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3.44/5 (sur 72 notes)

Nationalité : Royaume-Uni
Né(e) : 1964
Biographie :

Jason Goodwin est un historien et auteur britannique.

Il a étudié l'histoire byzantine à l'université de Cambridge.

Il est l'auteur d'une histoire de l'Empire ottoman et d'un récit de voyages intitulé Chemin de traverse.

"Le Complot des janissaires", couronné par l'Edgar Award en 2007, et "Le Trésor d'Istanbul" sont les premiers tomes d'une série d'enquêtes menées par Hachim, le détective ottoman. Ces deux titres ont été sélectionnés pour l'Ellis Peter Historical Crime Award.

"Le Mystère Bellini" est son troisième roman.

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Interview de Jason Goodwin par Barbara Peters. 1/6 Non sous-titré.


Citations et extraits (33) Voir plus Ajouter une citation
L'approvisionnement d'une grande cité, aimait à faire remarquer le kadi, est la marque d'une grande civilisation. A Istanbul, c'était une activité qui avait été portée presque à son point de perfection par quelque deux mille ans d'expérience et l'on pouvait dire, à juste titre, des marchés d'Istanbul, qu'il n'était pas une fleur, un fruit, uns sorte de viande ou de poisson qui n'y faisait, le moment venu, son apparition.
Une cité impériale a un appétit lui aussi impérial et, durant des siècles, la ville avait ordonné à l'immense arrière-pays de lui apporter son tribut quotidien. Là où les Byzantins avaient installé leurs jardins maraîchers, aux abords de la Thrace et de l'Asie mineure, les Turcs avaient, eux aussi, cultivé des légumes. Par les deux mers, les eaux chaudes de la Méditerranée et celles, sombres et glaciales, de la mer Noire, la ville était largement approvisionnée en poisson tandis que les truites les plus douces des lacs de Macédoine lui parvenaient dans des cuves. Des montagnes de Bulgarie arrivaient plusieurs sortes de miel pour la fabrication de sucreries par les maîtres confiseurs d'Istanbul.
C'était, à tout prendre, une activité parfaitement organisée, des pâturages des Balkans aux éventaires des marchés, avec un système permanent de commandes, d'inspections, d'achats et de réquisitions. Comme tout domaine requérant une surveillance de tous les instants, celui-ci était exposé aux abus.
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Hachim avait maintes qualités : un charme inné, le don des langues et la capacité d'écarquiller soudain ses yeux gris. Avant même de savoir qui parlait, hommes et femmes succombaient au timbre de sa voix. Mais il n''avait rien dans le pantalon.
Pas au sens vulgaire. Hachim était plutôt courageux.
Cependant, même au XIX° siècle à Istanbul, il faisait partie d'une espèce rare.
Hachim était un eunuque.
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D'une chiquenaude Hachim délogea un grain de poussière de sa manchette.
- Autre chose, marquise, murmura-t-il. (Elle le regarda sans sourciller.) Les papiers.
La marquise de Merteuil laissa échapper un petit rire.
- Flûte ! Monsieur Hachim, dépravation n'est pas un mot que nous reconnaissons à l'Académie. (Jouant de son éventail, elle lança d'une voix sifflante :) C'est un état d'esprit.
Hachim sentait déjà son rêve s'effriter.
La marquise avait tiré de son décolletage un papier dont elle usait comme d'un petit marteau pour tapoter sur la table. Il regarda de plus près. C'était un vrai.
Toc, toc, toc.
Il ouvrit les yeux et regarda alentour. Le château de Merteuil se dissipa sous la lueur de la bougie. Des ombres inquiétantes surgirent des rayons chargés de livres et des coins de la pièce. Il s'agissait plutôt d'une pièce et demie dans une maison d'Istanbul divisée en appartements, où Hachim vivait seul. L'édition en cuir des Liaisons dangereuses avait glissé sur son giron.
Toc, toc, toc.
- Evet, evet, grommela-t-il, j'arrive. (Il mit une cape sur ses épaules, enfila des babouches jaunes puis se dirigea d'un pas traînant vers la porte.) Qui est-ce ?
- Un page.
«Plutôt rassis pour l'emploi», se dit Hachim en faisant entrer dans la pièce sombre le vieil homme malingre. Le brusque courant d'air affola l'unique bougie. Deux ombres engagées dans un combat de boxe se mirent à danser sur les murs jusqu'au moment où, d'un coup de dague, la silhouette du page trans­perça son adversaire. Hachim prit le rouleau de papier et jeta un coup d'oeil sur le sceau. De la cire jaune.
Avec le pouce et l'index il se frotta les yeux. Quel­ques heures plus tôt, il scrutait encore l'horizon téné­breux, cherchant dans la bruine des lumières et le rivage. La flamme vacillante de la bougie lui rappela le balancement d'une autre lampe dans une cabine, là-bas en haute mer, lors des tempêtes hivernales. Le capitaine était un Grec au torse bombé, avec une taie sur l'oeil et une allure de pirate. À cette période de l'année, la mer Noire était traîtresse. Mais il avait eu malgré tout de la chance de trouver à s'embarquer. Même aux pires moments de la traversée, quand le vent hurlait dans le gréement, que les vagues fouettaient le gaillard d'avant, qu'il s'agitait et vomissait sur sa petite couchette, Hachim s'était dit que tout valait mieux qu'attendre la fin de l'hiver dans ce palais en ruine de Crimée, cerné par les ombres de cavaliers intrépides, rongé par le froid et la grisaille. Il lui fallait rentrer au pays.
De son pouce, il brisa le sceau d'un coup sec.
L'odeur de la mer dans les narines et le sol se déro­bant encore sous ses pieds, il tenta de se concentrer sur le texte calligraphié.
Il soupira et mit de côté le document. Au mur était vissée une lampe qu'il alluma avec la bougie. Les flammes bleutées montèrent lentement de l'étoupe cal­cinée. Hachim remit en place le verre et tailla la mèche jusqu'au moment où la lumière incertaine devint jaune et stable. Peu à peu, la pièce tout entière se trouva éclairée.
Il reprit le parchemin que le page lui avait donné et le déroula.
Salutations, et cætera. Au bas, il vit le paraphe du seraskier, le commandant pour la ville de la Nouvelle Garde, l'armée de l'Empire ottoman. Félicitations, et cætera. Il revint au début de la lettre. L'expérience lui avait appris à déchiffrer en quelques secondes une mis­sive de ce type. L'essentiel était là, glissé parmi les civilités : une convocation immédiate.
- Eh bien ?
Le vieil homme était au garde-à-vous.
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[...] Chacun avait ses idées sur le harem impérial, mais c'était essentiellement une sorte de machine. Le sultan qui injectait une nouvelle recrue dans la cohorte des concubines impériales n'était que le piston central d'un moteur destiné à garantir la production continue de sultans ottomans. Les autres, eunuques, femmes, n'étaient que de simples rouages.
Les chrétiens se faisaient du harem une tout autre image. Après avoir lu certains des romans français préférés de la Validé, Hachim avait peu à peu compris que les Occidentaux en général avaient du harem une idée très romanesque et très fantaisiste. Pour eux, il s'agissait d'un lieu de plaisir sirupeux où les plus belles femmes du monde, obéissant au caprice d'un seul homme, se livraient spontanément à des ébats amoureux, passionnés et lascifs, à d'obsédantes bacchanales. Comme si les femmes n'avaient que des seins et des cuisses, mais pas de cerveau ni de passé personnel. Qu'ils rêvent à leur guise ! songea Hachim. L'endroit était certes une machine, mais les femmes avaient leur vie, leur caractère et leur ambition. Quant aux rumeurs de lubricité, c'était simplement la vapeur que rejetait la machine.
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P60
La lecture d’Ali Pacha, c’était un peu comme regarder par le trou de la serrure et trouver de l’autre côté un œil qui vous regarde.
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Caprice de l'histoire, l'ambassadeur polonais avait été maintenu à Istanbul aux frais du sultan. C'était un retour au temps où les Ottomans étaient trop suffisants pour se plier aux lois ordinaires de la diplomatie européenne et n'autorisaient aucun roi ni empereur à se considérer l'égal du sultan. Un ambassadeur était, à leurs yeux, une sorte de plaignant devant la source de la justice mondiale et non un grand personnage bénéficiant d'une quelconque immunité diplomatique. C'est pourquoi ils avaient toujours tenu à payer ses factures. D'autres nations étaient parvenues à contester cette conception de la diplomatie. Mais dernièrement les Polonais ne pouvaient guère se le permettre. Depuis 1830, leur pays avait cessé d'exister, quand la dernière parcelle de terrain autour de Cracovie avait été avalée par l'Autriche.
Les appointements que recevait l'ambassadeur polonais ne semblaient pas couvrir le coût du maintien de l'ambassade elle-même, avait remarqué Hachim, mais ils permettaient au moins à Palewski de vivre dans un confort raisonnable. "Nous parlons de justice chrétienne, expliquait Palewski, mais la seule justice dont ait jamais bénéficié la Pologne a été le fait de son vieil ennemi musulman. Vous, Ottomans, vous comprenez mieux la justice que n'importe qui d'autre en ce monde !" Palewski se gardait de faire remarquer que les appointements octroyés étaient inchangés depuis deux siècles. Hachim, de son côté, ne disait jamais ce qu'il savaient tous les deux : que les Ottomans persistaient à reconnaître les Polonais à seule fin d'irriter les Russes.
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Hachim pressa les paumes de ses mains sur ses joues.
- Quand on est blessé, commença-t-il lentement, quand on a perdu quelque chose, ou quelqu'un, cela rend triste, n'est-ce-pas ? Parfois, le changement est salutaire, et parfois il donne juste envie de pleurer. Mais, quand on est jeune, il est difficile de croire à la douleur ou à la perte. Reste que la tristesse est un signe de vie. Les morts, eux, ne souffrent pas. Même ici, il y a beaucoup de tristesse. Même dans le temple de la félicité. Dans cet endroit béni. (Il s'arrêta un moment. Asoul n'avait bougé que pour frotter doucement la bague entre ses doigts.) Tu n'as besoin de rien dire, Asoul. Pas maintenant. Pas à moi. La tristesse t'appartient, à toi toute seule. Mais je veux te donner autre chose, en plus de cette bague. (Asoul leva le menton.) Un conseil. (Hachim inclina la tête, se demandant jusqu'où il pouvait aller. Ce qu'elle pouvait comprendre.) On ne peut rien changer, Asoul. La perte n'est jamais compensée, la douleur jamais complètement effacée. Tel est notre destin à nous, hommes ou femmes. L'amertume n'est pas une meilleure sorte de chagrin, Asoul. Le chagrin a sa place, mais l'amertume s'installe dans une blessure comme la gangrène. Insensiblement, peu à peu, elle vous enferme. Et finalement, même toujours en vie, vous êtes en fait déjà mort. Je l'ai moi-même constaté.
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[...] l'amertume s'installe dans une blessure comme la gangrène. Insensiblement, peu à peu, elle vous enferme. Et finalement, même toujours en vie, vous êtes en fait déjà mort.
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P52
Enfin, ils étaient aussi tatillons que n’importe quel Ottoman quant à la provenance de certains fruits et légumes. A Istanbul, on recherchait les concombres de Karakoy, les moules de Therapia. A Venise, Ruggerio souligna que les feuilles amères appelées radicchio devaient venir de Trévise, les artichauts de Chioggia et les haricots verts d’une petite ville de l’intérieur appelée Lamon. Ni les Turcs ni les Vénitiens ne semblaient tenir le poisson en haute estime.
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Au harem, les sourires servaient naturellement de bakchich, tout comme les froncements de sourcils et l’enthousiasme, la froideur et les propos acerbes. Sourires et trépignements étaient, au sein de ce monde clos, monnaie courante. Derrière chaque geste se cachait le désir d’être remarquée. Et, derrière ce désir, il y avait l’espoir de gravir les échelons, de monter dans la hiérarchie des femmes du harem, de se rapprocher de plus en plus du corps de l’homme dont la vie leur était, pour ainsi dire, confiée.
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Ronsard a écrit trois volumes de vers pour trois femmes différentes. La première et la dernière, Cassandre et Hélène, ne l’approchèrent point ; l’une parce qu’elle était trop belle et l’autre parce qu’elle était hideuse. C’est du moins ce qu’en disent ceux qui les ont connues ; mais Ronsard, ne voulait rien d’elles que leurs noms à mettre en sonnets, fit Cassandre plus belle encore que Cassandre, et daigna donner à Hélène tout ce que Dieu lui avait refusé. Aussi nous les voyons toutes deux incomparables.

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