Citations de Guy Lévis Mano (26)
Ne pense pas que je t'aime
parce que je regarde ton visage ;
beaucoup vont à la foire
pour voir, et n'achètent rien.
Dans la solitude des champs
je m'en allai pleurer ma peine,
et je pleurai si longuement
que fleurirent toutes les herbes.
Pour que je puisse t'oublier
il faudrait qu'il y ait
diligences par les mers
et barques sur les chemins.
J'ai une douleur, je ne sais où,
née de je ne sais quoi ;
j'en guérirai je ne sais quand,
si me soigne je ne sais qui.
Peine et ce qui n'est peine,
tout est peine pour moi,
hier de ne pas te voir,
aujourd'hui de t'avoir vue.
Hier tu m'as dit aujourd'hui,
aujourd'hui tu m'as dit demain,
et demain tu me diras
que l'envie t'a passé.
ils sont inconscients / de Notre Poésie / et nous ajoutent / pour fabriquer la leur
Les étoiles du ciel
n'y sont pas au complet,
car ma belle en son visage
garde les deux principales.
J’ai mal au monde entier
J’ai mal au monde entier
qui oublie l’exemple des moissons
et la liesse des guirlandes…
Jusqu'à mes soupirs
qui sont plus heureux que moi;
ils s'en vont et je demeure;
ils s'en vont et moi pas.
Les caractères…
Les caractères foulaient les vélins épais
qui freinaient tels des murs de prison
leur poussée vers des ciels sans encre
Coalition des a seigneuriaux
e à tout faire
w rares
qui en bagarres incertaines suscitaient
la débandade des mots
Et le cri de révolte :
« Ils sont inconscients de notre poésie
et nous ajoutent pour fabriquer la leur »
Volant de bouche en bouche
un chant atteignit ma maison,
et du miel qu'il portait
laissa une goute en mon âme.
Si je savais quelles pierres
mon amour foule dans la rue,
je les mettrais à l'envers
pour que personne ne les foule.
On dit beaucoup que les femmes sont volages en amour , mais on ne dit pas assez combien elles ont de constance en amitié .
Le jour où tu naquis
un morceau de ciel tomba ;
jusqu'à ce que tu meures
le trou y restera.
El día que tú naciste
cayó un pedazo de cielo ;
hasta que tú no te mueras
no se tapa el agujero.
JE VOUS PARLE DES MURS
Si tu parles aux murs, fais attention, je te préviens fais attention. Les murs sont comme ces plantes bizarres qui semblent fermées et quiètes. Mais ce n’est pas vrai. Un moment ou l’autre, elles s’ouvrent subrepticement — c’est toujours au contact d’une proie ingénue — et elles se referment vous ayant happé irrémédiablement, et assimilé. Et vous êtes encore là à les regarder comme si rien ne s’était passé. Je vous en parle — des murs — et vous mets en garde, parce que j’en sais beaucoup sur leur comportement, moi qui suis ennemi déclaré des murs, et qui leur tiens des discours offensants, leur faisant entendre qu’ils ne sont pas de la race des portes et des fenêtres qui ont deux richesses : le dedans et le dehors. Les murs m’ont inoculé l’obsession du dehors.
Un jour Dieu voudra peu-être
que Pâques tombe un vendredi
et la lune sur mon toit,
et moi dans le lit où tu dors.
Cette guitare que je touche
a une bouche et sait parler ;
mais lui manquent les yeux
pour m’aider à pleurer.
Le livre de l'expérience
ne sert de rien à l'homme;
à la fin est sa sentence
et nul n'arrive à la fin !
PEUPLER LA PRISON
Il était le juge. Les cinq geôliers amenèrent le prisonnier.
Le juge regarda les yeux affamés du prisonnier.
Il y vit des fleuves, des prairies, des coteaux, quelques
fleurs, et aussi des oiseaux qui les parsemaient. Puis il
regarda les yeux gris des geôliers. Il n’y vit que des judas,
des serrures séparées de leurs clefs, et des murailles. Le
juge parla : Que le prisonnier s’en aille récupérer son
fleuve, sa plaine et ses oiseaux. Il suffit de geôliers
pour peupler la prison.