Citations de Marie de Hennezel (539)
Pour inciter à inventer, à créer du nouveau. c'est à cette création de sens, à cette créativité spirituelle, dans le quotidien du soin, que nous avons souhait inviter les lecteurs, et plus précisément ceux que la vie ou la profession mettent en contact avec la souffrance et la mort. Sortir de la sclérose répétitive des réponses toutes faites et des rites vidés de leurs contenu. Mais oser puiser dans la richesse et la profondeur de notre nature humaine pour devenir pleinement humain et redonner à notre humanité sa véritable dimension.
... nous savons que l'organe de l'ouïe est le sens qui reste encore en éveil quand bien même les autres ne fonctionnent plus.
... il faut aussi faire appel à notre dimension prophétique qui, comme nous l'avons précisé, n'est pas réservée à des êtres exceptionnels.
Le rituel de la dormition, pourrait tout à fait inspirer l'approche contemporaine de l'accompagnement. De quoi s'agit-il ?
La dormition va permettre à la personne de s'endormir "dans le Sens", un Sens qui lui permettra d'ouvrir la porte de son corps mortel sur le jardin de l'âme.
Le rôle de l'accompagnateur est d'aider l'autre à ouvrir cette porte, cette fenêtre, sur l'inconnu qui vient à sa rencontre ou vers lequel il se dirige.
Jean-Yves Leloup - Le mot "sacré" vient du verbe latin sacere, littéralement : ce qui est considéré comme sacré est soumis à l'anathème, est exclu. En fait, quelque chose de sacré est quelque chose de tabou, c'est-à-dire que cela est dans le monde, mais "n'est pas de ce monde".
Je pense que la véritable acceptation arrive in extremis, car même les personnes qui ont senti qu'elles allaient mourir, qui ont accompli tout un chemin d'évolution, qui sont passées par toutes ces étapes, ne sont pas à l'abri de remontées éventuelles.
Le véritable abandon est tout à fait in extremis.
M. de H. - J'ai l'impression que lorsqu'il s'agit d'une véritable acceptation la personne n'en parle pas. Elle est évidente parce qu'elle est discrète. Certaines personnes disent trop qu'elles ont accepté. Cela paraît une élaboration intellectuelle, rationnelle. En ce qui me concerne, quand j'entends cela, je reste sur mes gardes.
Il n'y a pas plus divin qu'un être humain.
Il n'y a pas plus divin qu'un être humain.
Nous parvenons enfin à la sixième et dernière étape.
Le doute et la foi, le désespoir et la confiance, l'avarice et la générosité, la colère et la patience, l'orgueil et l'humilité nous conduisent à cet état d'ABANDON, de paix.
La quatrième épreuve, ou tentation, durant l'agonie est l'IMPATIENCE, la COLERE.
De nouveau, cela dure trop longtemps, et nous entendons : "Ca suffit, ça suffit, débranchez-moi..."
La personne se met en colère contre son médecin, contre son infirmière, et même contre celle ou celui qui gentiment vient l'écouter, en les accueillant par des "Ca ne sert à rien ! De toute façon, je vais crever, alors laissez-moi crever le plus vite possible !"
Ce sont de vraies colères et, dans ces colères, des gestes irrémédiables peuvent même parfois être posés, car là aussi il existe une force incroyable. Dans toutes ces agonies, nous sommes frappés de voir cette énergie qui nous semble plus qu'humaine. En présence d'une personne totalement épuisée, il est normal de se demander où elle va chercher cette force pour crier, remuer dans son lit et nous mettre à la porte !
En tant que témoin, il ne faut pas oublier que le désespoir est contagieux ; voir quelqu'un souffrir à ce point, se remettre en question comme remettre toute chose en question... peut ébranler celui qui accompagne. L'agonisant peut même se croire abandonné de Dieu : "Père, pourquoi m'as-Tu abandonné ?" Dens ces moments-là, il s'agit de se souvenir que "Père, pourquoi m'as-Tu abandonné ?" n'est que le début de la parole du Christ. En fait, nous ne perdons que la "sensation" d'être relié Perdre la "sensation" d'être aimé ne veut pas dire que l'on n'est plus aimé, que Dieu, le Souffle, n'est plus présent !
Non seulement nous ne croyons plus en rien, mais de plus nous ne sentons plus rien... Nous sommes dans un état de privation sensorielle, de privation affective, absolument terrifiante et, disons-le, infernale.
L'autre a le droit de fermer ses volets à la lumière ; il a le droit de douter... Parfois, après une lutte plus ou moins longue, quelque chose chez la personne mourant se détend, adhère à ce qui est, et, dans cette adhésion, elle adhère en elle-même à plus grand qu'elle-même.
... il n'est pas nécessaire d'attendre de mourir pour savoir qu'il y a des jours où ce genre d'épreuve [doute] nous déchire, nous fait mal, et que l'acte de foi est bien un acte de liberté?. Car rien ni personne ne peut nous obliger à croire. Et lorsque nous sommes à côté de quelqu'un qui ricane, si nous sentons bien notre impuissance, nous sentons également l'importance d'être là comme témoin. Il faut permettre au mourant d'avoir des doutes, tout en étant soi-même ancré dans ce Souffle, dans cette paix, dans cette certitude : le Réel n'est pas seulement ce corps qui meurt.
Il n'empêche qu'il y a combat, un combat qui se lit sur le visage. On peut voir la personne grimacer, dire non, serrer les poings, et même nous repousser.
Parfois même, au lieu d'être un chemin, la religion peut devenir un obstacle, certaines doctrines peuvent penser à notre place, nous "catéchiser", nous mettre en état d'arrêt de pensée, en état d'arrestation !
Le moment de la mort est celui où notre conscience ne traduit plus en concepts, en images ou en sensations la pureté de cette Lumière. C'est alors une conscience non arrêtée...
De la même façon, il y a l'expérience de certains psychotiques qui ne sont ni dans le monde physique ni dans le monde spirituel, mais dans ce monde intermédiaire. Le rôle du thérapeute est à la fois de les ramener sur terre et de les ouvrir à une réelle dimension spirituelle.
J.-Y. L. - Dans certains milieux, plutôt que de parler de corps pneumatique, nous pourrions parler d'un "corps de rêve". Non du corps rêvé ou fantasmé, mais véritablement d'un corps de rêve, car le rêve a une certaine qualité sensorielle, à la fois dans le corps et hors du corps.
... les rêves que font les personnes qui vont mourir leur envoient souvent des messages concernant justement ce corps pneumatique.
Notre inconscient ne croit pas à la mort, pour lui elle est irreprésentable. Notons aussi que certaines expériences faites en rêve : nous pouvons rêver que nous sommes mort ;, nous assistons alors à notre propre mort, et cela en spectateur.