme, féminisme, genre, culture, écriture... -, l'autrice journaliste montre brillamment toute la difficulté d'être en partie descendante des colons espagnols, toute l'ambiguïté que cela sous-entend pour pouvoir accepter une double origine problématique, entre bourreau et victime, symbolisée encore aujourd'hui par l'appropriation européenne de nombreuses oeuvres de la civilisation précolombienne.



Elle dessine de fait, tout aussi brillamment, en dressant son propre portrait au fil du récit, un portrait huaco, figurine inca représentant de manière assez réaliste quelqu'un, notamment son visage, dont elle se sent, au bout du compte, de plus en plus proche, pas seulement physiquement ; et c'est aussi, plus généralement, le portrait de nombre de descendants dans la situation de Gabriela Wiener, qui tentent de se réapproprier leurs origines en les questionnant.
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