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Critiques de Hervé Commère (684)
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Ce qu'il nous faut, c'est un mort

Pfff, encore un auteur à suivre. Il est pénible ce Hervé, il aurait pu rester dans l'ombre, tranquille à écrire juste à sa cousine et ses potes. Mais non, sous prétexte que m'sieur Commère a la narration facile et juste, le voilà à nous narguer avec son roman social. Il nous jette à la tronche toute l'étendue de son talent le gars. Sans gêne quoi.



Et que je m'inspire de l'actualité, que je te la broie et te la malaxe pour te fourrer le nez dans la réalite de ta France profonde. Ni vu ni connu, il t'embarque dans son bled paumé de Normandie. Et toi lecteur hypnotisé, tu commences à faire connaissance avec les Vrainvillois, à faire même partie du village. Tu la vois bien l'usine Cybelle qui fait vivre tout ce petit monde depuis des décennies. Puis tu t'attaches, forcément, ça ressemble à ce que tu connais. Entre ce que tu entends aux infos (et si la télé le dit alors...) mais surtout ce que tu côtoies, tu te dis qu'il a vu juste Auguste (Madame Commère-mère a hésité avant d'opter pour Hervé).



On remonte le temps, on suit quelques parcours. Arrivent alors les coups du sort pris pleine face. Accident, viol, rencontres plus ou moins heureuses. Hasard ou destin qui sait, mais la route tracée bien droite à la naissance se fend alors de moult virages à 180 degrés.

Et le Commère, l'air de rien, il te décortique ça tel le légiste penché sur son cadavre en décomposition. Il te laisse respirer les relents de ce XXIème siècle où précarité, délocalisation, racisme, violence, détresse et défiance cohabitent. Vrainville tremble, Vrainville combat. Le village s'agite. Le village explose.



Mais il ne s'arrête pas là le bougre! Il est capable de tout je vous dis. Capable de passer du plus sordide au plus humain, avec une facilité déconcertante. C'est le Freddy Mercury du roman, il te change de registre en loucedé et t'as rien vu venir. Pire. Toi, pauvre pomme, tu crois que tu commences à cerner ses personnages, à détecter les pourris, les sympas, les paumés, les arrivistes. Et t'as le Commère qui te retourne le ciboulot et te montre que t'as rien pigé en fait. C'est que la nature humaine est autrement plus complexe que la seule apparence. Et tu sors de ce Vrainville k.o d'avoir suivi ce chassé-croisé de profils si ordinaires et déconcertants à la fois.

Magistral puzzle où Hervé Commère s'amuse à emboîter les pièces une à une. Sans erreur. Pfff.



Donc avec ce roman, Hervé Commère finit number one de mes coups de coeur 2016. Oui rien que ça. Et ça m'énerve. Parce que je ne le connaissais pas avant cette lecture. Ce qui n'était pas plus mal vu que j'ai déjà pas mal à faire niveau lecture, voyez. Et maintenant va falloir que je jette quelques yeux sur son oeuvre. Problème : la nature peu généreuse ne m'a filé que deux zoeils. Et fourbe jusqu'au bout, elle me les fait fonctionner ensemble ces deux gros boulets oculaires. Ouais, on est d'accord : un livre pour deux yeux c'est pas juste. Et avec tous les Commère à rajouter à une pal bien trop pleine pour une vie bien trop courte (la nature m'a aussi donné un temps compté tant qu'à faire mal les choses), bin je ne te dis pas merci Auguste.



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Respirer le noir

Voici déjà le quatrième tome de cette collection délicieusement noire, développée autour de nos cinq sens et cette fois dédié à celui de l’odorat. Après « Ecouter le noir », « Regarder le noir » et « Toucher le noir », Yvan Fauth du blog littéraire EmOtionS nous invite donc à « Respirer le noir » en compagnie d’auteurs de renom, le temps de douze nouvelles qui devraient pouvoir réconcilier les plus sceptiques avec le genre.



1. R. J. Ellory – le parfum du laurier-rose

Qui de mieux que le maître du noir et grand fidèle de cette collection pour ouvrir ce bal olfactif ? R.J. Ellory invite à suivre les pas d’Anderson, un ancien policier qui sort de prison après une très longue détention pour un crime dont les souvenirs et les odeurs le poursuivent. Une histoire enveloppée d’un parfum de vengeance où l’odeur du sang se mélange régulièrement à celle du laurier-rose. Un récit parfaitement maîtrisé mêlant justice et crime !



2. Sophie Loubière – Respirer la mort

Déjà présente dans « Ecouter le noir », Sophie Loubière raconte les déboires de Willy, qui a développé un odorat hors norme suite à un accident de jeunesse. Un très bon récit qui débute la tête enfoncée dans une bouse de vache et qui développe des capacités olfactives pour le moins surprenantes au fil des pages…



3. Franck Bouysse – Je suis un poisson

Nouveau venu au sein de cette collection, Franck Bouysse se base sur une pathologie certes rare, mais bel et bien réelle pour nous conter le calvaire d’un homme atteint du Fish-Odor Syndrom. Malgré une chute assez prévisible, j’ai particulièrement apprécié la superbe plume de cet auteur qui invite à partager la solitude de cet individu souffrant d’un manque d’amour, incapable de nouer des relations sociales à cause de l’odeur nauséabonde qu’il dégage…



4. Mo Malø – Cristal qui sent

C’est sans grande surprise que Mo Malø décide de nous emmener au Groenland, région qu’il affectionne particulièrement au cœur de ses romans, pour une expédition visant à retrouver le carnet d’expédition d’un climatologue disparu depuis 90 ans. Un décor qui a le mérite de rafraîchir un peu le lecteur en cette période de canicule et un périple enneigé qui va révéler l’existence d’un cristal diffusant une odeur qui rend vite accro. Un bon récit dont la thématique se rapproche peut-être très/trop fort de la nouvelle de Sophie Loubière…



5. Dominique Maisons – Deux heures et trente minutes

Cet auteur que je découvre à l’occasion de cette nouvelle nous emmène dans les coulisses de l’Elysée, où la découverte d’un corps va mettre les sens de la sécurité nationale en alerte. Une enquête certes classique, mais parfaitement maîtrisée et un auteur dont je note le nom.



6. François-Xavier Dillard – Happy World

Ah, la voilà, la nouvelle qui va vous faire tourner les pages un peu plus vite et augmenter votre rythme cardiaque. « Happy World » est un parc d’attraction où une famille de quatre s’apprête à passer une journée de rêve…sauf qu’un étrange commando s’apprête à y perpétrer un attentat terroriste. Le bon père de famille que je suis a retenu son souffle en suivant les efforts de ce papa essayant de sauver sa famille… Une montagne russe d’émotions ! Bravo François-Xavier Dillard (« Prendre un enfant par la main ») !



7. Adeline Dieudonné – Glandy

L’autrice de l’excellent « La Vraie Vie » partage toute la misère d’Alexandre Glandy, un homme amoureux qui noie sa misère dans l’alcool. Si cette nouvelle parvient à restituer les odeurs fétides liées à la condition de cette homme désagréable buvant le peu d’argent que sa femme tente de mettre de côté, je n’ai malheureusement pas accroché à cette histoire. Probablement que l’incapacité de pouvoir m’attacher à un tel personnage n’y est pas étranger…



8. Hervé Commère – le monde d’après

Hervé Commère dresse le portrait d’une petite bourgade sur le déclin depuis que l’unique entreprise du coin a été contrainte de fermer ses portes. Si L’auteur de « Sauf » décrit avec grand brio l’amertume et les difficultés des habitants de ce bled croulant sous le chômage, le lien olfactif de cette nouvelle m’a par contre semblé bien léger. Bien aimé !



9. Vincent Hauuy – Miracle

Vincent Hauuy (lisez le « Le tricycle rouge » !) propose une nouvelle plus futuriste qui invite à plonger dans le cerveau d’un meurtrier comateux afin d’élucider un meurtre. Un récit d’anticipation qui invite le lecteur à découvrir la mémoire des odeurs afin de résoudre une enquête. Pas mal.



10. Jérôme Loubry – Les doux parfums du cimetière

Cette nouvelle de Jérôme Loubry (lisez « Les refuges » !) se déroule dans un cimetière en compagnie d’un gamin venant régulièrement se recueillir sur la tombe de sa mère. Si l’environnement sied donc parfaitement à l’ambiance noire de cette collection, le récit s’avère cependant le plus lumineux de tous. Outre ce petit garçon particulièrement attachant qui associe les autres visiteurs endeuillés à une odeur spécifique, j’ai beaucoup apprécié l’humanité qui accompagne ce petit conte tendre et poétique.



11. Chrystel Duchamp – L’amour à mort

En trois chapitres très courts, l’autrice de « Le sang des Belasko » et « Délivre-nous du mal » invite à suivre les déboires d’un homme victime d’une rupture amoureuse, qui passera du paradis à l’enfer via un passage par le purgatoire, poursuivi par l’odeur d’un bien étrange hôpital. Surprenant !



12. Barbara Abel & Karine Giebel – Petit nouveau

S’il y a un duo que l’on prend grand plaisir à retrouver au sein de cette collection qui m’aura incité à lire des nouvelles, c’est bien celui-ci ! Un récit à quatre mains inspiré d’un fait réel, qui réunit une nouvelle fois deux reines du polar, l’une française, l’autre bruxelloise. La cerise sur le gâteau, la touche finale de noirceur qui vous invite à refermer cet ouvrage la peur au ventre, presque avec l’envie de remettre cet horrible masque et à vous désinfecter les mains toutes les deux minutes, juste au cas où quelque chose de pire que le COVID viendrait menacer notre société… Brillant !



Ancré dans les problématiques de notre société actuelle grâce à plusieurs nouvelles très proches de la réalité, « Respirer le noir » propose des nouvelles certes inégales, ce qui est inhérent au genre, mais dans lesquelles je vous invite néanmoins à plonger le nez, surtout dans celles de François-Xavier Dillard et de Barbara Abel et Karine Giebel. Personnellement, je me prépare à goûter à nouveau du noir avec le cinquième et dernier volet de cette collection.



Et si vous n’avez pas encore eu votre dose de nouvelles, je vous invite vivement à lire « Chambres noires » de Karine Giebel… du très haut de gamme !
Lien : https://brusselsboy.wordpres..
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Sauf

À l'age de 6 ans, alors qu'il s'amusait loin de chez lui en colonie de vacances, Mathieu apprend, par sa tante venue tout spécialement, le décès de ses parents. Le manoir sur les hauteurs bretonnes a brûlé, il n'en reste rien. Élevé par son oncle et sa tante, le drame, aujourd'hui encore, le hante. En ce moment tout particulièrement alors qu'il tient dans ses mains un album photos, à la couverture de velours, contenant les photos de son enfance, annotées de l'écriture de sa maman. Comment expliquer l'existence de cet album alors que tout est censé avoir brûlé ? Qui est la femme venue le déposer dans son dépôt-vente ? Lui aurait-on menti ? Ou caché quelque chose ? Cet album photo va le replonger dans son passé et le confronter à la vérité, aussi inattendue et improbable soit-elle...



Ce roman est un véritable page-turner. Des rebondissements à la pelle (peut-être trop au final), de très courts chapitres (de 3 à 6 pages), une intrigue sans cesse relancée, moult effets (parfois tirés par les cheveux), des faits énigmatiques et un final inattendu. L'on ne pourra pas reprocher à Hervé Commère d'agripper le lecteur et de le tenir en haleine tout au long de ce roman. Là où le bât blesse, ce sont justement tous ces rebondissements qui finissent autant par éveiller la curiosité que par lasser. L'auteur nous plonge dans une ambiance oppressante et mystérieuse que Mat devra éclaircir s'il veut lever le voile sur son passé. À ses côtés, une galerie de personnages attachante : son amie, Anna, mais aussi ses employés, Gary et Mylène. De Montreuil à la Norvège en passant par la pointe bretonne, l'auteur balade le lecteur qui, sans trop réfléchir, se laissera porter par cette intrigue bien huilée.
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Sauf

Un roman fait de courts chapitres, ce qui pousse le lecteur a tourner les pages sans le vouloir.

Un roman assez addictif, plein de rebondissements.



J'ai passé un agréable moment de lecture.

Les personnages sont travaillés, torturés pour certains.

Le scénario est assez original, néanmoins les.nombreux rebondissements rendent certaines choses peu crédibles, et c'est bien dommage.



L'écriture de l'auteur est simple et agréable.

Donc dans l'ensemble un roman plaisant.

Je découvre l'auteur par ce roman. Je continuerai à lire d'autres romans dans les mois à venir.



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Sauf

Voilà, ça y est , je viens de tourner la dernière page de ce roman et je suis heureux de m'en être sorti sain et " SAUF" .Pas banale, tout de même, cette histoire . Lui , c'est Mathieu, un gars de 48 ans, élevé 'par son oncle et sa tante , et qui a eu quelques démêlés avec la justice , et sa femme Anna . Il y a aussi Mylène et Gary , ses deux comparses qui l'aident à gérer avec bonheur son entreprise de dépôt- vente . Et tout va bien ... Et tout va déraper à cause d'un mystérieux album - photos déposé par une étrange personne , une femme qui ne donne pas son nom , et un album-photos qui suscite des convoitises au point d'engendrer cambriolage , incendie , coups de feu ....Et c'est parti ....À partir de là , les faits s'enchaînent....jusqu'à un dénouement....qui révèlera de sacrés secrets de famille .

J'ai déjà eu l'occasion de lire " Hervé Commère " , et , une fois de plus , j'avoue avoir été un lecteur attentif parce que très intéressé et mené par le bout du nez du début à la fin . Pas de temps mort , un nombre de personnages très raisonnable donc bien " analysés " , une intrigue construite avec une logique et une maestria irréprochables , surprenants, originaux ....Et de la Bretagne à la Norvège....

Il est très intéressant de trouver ici confirmation que le sort de chacun et chacune d'entre nous , s'il dépend de notre propre cheminement , de nos choix, de notre motivation , de notre libre - arbitre , dépend aussi pour beaucoup de tous ceux et celles qui ont encadré , voire façonné notre enfance , et notre enfance.....bien difficile de lui échapper.

L'écriture de cet auteur est pour lui un atout extraordinaire , on semble " glisser " tranquillement sur un tapis de velours" , sans heurt , sans la moindre aspérité , une belle écriture et une imagination fertile , de nature à nous balader jusqu'au bout du bout .Quant à la brièveté des chapitres , une habile façon de " dynamiser " le propos .C'est très bien.

Un roman à conseiller fortement dans cette période de confinement et ...de stress.

..

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Regarde

Voilà un roman qui m'aura tenu en haleine jusque dans les dernières pages , un roman très bien écrit , très bien construit . Je n'en attendais du reste pas moins d'Hervé Commère, un auteur connu et reconnu , à juste titre , ma foi .

Je tiens , avant tout à préciser que je n'avais pas lu " Sauf " auparavant et que je n'ai donc pas été gêné par ce manque , si ce n'est que je me suis sans doute privé d'un autre bon moment d'évasion , mais bon .

Tiens , puisque je parle d'évasion, ça tombe bien . Mylène, l'héroïne, a passé 8 ans en prison pour complicité dans le braquage d'une bijouterie espagnole avec le " grand amour de sa vie " , Pascal , lui - même sauvagement assassiné pendant son incarcération....

Qui a tué Pascal et pourquoi ? Vaste , très vaste programme auquel s'attaque Mylène, soutenue par son amoureux Gary , un gitan et ses cousins , ses amis Mat et Anna et le policier Dagan...

C'est que Mylène, les amis , elle veut comprendre , c'est légitime, non ? L'enquête va être ardue .Pour cela , on peut faire confiance à Hervé Commère pour nous " balader " , nous distribuer avec parcimonie des éléments qui , mis bout à bout , bâtiront une trame logique ... pas si évidente mais bien pensée. le fait que Mylène " prenne la parole " dans le récit nous permet de mieux appréhender sa personnalité, une personnalité complexe mais ...attachante . Femme d'argent ? Femme à hommes ou Femme d'un homme ? Les deux ? On en apprendra suffisamment tout au long du récit pour se faire une idée propre , un fort caractère en tout cas , dont on suivra la quête avec enthousiasme et une " certaine " admiration " pour son opiniâtreté .

Je crois avoir dit que ce roman se lisait facilement , avec délectation , pas si " dynamique " que certains mais habilement construit avec des chapitres courts qui " boostent " le récit, n'autorisent , de la part du lecteur , aucun relâchement et interdisent à l' ennui de s'immiscer sournoisement .

Je ne sais pas si je reviendrai vers " Sauf " , je ne le crois pas dans la mesure où ma PAL reste " vertigineuse " ( ...et que je ne souhaite vraiment pas le retour du confinement , mais...) ce que je sais , c'est que je reviendrai vers Hervé Commère, un auteur qui " sait faire " .

Et pour terminer , chers amies et amis , je vous offre un indice qui devrait grandement vous aider :

" On ne se méfie jamais assez des fantômes du passé..."



Ça y est ? Vous y voyez plus clair ? Non ? Ah ben ça alors , vous allez encore être obligés et obligées de TOUT lire ....J'aimerais tant vous aider plus ....Mais je vous rassure , le plus difficile , c'est de " saisir " le livre , après...ben après c'est parti , tiens et "ça avance tout seul " ...( Attention si vous avez quelque chose sur le gaz )
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Les ronds dans l'eau

Commère : personne curieuse et bavarde...

Et là je pouffe comme un ouf car s'il est bien un terme à ne pas lui accoler, c'est bien d'être cancanier.



Quel rapport entre un truand rangé des bagnoles et un gentil serveur, tendance dépressive.

A priori, aucun. Et pourtant...

Ah si, une malheureuse concordance géographique, objet de dommages collatéraux de magnitude 12,4 sur l'échelle de Richter. Charles Francis pour les intimes.



Les ronds dans l'eau est de ces bouquins à tiroirs qui n'en finissent pas de surprendre.

Mélangeant habilement les genres, et tout particulièrement le corsé et l'obscur, il est, de fait, difficilement catalogable.



Hervé Commère, comme il est souvent d'usage, décrit deux trajectoires concomitantes qui finiront fatalement par se percuter pour n'en faire plus qu'une. Et là j'ai envie de faire tut, tut, tut. Si le procédé commence à dater, la résultante de cette croisée des chemins est d'une originalité inventive et salutaire. Plutôt que de s'appuyer sur des ressorts déjà usités du temps d'Érode, Commère réinvente le genre en réorientant et reboostant un récit qui n'en demandait pas tant.



La grande force de l'auteur réside en cette faculté quasi immédiate d'accrocher à travers les portraits de deux personnages aussi dissemblables que l'eau et le feu.

L'un aura dangereusement brûlé la chandelle par les deux bouts alors que l'autre sombre dans un marasme journalier semblant ne jamais vouloir décliner. Un chagrin d'amour à l'écho persistant.

A ce propos, Commère décrit à merveille une télé-réalité débilitante et rien que pour cette justesse de ton, ce bouquin vaut déjà le coup.



Les ronds dans l'eau devrait vous éclabousser de toute sa classe stylistique et narrative.

Singulier et racé, il se déguste posément en vous laissant en bouche la sensation durable d'avoir savouré un millésime d'exception.





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Sauf

Mat s'en est bien sorti.

Pour un gars dont les parents ont été retrouvé carbo pour cause de minuteur défectueux, alors qu'il n'avait que six jeunes printemps, le bilan apparaît, aujourd'hui, finalement positif.

Heureux proprio d'une brocante.

Heureux en ménage.

Heureux en chevauchant sa Triumph.

Ça fait beaucoup de bonheur au compteur, n'est-il pas ?

C'est également ce que s'est dit Hervé Commère en décidant d'y mettre le hola.

L'apparition d'un vieil album photo censé avoir brulé itou avec le manoir et son incommensurable populace de deux malheureuses âmes aura suffi à bouleverser ce fragile équilibre.



-Dis, tu veux jouer au j'aime/j'aime pas ?

- Non !

-Super ! Je t'écoute !

- Huumpf...

Bien aimé les personnages, surtout les deux employés de cette brocante aux profils totalement contraires mais parfaitement complémentaires. Mylène et Gary, spéciale cacedédi les aminches !

J'ai adoré bourlinguer pour pas cher. Commère Tour vous embarque pour un long périple dépaysant et ça, j'adhère.

J'ai également apprécié le gabarit du bestiau. Court, ramassé, idéal en cas de petite fringale et pas le temps de rester sur l'estomac en cas de digestion délicate.

- Super ! Vas-y, donne tout ce que t'as pas!!

- ?!?!!!?

- Sinon, quelques réticences à faire valoir, possiblement, de manière hypothétique en conjecturant laconiquement ?

- Si fait.

Outre l'attitude de certains protagonistes, proches de l'ami Mat, qui m'a semblé proprement inconcevable, j'ai trouvé à ce récit les qualités de ses défauts.

L'histoire est une boule d'énergie qui s'auto-alimente sans cesse. Un mix de Taz et de Gargantua qui, je trouve, fait dans la surenchère en proposant un cliffhanger systématique de fin de chapitre histoire de relancer une trame déjà survitaminée.

Y a des fois, j'aime bien quand ça bouge, pis y a des fois, j'aime bien souffler.

Ici, point de répit mais la volonté affichée d'en remettre une couche encore et encore. Le mille feuilles à haute dose, perso, ça me gave.

Là, je donne l'impression d'avoir passé un sale moment, alors que nenni !

Malgré ce sentiment de course au rebondissement absolue, j'ai, paradoxalement, été happé par cette quête de vérité au point de me dire que ce diable de Commère avait finalement réussi son parii-ii, métamorphosant les heures en minutes, signe d'un plaisir certain à défaut d'être total.



L'honneur est donc sauf.



Merci à Babelio et aux éditions Fleuve pour cette préposition somme toute agréable.
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Sauf

« C’est une histoire de dingue ! », me suis-je dis, je ne sais combien de fois, durant la lecture du nouveau roman de Hervé Commère, Sauf.



L’auteur l’avait déjà démontré par le passé, il confirme à nouveau sa maîtrise exceptionnelle. Sauf, ou le chaînon manquant entre le Commère de l’époque Le deuxième homme et celui de ses deux précédents livres. Un virage, sans en être vraiment un. Une intrigue développée avec une telle virtuosité et avec une si belle humanité, qu’il y a de quoi rester sans voix.



Imaginez une histoire qui n’entre pas habituellement dans les conventions du thriller, mais racontée avec tous les ingrédients qui font les (très) bons thrillers. Chapitres courts, surprises ahurissantes à la fin de presque chacun d’entre eux… Le genre de bouquin impossible à reposer. A chaque page, vous vous dites qu’il est tout bonnement impossible de ne pas poursuivre la lecture, quitte à ne pas manger ni à prendre le temps pour vos besoins physiologiques essentiels.



Ou plutôt si… Je ne sais combien de fois j’ai reposé le livre sur mes genoux, les yeux dans le vague, en murmurant en boucle « c’est un truc de dingue, c’est un truc de dingue… ».



Le récit que nous offre Hervé Commère est à la fois fou et réfléchi dans ses plus infimes détails. Un puzzle aux multiples pièces, ramassé sur 270 pages, qu’il assemble avec maestria devant nos yeux ébahis. En découle un sentiment d’urgence tout du long, les mots de l’écrivain devenant totalement ensorcelants. Quelle imagination ! Quelle singularité ! Quelle incroyable capacité à rendre limpide une intrigue complexe.



Qu’ils sont rares les romans noirs aux rouages aussi parfaitement huilés, à la précision aussi minutieuse, et qui pourtant font autant vibrer le cœur et l’âme. Le palpitant qui s’emballe et les émotions qui affleurent. Des phrases courtes, paradoxalement bourrées d’émotions. Une empathie de tous les instants grâce à une écriture personnelle facilement reconnaissable.



Sauf n’est pas qu’un roman noir. C’est aussi une histoire d’amourS ; amour beau ou dévoyé ; comme sait si bien en parler cet auteur unique. Un récit qui fait vibrer chaque fibre de votre être ; cœur, tripes, cortex cérébral…



Sauf est un roman qu’on n’oublie pas. J’en ai été remué, j’en ai eu des nœuds dans le ventre, ce qui m’arrive de plus en plus rarement à force de lire autant. Preuve qu’Hervé Commère est un auteur à part.



Ce qu’il vous faut, c’est un Commère. Laissez-vous porter, il imagine le reste.
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Le deuxième homme

Pas tout a fait convaincue par ce roman.

Bizarrement je le trouve terriblement mal équilibré.

Certains passages sont passionnants, d'autres beaucoup moins.



La première moitié du roman met vraiment le lecteur dans une situation où il ne sait pas trop sur quel pied danser.

La suite est beaucoup moins intéressante avec le dénouement. En fait le scénario ne m'emballe pas du tout.



Si l'écriture de l'auteur est agréable et assez percutante avec des chapitres courts, le scénario a perdu en qualité.



Je sais que l'auteur est capable de faire des romans exceptionnellement bons, donc on va dire un petit faux pas avec ce roman qui n''est pour moi que moyen.
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Ce qu'il nous faut, c'est un mort

Pourquoi je l’ai choisi:



Parce que ce qu’il me faut, c’était une bonne lecture…Un de celles recommandées par mes blogs potes, un auteur que je ne connaissais pas encore mais dont j’ai hâte de découvrir ses autres écrits, maintenant…

Ce que j’ai ressenti:



Ce qu’il nous faut, c’est un roman qui nous tienne éveillé une partie de la nuit…Un de ceux qu’il est impossible à lâcher malgré l’heure avancée…Nous ne pouvons quitter à leur sort, ses femmes, petites mains aux grands cœurs qui tiennent en respect la mode, et leur village. Les laisser tomber, en quittant cette lecture est une chose qu’il m’a paru inconcevable. On est tendu, concerné, affligé de voir la crise emporter le savoir-faire français, le rêve d’un homme, la mise en valeur des femmes…C’est notre quotidien, nos avenirs, et ça fait mal au cœur, alors on lit sans interruption, parce que finalement, leurs vies, c’est un peu des nôtres….



Ce qu’il nous faut, c’est une amitié qui dure au delà des mots…Trois amis unis dans le secret et la tragédie, tantôt envieux tantôt admiratifs, mais toujours solidaires…Des relations compliquées, mais des personnages si incarnés qu’ils nous montrent une voie sinueuse et toujours en bord de gouffre, mais plein d’une énergie de vie…



Ce qu’il nous faut, c’est des larmes…qui se pointent au bord des yeux, car l’écriture de ce roman est emplie d’émotions. Il parle si bien de sentiments, de destins brisés et des problèmes de société qui nous concerne directement, qu’on est tiraillé de l’intérieur. Elles arrivent comme un cadeau, un trop plein de non-dits qui ressortent sous forme d’eau, car la douleur est trop intense…C’est en refermant ses pages, qu’on se rend compte que la vie, c’est devant.



Parce que ce qu’il est dommage, c’est qu’il faille un mort (et souvent plusieurs), pour que le monde bouge…. Ce roman noir est un diamant , où se reflètent les visons de tous ses personnages et Hervé Commère en orfèvre, et polissant chaque personnalité et drames, nous donne un petit joyau précieux de bons mots et d’intenses réflexions sur la société qui nous entoure, et les gens influents qui la contrôlent…Tout un investissement pour doser avec doigté et intelligence, cette histoire moins anodine qu’elle n’y parait…



Il est des livres comme celui ci, qui à force de petits détails et de grandes valeurs deviennent un Coup de Cœur…Ce qu’il nous faut, c’est le trouver…Pour moi, c’est fait !


Lien : https://fairystelphique.word..
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Imagine le reste

Hervé Commère est un malin ! Appeler son dernier né, Imagine le reste, quand on connait déjà ses romans, c’est un peu comme nous faire un pied de nez ;-).



Parce que la marque de fabrique de l’auteur a toujours été d’emmener ses lecteurs vers des contrées insoupçonnées, avec un art du contre-pied très personnel. Il nous lance sur des pistes, nous laisse effectivement imaginer le reste, mais ne nous emmène JAMAIS là où on le pense (et il fait subir le même sort à ses différents personnages).



Hervé Commère a un talent fou pour construire des puzzles improbables, dont le résultat final nous explose en pleine figure, éblouissant. Avec ce roman, il offre à nouveau des morceaux d’histoires qui nous happent immédiatement sans qu’il soit possible, pour autant, d’imaginer la suite des événements.



Une fois de plus, il distille son art du changement de perspective et de point de vue de manière magistrale ! La construction de son récit à plusieurs voix est tout simplement fascinante. Un vrai travail d’équilibriste pour un exercice de haute voltige.



Que l’on soit clair : alors que d’autres écrivent juste avec leurs mains, Hervé Commère le fait avec sa tête, son cœur et ses tripes. Car son écriture est toute aussi ensorcelante que son intrigue.



L’auteur habite littéralement son récit, ses mots transpirent d’émotions, les pages palpitent entre vos mains. Le tout papillonne d’une force et d’une beauté assez unique, car Hervé Commère est capable de fulgurances rares dans l’univers du polar.



Mais peut-on encore parler de Polar ? Oui… et non. Oui, parce l’intrigue est magistralement machiavélique, qu’on y croise des "mauvais garçons" et qu’on y parle de braquage et autres méfaits. Non, parce que ce roman est tellement plus que ça, tellement plus… Dans ce vrai roman noir, sensiblement plus épais que ses précédents (420 pages), l’auteur se (nous) ballade cette fois sous d’autres climats.



Ce récit est une leçon de vie où les personnages sont tels des pièces d’un immense puzzle. Et une histoire d’amourS si profonde et dramatiquement bouleversante, aussi. Certains passages nous font réfléchir, caressent, chatouillent, écorchent, troublent, perturbent, percutent…



Ah, et ces personnages… Des individus qui forment un tout, qui ont de la texture, du gras, de l’ampleur. Des personnages en 3D qui vibrent, souffrent, vivent à travers les mots de l’auteur. Des êtres complexes, certains en version gueules cassées par la vie, mais tous attachants à leur manière (et ça aussi c’est un tour de force).



Et pour couronner le tout, Hervé Commère parle de musique dans ce roman. Avec l’immense talent qui est le sien, il arrive à plaquer des mots sur ses descriptions des émotions musicales, à tel point qu’il m’en a collé des frissons. Un autre exercice extrêmement difficile et qu’il transcende littéralement.



Je ressors de cette lecture les larmes aux yeux. Hervé Commère avait déjà fait très fort avec ses précédents romans, mais je peux sans hésiter affirmer que celui-ci est son meilleur et son plus abouti.
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Imagine le reste

"Imaginer le reste est une chose magnifique, mais voir son destin s'accomplir est une chose plus belle encore."

Dans mon cas, quand j'ai eu Imagine le reste entre les mains, j'ai été confrontée à un dilemme courant dans la vie de tout lecteur, l'ouvrir ou ne pas l'ouvrir? That is the question!J'ai retardé l'échéance au maximum, assistant même à la rencontre avec l'auteur organisée par Babelio dans les locaux de l'éditeur sans avoir lu une seule ligne du roman. C'est il y a trois jours de ça que j'ai décidé de me lancer. Frileuse, je l'ai sorti de ma PAL pensant en finir une fois pour toute avec ce phénomène qui enflamme la toile depuis quelques temps déjà. J'ai tout imaginé sauf le reste et je n'aurai jamais cru que la bête en question ferait couler de grosses larmes sur mes joues et pourtant... c'était pas gagné!

Le début du roman nous fait faire la connaissance de Fred et Karl, deux loubards qui enchaînent les mauvais coups pour tenter de se sortir de Calais, ses cités HLM et sa grisaille. Fous amoureux de Carole qui les quittera du jour au lendemain, elle ne cessera d'occuper leurs pensées jusqu'au jour ou Fred fera ce qu'il pense être le meilleur coup de sa vie. Volant à Cimard, un escroc d'envergure à Calais, un sac en cuir brun contenant deux millions d'euros en cash, Fred va entraîner Karl sur les routes pour retrouver Carole et mener une vie dorée loin de tout ce qu'ils ont toujours connu seulement même en imaginant le reste, la vie à parfois son mot à dire et le sac en cuir brun risque de leur réserver des surprises...

Je préfère être honnête, en début de lecture je n'ai pas été emballée le moins du monde par cette histoire. Karl et Fred, les deux protagonistes du début, j'ai eu du mal à les apprécier mais je crois que ma bête noire à été Carole. Celle par qui tout ça est arrivé, cette fille que j'ai trouvé foncièrement égoïste malgré la perfection que veut lui donner l'auteur à tel point que j'ai cru ne jamais arriver au bout de la première partie. Ce qui a permis de sauver les meuble c'est le suspense, les questions que j'ai commencé à me poser au fur et à mesure que l'auteur plaçait les jalons de ce qui allait suivre et là j'ai pensé que ça serait con d'abandonner en si bon chemin. Après tout, j'avais fait le plus dur: la première partie (attention cela n'engage que moi!). Mon instinct me soufflait qu'il y avait un trésor caché dans cet ouvrage et effectivement il y est. Ce que j'y ai trouvé, ce n'est pas simplement une accumulation de faits, des destins qui se font et se défont, non, je crois que c'est plus profond que ça, il y a quelque chose de particulier entre les lignes, comme si l'histoire entrait en résonance avec l'âme du lecteur (c'est au moins ce qui s'est passé avec moi). J'ai eu l'impression de trouver un morceau de moi-même dans les sentiments des protagonistes, on dirait que l'auteur à réussi la prouesse d'englober la nature humaine toute entière dans les quelques acteurs de cette tranche de vie qui a défilé sous nos yeux. J'ai fini par être emballée car on croit percevoir les coulisses d'un destin que nous avons le sentiment de ne pas maîtriser, c'est aussi une lecture qui motive car elle donne envie de se battre pour y arriver peu importe le chemin que l'on prend pourtant comme je l'ai dit plus haut, j'étais partie pour ne pas aimer, peut-être pour soulager une lubie de lectrice capricieuse qui ne veut pas faire comme tout le monde mais sur ce coup-là je suis bien obligée de m'incliner bien bas en me rangeant à l'avis général : ce livre est un bombe! Il m'a été impossible de le lâcher avant la fin. Quand je suis presque arrivée au dénouement, pour éviter de lâcher un flot de larmes continu en ne voyant qu'une ligne sur deux, j'ai fractionné ma lecture en attendant que l'émotion s'apaise, ne voulant pas en perdre une miette avec mes états d'âme de midinette hyper sensible. J'ai refermé le livre, des scénarios plein la tête et le coeur gonflé d'émotion en me disant qu'Hervé Commère est un auteur à suivre de près. En attendant, je vous conseille ce livre qui je l'espère vous plaira autant qu'à moi!

Merci à Babelio et Fleuve éditions pour ce cadeau qui va rester au chaud dans ma biblio.

A lire!
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Ce qu'il nous faut, c'est un mort

Quelle belle surprise que ce livre! Je croyais m'embarquer dans un polar classique et j'ai été plongée dans une formidable odyssée humaine : celle d'un village de Normandie, Vrainville rassemblé autour de SON entreprise, les ateliers Cybelle, une fabrique de lingerie. Cette entreprise familiale est le fleuron et la fierté de la région, et le poumon du village. La plupart des femmes du village y travaillent. Mais les temps changent. Les dirigeants de l'entreprise aussi. La solidarité des débuts s'effrite. Mondialisation, crise économique, délocalisation, chômage, harcèlement, s'inscrivent comme une résignation. Pourtant, les chuchotements et les murmures grondent. Comment faire renaitre la solidarité d'antan ? Comment faire reculer la marche inéluctable de la fermeture? Comment attirer la lumière sur eux ? Ce qu'il leur faudrait, c'est un mort…. soupire une ouvrière désabusée.



La grande force de ce livre est de nous immerger littéralement dans la vie des habitants de ce village, qui s'articule autour d'un personnage central et majeur : les ateliers Cybelle. Une saga familiale sur 3 générations qui déploie ses ramifications autour d'une infinie palette d'émotions humaines: courage, générosité, égoïsme, mesquinerie, cupidité, amitié, trahison, honte, lâcheté, etc, etc… Bref, la vie tout simplement.



A mi parcours, l'enquête policière reprend le devant de la scène. C'est le temps des secrets qui refont surface, des combats, des mensonges, des espoirs, des désillusions … des morts. Je reconnais que mon intérêt s'est un peu émoussé dans cette partie qui est très inégale et pas toujours crédible. Mais j'étais déjà embarquée avec les habitants de ce village. Alors, j'ai continué avec plaisir ma route avec eux.



La construction est intéressante. Point de suspens en tant que tel puisque la plupart du temps, l'auteur annonce ce qui va se passer en début du chapitre, comme s'il racontait un fait divers. Pourtant, même s'il s'est effectivement inspiré de l'histoire des ouvrières des usines Lejaby, il s'agit bel et bien d'une fiction. Il utilise le temps, en jonglant entre le passé et présent, pour maintenir notre intérêt. Et, par un magistral chassé croisé de personnages, il nous révèle petit à petit les interactions entre eux, et surtout sur les conséquences de leur choix.



Dans ce récit qui navigue entre critique sociale et roman policier, nos actes, notre destin, et ce que nous en faisons, tambourinent comme un clapotis sourd. Si l'histoire s'ouvre sur une épigraphe des Rita Mistsouko : "On est responsable du feu qu'on a allumé", ce n'est pas anodin. Feu de joie, brasier ou bucher, les choix que nous faisons sont les braises incandescentes qui palpitent au coeur de ce livre et de nos vies.
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Ce qu'il nous faut, c'est un mort

Voilà un excellent roman ! Juste avant de le commencer, j'avoue pourtant avoir hésité un instant, me demandant ce qui m'avait pris d'acheter ce livre dont on parlait peu et dont l'auteur, un presqu'inconnu, un homme qui se veut simple, n'attire pas la lumière. Reconnaître que je n'ai pas regretté ma lecture est trop faible comme expression de repentance. Je déclare que Ce qu'il nous faut, c'est un mort est un roman finement conçu, qui multiplie les genres et qui m'a sincèrement passionné.



Il y a des romans qui commencent par la fin. Là, c'est l'inverse, Hervé Commère commence par poser des jalons bien antérieurs au début de l'intrigue.



Premier jalon, dix-huit ans plus tôt, quelque part en Normandie. Trois copains d'à peine vingt ans, Vincent, Patrick et Maxime, mènent une virée nocturne qui tourne mal. Un secret qui pèsera longtemps sur leur conscience et sur leurs relations. En même temps, à des centaines de kilomètres de là, une très jeune femme vit un drame épouvantable qui la marquera à jamais.



Pour le second jalon, on remonte près d'un siècle en amont, au lendemain de la première guerre mondiale. A Vrainville, petit village de Normandie, un jeune entrepreneur visionnaire et paternaliste fonde les Ateliers Cybelle, une fabrique de sous-vêtements féminins, dont le développement deviendra un modèle de réussite financière et sociale.



Vrainville, 2016. Aux Ateliers Cybelle, on doute... Un contexte d'un réalisme douloureux auquel nos territoires finissent par être habitués et résignés. Rayonnement de la marque, qualité des articles, engagement du personnel, rien n'y fait. La mondialisation accomplit son oeuvre : produire de la lingerie à Vrainville coûte trop cher. le PDG, un homme jeune, petit-fils du fondateur, voudrait tourner la page. Un fond d'investissement américain se montre intéressé. Mais avec quel avenir pour l'usine locale ? Et comment le village pourrait-il survivre à la disparition de son poumon économique ?



Les habitants sont tous inquiets. A commencer par deux d'entre eux, le Maire et le secrétaire général du comité d'entreprise. Chacun à leur manière, ils tentent de s'opposer aux stratégies du chef d'entreprise. Trois hommes du même âge qui s'affrontent sans tapage, mais avec détermination. Autour d'eux, les femmes, qui constituent l'essentiel des effectifs, s'organisent. L'une d'elle, belle, mais dure, lutte aussi contre des démons... Son passé pourrait-il resurgir ?



Dans des débats qui, dans chaque camp, tournent en rond, quelqu'un prononce ces mots : « Ce qu'il nous faut, c'est un mort »... Une idée qui pourrait faire son chemin.



Effectivement il y a un mort. de critique sociale, le roman tourne à l'énigme policière. À qui profite le crime ? S'en mêle un policier atypique qui finira par tout démêler. le dénouement final, inattendu, est d'une cohérence subtile.



L'auteur analyse avec finesse les personnages, leur psychologie, leurs pensées, leur comportement. Il les dépeint dans des phrases courtes, simples, précises, un peu naïves ; des verbes conjugués au présent, des mots du langage parlé, dans un rythme légèrement saccadé. Comme un commentaire off qui accompagnerait des portraits captés de près, caméra à l'épaule, les réflexions intimes s'affichant en sous-titre.



Dans une sorte de bienveillance humaniste, Hervé Commère ne juge pas ses principaux personnages. Ou s'il les juge, il ne les loue ni ne les condamne. Ceux qui paraissent les meilleurs ont leur part d'ombre. Les plus retors ne le sont pas sans excuse. La plupart ont fait leur chemin en suivant les rails sur lesquels la vie les a posés. Quelques uns ont eu le courage de choisir un autre chemin. Cela les rend-il meilleurs ? Ou plus heureux ?



A quoi bon, semble se résigner l'auteur ! Qui peut quelque chose à la marche du monde ? « Nous avons vécu sur un trésor qui s'envole... C'est fini, c'est tout... C'est dommage pour nous, c'est très dommage, mais nous n'y pouvons rien », fait-il dire à l'un des protagonistes. Des propos pessimistes qui entrent en résonance avec les observations sur la décadence délivrée récemment par un philosophe dont les territoires ne sont pas si éloignés de Vrainville...



Pour ma part, la lecture de ce livre ne m'a apporté que du plaisir. Ce n'est pas ce qui fait le bonheur, mais cela y contribue.
Lien : http://cavamieuxenlecrivant...
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Respirer le noir

Respirer.

Profondément.

Emplir d'air (et de tout ce qu'il contient) mes poumons, ouvrant mes narines, gorge envahie, torax déployé... Je respire.

Un bon coup.

Pour retrouver mon calme.

Pour ne plus trembler.

Pour tourner ma langue sept fois dans ma bouche.

Pour remettre mes mains dans mes poches.

Avant de faire des bêtises que je pourrais regretter.

Envie de meurtre!!!



Que c'est difficile d'être adolescent...

Plus difficile encore, c'est d'être maman d'une adolescente!

Je sais de quoi je parle: allez, debout, c'est l'heure de te lever!

Ramasse tes chausettes!

Lâche donc ton portable, il est presque minuit!

Non, à 14 ans, tu n'as pas besoin d'un compte sur Instagram (sur Babelio, d'accord... Tu ne parles pas français? Et après?).

Non, à 14 ans, tu n'as pas l'âge d'aller boire un coca avec tes copains après 20 heures....

Parles-moi sur un autre ton: je suis ta mère!

Grosse? Mais non, tu n'es pas grosse: 55 kilos pour 1,62 m. Tu es folle!



Respirer le noir. Encore un recueil de nouvelles qui accompagne ma pause-dejeûner (z'avez qu'a lire mon billet sur "Exils"... Je ne vais pas me répéter, tout de même!).

Après avoir "Écouter le noir" que j'avais apprecié malgré une nouvelle qui m'a completement échappée, j'ai mis un certain temps à me replonger dans ce genre de littérature "courte". Pause-dejeûner oblige, donc.

Bien qu'inégales, comme dans tout recueil de nouvelles, j'ai trouvé leur niveau excellent. Peut-être parce que le "Noir" a une odeur. le malheur et la mort se sentant à mille lieues à la ronde, il a semblé plus "simple" ou plus "évident" aux auteurs de créer une nouvelle "noire" tournant autour de la respiration et/ou de l'odorat.

Résultat: inspirées (c'est le cas de le dire, puisqu'elles s'y prêtent), chaque nouvelle se respire, se hume ou coupe le souffle! J'ai même retenu ma respiration...

Bravo à Adeline Dieudonné qui m'a rappelé "Le parfum". J'ai sentis les remugles décrits si nettement que j'ai eu du mal à avaler mon potage!

La nouvelle de Mesdames Karine Giebel / Barbara Abel, duo imbattable ne pouvait qu'être parfaite. Je l'ai lue le souffle court, "aspirant" (ben, oui...) à ce qu'elles épargnent les "gentils", sans savoir qui allait périr. J'aime déjà beaucoup la plûme de chacunes de ces dames séparément. En tandem, c'est formidable. Elles ne sauraient faire autrement. À noter: le talent de ce duo pour planter un décor, installer une ambiance et "parfumer" l'atmosphère d'angoisse, sur un format aussi court qu'une nouvelle, mais avec le brio dont elles usent et abusent quand elles écrivent des romans, textes beaucoup plus copieux. Bref, une réussite! Et la petite pique politique (aaaah...le nom de ce toutou!!). Impayable!



Et maintenant? Comment lier mon intro et mon envie de meurtre avec l'ado de mon deuxième paragraphe? Oui, c'est bien elle que j'ai envie d'étrangler. Et pourtant, c'est ma fille, la chair de ma chair, le fruit de mes entrailles (ma fille, ma bataille, j'voulais pas qu'elle s'en aille... Merci Balavoine...).

Mère indigne? Monstre-maman?

Noooon!

Je voudrais l'étouffer... de baisers, la serrer sur mon coeur à lui couper le souffle, la porter tout contre moi pour sentir son parfum de bébé devenu grand.

Elle est née au début d'une chaude nuit d'octobre, pendant un été indien comme il y en a souvent au Portugal. L'accouchement (très compliqué...) ne s'est pas du tout passé comme je l'avais imaginé pendant les mois de ma grossesse (mais ça, c'est encore une longue histoire...). Quand, vers trois heures du matin, la sage-femme nous a emmenées du bloc opératoire jusqu'a notre chambre, elle a pris soin de coucher ma princesse à mes côtés, tout près de mon coeur, au creux de mes bras... Et jusqu'au matin, j'ai caressé son petit nez retroussé pour sentir sa douce respiration et m'assurer qu'elle était bien vivante...



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Sauf

Mais il est fou, dis ! Dingue ! (comme le disait Jacquouille). Oui, il est dingue, cet auteur, moi je te le dis !



Hervé Commère m’avait déjà époustouflé avec « Ce qu’il nous faut c’est un mort » et là, il m’a décoiffé.



Pire, je pourrais même dire qu’il m’a troué le c** mais je ne voudrais pas qu’il ait des problèmes et qu’on l’accuse d’abus textuel sur la pauvre lectrice que je suis.



Oui, ce roman est un truc de ouf (pour parler djeuns), tout en étant réaliste. C’est court, c’est intense, sans que l’auteur ait bradé la qualité de son histoire, de ses personnages ou de son écriture.



Au départ, tu te poses moult questions sur le pourquoi du comment un album photo, censé avoir brûlé avec le manoir, se retrouve dans les mains de Mathieu, propriétaire d’un dépôt-vente et, accessoirement, fils de ses parents qui sont mort dans l’incendie dudit manoir. Tu m’suis ?



Il y a du mystère, qui, tel un brouillard léger, entoure cet album photo. Ensuite, le brouillard s’épaissi, tout comme le mystère et les questions affluent dans ta tête, sans que tu puisses trouver la solution de l’affaire. Je pensais l’avoir trouvé et je me suis plantée. Et royalement !



Avançant à vitesse élevée dans ta lecture, malgré la purée de pois, tu la vois se lever vers la moitié du roman et là, tu as la trouille : si l’auteur nous raconte tout, qu’est-ce qu’on va faire le reste du roman ? Se gratter les cou…des ??



Si le brouillard s’est levé en partie, l’auteur sort ensuite le canon à smog et t’enfumes un peu plus, te faisant tourner en bourrique au niveau cérébral car tu cherches le fin mot de l’histoire, mais aucun des scénarios échafaudés dans ta tête ne sera plausible.



D’ailleurs, la tête, je me la suis prise, éliminant l’impossible pour que, ce qui me reste, si improbable soit-il, devienne nécessairement la vérité. Et je me suis plantée…



Punaise, quel roman ! Je suis essoufflée par l’enquête menée par Mathieu et sa femme, Anna, aidé tout deux par les employés de Mathieu : Gary, le gitan (♫ que tu ne connais pas ♪) et la vendeuse, Mylène (pas Farmer).



Du rythme, du mystère, du suspense, de l’action, des personnages intéressants, sympathiques, avec leur part d’ombre, une enquête qui ne sera pas pépère, sorte de chasse à la vérité, une chasse au présent pour éclairer le passé et ce qui est arrivé dans ce putain de manoir, la nuit 6 au 7 août 1976.



Un truc de fou, je vous le dis ! Et comme le disait si bien Jeanne D’Arc alors que les flammes dansaient autour d’elle « Vous ne m’avez pas crue, et bien, vous m’aurez cuite ».



Faites fumer vos méninges sur ce roman de fou et, comme moi, perdez le sens du temps, oubliez ses heures (Qui tuaient parfois À coups de pourquoi ♫), oubliez de manger, de boire et lancez-vous comme un affamé sur ce roman qui vous enfumera plus que si vous étiez une noix de jambon dans un fumoir.



Son précédent roman avait placé la barre très haute au niveau émotions et profondeur.



Celui-ci ne le dépassera pas, ne l’égalera pas, mais ce n’est pas grave car les histoires ne sont pas les mêmes. En tout cas, il le talonne de près.


Lien : https://thecanniballecteur.w..
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Imagine le reste

Un polar manipulateur, com'(ma) mère sait bien les faire !



Fred et Karl, deux petites frappes de Calais sont poteaux comme cul et chemises, même Carole la belle trapéziste avec qui ils s'envoient en l'air ne brise pas leur amitié à toute épreuve. Une arnaque, un sac plein au as dérobé au caïd local leur ouvre une autoroute de liberté. Sauf que Nino, un voisin à la voix d'ange à qui l'on donnerait le bon dieu sans confession rafle la mise, disparaît de la circulation dans une Supercinq vers la lumière des projecteurs . Et pendant ce temps là, Serge, le caïd escroqué sentimental bourreau n'oublie pas son sac en cuir...



Après Les Ronds dans l'eau et Le Deuxième homme, Hervé Commère continue à nous surprendre avec son quatrième roman. Dans les précédents, il nous a bluffé avec ses remous puis ses enveloppes et voilà qu'il nous sort un sac -à patates- qu'il nous met sur la tête. On plonge la tête la première dedans en écoutant chacun des protagonistes raconter et s'imaginer leur vie avec ou sans ce bagage. Au début, on ne pige pas où veut en venir l'auteur puis on finit par comprendre entre les lignes et surtout dans la quatrième partie que l'essentiel était peut-être ailleurs...



Les personnages sont inoubliables, un duo calaisien traité façon Valseuses en un peu plus contracté du... Des paillettes plein les yeux pour Nino, petit rouquin énergique devenu chanteur superstar dans le groupe Light Green qui traîne comme un boulet son spleen, sa vieille Supercinq et un sac. Un élogieux portrait d'un producteur grandiose qui voit vert...Et les membres du groupe qui assurent. Un pur moment de Rock'n'roll ! C'est ma partie préférée. Enfin, le portrait de Serge, un caïd plus transformiste que conformiste.



Au final

Ni polar, ni thriller, un roman noir lumineux teinté de métaphysique, une écriture affutée, des personnages très humains et une construction en écho ou chacun s'imagine le reste et la suite.



Hervé Commère, un auteur qui ne roule pas des - polars - mécaniques.



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Respirer le noir

S'il continue dans cette veine, Yvan Fauth (alias mon ami @Gruz sur Babelio) va vraiment me rendre accro aux nouvelles, moi qui n'en lisait presque jamais il y a deux ans à peine ! Mais depuis qu'il m'a fait découvrir cette collection autour des sens qu'il dirige avec brio, je viens réclamer ma dose à chaque nouvelle parution. Et pour mieux s'assurer de ma dépendance, ce diable d'homme a eu une idée imparable à l'occasion de la parution du quatrième opus : organiser un concours sur son blog EmOtionS, dont le gagnant remporterait un exemplaire de "Respirer le Noir" dédicacé par chacun des 13 auteurs, rien que ça ! Et devinez quoi : j'ai gagné ! Dès lors, j'étais foutue...



Ah, il faut que je m'interrompe ; je viens de sentir une délicieuse odeur, oubliée depuis des mois ici : la PLUIE ! Je vais respirer cette fragrance digne des meilleurs parfums, après tant de sécheresse, à plus tard.



(15 minutes plus tard) Voilà c'est déjà fini, mais je m'en suis mis plein les narines ! Mais revenons à d'autres effluves, plus ou moins ragoûtants selon les textes.



Premier invité : R.J. Ellory himself, dans "Le parfum du laurier-rose", cette fleur "à la fois belle et mortellement vénéneuse". Andersen était un bon policier. Mais il a tué. Et pendant 29 ans, c'est l'odeur du sang qui le poursuivra du fond de sa cellule. Sauf parfois en rêve, où une petite victime innocente lui enverra le doux parfum abricoté du laurier-rose. Mais Andersen a purgé sa peine... Une de mes nouvelles préférées, où l'empathie ne va pas nécessairement là où on l'attendrait.



Sophie Loubière vient ensuite nous faire "Respirer la mort". Pas très engageant, présenté comme ça ! Surtout que ça commence par la tête d'un gamin enfoncée dans une bouse par son grand frère... En grandissant, Willy (l'embousé) développe des capacités olfactives extraordinaires, et parfois très gênantes : "tu sens la sardine", dira-t-il un soir à son père rentré plus tard qu'à l'accoutumée. Las, c'était plutôt la morue, comme le comprendra la mère ! Mais ce sens surdéveloppé va peu à peu prendre une place bien trop importante dans l'existence de Willy... Excellent texte également, qui figure dans mon top 5.



Franck Bouysse va m'emmener en territoire plus connu, en évoquant la triste vie d'un individu atteint du Fish-Odor Syndrom dans "Je suis un poisson". Je connaissais déjà cette affection par le biais d'un roman jeunesse ("la fourmi rouge" d'Emilie Chazerand") et je m'attendais donc à ce que l'auteur nous décrit de la vie sociale plutôt limitée des victimes de ce syndrome. Par contre la conclusion...chapeau ! Elle résonne d'ailleurs avec la fin du texte précédent, et avec une actualité pas encore enterrée. Un peu court à mon sens, mais Franck Bouysse a eu du nez !



"Cristal qui sent" de Mo Malo (tiens : ça m'évoque un autre cristal, celui de Théodore Sturgeon pour les férus de SF, et le clin d'oeil est certainement voulu !). Je ne connais pas encore cet auteur, mais il semble que ses romans se déroulent souvent dans le Grand Nord. ce texte ne fait pas exception, nous y suivons une expédition cherchant à localiser la sépulture de Villmussen, dernier compagnon de route d'un explorateur dont la mission s'était achevée tragiquement. Au cours de leur périple, ils vont tomber sur un mystérieux rocher doté d'une propriété inédite : il "sent". Et après en avoir réalisé un prélèvement, leurs propres capacités olfactives vont se modifier d'une façon incroyable. Et justement, je n'y ai pas vraiment cru, je n'ai pas réussi à rentrer dans cette histoire, peut-être parce qu'il faisait environ 40° à l'extérieur quand je l'ai lue ?



Changeons de décor avec "Deux heures et trente minutes", et partons pour le palais de l'Elysée, avec Dominique Maisons, auteur encore inconnu pour moi. Il y fait bien plus confortable, l'atmosphère y est feutré, mais un drame vient de s'y produire, qui pourrait menacer la sécurité de la nation tout entière. Et notamment son jeune dirigeant, dont l'évocation m'a fait sourire. retenez votre respiration, sinon tant pis pour vous ! Une nouvelle un peu plus légère, plaisante, mais qui ne marquera pas durablement ma mémoire, olfactive ou autre.



Mais la suivante, attention, là on entre dans du lourd ! Et pourtant François-Xavier Dillard nous emmène dans son "Happy world", un parc d'attraction qui m'a rappelé "Europa-park", un endroit de rêve où comme le héros, j'aimais emmener ma petite famille lorsque nos enfants étaient plus jeunes. Le seul inconvénient de ces endroits, c'est qu'il faut faire d'interminables queues pour profiter des attractions les plus prisées. Et ça, Nicolas (le papa) ne le supporte pas. Samia (la maman) va donc se dévouer et poireauter dans la file d'accès du Speed Mountain, le dernier-né des manèges du parc. Pendant ce temps-là, Nico et les enfants vont faire un petit tour dans ces grosses bulles transparentes qui roulent sur l'eau, ça a l'air trop fun !

Pendant ce temps-là, un commando de sinistres individus s'apprête à diffuser le contenu de mystérieuses bonbonnes par le circuit d'irrigation du parc... Comme pour la plupart des lecteurs, cette histoire m'a prise à la gorge, je retenais mon souffle tout au long des 6 chapitres et de l'épilogue qui les conclut. C'est un texte élaboré malgré sa relative brièveté, il comporte tous les éléments que j'aime dans un roman. Dans le top 2 sans hésiter !



Après, la chute fut un peu brutale avec le "Glandy" d'Adeline Dieudonné que pourtant j'apprécie pour ses romans. Mais cette fois je n'ai pas accroché du tout. L'histoire serait tirée d'un fait divers, elle se passe juste avant la première guerre mondiale. Glandy est au service d'un petit notable, et supporte mal sa condition, surtout qu'il s'est amouraché de la fille de son patron. C'est Carnaval, et il s'imagine que sous un déguisement il pourra l'approcher et la séduire. Le rapport avec le thème ? Très lointain, quelques odeurs évoquées, notamment celle du vomi après la cuite, miam-miam ! J'ai passé très vite à la nouvelle suivante...



Et celle-ci m'a flanqué un uppercut, car elle est très réaliste et pourrait fort bien être lue dans la page fait-divers d'un quotidien régional. C'est "Le monde d'après", d'Hervé Commère, et ça se passe dans le monde de maintenant, celui que nous connaissons depuis l'apparition d'un sale petit virus. Un village très tranquille, surtout depuis que la carterie Bellegrand, unique entreprise du coin, a dû fermer ses portes face à la concurrence étrangère. Le petit lotissement construit à l'époque de la prospérité a été déserté, les habitants s'en vont chercher du travail sous d'autres cieux. Mais un jour, un agent immobilier se met en tête de redonner vie à ces pavillons abandonnés. Ce qu'il ignore, c'est qu'il y a très longtemps, un jeune garçon avait volé une clé de chacun des pavillons. Je n'ai absolument pas trouvé de lien avec le sens de l'odorat, je n'ai pas compris ce que cette nouvelle faisait dans ce recueil, mais à part ça j'ai vraiment beaucoup aimé.



"Miracle" de Vincent Hauuy, que je ne connaissais pas, et qui ne m'a vraiment pas transcendé avec son polar d'anticipation où il nous convie à une plongée neuronale dans la psyché d'un tueur comateux. Je me suis un peu perdue dans cette sombre histoire où le parfum" Miracle" de Lancôme tient un rôle essentiel. Sans plus, une des nouvelles que j'ai le moins aimée.



Jérôme Loubry, par contre, m'a énormément touchée avec "Les doux parfums du cimetière", l'histoire de Pierre qui a perdu sa mère et vient régulièrement lui parler sur sa tombe, lui raconter les autres visiteurs du lieu qu'il caractérise chacun par une odeur. On croise Monsieur Gâteau, ainsi nommé parce que le tabac de sa pipe rappelle à Pierre l'odeur des gâteaux que sa mère lui confectionnait. Madame Cerise et Patchouli, à cause de son parfum capiteux, qui vient "visiter" son mari et lui montrer sa poitrine opulente (ce que Pierre, caché derrière un arbre, ne manque jamais de guetter). Benoît, un joggeur qui passe par le cimetière pour raconter ses performances sportives à ses grands-parents devient Monsieur Vinaigre. Et bien d'autres encore, dont il épie les conversations avec leurs défunts. A cause de sa sensibilité particulière aux fragrances de chacun, il va devenir "le Nez de la Mort". Une histoire délicate, qui pourrait être triste mais que j'ai trouvée au contraire pleine de fraîcheur et très émouvante.



Place à Chrystel Duchamp, avec "L'amour à mort" qui nous mènera du paradis à l'enfer avec un passage par le purgatoire. En trois brefs chapitres, une histoire qui au départ paraissait banale va se transformer en un pur cauchemar. Très efficace, et bouchez-vous le nez, l'enfer ça ne sent pas bon !



Et enfin, pour clore ce festival dédié à notre sens de l'odorat, le duo de choc déjà présent dans les autres opus, isolément ou ensemble, j'ai nommé Barbara Abel et Karine Giebel, qui nous ont concocté "Petit nouveau", un titre dont nous comprendrons le sens à la toute fin du récit. On y retrouve un thème traité dans une autre des nouvelles présentées ici, mais cela n'a n' absolument pas nui à l'intérêt que j'y ai porté. je préfère ne pas trop en dire, mais si vous connaissez un peu ces deux auteures, vous vous douterez qu'il y aura de la noirceur, du suspense, plusieurs histoires qui s'imbriqueront, et un talent extraordinaire pour emporter le lecteur. Et tout ça en partant également d'un fait réel... Sans conteste, la meilleure histoire en cerise sur le gâteau bien odorant que nous a cuisiné Yvan !



Je me rends compte que ma critique est devenue aussi longue que mon nez, et qu'il faut que je reprenne mon souffle, que je respire une bonne bouffée d'air frais, et vous aussi sans doute. Comme entretemps la nuit est tombée, je vous invite à m'accompagner dans mon jardin, où enfin l'odeur piquante de l'herbe desséchée a cédé la place aux doux effluves de la terre mouillée.

Mais, c'est étrange, une odeur inconnue vient agresser mes narines...















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Ce qu'il nous faut, c'est un mort

Je te prie de bien vouloir excuser ma familiarité, Hervé. Je voulais t’embrasser. Oui c’est la première chose que j’ai eu envie de faire une fois la dernière page tournée. T’embrasser, te remercier en te regardant dans les yeux et y voir toute l’humanité que tu as su incruster dans chaque phrase de ce magnifique bouquin.



Il faut dire qu’on est passé ensemble par une flopée d’émotions fortes tout au long de ce roman. Oui, je dis bien ensemble, c’est rare de se sentir ainsi connecté à un roman et à son auteur.



C’est beau ce que tu racontes dans ce livre, c’est fort, c’est profondément humain. Tes personnages inventés ont pris vie à travers ces pages, leur feu intérieur crépite. Le notre aussi, au diapason ou au contraire en révolte, reliés que nous sommes à cette histoire et à ses personnages.



Parce que avec Ce qu’il nous faut c’est un mort, tu as ouvert en grand la porte que tu avais entrouverte avec ton précédent roman, Imagine le reste. Tu t’éloignes de l’univers des polars pour nous permettre de vivre une véritable expérience de vie. Un roman noir, un roman noir social, un roman noir humain.



Déjà, un mec qui vient nous causer d’une histoire de chiffons, ce n’est pas banal (même si ce sont des soutiens-gorges et des petites culottes). Ensuite, tu nous parles peut-être d’un mort (ou de plusieurs ?), mais ce n’est pas le cœur de ce récit (le titre est très bien trouvé, au passage).



Ami lecteur, ne t’inquiète pas pour autant, ce Hervé Commère là n’a rien perdu de son talent narratif hors norme et de sa capacité à nous surprendre. Cette histoire est incroyablement bien construite, pleine de surprises et de rebondissements. Elle prend d’ailleurs une tournure étonnante dans sa deuxième partie. Oui Hervé, tu es toujours l’écrivain que l’on connaît, mais en meilleur encore (et ce n’est pas peu dire).



Tu nous parles du monde, tu nous parles des gens, tu nous parles de sentiments avec une telle vitalité qu’on ne peut qu’être touché aux larmes par le sort de tes personnages. Tous tes personnages, même ceux qu’on a envie de détester. Oui, même eux, tu arrives à les rendre si vivants et si complexes qu’on ne peux que se sentir raccordé à leurs destins.



En fait, ton roman est un étonnant entraînement à l’empathie. On devrait le faire lire à tous ceux qui perdent cette capacité à comprendre les autres, à être à leur écoute. Oui Hervé, j’insiste, outre un éblouissant roman noir, c’est un livre rare.



Parce que je n’ai pas encore suffisamment insisté sur la qualité de ton écriture. C’est par ta plume si personnelle que ce récit nous bouleverse, nous soulève dans les airs. Elle est d’une telle expressivité qu’on ne peut qu’être emporté par tes mots.



Et c’est pour ça que je voulais t’embrasser, excuse-moi encore de tant de familiarité.



Crois-moi, ami lecteur, ce qu’il nous faut ce sont des livres de ce genre, des livres qui font battre le cœur et remuer les tripes, en se sentant connecté à son prochain.



Ce qu’il nous faut c’est un Hervé Commère, régulièrement. Pour être humain et vivant (et prendre son pied littérairement).
Lien : https://gruznamur.wordpress...
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