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Citations de Isabelle Stengers (36)


Isabelle Stengers
Les statistiques créent des probabilités ; or moi, ce qui m’intéresse, c’est le possible malgré les probabilités
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Un livre sans sève, c'est un livre dont on peut dire qu'on a appris des choses, mais sur le mode de l'information. Ce sont des livres qui ne m'ont pas nourrie.
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Isabelle Stengers
« La science est balbutiante
face aux enchevêtrements du vivant »
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La fable du douzième chameau raconte qu’un vieux bédouin, sentant sa fin prochaine, appela à lui ses trois fils, pour partager entre eux ce qu’il lui restait de biens. Il leur dit : Mes fils, je lègue la moitié de mes biens à l’aîné, le quart au second, et toi, mon dernier, je t’en donne le sixième. A la mort du père, les fils se trouvent bien perplexes car les biens du père n’étaient autres que onze chameaux. Comment partager ? La guerre entre les frères semblait inévitable. Sans solution, ils se rendirent au village voisin, quérir les conseils d’un vieux sage. Celui-ci réfléchit, puis hocha la tête : Je ne peux pas résoudre le problème. Tout ce que je peux faire pour vous, c’est vous donner mon vieux chameau. Il est vieux, il est maigre et plus très vaillant, mais il vous aidera peut-être. Les fils ramenèrent le vieux chameau et partagèrent : le premier reçut alors six chameaux, le second trois et le dernier deux. Restait le vieux chameau malingre qu’ils purent rendre à leur propriétaire

le douzième chameau a redéployé le problème en faisant exister l’inconnue que sa formulation dissimulait. Partager un héritage selon des proportions déterminées demande que la somme des parts proportionnées soit égale à l’héritage. Mais cela ne prescrit pas ce sur quoi doit porter le calcul des proportions.
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Ne jamais oublier que ce monde oblige à lutter, que rien n’y est "normal", et ne jamais arrêter de penser ensemble, de cultiver l’insoumission, y compris à nos propres évidences, les unes avec les autres, par les autres et grâce aux autres, n’est-ce-pas d’ailleurs le sens même de cette aventure sans cesse à reprendre qu’est le féminisme ?
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Cela les différence donc des formulations généralement reconnues comme scientifiques ou rationnelles, qui exigent qu'une bonne définition se conserve quelque que soient les circonstances, qu'une bonne explication soit valable à toute échelle. C'est ce que Anna Tsing nomme l'impératif de scalabilité. [...] Mais, en écologie, elle signifie un ravage. Le premièr exemple qu'Anna Tsing donne d'une telle opération, c'est le modèle de la plantation, avec ces monocultures et ses esclaves eux-mêmes séparés de leur culture et de leurs langues, extraits de leur mondes, sans passé ni avenir. Mais le modèle s'est étendu partout, à l'usine où nul ne doit faire d'histoire et a l'école par exemple où les savoirs sont formatés pour permettre une "évaluation objective". Cela permet des modes de gestion indépendants de l'échelle, des circonstances et des histoires, qui sont Indifférents aux relations qui peuvent se tisser, ou alors carrément ostiles.
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Reclaim l'intelligence écologique, c'est multiplier les situations où prend sens le fait que les humains sont non "dans la nature" mais de la nature, comme tous les autres êtres.
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Ce discours sur la rationalité scientifique, s’il domine encore implicitement les modes de transmission du savoir, est aujourd’hui discrédité tant par un grand nombre des acteurs qu’il est censé décrire -et notamment les physiciens les plus renommés- que par les historiens des sciences. L’énoncé d’une théorie apparaît désormais comme un acte d’invention, hautement singulier. Invention ne signifie certes pas ici arbitraire .
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L’intuition, l’imagination selon Einstein ; « Mais il faut s’arrêter un instant, et reconnaître que ce mode de caractérisation de l’invention d’Einstein ne correspond pas du tout à la manière dont Einstein lui-même définit la démarche du scientifique. Einstein, nous l’avons déjà souligné, s’oppose aux lectures empiriques et hypothético-déductives de la science, mais ce n’est pas pour leur substituer une référence à un dispositif technique tel que celui qui permet de régler la circulation sur le réseau ferroviaire. Il s’agit pour lui d’affirmer la liberté créatrice de l’homme de science par rapport aux faits, aux phénomènes dont il a à rendre compte : aucun chemin logique n’existe entre les « faits » et l’idée théorique à partir de laquelle ils prendront sens ; seules l’intuition, l’imagination mathématique sont susceptibles de créer, par un miracle que nous ne pouvons comprendre, une construction conceptuelle qui traduise la vérité objective du monde et nous permette de comprendre ce que nous observons. L’intuition, pour Einstein, a les traits d’une opération de divination ; elle confère son identité à la physique : quête d’une image fidèle du monde, tel qu’il existe indépendamment de celui qui observe, tel qu’il ne peut être conçu par un acte d’affranchissement par rapport aux données qui nous situent et nous contraignent .
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Revenons au moment du déclic. ce qui se produit est un phénomène que Koestler nomme bissociation : une synthèse intuitive immédiate entre deux zones du sens ou matrices. les deux matrices étaient données mais distantes : soit dans l’espace des disciplines, soit même dans le temps ; c’est l’intuition qui les saisit ensemble et qui (visuelle en cela) perçoit entre elles un rapport analogique qui n’avait pas encore été dégagé. Le saut dramatique qu’est le rapprochement est l’acte même de la créativité .
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On ne trouvera chez Kuhn ni le récit d’une ascèse de la raison, ni l’opposition absolue entre science et opinion. Une science, lorsqu’elle se fonde, ne se détache pas sur un fond d’erreur, elle découvre un mode de conceptualisation capable de créer l’unanimité, ce que Kuhn appelle un « paradigme ».
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En 1938, dans son célèbre article "L'analyse avec fin, l'analyse sans fin", Freud a reconnu que les guérisons produites par la cure analytique ne sont ni prédictibles, ni fiables, ni complètes.
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La singularité de l'hypnose est alors qu'il s'agit moins d'un fait "en attente de théorie" qu'un fait mettant en question la position de "jugement sur la réalité" qu'une théorie vise à instituer.
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Traduire devrait prendre du temps. Il y a des choix qui travaillent, qui doivent maturés. Traduire, c'est recréer, c'est écrire à la fois avec des contraintes et des limites. C'est écrire sur un mode où on n'a pas la liberté de l'écriture, mais où on est contraint parce que le texte original oblige.
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Adam donne un nom à chaque animal. Cet acte qui dans la Genèse définit la place de l'homme parmi les autres animaux est reproduit depuis des siècles par les savants à l'égard des multiples êtres de la nature.
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Parler de nos "faire autrement", de nos refus, mais aussi de ces sentiments d’être déplacées, de ces malaises qui attendent toujours au tournant, ne relevait plus du papotage mais d’une "mise en commun" : pouvoir sentir et dire ensemble : "Ceci importe’‘. Pouvoir en faire toute une histoire.
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Mais la biologie contemporaine dont j'ai parlé témoigne de ce que les sciences peuvent involuer, elles peuvent trahir la mission qui leur a été assignée de produire des définitions qui fassent autorité et prendre le partie de la pertinence, qui est une aventure ouverte, capable de créer des liens forts avec les préoccupations collectives. [...] Certains ricanent et disent qu'il est trop tard, mais ce qui nous attend ce n'est pas un big flash, comme peut l'être une déflagration atomique, une fin du monde brutale et instantanée, un rideau qui tomberait, ignorant les possibles qui poussent un peu partout. Non, quoi qu'il arrive, cela va se déglinguer pendant des siècles, et ça ne va pas être drôle. Alors ma hantise c'est : que peut-on fabriquer qui puisse être éventuellement ressource pour ceux qui viennent ? Et donc, pour moi, tous ces points d'intelligence, tous ces points d'émergence d'une culture écologique et sociale active qui font résurgence dans des milieux ravagés, font partie de ces ressources. Il ne faut pas leur demander s'ils sont capables de nous sauver. Mais ils couplent la lutte contre la dépendance généralisée qui tue nos mondes, et une culture de la sympoïèse, des créations de sensibilités et de rapports entre humains et non humains que génèrent ces sensibilités. Et c'est peut-être ce qui est digne d'être légué, transmis : ces points de résistance et d'intelligence qui ont déjà pu faire résurgence et qui vont continuer à la faire.
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Aujourd'hui, on voit les signes de ce que j'appellerais, à la suite de Deleuze et Guattari, une "involution". Pas d'une évolution de nos savoirs vers plus de sophistication mais une espèce de déshabituation, de désintoxication. Il s'agit de défaire les réflexes, les méthodes, les idéaux de l'intelligibilité qui bloquaient ces sciences dans une indifférence hostile, pour que quelque chose de nouveau émerge. [...]
Et l'une des penseuses qui, me semble-t-il, accompagne ce mouvement de la manière la plus opérante et innovante, c'est Donna Haraway. Avec, notamment, cette idée que les sciences où les récits importent peu sont exceptions, qu'il faut prendre soin de nos manières de raconter car c'est le récit qui rend intelligible, pas la bonne définition. Dans cette perspective là, l'opposition routinière entre les sciences sociales humaines et les sciences de la nature est une absurdité stérilisante.
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N'est-il pas temps que nous cessions de critiquer la suggestion pour comprendre que ce que nous appelons suggestion désigne en fait, pour le meilleur comme aussi évidemment pour le pire, ce qui donne aux humains la possibilité de penser et de vivre ensemble ?
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L'hypnose établit une relation alors que l'expérimentation exige, pour permettre un jugement, la séparation.
L'hypnose est donc une blessure narcissique tant pour les expérimentateurs que pour les thérapeutes. Comment s'étonner de ce qu'elle reste, aujourd'hui encore, considérée comme un phénomène "irrationnel", c'est à dire qui ne peut intéresser que des esprits amateurs de mystère et d'irrationnel, à la limite, un phénomène!ne qui, semble-t-il, "ferait mieux de ne pas exister". Et un tel jugement s'entretient de lui-même. Combien de fois n'avons-nous pas entendu dire : "L'hypnose ? Mais si c'était un phénomène intéressant, cela se saurait !" par des gens naïfs et de bonne volonté, sincèrement étonnés, qui ignorent que nos savoirs ne sont pas neutres, et que le silence pèse sur les phénomènes qui blessent le narcissisme des chercheurs.
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