Citations de Marie Desplechin (440)
Avez-vous déjà remarqué que l'amour est très différent de la pâte d'amandes? Imaginez que vous vouliez très fort de la pâte d'amandes. Vous demandez poliment:
-je peux avoir de la pâte d'amandes?
-mais oui, bien sûr, vous répond l'adulte de service.
Vous vous servez. Vous mangez. Vous en reprenez un peu, pour voir. Délicieux. Vous vous gavez comme un pourceau. Et que notez-vous au bout d'un moment? Vous notez que la question de la pâte d'amandes ne se pose plus. Du moins tant que vous n'avez pas digéré cet amas sucré qui vous écrabouille l'estomac. Vous êtes tranquille.
Prenez maintenant l'amour. Vous demandez poliment:
-Est-ce que tu m'aimes?
-Mais oui bien sûr, vous répond l'adulte de service.
Vous êtes bien avancé. Car que notez-vous? Que vous n'avez rien de plus. Que la question de l'amour se pose toujours.
-tu m'aimes comment? demandez-vous alors, en espérant une réponse qui ait la consistance de la pâte d'amande.
J'accepte parce qu'il me reste une goutte d'amour dans ma flaque d'amitié. Mais méfie- toi j'ai peur que tout s'évapore et que bientôt il n'y ait plus rien, ni mare, ni flaque, ni goutte de rien du tout.
On n'est jamais si bien trahi que par sa famille.
p. 106
A force de traîner à longueur de week-ends dans l'appartement vide, j'arrivais complètement déprimée au lundi matin. Il me fallait une journée d'école pour me remettre le moral à flot. Heureusement qu'il existe une école pour réparer les soucis familiaux.
p. 93
j'ai laissé le découragement m'envahir tandis que le temps filait tragiquement. Il serait bientôt cinq heures, l'heure de me rendre , chez Pierre , au rendez-vous que Neville m'avait donné la veille au soir, par téléphone
« Vous dites souvent que les enfants incarnent le futur, et que vous feriez n’importe quoi pour eux. Si vous pensez ce que vous dites, s’il vous plaît, écoutez-nous. Nous ne voulons pas de vos encouragements. Nous voulons que vous preniez au sérieux l’urgente crise environnementale qui se déroule autour de vous. Et nous voulons que vous commenciez à dire la vérité. » Greta Thunberg
- Quel malheur qu'il soit mort si jeune en vous laissant avec votre petite fille !
- Mais quelle chance pour moi de l'avoir connu et de l'avoir aimé, ai-je dit.
- Tu vas t'entraîner. Je veux que tu saches bien lire. Je veux que tu sois la plus forte à l'école.
Je ne dis plus rien pour ne pas l'énerver. Je ferme les yeux et je pense dans ma tête : " Je m'en fiche de lire. Je m'en fiche d'être la plus forte à l'école."
( p 11)
Chez moi, on ne mange ^pas de viande de porc, c'est comme ça, la religion. Je demande à Sylvie :
- Il n'y a que des chrétiens ici?
- Des chrétiens et des juifs aussi. Mais je vais être franche avec toi : personne ne croit plus tellement en Dieu.
Je n'en crois pas mes oreilles.
- QUOI ??? Tu ne crois même pas en Dieu?
Sylvie rit mais je suis inquiète.
- Tu crois en quoi alors ?
( p 45 )
Elle aurait pu faire l'effort de m'appeler Violette. Mais non, il a fallu qu'elle choisisse Verte. Quelquefois j'ai envie de l'attaquer en justice. Mais quelquefois je l'aime et j'ai envie de lui offrir des vacances de rêve à Honolulu. Rien n'est plus fatigant qu'une mère. Étant entendu que je ne sais pas ce que c'est qu'un père.
Les sorcières ne peuvent passer leur pouvoir qu'à l'aînée de leurs filles. Voilà pourquoi la plupart d'entre nous se contentent de donner le jour à une seule gamine. C'est bien assez de souci. Franchement, quand on n'aime pas beaucoup les enfants, pourquoi s'encombrer de toute une tripotée de braillards sans le moindre avenir dans la profession.
Eh bien, ma petite fille, laisse-moi te dire qu'elle est un peu insuffisante (ta réponse), si un homme peut se permettre d'avoir un avis. Si je pensais comme vous, j'interdirais aux filles d'entrer sur mon terrain de foot ! Je ne vois pas l'intérêt de passer sa vie à ranger les filles dans un casier et les garçons dans un autre...
Mais à l'instant où je la rencontre dans le hall, la Pome imaginaire s'efface. La Pome véritable prend toute sa place. J'oublie qu'elle a tout d'une sorcière. Je l'aime en fille normale. J'ai trouvé ma jumelle en esprit.
- Ne te moque pas trop de ta mère. Tu lui ressembles forcément un peu, quoi que tu en penses. Elle t'a transmis ses dons à la naissance. Même si elle t'avait abandonnée, même si elle ne s'était jamais occupée de toi, tu deviendrais quand même une sorcière. C'est comme ça. C'est la nature.
- Je suis contre la nature, a dit Verte.
Et ma petite Verte cesserait de s'intéresser aux morveux de sa classe, elle renoncerait à me poser des questions sur son père. Elle deviendrait enfin la bonne petite sorcière que j'espérais de tous mes vœux.
Tout cela ne m'est pas venu tout seul. Pour devenir sorcière, il ne suffit pas d'avoir un don. Il faut se donner du mal. Là comme ailleurs, le vrai secret, c'est le travail.
Parmi toutes les espèces, il en existe une pourtant qui n'a pas le droit de se plaindre. Une seule. L'espèce des mères.
Tant que j'en aurai la possibilité, je ne veux plus vendre ma vie. Ma vie est à moi. Je préfère vendre mon travail.
Elle n'a jamais terminé de cartographier mes frontières.
Rien n'est si engageant que le dépaysement.