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Citations de Lucien Suel (103)


J'écris comme je veux. Je suis une loque, on ne va pas me repasser. Je sèche au bord de l'évier. Je moisis avec comme une toile d'araignée qui pousse sur ma joue et aussi plus bas sur mes mollets, des fils grisâtres.
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Ce n'est pas du hasard Emile Emilie. Je les fais circuler à l'intérieur de moi, mon corps je veux dire : noyade dans l'estomac, accident au genou, mort subite dans le bras gauche, cancer dans la rétine, boyaux rouges. L'innocence perdue avec des cheveux gris.
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Mauricette demandait l'explication, voulait connaître le pourquoi du chagrin. Elle était toujours au bord de la flagellation, de l'auto-mutilation, avec un regard scalpel, regard laser fixé sur le détail révélateur de la misère humaine, le gravier dans la chaussure, le bout de pain mouillé à l'orée d'une narine, ou la couleur bleutée du liquide vaisselle.
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Depuis hier, j'ai l'impression que mon coefficient de gravité a évolué. Comme si j'étais sur la pointe des pieds. Je me suis rapprochée des étoiles. Et en même temps, en esprit, collée à la terre. Sensation agréable. La vérité m'a libérée.
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Le temps reste doux mais le bleu a disparu. Seule à ma table, j'écoute le balancier du carillon et les voix du vent, basse continue au ras du toit et soudaines attaques en crescendo qui se manifestent à la vue par des oscillations rapides de toutes les tiges, du petit buisson de thym aux souples baliveaux.
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Pas d'esprit qui me guide la main. Je me débrouille comme je peux. M'appuie sur les vies précédentes. Stock antique, sans remonter aux pharaons ou aux paysans plantés dans les boues du Nil. Une charpente, un cadre. Serrée dans le plan.
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Les gens disparaissent. Les objets aussi. Bretelles. Bouteilles d'encre. Échelles en bois. Ballots de paille. Pierres à aiguiser. Transistors. Pellicules photo..
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Blanche n'est pas une demoiselle, mais elle surgit dans ma vie au moment où la nuit commence à reculer. Quelques secondes chaque jour, quelques oscillations du balancier.
Trajectoire noire et jaune d'un merle sautillant dans les feuilles mortes, puis éclat rouille et beige d'un rouge-gorge. Je m'interromps dans mes réflexions, laissant mon regard errer sur le jardin à travers la vitre. J'ai pris l'habitude de la solitude, pas de l'isolement
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L’octobre luit entre les cumulus. Sur la baie de Wissant, les cerfs-volants prennent l’air. L’ouest calcaire fixe les falaises anglaises, mur blanc sur les vagues entravées de la Manche. La jeune fille décortique le crabe, suce la praire et le bigorneau. Les moules d’Équihen, adolescentes collées, puis détachées du Fort, livrées au litre à la table d’éventaire, se parfument au vinaigre de branchies. C’est la pluie qui leur donne la douce illusion d’un sursis. Petite moule, serre très fort ton muscle adducteur ! Ne laisse donc plus les enfants cruels tirer sur ton byssus. Écoute la sirène du car-ferry qui enfantera les trailers et la tôle rutilante des cruisers.
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Vienne l’époque de la terre brûlée ! Torche humaine à l’aplomb de l’univers. La fumée pique les yeux et monte à la tête. Les vies transformées des graminées, composées et autres crucifères s’échappent dans un vol de gaz carbonique et de bitume au milieu des pensées (autres fleurs) essentielles d’un navigateur céleste.
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[…] les dizaines de milliers de pages que tu as absorbées tournent sans cesse dans les tiroirs et les étagères de ton cerveau, tu te souviens des noms des auteurs, des titres des livres et même du nom des éditeurs et des collections, tu reconnais les couvertures, les tranches colorées, tu distingues les différents éditeurs à la couleur de la couverture, au format du livre, tu repères de loin dans les cartons les logos de tes préférés, tu recopies des paragraphes entiers, tu apprends par cœur des poèmes et des citations, tu lis les biographies et la correspondance de tes favoris, tu cites des phrases et des vers, tu prêtes des livres, tu perds des livres, tu les rachètes, tu ne t’en lasses pas ; quand tu es dans le jardin, tu considères les saisons comme les chapitres d’un livre familier que tu relis régulièrement, chaque année tu écris de nouvelles pages dans la terre du jardin, tu rédiges des brouillons successifs, tu élagues, tu mets au propre, tu relis tu déchires, tu chiffonnes des boules de papier, tu jettes au fumier, tu recommences, l’écriture te nourrit, tu rédiges les versets de la terre, tu graves dans la glaise, ton corps est ton dernier volume, les rides et les cicatrices, les plis et replis, les bosses et les creux racontent ton histoire et celle de tes frères ; il pleut sur le livre abandonné près du fauteuil du jardin, les pages sont trempées, même le vent ne parvient pas à les tourner, l’encre noire coule dans les allées, le ruisseau d’encre grossit, devient une rivière, coule vers la Lys, coule vers l’Escaut, traverse le pays, rejoint la mer du Nord, l’encre glisse dans la mer, les lettres les mots les phrases sont emportés par la bourrasque, par l’érosion incessante, tu les suis des yeux le plus longtemps possible, tu retiens les plus beaux mots, laitue blonde de la passion, reine de mai, mâche ronde verte à cœur plein, tu retiens tous ces mots, tu les retiens par cœur, ton cœur se remplit de mots, il déborde il éclate, les mots se répandent dans ton corps tout entier, ils parcourent tes veines comme des alcaloïdes stupéfiants, ils se nichent dans ton estomac et tes intestins veloutés, ils se cachent au détour d’une articulation, entre tes vertèbres sacrées, ils rampent à l’intérieur de tes os dans la moelle jaune et grasse, ton sang charrie tous les mots de l’amour et de la violence, les pseudopodes de tes globules blancs se saisissent des mots les plus longs, en séparent les syllabes et les digèrent sans coup férir, mais un jour cependant, les choses changent, tu constates l’invasion de ton corps par les profanateurs de littérature, les slogans de la télévision comme de longs vers répugnants s’introduisent dans tes oreilles, rampent entre les osselets, circulent sous les méninges de ton système nerveux, ils s’accouplent tête-bêche à l’intérieur de ta tête, tu regardes l’éclosion dégoûtante des parasites, tu les vois migrer, ton corps devient le champ de bataille de la poésie, ta peau se soulève par endroits, révélant l’ardeur des combats engagés entre les mots du dedans et ceux du dehors, ta température s’élève brutalement, tu te sens impuissant, tu assistes en spectateur à la lutte finale, tu es terrorisé, tu sens venir la fin, tu crains à tout moment de voir apparaître au milieu de l’écran noir sous tes paupières fermées cette sentence ultime THE END, tu voudrais apporter des retouches au script mais toute retouche est interdite, tu ne maîtrises plus rien et de toute façon ton […]
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Je vous salue, briques carminées dans votre brouette grinçante et cabossée.
Je vous salue, percale humée sous les manteaux, doublure douce et luisante.
Je vous salue, minium argenté coulant le long des rayons d’un vélo rouillé.
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L’écriture, panache de vapeur dans le vent, va laisser place au chatouillis des touches, au trottinement constant et hâtif des souris...
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… les idées du chevreuil et du babouin, l’instinct du lombric, les sentiments du chardonneret et ceux de la moule à l’étal, tout ce travail en silence se fond dans l’amalgame animé qui fume à l’aplomb de la terre. L’être vivant y aspire et refoule son image, son âme, son imagination. C’est une ellipse de l’infini. Nous sommes sortis de cette imagination.
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 Nous vaquons sous les nuages ventrus. Nous mourons les mains vides et l’âme lisse. Nos yeux plongent dans le sang des restants, dans la tête des perdus en terre, dans le cœur usé des pieux versets. Notre empreinte s’évapore au centre de la croisée impavide et nue.
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tu n'en peux plus de cette douceur de cette violence, tu te cuirasses, tu ne contrôles rien, tu t'écoules dans le flot du temps, la musique s'éloigne, tu revois l'enfant vêtu d'une aube blanche, il a les yeux bleus et les cheveux blonds, il ressemble à Thomas, il ne dit rien, se tient près de toi, le rouge-gorge s'est posé sur son épaule, une autre silhouette se tient près de lui, c'est ton amour qui te regardes
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tu tournes très lentement sur toi-même sous la cascade bienfaisante, petit à petit toujours en tournant, tu plies les jambes, tu t'accroupis jusqu'à ce que l'eau t'arrive aux épaules, puis tu te détends complètement jusqu'à t'asseoir sur le fond du bassin, à ce moment l'eau monte jusqu'à ton menton, pris d'une impulsion subite tu te laisses glisser, tu t'allonges sur le dos au fond de l'eau les yeux grands ouverts, tu vois la cascade descendre vers toi dans un nuage de bulles.
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le couvercle de la lessiveuse galvanisée se soulève rythmiquement comme si le linge respirait à pleins poumons dans l'eau savonneuse, les corbeaux font des taches noires sur la neige des champs, tu les vois aussi à Amsterdam dans le musée Van Gogh hurlant au dessus des blés mûrs, tes yeux se mouillent, tes oreilles gelées roulent sous tes doigts qui tâtent, soulèvent les croûtes séchées, tu t'approches du grand miroir de la garde-robe en titubant sur des escarpins trop grands pour toi, les plombs sautent, la platine soulevée de la cuisinière à charbon projette des ombres effrayantes, les chandelles fondent lentement empalées sur les piques du plateau circulaire, flammes agitées par les courants d'air sous le porche
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les premier à sortir sont toujours les mêmes, navets et radis, deux petites feuilles arrondies, cotylédons fragiles qui étaient embryonnaires dans le ventre de la graine ronde, ils commencent déjà à transformer la lumière en chlorophylle, filtrant le carbone de l'air tandis que le fil blanc de leur racine se glisse s'allonge vers le bas dans l'humus entre les déchets organiques et les agglomérats terreux, tu repères aussi la sortie au jour des laitues et des épinards, les tiges dressées des bébés poireaux et oignons, lignes de cheveux verts hérissés entre la pourpre des betteraves et les papillons petits pois
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tu as beaucoup travaillé, le jardin n'existait plus, abandonné depuis des dizaines d'années, juste quelques mètres carrés de chiendent de chardon et d'orties cernés par la profusion des arbustes plantés par les oiseaux, aubépines aux longs couteaux pointus pics à glace dirigés vers tes yeux, prunelliers encastrés les uns dans les autres, églantiers et ronces entortillés autour des troncs, dégringolant du ciel, t'enfonçant des épines dans la tête, "ecce homo", tu t'échines tu t'esquintes tu frappes et coupes et creuses et arraches et scies et brûles et déchiquettes pendant des jours et des jours, t'écroulant sur le dos dans la terre mise au jour, la sueur ruisselle traçant des lignes noires dans la poussière qui recouvre ta poitrine, ton coeur cogne ton coeur cogne, la sueur tombe dans la terre sur le corps des fourmis, tes muscles sont brûlants,
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