Quant à mon compagnon, Don Montuori, il m'a, comme d'habitude, tout donné : les yeux, les oreilles, le cœur. Tous les remerciements du monde ne suffiraient pas à couvrir ma dette.
Quand Chateaubriand fût présenté en 1787 à la cour, il fut gratifié par Marie-Antoinette d'un sourire qui dût le fasciner car, dix-huit ans plus tard, il croyait retrouver le même dans une fosse ouverte au cimetière de la Madeleine. " Au milieu des ossements, je reconnus la tête de la reine par le sourire que cette tête m'avait adressé à Versailles", nous confie-t-il, sans rire, depuis sa tombe.
Il n’avait jamais imaginé qu’on puisse tour à tour taquiner et savourer, se remémorer et sublimer… encore des verbes ! Il est des jours où lui aussi s’imagine ainsi, conjugué à tous les temps et à toutes les formes. Et d’autres où il se sent…
Amants.
Le temps passe mais le terme garde pour Harriot tout son mystère. Il se prend à admirer l’esprit pratique des Romains qui, conscients de la fugacité de leur quête, inventèrent une cohorte de verbes pour la qualifier. Amare. Diligere, delectare, placere, observare.
Parmi ce fouillis linguistique, quel mot correspond le plus à son sentiment ? Amare, oui, il en a fait l’expérience. Lorsqu’il est arrivé pour la première fois à Londres, il a fréquenté la Calotte du Cardinal, une maison close où les femmes vives et expérimentées, vautrées sur des draps déchirés, exigeaient leurs dix-huit pence d’avance pour se déboutonner, le temps de finir leur affaire.
On ne peut faire confiance à sa vue, pas plus qu’aux autres sens, et seule l’obstination permet d’atteindre l’autre côté. Le côté opposé.
Quand on voit une suite de lettres, on la lit comme du texte. Et c’est exactement ce qu’il veut qu’on fasse. Le secret, c’est d’oublier le contenu pour ne s’intéresser qu’à la forme.
La vanité d’acteur ne semble pas être chez lui un trait de caractère. Il s’agite, grommelle, griffonne, perd sa page, s’en prend à sa plume… Bref, il agit comme un homme esclave de son tempérament.
Ce n’est pas parce qu’il ne s’est jamais marié qu’il n’a jamais été amoureux.
À l’époque, la langue n’était pas standardisée. Il n’y avait pas de dictionnaire de référence, et les gens ne pensaient pas qu’il devrait y avoir une graphie attestée pour chaque mot. C’étaient donc la prononciation et la logique qui dictaient la façon d’écrire de chacun. Le nom Shakespeare, par exemple, avait quelque chose comme seize orthographes différentes. D’ailleurs, lui-même n’écrivait pas son nom comme nous le faisons aujourd’hui.
Certaines de mes meilleures transactions ont été conclues à des enterrements. Comme je dis toujours, de la mort jaillit la vie.