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3.9/5 (sur 29 notes)

Nationalité : Chine
Né(e) à : Shangluo , le 21/02/1952
Biographie :

Jia Pingwa est un écrivain chinois.

Il a été contraint par la révolution culturelle d'interrompre ses études secondaires pour devenir paysan pendant cinq ans (Mouvement d'envoi des zhiqing à la campagne).

Entré en 1972 à l'université de Xian où il vit désormais, il s'est rapidement imposé comme un écrivain important.

Depuis 1977, il fait de la peinture du milieu paysan son sujet de prédilection : superstition et sexualité tiennent une place de choix dans ses descriptions naturalistes (Le porteur de jeunes mariées, 1992).

Mais il doit sa notoriété à La Capitale déchue (1993), qualifié par la critique chinoise de roman pornographique ; autocensurée, l'œuvre confère à la grande ville les dimensions mythiques d'une énorme puissance corruptrice.

Il obtient le Prix Femina étranger en 1997 pour son roman La Capitale déchue.
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Bibliographie de Jia Pingwa   (6)Voir plus

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Citations et extraits (8) Ajouter une citation
Je regagnai la ruelle où j'habitais. Assises devant leur porte, les femmes s'affairaient dans le calme, qui à éplucher les légumes, qui à coudre, tout en commentant les derniers potins : la querelle qui avait tourné en pugilat entre Gao Feng et Sanwa ; les jours heureux et la vie douce que coulait la famille Unetelle. Pourtant le couple n'avait que deux filles, pas fichu d'enfanter un mâle, malgré toute sa richesse. On ne pouvait pas tout avoir, la perfection n'existait pas. Et la ribambelle de gamins de la famille Machin-Truc ? Tiens, et la femme de Wei Xiaoxiao, ce n'était pas sa faute, corrigea une autre, mais celle de son mari. On dit que quand un homme, un vrai, va uriner, il a besoin de ses deux mains pour tenir son engin. Eh bien, à lui, le brave garçon, deux doigts suffisaient largement vu qu'il avait une quéquette grosse comme une cigarette ! Sa femme n'avait qu'à recourir à un géniteur, c'était pas compliqué ! Les cancanières laissèrent tomber leurs ouvrages et se mirent à passer en revue ceux qui pourraient faire l'affaire. Celui-là, oui, d'accord ; celui-ci, surtout pas ; éventuellement celui-là, non, en fait, ce n'était pas le parti idéal. L'énumération achevée, elles éclatèrent de rire.
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Il existait une vaste terre, un pays abandonné, peuplé de pierres nobles et variées, sillonné de cours d'eau limpides. Y poussaient une végétation luxuriante, des fleurs éclatantes. Un éden et une nature idyllique. Un jour, quelques hommes et quelques femmes, d'une intelligence extrême, découvrirent cet endroit. Ils bâtirent une première maison et un âtre d'où s'éleva de la fumée. Pour vivre, ils labourèrent la terre. Puis ils se multiplièrent, les familles s'agrandirent. Ils construisirent de nouvelles maisons, et des chemins pour les relier. Des villages se formèrent ainsi, avec des écoles et des petits commerces. Mais les villages grossirent et se transformèrent en gigantesques métropoles avec leurs tours, leurs banques, leurs organisations politiques et leurs voitures de luxe. La civilisation se développa, mais au détriment de la beauté de la nature. La pollution était née : pollution de l'environnement, pollution intellectuelle, spirituelle. Les hommes durent affronter les turbulences de l'existence moderne, l'insécurité et les épidémies. En songeant au paradis perdu, le dimanche, ils retournaient se promener à la campagne, cultivaient des fleurs dans leur jardin. Les villes se ruinèrent pour construire de somptueux parcs zoologiques ou botaniques. Hélas, un jour, une ultime dispute éclata ; que faire pour arriver à franchir un second pas vers la civilisation ? Personne ne savait répondre, mais impossible d'esquiver la question. C'est alors qu'un génie...
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"Chaque matin, distribue à tous les mâles du village un préservatif. Pas de préservatif, pas de relation sexuelle ! Nous ne pouvons certainement pas nous permettre de déroger à la politique gouvernementale de planification des naissances."
C'est à ce moment que Xingben entra.
"Et ta femme ?" rugit Cheng Yi, vert de rage, en tapant du poing sur la table.
Affolé, Xingben se tassa sur lui-même en tremblant.
"Quoi, ma femme ? Depuis hier soir je jouais au mah-jong chez Gao Feng. Qu'est-ce qu'il y a ?
- Ton emploi du temps, je le connais, inutile de me le répéter, hurla Cheng Yi. Saurais-tu par hasard que ta femme est enceinte ?
- Oui, je sais.
- Pourquoi ne l'as-tu pas fait avorter ? Tu as déjà deux mômes et le troisième arrive ! Tu ne manques pas d'air. Que tu me prennes pour un con, soit, mais la justice d'Etat c'est une autre affaire ! Tu vas t'amuser, crois-moi !
- Mais je n'y suis pour rien, protesta Xingben. Après le premier accouchement, on lui a posé un stérilet, et pourtant elle est de nouveau tombée enceinte. On ne pouvait pas imaginer que les stérilets fournis par l'Etat ne servaient à rien. A l'époque, notre ancien maire qui avait cru que nous avions retiré le stérilet lui avait fait passer une radio. Il a bien vu que nous n'avions pas menti, le stérilet était toujours là. Elle est encore enceinte, mais on ne s'y attendait pas. Sans doute la volonté céleste ! Qu'est-ce que j'y peux, moi ?
- Arrête tes histoires, tu ne m'auras pas ! ricana Cheng Yi. Ecoute-moi, ce matin j'ai précisément emmené ta femme passer une radio. Tu sais aussi bien que moi que son stérilet était accroché à sa ceinture ! Va la chercher ! Elle est à l'hôpital près de la porte sud de la ville !
- On lui a fait un curetage ! s'écria Xingben avant de s'éclipser.
- Hé, reviens ! hurla Cheng Yi. Voici la facture du taxi qui nous a conduits à l'hôpital. Dix yuan, s'il te plaît !"
Ahuri, Xingben se vit contraint de poser sur le bureau un billet de dix yuan.
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Pissechien avait été surpris. Il avait juste escaladé l’armoire pour renifler l’odeur qui venait de la paroi. Comment le flacon d’huile pendu au crochet avait-il pu tomber ? C’était une précieuse céramique ornée de fleurs vertes, une antiquité. Sa grand-mère racontait que le jour de son arrivée à Gulu, le jour de son mariage, on se servait déjà de ce flacon pour conserver l’huile de soja. Même si les fours à céramique de la colline du village tournaient pendant un siècle, ils n’arriveraient pas à égaler son degré de raffinement. Pissechien s’était donné la peine de caler la table basse sur laquelle il avait placé son tabouret, mais, parvenu au sommet de l’armoire, le crochet avait plié, et cédé. Impuissant, il avait suivi des yeux la chute du flacon qui avait fini en mille morceaux. Sur le seuil, sa grand-mère peignait sa chevelure abondante bien que déjà grise. Elle ôtait du peigne des mèches qu’elle enroulait, puis glissait dans les lézardes du mur, à côté de la porte. Il y avait déjà de nombreuses pelotes. Pissechien savait que lorsqu’il entendrait Laisheng sur son vélo chargé de marchandises vanter ses articles à l’entrée du village, près du lion en pierre, le moment serait venu pour lui d’aller troquer ces petites pelotes contre du maltose. La grand-mère de Pissechien voulut savoir d’où venait le bruit. « Le flacon est cassé », dit Pissechien.
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"Vous croyez peut-être que personne ne soupçonne ce que vous manigancez ? Tandis que nous nous échinons à préserver notre village, vous attendez avec impatience qu'il soit rayé de la carte et que, sitôt les vieilles maisons démolies, les neuves poussent comme des champignons après l'averse. Et vous avez la conscience tranquille ?
- Exact, c'est ce que j'espère, tonitrua-t-elle. Quel est l'intérêt de s'obstiner à conserver ces vieilles bicoques en ruine, sans air conditionné, sans eau courante, sant tout-à-l'égoût ? Tu préfères vivre dans ces taudis plutôt que dans des maisons à l'occidentale ? Réponds-moi franchement, tu aimes mieux être une campagnarde ou une citadine ?
- Même si vous habitez à la ville, vous resterez toujours une paysanne.
- Parfaitement ! Mais dès qu'on acquiert un peu de savoir, une fois en ville, on trouve un travail ! Pas vrai ? C'est pas toi qui étudies à longueur de journée qui vas le contredire ?
- J'arrête d'étudier ! déclarai-je. Et puisque vous êtes si maligne, adressez-vous directement au maire !"
Écumante de colère, je rentrai dans la maison.
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Cheng Yi avait donc été au Tibet. Pour quelles raisons ? Mystère. Il se refusait à tout récit de son voyage. Les villageois qui adoraient, sans malveillance d'ailleurs, les commérages ne se privaient pas d'émettre toutes sortes de supputations quant à ses aventures. L'endroit privilégié pour commenter ou colporter des ragots n'était autre que les latrines publiques du village. Construites à l'époque où les campagnes devaient prendre pour modèle la commune populaire de Dazhai, elles ne comptaient pas moins de quarante-huit trous. On imagine l'animation des débats ! Les toilettes avaient beau regorger de merde, dégouliner de pisse, les vers y frétiller en colonies et les mouches y voler en escadrilles, les gens prenaient plaisir à venir y polémiquer et palabrer. Dans ce lieu privilégié, on débattait aussi des sujets de plus haute importance, des grandes questions politiques, tant nationales qu'internationales : à savoir si l'Organisation des Nations Unies était un pays ou un bâtiment, si l'ère de Mao Zedong avait été meilleure que celle de Deng Xiaoping, ce qu'il en était du problème de l'indépendance de Taiwan ou de son rattachement au continent par la force armée...Finalement, les villageois accroupis au-dessus de leurs trous, tout en ronchonnant que cette posture était fatigante et qu'il fallait suggérer au Comité du village de prévoir un budget pour l'installation de cuvettes confortables, avaient tiré la conclusion suivante : Cheng Yi était allé au Tibet faire du trafic d'objet anciens et y avait laissé la main. Car, vu l'état de la médecine et des soins dans le reste de la Chine, il n'y avait que là-bas, dans cette région lointaine, qu'on avait pu greffer une main de femme à un homme. Cheng Yi ignorait les trois quarts des racontars qui couraient sur lui. Sitôt le seuil des latrines franchi, les gens se montraient discrets. La seule chose que les villageois se permettaient, histoire de s'amuser et bien que ce ne fût pas dans nos coutumes, c'était de lui serrer cette fameuse main en le saluant. En effet, la main réagissait, affirmait-on, de manière différente selon qu'il s'agissait d'une femme ou d'un homme : elle étreignait avec beaucoup plus d'ardeur celle d'un homme...
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"As-tu mangé ?" me demanda en souriant Cheng Yi que je croisai dans la rue. Je lui fis remarquer que, désormais, dans sa position, ses manières devaient s'améliorer. Les temps avaient changé. Si les villageois persistaient à utiliser cette formule traditionnelle pour se saluer, cela impliquait qu'ils ne mangeaient pas à leur faim et que par conséquent, lui, Cheng Yi, était un mauvais maire.
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Il faut apprendre à apprécier ce qu'on ne peut supporter.
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