Citations de Georges Vigarello (119)
Désormais, c'est l'anatomie qui impose ses formes à l'habit et non l'inverse.
Au XVIIIè siècle, les tentatives de jurisprudence différencient les violences sexuelles commises par les valets sur leurs maîtresses de celles commises par les maîtres sur leurs servantes.
La visibilité du sport, son simplisme sans doute, sa volonté obscure de constituer un monde séparé et "préservé" en font aussi un des lieux d'une hypocrisie rampante, sinon d'une évidente vulnérabilité.
Plus que d'autres pratiques, le sport révèle nos sociétés.
(Georges Vigarello ).
La propreté se dit de la forme autant que de la "blancheur". Elle qualifie aussi bien la silhouette que la matière. Elle confirme ce double critère que seul le temps dénouera : assimilation de la netteté au visible et désignation par là-même d'une distinction.
Deuxième partie - Le linge qui lave
Dans " La petite Roque", en 1887, Maupassant décrit le viol et le meurtre d'une enfant de 13 ans par le maire Renardet, "un gros et grand homme, rouge et lourd, fort comme un boeuf, et très aimé dans le pays bien que violent à l'excès".
Commence alors un recensement de ces emplacements et de leurs "brouillards purulents", auquel s'ajoute la liaison insistante entre la puanteur et la malpropreté, celle des espaces et des corps. Mais pas des espaces et des corps nobles ou bourgeois : les lieux soupçonnés sont d'abord ceux où s'accumulent les pauvres, et les corps sont ceux que le linge ne protège pas toujours. C'est le peuple qui est d'abord concerné. De ces recensements et des normes qui les sous-tendent naissent insensiblement après 1780 les prémices d'une "hygiène publique", amorçant par moments ce que le XIXème siècle va développer. Évoquer la propreté, c'est opposer aux "négligences" populaires, aux puanteurs urbaines, aux promiscuités incontrôlées. Da,s les années 1780, la critique n'est plus cantonnée à l'artifice des aristocrates : de sont bientôt les pratiques du peuple qui sont réprouvées comme elles ne l'avaient jamais été.
Troisième partie - De l'eau qui pénètre le corps à celle qui renforce
Les situations dites de danger sur mineurs, relevés par les services départementaux pour les risques de violence, d'abus sexuel, ou de négligences lourdes, passent de 35.000 en 1992 à 65.000 en 1995.
D’abord, on considère que la virilité ne
répond plus à ce qui peut être attendu d’un
comportement masculin dans un fonctionnement efficace et souple de la société.
La domination au sens large est contestée et l’univers féminin, en particulier, ne
peut plus accepter l’asymétrie. Ensuite, si
la virilité existe encore, elle est au moins
partagée : la femme aussi peut être virile.
Une phrase de la défense ( 1 ) vient bouleverser les atternoiements :
"Lorsqu'une femme dort paisiblement sous une tente et reçoit les agresseurs à coups de marteau ( 2 ), qui encore peut parler de consentement ?"
NDL : (1) : procès d'Aix, sur les violeurs de deux femmes touristes belges en camping dans le sud de la France, en 1974. ( Procès 1974-1978)
(2) il s'agit du marteau pour enfoncer les piquets de tente.
Le violeur devient, pour la première fois, un terrain d'études, un exemple permettant de mieux comprendre le viol.
La figure de Jacques Lantier, par exemple, avec sa longue hérédité de misère et d'alcool, ses "mâchoires trop fortes", ses cheveux trop drus, ses indices de désordre cachés sous "un visage rond et régulier", traversé par "l'instinct du rapt", comme par "la soif héréditaire du meurtre", est transformé en "bête humaine" par un Zola lecteur du médecin Cesare Lombroso.
En 1887, Cesare Lombroso donne, pour la première fois aux auteurs de viol, un nom : "les violateurs".
( pages 215-216)
L'histoire n'est plus à faire de cette anthropologie rapidement triomphante, avant d'être tout aussi rapidement critiquée.
(Page 217 )
NDL : cependant, la presse et la médecine ont eu le mérite de faire prendre conscience à la population de ce problème de société.
La propreté n'est donc plus la même une fois qu'est évoqué l'univers microbien. Le thème des défenses s'est brusquement accentué. Le regard s'est déplacé. Des objets se sont constitués et des causalités jusque-là inédites se sont imposées. Corpuscule invisible, le microbe a bouleversé les repères, au-delà de la crasse elle-même. Et ce bouleversement a d'autant plus d'importance qu'il est "efficace" : les infections post-opératoires diminuent largement lorsqu'à la fin du XIXème siècle les chirurgiens officient avec des gants stériles et non plus avec leurs mains nues. De même que diminuent statistiquement les cas de diphtérie lorsque sont mieux compris les modes de communication par contact qui entretiennent le mal. Des preuves s'affichent. Une ostentation même affleure : "Les maladies épidémiques sont la conséquence de l'ignorance et la punition de l'incurie des peuples et des individus." L'objectivation du microbe renforce le discours positiviste de la fin du XIXème siècle : la propreté n'est-elle pas, pour la première fois, l'objet d'un véritable travail expérimental ? Vérifications, calculs, évaluations statistiques de la présence microbienne.
Le thème, pourtant, ne saurait se limiter au seul fonctionnement de la preuve. Cette propreté savante comporte elle-même ses versants imaginaires.
Quatrième partie - L'eau qui protège
Révélatrice de ce changement est la réprobation unanime manifestée par les voisins contre l'accommodement financier accepté par la femme d'un comptable varois en 1871 :
"Nous lui avons dit qu'il n'était pas honorable pour elle de préférer de l'argent à l'honneur de sa fille."
Dans l'Ancien Régime, le viol en cas de guerre est cet acte systématique accompagnant jusqu'au symbole de la possession d'un territoire.
"J'affirme que les femmes sont victimes d'actes inqualifiables. Le fait nouveau est qu'elles ne l'acceptent plus."
(Cécile Goldet, sénatrice, Journal Officiel ; 1980 )
La jurisprudence des premières décennies du XIXè siècle révèle tout simplement l'assurance que la disproportion entre les organes sexuels d'un adulte et ceux d'un enfant rend impossible l'intromission du membre viril : la conviction, autrement dit, que le viol sur un enfant n'existe pas.
NDL : mais c'est horrible, c'est un recul de la justice par rapport aux siècles précédents !
C'est tout de même Zidane qui a inventé la fameuse roulette, pas un savant sur son ordinateur !
( Vigarello.)
NDL : "Pas évident de trouver l'inventeur de ce geste, certains en attribuent l'invention à Maradona quand d'autres évoquent Pelé. Une chose est sure, celui qui a remis la roulette sur le devant de la scène européenne s'appelle Zinedine Zidane." source : footendirect.com
Encore faut-il, pour engager cette même histoire, faire taire nos propres points de repère : reconnaître une propreté dans des conduites aujourd'hui oubliées. La toilette "sèche" du courtisan par exemple, frottant son visage avec un linge blanc au lieu de le laver, répond à une norme de netteté tout à fait "raisonnée" au XVIIème siècle. Elle est réfléchie, légitimée. Alors qu'elle n'aurait guère de sens aujourd'hui : sensations et explications ont changé. C'est cette sensibilité perdue qui est à retrouver.
Introduction
Jeanne Haubillart, en 1698, est "sollicitée et violentée" par son père. Les preuves de la violence sont attestées au procès, les attendus de la sentence les confirment : la fille a été forcée "à commettre l'inceste". Le père est condamné à 9 ans de galères, mais Jeanne est également condamnée soumise à un bannissement de 5 ans, sans que la raison de cette peine soit clairement donnée.
Audibert, chirurgien, conduit la victime à l'Hôtel-Dieu avant de diriger les parents devant un commissaire de police en les accompagnant. Il le fait un jour de 1765 après l'examen de Jeanne Doré, une enfant de 3 ans violée et fouettée par un "gagne deniers" dans une cour du quartier.
Un tambour de Chatellerault, accusé en 1827 "d'attentat à la pudeur commis avec violence sur plusieurs enfants", est acquitté parce que ses actes ont été déclarés effectués "sans violence". La cour d'assises de Vienne a nommé l'attentat, les jurés l'ont reconnu, leur réponse négative sur sa violence, en revanche, a innocenté l'agresseur.
NDL : pauvres gamin(e)s !