Citations de Isabelle Rossignol (52)
Tu voulais mouriir et alors ?
Fallait-il t'empêcher de le faire tendrement ?
Vous devriez comprendre cela.
Les rêves d'une femme qui veut mourir et ceux d'une fille qui veut l'accompagner.
À moi la fille dont la mère réclame la mort que je ne sais lui donner du fait de votre refus éclairé pour le droit à la vie que vous seuls détenez vous me dites en me voyant partir tête baissée vous me dites bonne soirée.
Béni soit votre mère elle qui vous a donné la vie que vous voulez lui retirer.
Il m'arrive également que ma peur soit si forte que je m'arrête sur le seuil et me retourne avec l'espoir que le ciel bleu face à miracle.
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Toi tu souffres et mes sacs font un bruit de plastique.
Un bruit insolent de vie du dehors.
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Savez-vous ?
Savez-vous ce qu’elle a fait à l’instant où elle a compris qu’elle allait mourir et a souhaité urgemment en finir savez-vous ce qu’elle a fait ?
Elle m’a envoyé vous le dire puis elle a fait ses mots croisés.
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M’envoyant puis attendant, comptant sur moi, se passionnant une dernière fois pour ces grilles à petites cases éclatées qu’elle remplissait par sécurité au crayon gris, ceux munis d’une gomme à leur extrémité, mais elle gommait peu, se trompait rarement, rompue à cette pratique qui lui venait, je crois, de sa mère.
Je crois car nous n’avons pas eu le temps d’en parler et nous ne l’aurons plus comme je le regrette.
M’être privée de savoir d’où ma mère a tiré son goût immodéré des mots croisés.
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Mais suffit.
Vous me rappelez à l’ordre je vous ennuie je vous dissipe je parle je parle et vous avez bien mieux à faire.
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Si bien qu’aujourd’hui devant vous regardez je suis là asseyez-vous écoutez-moi je vous l’ordonne.
Je vous ordonne de cesser sur-le-champ de faire taire les filles qui défendent leur mère mais au contraire de les armer les préparer ne plus jamais les repousser parce que les filles des mères qui veulent mourir et vont mourir ont le désir d’elles-mêmes mourir ne le saviez-vous pas ?
Vous, à nous nier, vous nous tuez alors voyez.
Incipit :
1
Oh je sais.
2
Je sais avant même d’arriver que vous êtes là à ne pas m’attendre pas me voir pas m’entendre.
Je le sais à vos airs et milles autres détails qu’à votre insu vous exhalez de vos yeux de vos bouches de vos rictus entêtés au-dessus de vos blouses éminentes et blanches.
Parce que les maîtresses, c'est comme les livres.
Grâce à elles, on peut aller mieux.
La mère qui ne connaît pas les larmes parce qu'elle ravale les mots qui pourraient les faire naître. La mère qui jette les enfants parce qu'elle est contre le malheur. La mère qui, sous sa blouse, est propre. (p.75)
La mère ne répond pas. Et comme tout à l'heure, Murielle se dit que le silence est plus lourd lorsqu'il arrive après les mots. Parce que le silence après les mots veut dire qu'il faudrait encore parler. (p.75)
- I' faut pas êt'e pauvres pour avoir plein d'mômes. (p.75)
- Tu crois qu'c'est pour l'plaisir qu'on les fait passer, les gosses ? (p.74)
Pourtant, une fois ce temps passé, reviennent le refrain et la chambre blanche. Reviennent aussi les règles de Murielle. Si bien que la vie est rythmée par les cycles des femmes. (p.65)
Car en toute fille à qui l'ont dit : "Tu pues", il y a l'envie de faire oublier que l'on pue. (p.19)
La mère retourne à son assiette et la gosse scrute le mur. Du plus loin qu'elle se souvienne, les repas ont toujours eu une odeur de pets, de nouilles et d'eau de vaisselle. (p.12)
Un pays, c'est là où on vit, pas d'où on vient.
En mission, seule compte la proie : la harponner et ne plus la lâcher.
– Tu sais bien que si on ne change pas le monde, le monde nous change.