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Citations de Javier Cercas (532)


Entre nous, Marin, je ne vois vraiment pas ce que tu trouves à ces romans.
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— Mr Grau disait toujours qu’une tragédie est un conflit dans lequel les deux personnes qui s’opposent ont raison.

(Actes Sud, p.32)
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La première horreur commença en été, raconte Armengol. Au début du mois de septembre, un autobus bondé d'anarchistes arriva en Terra Alta en provenance de Barcelone ; il était peint en noir et orné de têtes de mort blanches, et ses occupants se mirent à assassiner à tour de bras. En peu de temps, ils semèrent la terreur dans la comarque ; dans la comarque, mais aussi à Bajo Aragón, à Ribera d'Ebre, dans toute la zone. Ils faisaient irruption dans les villages, parlaient avec les anarchistes locaux, leur demandaient une liste des personnes de droite et les tuaient toutes.
- Pour que vous vous fassiez une idée, dit le vieil homme, à Gandesa, en une seule nuit ils ont tué vingt-neuf personnes. C'était ça la fameuse révolution espagnole, au début de la guerre : une authentique orgie de sang. Joli, n’est-ce pas ? Et après, on dit que nous, les Mexicains, nous sommes violents. Mais en vérité, en comparaison de vous, nous sommes un peuple pacifiste et compatissant.
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Cette nuit-là Melchor dort peu et mal, comme d'habitude depuis la mort d'Olga, et il se réveille à l'aube recroquevillé sur le matelas du séjour, nu, frigorifié et migraineux, tandis que dans son esprit trotte une question rhétorique que Jean Valjean se pose au début des Misérables et que Melchor n'a pas cessé de se poser depuis qu’Olga est morte - "La destinée peut-elle donc être méchante comme un être intelligent et devenir monstrueuse comme le cœur humain !"-et qu’il a la même pensée que tous les matins au réveil depuis lors : il n'a pas retrouvé ceux qui ont tué sa mère, mais il retrouvera ceux qui ont tué sa femme.
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Et, pour quelque raison inconnue, [Cosette] lisait davantage des auteurs que des livres ; quand elle aimait un écrivain, elle finissait tous ses livres, même si tous ne lui plaisaient pas, ou même si elle ne les comprenait pas (dans une rédaction, elle écrivit un jour qu’elle préférait les livres mauvais des auteurs qu’elle aimait aux bons livres des auteurs qu’elle n’aimait pas) : c’est ainsi qu’elle lut, avant ses dix-sept ans, tout Stephen King, tout Ursula K. Le Guin, tout Pere Calders, tout John Irving, tout Roald Dahl, tout Sergi Pàmies, tout Huraki Murakami.
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Suite à l'assassinat de sa mère, Melchor abandonna les ateliers qu'il fréquentait et arrêta toute activité sportive sur les terrains de la prison. II se replia sur lui-même. Il prit du poids. Il ne parvenait plus à dominer ses pensées, aussi ses pensées le dominèrent-elles, des pensées morbides et immuables, obsédé qu'il était par ce qui était arrivé à sa mère ou par ce qu'il imaginait lui être arrivé. Les deux seules activités qui soulageaient en apparence son obsession étaient précisément celles qui l'alimentaient le plus : parler avec Vivales et lire Les Misérables, qui durant ces jours de deuil cessèrent d'être pour lui un roman pour devenir autre chose, quelque chose qui n'avait pas de nom ou qui en avait beaucoup, un vade-mecum vital ou philosophique, un livre oracle ou sapiential, un objet de réflexion à explorer tel un kaléidoscope infiniment intelligent, un miroir et une hache. Melchor pensait souvent à Mgr Myriel, l'évêque qui fit de Jean Valjean M. Madeleine, le saint persuadé que l'univers est une immense maladie dont le seul remède est l'amour de Dieu, il pensait à l'évêque et se disait qu'il était vrai que l'univers est une maladie, comme le croyait l'évêque, mais que, contrairement à l'évêque, il vivait dans un monde sans Dieu et que dans ce monde il n'y avait pas de remède contre la maladie de l'univers. Bien évidemment, il pensait à Jean Valjean et à sa certitude que la vie était une guerre et que dans cette guerre, c'était lui le vaincu et les seules armes à sa disposition, les seuls carburants, étaient le ressentiment et la haine, et il sentait que Jean Valjean c'était lui, ou qu'il n'y avait aucune différence essentielle entre eux deux.
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Melchor prit au hasard quelques livres courts qui l'ennuyèrent au point qu’il ne les finit pas. Le jour où il les rendit à la bibliothèque, le Français était en train de cataloguer un livre très épais, en deux tomes, intitulé Les Misérables. Inévitablement, Melchor se souvint de l'admonestation récurrente de sa mère : "Si tu veux être aussi misérable que moi, ne travaille pas à l'école."
- Tu l'as lu ? demanda-t-il.
- Évidemment, répondit le Français. C'est un roman très connu.
- Et c’est bon ?
- Ça dépend.
- Ça dépend de quoi ?
- Ça dépend de toi, répondit le Français. L'écrivain fait la moitié d'un livre, l'autre moitié, c'est toi qui la fais.
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Melchor lève de temps en temps le regard du livre et observe cet homme qui durant des années a été son compagnon le plus fidèle et son meilleur ami, sans penser à rien ou se disant que, jusqu’à ce que sonne l’heure de la vérité, quand tous les masques tombent, nous ne savons jamais qui nous sommes.
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— Ça signifie qu’elle dit uniquement ce que les gens veulent entendre ?

—Plus ou moins. Et aussi qu’elle n’a pas grand-chose à dire, même si elle le dit très bien. C’est la clé du succès en politique, pas vrai ?


(Actes Sud, p.184)
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Voilà, c'est tout ce que je voulais vous raconter : les romans ne servent à rien, sauf à nous sauver la vie.
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Tout ce que je sais c'est que les politiciens ne sont ni de droite ni de gauche : ce sont des politiciens, point barre. Ils ne s'intéressent qu'au pouvoir. Le reste ils n'en ont rien à cirer.
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C'est son sixième whisky,répondit le barman à la place de Mechor. Dommage que c'était pas du coca: il serait déjà mort.
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La bataille n'a fait que laisser des blessures visibles, continua-t-elle, comme si elle ne parlait pas à Melchor mais à elle-même. Les tranchées, les ruines, les collines jonchées d'éclats d'obus, toutes ces choses que les touristes aiment tant. Mais les vraies blessures, ce ne sont pas celles-là. Ce sont celles que personne ne voit. Celles que les gens conservent secrètement. Ce sont elles qui expliquent tout mais, de celles-ci, personne n'en parle. Et, qui sait, c'est peut-être mieux comme ça.
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"Oui, mais il n'est pas entré en politique parce qu'il n'avait pas le choix, comme Rosell. Il l'a fait parce qu'il a voulu, c'est-à-dire, parce qu'il a vite compris que la politique est une extension des affaires... C'est comme ça que ces gens-là ont toujours conçu la politique. Même s'ils ne le disent pas en ces termes."
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- Il y a quelqu'un par là ?
Le soldat regarde Sanchez Mazas; celui-ci fait de même, mais ses yeux embués ne comprennent pas ce qu'ils voient : sous les cheveux mouillés, le large front et les sourcils perlés de gouttes, le regard du soldat n'exprime ni compassion, ni haine, pas même de mépris, mais une espèce de joie secrète et insondable. Il y a en lui quelque chose qui confine à la cruauté et résiste à la raison, mais qui n'est pas pour autant l'instinct, quelque chose qui vit là avec la même persévérance aveugle que le sang qui s'obstine dans ses veines ou que la terre dans son immuable orbite ou tous les êtres dans leur opiniâtre condition d'êtres, quelque chose qui échappe aux mots de la même manière que l'eau du ruisseau esquive la pierre, car les mots ne sont faits que pour se dire eux-mêmes, pour dire le dicible, c'est-à-dire tout, hormis qui nous gouverne ou nous fait vivre ou nous touche ou ce que nous sommes, ou ce qu'est ce soldat anonyme et vaincu qui regarde à présent cet homme dont le corps se confond presque avec la terre et l'eau brune du fossé, et qui crie en l'air avec force sans le quitter des yeux :
- Par ici, il n'y a personne !
Il fait ensuite demi-tour et s'en va.
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... s'il est vrai qu'on fait la guerre pour l'argent, qui est pouvoir, les jeunes gens, eux, partent pour le front et tuent et se font tuer pour des mots, qui sont poésie. C'est pourquoi ce sont toujours les poètes qui gagnent la guerre...
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En face de lui, Salom ronfle légèrement, les mains croisées sur le ventre, son thorax se levant et descendant au rythme de sa respiration ; l’air qui entre et sort de ses narines berce comme une brise les poils de sa moustache.
(page 305)
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C’est un après-midi sans vent, les éoliennes se profilent sur le bleu cobalt du ciel, immobiles tels de gigantesques insectes endormis.
(page 220)
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L’inspecteur veut savoir qui est Damián Carrasco et Melchor lui répond que c’est un vieil ami dont il a perdu la trace.
- C’est ça, et moi je suis Mahatma Gandhi. Arrête des conneries, réplique Blai. Qu’est-ce que tu trames, raconte-moi un peu.
(page 183)
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La douleur était si grande que l’esprit est parti dans une direction et le corps dans l’autre ; plus précisément, l’esprit a abandonné le corps à son destin, pour que le corps souffre tout seul, comme si l’esprit s’était déconnecté du corps pour ne pas avoir à souffrir avec lui… C’est la forme extrême du blocage.
(page 177)
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