Maurice Carême - Femme - Editions Roger Wastiau - Bruxelles 1972 -
Avec les Eaux-Fortes originales de John Dix.
Dédicacé par l'auteur - Lu en août 2018.
Ce bijou, décidément, la boîte à livres de ma commune m'a déjà bien comblée en matière de lecture, est une véritable trouvaille et découverte pour moi.
Il est composé de 7 séries de poèmes : Laminaire - Bonheur - Émerveillement -
Chansons - Absence - L'anneau des saisons - Magie du temps.
Tous dédiés à la Femme.
C'est beau, c'est simple c'est émouvant.
Ô femmes que vous êtes, si les hommes savaient nous parler ainsi,
ils verraient l'émotion naître dans nos yeux et fondre comme neige au soleil, en larmes dans l'espace clos de leur coeur.
Je ne connais de Maurice Carême que quelques poèmes ânonnés à l'école.
Je découvre ici un homme sachant écrire des poèmes sublimes avec une grande simplicité de coeur. Il a écrit "Femme" en 1946.
Maurice Carême, poète et écrivain belge, né à Wavre le 1é mai 1899 et décédé à Anderlecht (Bruxelles) le 13 janvier 1978 à l'âge de 78 ans.
Il existe une Fondation Maurice Carême.
Ci-dessous, un choix de 7 poèmes correspondants aux 7 séries, dans le même ordre.
Très difficile de faire un choix, ils sont tous superbes. Je vais choisir les plus courts.
Plus belle, plus sincère et plus vraie que moi-même,
Tu deviens chaque jour un peu mieux ce que j'aime,
Tu deviens peu à peu cette femme éternelle
que je n'osais rêver si mienne et si réelle.
Tu es la seule sur la terre
A comprendre mon coeur mouvant.
Aujourd'hui, je pense à ma mère
Qui lisait dans mon coeur d'enfant.
Tu es la seule sur la terre
A pouvoir lire plus avant.
Un jour, tu le pris dans tes mains
Mon coeur distrait qui n'était rien
Qu'un peu d'argile frémissante.
Tu en fis un beau vase humain,
Et tout ce qu'on y verse chante.
Je ne t'apporte qu'un amour
Naïf comme une pâquerette,
Des chansons maladroites faites
Avec des mots de tous les jours
Et ce corps gauche et sans beauté
Que la vie a trop tôt voûté.
Mais je sais ta bonté pareille
A ce vent d'avril qui recueille,
Au plus profond de la forêt,
Le chuchotement d'une feuille
Mal repliée sur son secret.
Sont-ce mes mains, sont-ce tes mains,
Et sais-je quel est le visage
Que je caresse si lointain
Qu'il prend peu à peu le dessin
D'un paysage à ton image ?
Ne cherche pas plus loin,
Voici de la bruyère.
Mets ta main dans ma main
Et laisse la lumière
Nous montrer le chemin.
Femme, dont le sourire a parfois la tristesse
Des vergers lourds de fruits qu'un dernier soleil dore,
Je voudrais te polir un merveilleux miroir
Où, défiant l'inquiétude et la vieillesse,
Chaque fois plus aimée tu pourrais te revoir.
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Maurice Carême, le « prince des poètes » a bercé notre enfance et ce petit livre jeunesse édité par Gallimard nous plonge dans la nostalgie. Délicatement illustré par Dominique Thibault, ce recueil s’adresse à tous, enfants, jeunes et moins jeunes. Tout comme Jacques Prévert ou René de Obaldia, c’est la magie d’une poésie intergénérationnelle.
Avec simplicité et candeur, ces textes oniriques font appel au quotidien mais aussi au conte et au merveilleux. On retrouve les héroïnes de nos contres d’enfant comme « Le petit chaperon rouge » plongé dans un monde contemporain ou bien « La belle au bois dormant » qui échappe à son destin d’épouser un prince.
C’est très joyeux. Pas étonnants que certains aient été mis en musique.
Pourtant, certains de ces poèmes sont emplis de gravité, comme dans « les oiseaux perdus » qui se termine par une note d’espoir tandis que « l’oiseleur » nous montre la cruauté humaine. Dans « le chasseur » le poète adresse avec humour un hymne à la nature sauvage. On retrouve aussi les héroïnes de nos contres d’enfant comme « Le petit chaperon rouge » plongé dans un monde contemporain ou bien « La belle au bois dormant » qui échappe à son destin d’épouser un prince.
Une biographie de Maurice Carême clôt ce recueil.
Un vrai plaisir de lecture, un livre à lire et à relire.
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Un petit trésor que j'ai découvert à la foire du livre de Bruxelles. J'y retrouve des poèmes de Maurice Carême connus ou inconnus.
On y retrouve son âme d'enfant, son amour des mots.
Son âme d'enfant, c'était à tel point qu'il avait collectionné des poèmes écrits par ses petits élèves car il fut instituteur depuis l'âge de 19 ans jusqu'à 43 ans à Anderlecht, une commune de Bruxelles. Il y vivait dans la maison blanche avec son épouse, institutrice également, qu'il appelait Caprine.
Il a été traduit dans une quarantaine de langues et s'est consacré à son art après plus de vingt ans de métier.
Sa maison est devenue un charmant musée, plutôt un lieu de vie enchanteur.
A la foire du livre, j'ai trouvé le recueil sur le stand de la Fédération Wallonie Bruxelles. Ne riez pas, notre petit pays est compliqué et ingouvernable.
Un peu plus loin, tout un stand était occupé par la fondation Maurice Carême.
Je me réjouis que ce monsieur qui m'a toujours touchée par ses mots si vivants et joyeux soit mis à l'honneur 42 ans après sa mort en 1978. Il était né en 1899.
Je suis donc ravie d'avoir découvert cette pépite parue chez Espace Nord en 2017.
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Pour beaucoup, parler de la poésie de Maurice Carême fera rejaillir des souvenirs d’école, des odeurs de pupitre, de craie, de tableau noir, le moment des récitations au pied de l’estrade, les bons points échangés contre une image…Evocations d’enfance, salle de classes et cours de récréation, à courir sous les platanes, à s’abriter sous les préaux…
C’est que le poète belge Maurice Carême (1899 – 1978), naît à Wavre, une petite ville du Brabant wallon, fut longtemps instituteur et que son amour des enfants le poussa à leur dédier une large part de son œuvre poétique.
Après avoir goûté aux mouvements futuriste et surréaliste, c’est vers la poésie de l’enfance que Carême se tourne, dans une démarche poétique révisée en profondeur pour atteindre la plus grande simplicité. Une simplicité qui offre la lumière, celle qu’on voit briller doucement à travers le carreau, d’une douceur enveloppante et chaude, un halo doré et caressant.
Comme Prévert, lui-aussi fréquemment étudié à l’école primaire, Maurice Carême a laissé son empreinte dans la mémoire de maints écoliers au gré de rimes courtes, vagabondes et riantes, au rythme d’une poésie toute vêtue de naturel, de rondeur et de franchise. La nature, considérablement présente, y foisonne, s’y niche par tous les temps et en toutes saisons, les animaux s’y promènent, y courent, y caracolent.
« Un écureuil, sur la bruyère / Se lave avec de la lumière / Une feuille morte descend /Doucement portée par le vent »..
Mais il serait dommage de réduire Maurice Carême uniquement à la seule étiquette de « poète de l’enfance » car l’auteur a également écrit de nombreux et superbes poèmes qui s’adressent aux plus grands.
Pour autant, là encore, c’est le mot « simplicité » qui s’inscrit en lettres majuscules dans l’œuvre du poète. Une simplicité qui s’unit à une profondeur du sens et à une richesse du cœur, qui alimenteront justement la renommée de l’homme de lettres belge et le rendront inoubliable.
Le recueil « Mère », paru dans les années 1930, est l’un des plus vibrants témoignages de cette poésie où spontanéité et naturel s’enjolivent des plus belles fleurs de la sincérité et de la confiance.
« Je prenais la main de ma mère / Pour la serrer dans les deux miennes / Comme l’on prend une lumière / Pour s’éclairer quand les nuits viennent. »
Qu’il parle de son enfance, de sa ville natale ou de la modeste vie des gens humbles :
« Rien que ce mur et ce chemin / Et, autour de moi, un matin / Qui a l'odeur dorée du pain / L'ombre d'un oiseau sur le mur,/ L'écho d'un pas sur le chemin. / Douceur faite de petits riens…»
Qu’il chante l’amour et la joie, ou bien « Caprine », la femme de sa vie, sa compagne et sa muse d’un quart de siècle :
« Le jour qui vient de s'éveiller / Ne cesse de s'émerveiller. / Et c'est toute la joie de vivre / Que le vent, de son crayon bleu, / Note sur le livre des cieux. »
Qu’il s’indigne contre la misère humaine :
« Et l’on a beau vouloir crier / Qu’on a les pieds, les mains liés / Comme personne ici ne crie / On se tait par humilité. »
Qu’il exalte la beauté de la nature ou qu’il s’attarde, nostalgique, sur le temps qui s’écoule :
« On dirait qu’on entend pleuvoir le temps / Usant les vieilles pierres de la rivière / On dirait qu’on entend pleuvoir les ans / Qu’emportent doucement les eaux du temps. »…
…Il y toujours chez Maurice Carême ce même élan de vie, cette sincérité, cet abandon de toutes formes alambiquées au profit de vers cristallins et pénétrants, toniques et chantants, qui conduisent à une intensité et à une émotion spontanées.
Une poésie pleine de douceur et de vie, de foi en l’homme, de sagesse et d’humilité à laquelle on peut également ajouter une large part accordée au visuel, un sens aigüe de l’image qui libère instantanément les représentations et les projections mentales du lecteur.
Paysage hivernal, forêt automnale, ciel brumeux ou ensoleillé…la transparence et la nudité des rimes font jaillir les images comme le feraient quelques coups de crayon sur une feuille à dessin, révélant alors, par on ne sait quelle magie, un tableau enchanteur.
« C'est du soir en fruit, / De la nuit en grappe / Et le pain qui luit / Au clair de la nappe.
C'est la bonne lampe / Qui met, sur les fronts / Rapprochés en rond / Sa joie de décembre.
C'est la vie très simple / Qui mange en sabots, / C'est la vie des humbles : / Sourire et repos. »
La poésie de Maurice Carême, c’est une lumière qui nimbe les êtres et les choses d’une clarté douce, comme un rayon de soleil caressant aux aurores la feuille d’un arbre, c’est le frémissement musical du vent dans les branchages, c’est le tintement des sabots sur la roche, c’est la fuite d’une biche dans l’épaisseur des fourrés, ce sont des animaux, écureuils, chats, chèvres…qui viennent nous souhaiter le bonjour, c’est…le bruit de la vie, l’odeur de la vie, l’existence sans fioritures, dans ce qu’elle a de beau au naturel, dans ce qu’elle a de fort aussi, et de grave, et de triste, et d’humain.
Alors oui, malgré le temps qui passe et bien que pour certains les souvenirs d’école soient désormais lointains, c’est un réel plaisir de redécouvrir l’œuvre de ce grand monsieur, qui compte près de 80 recueils de poèmes, de contes, de nouvelles, de romans et d’essais.
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Un roman de Maurice Carême ? En voilà une surprise !
Son nom m'évoque des souvenirs de poèmes appris à l'école. De très beaux poèmes.
Donc pour moi, Maurice Carême était un poète, et je ne savais pas du tout qu'il avait écrit des romans.
Le thème du football m'attire ; aussi, piquée par la curiosité, j'entame ma lecture.
J'ai bien apprécié ce court texte un peu farfelu.
Tout d'abord, il nous transporte dans une autre époque ; il est rédigé dans une langue un peu vieillotte qui a son charme, et il décrit une société et une façon de vivre aujourd'hui disparues.
Il nous emmène dans un univers particulier : celui des supporters de football.
Prosper Goffineau (j'adore ce nom !) mène une petite vie rangée, étriquée même. Brimé par une femme autoritaire, il va trouver dans le football un moyen d'échapper, au moins temporairement, à ce joug pesant.
Plutôt effacé dans la vie, Prosper découvre la fièvre des soirs de matchs, l'ambiance dans les tribunes, la liesse collective, le sentiment fort d'appartenance à un groupe.
Il est subjugué.
Le problème est qu'il va devenir dépendant de ces émotions fortes. Dès lors, toute sa vie va changer. Son addiction à la folie du ballon rond va tout emporter.
Ce petit roman se lit d'une traite. Il est original et distrayant. Il raconte d'une façon amusante comment, pris par le jeu, un supporter peut changer de personnalité et voir sa vie totalement transformée.
Les éditions Espace Nord ont eu une très bonne idée en rééditant cet ouvrage de 1928, et je les remercie pour l'envoi de ce livre dans le cadre d'une opération Masse critique organisée par Babelio, que je remercie également : une fois de plus j'ai eu la chance de découvrir un texte que je n'aurais sans doute pas découvert autrement.
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Dans cette « Heure de grâce », on découvre un autre Maurice Carême, très éloigné de l’auteur archi-connu de poèmes naïfs (oserais-je dire niais ?) et comptines légères pour enfant en âge scolaire. Non, ici, Carême dévoile un tempérament torturé, une âme d’enfant emprisonnée dans un corps vieillissant, hantée par l’approche de la mort, par le temps qui passe et emporte les êtres aimés, par la peur de la solitude.
C’est aussi une âme fière, qui refuse de courber le front, qui ne peut trouver la paix dans les joies simples de la vie (« pourquoi ce front chagrin, cette mélancolie ? Le ciel est si serein, la terre si ravie, que l’on entend la vie rire dans le matin »), qui ne cesse de s’interroger et finit peut-être par douter de sa foi (« Mais c’est en moi, Seigneur, que votre voix jamais ne monte et ne résonne alors que, dans le monde, je l’écoute en pleurant qui résonne et qui monte toujours plus belle et plus fermée sur son secret »). Ou encore :
« C’est encor moi, Seigneur,
Toujours moi, plus malade
Après chaque dérade
Et rejeté si loin
De votre bergerie,
Qu’il n’est plus de chemin
Entre vous et ma vie. »
Mais au fil des pages, au fil des ans devrai-je écrire (le recueil court sur la période de 1948 à 1957), petit à petit, les tourments s’apaisent et le poète retrouve dévotion et gratitude.
Personnellement, j’ai rechigné sur certains passages, ceux où Carême nomme expressément le Seigneur et Marie. Même si en exergue, il cite Ruysbroek l’Admirable : « de quelque manière ou sous quelque nom qu’on se représente Dieu comme Maitre de tout le créé, l’on est toujours dans le vrai », j’ai trouvé le tout un peu trop connoté de catholicisme.
Néanmoins, j’ai globalement apprécié le ton des poèmes, soignés et toujours très imagés, très visuels. J’y ai découvert une autre facette de cet auteur sincère, affichant ses défauts et ses peurs sans fausse pudeur.
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Le monde des supporters de foot des années trente dépeint dans un roman de... Maurice Carême ! Les premiers chapitres sont sympathiques et goguenards mais la morale bien pensante finit par reprendre le dessus, menant clubs et supporters droit en enfer. Le foot décrit dans une langue de poète est curiosité qui m’a bien amusé !
Je remercie chaleureusement les éditions Espace Nord et Babelio de m’avoir fait goûter cette réédition de « Le martyre du supporter ». J’avoue que je l’avais coché dans la liste d’une Masse critique parce que son thème avait piqué ma curiosité, mais sans remarquer que l’auteur en était Maurice Carême, dont les poèmes sont bien connu des écoliers belges.
À côté des nombreux poèmes qui font sa renommée, j’ignorais que Maurice Carême avait publié quelques romans (trois, si j’en crois Wikipedia), ainsi que des contes. « Le martyre du supporter » est son premier roman, publié en 1928, dans les toutes premières années de sa production littéraire.
Originaire de Wavre, Maurice Carême s’est ensuite établi à Anderlecht, où il a mené une carrière d’instituteur. Les amateurs de football belges auront donc vite compris que l’équipe du « Sporting », qui joue en mauve, est celle du Sporting d’Anderlecht et que les rouges du Standard sont (déjà) ceux du Standard de Liège.
Un intérêt de ce livre est le tableau qu’il nous donne du football et de ses supporters dans le Bruxelles des années trente. On participe au quotidien d’une petite famille bourgeoise, dix ans avant « Bossemans et Coppenolle ». On joue aux cartes le dimanche. On boit de la gueuze grenadine (la gueuze Belle-vue venait à peine de naître et la dynastie Vanden Stock n’avait pas encore pris la tête du Sporting). On paie sa place de tram au receveur, avec un tarif différent pour les places assises. Et j’en passe.
Le foot, dans les bonnes familles, c’est à la limite de la dépravation... On s’amuse au début du livre de voir le clerc de notaire Prosper Goffineau s’éloigner à pas feutrés du « juste milieu » (comme dirait Brassens) où il subit la loi de sa femme et de sa fille, pour s’encanailler avec des supporters du Sporting. Le ton est goguenard, on sourit. Prosper finit par devenir le pilier des supporters du club !
Mais il fallait que la morale bien pensante reprenne le dessus: je vous laisse découvrir la plongée vers l’enfer de Prosper et de son club...
À part cet aspect documentaire, je me suis régalé de lire des descriptions de foot écrites par un poète. J’imagine que l’effet décalé était involontaire, mais c’est succulent ! Jugez plutôt. L’équipe entre sur le terrain : « Bientôt, une nouvelle clameur, plus dense, plus vibrante s’épanouit, heureuse comme un soupir longtemps contenu ; les joueurs locaux apparaissaient, visage souriant, poumons avides d’air, coeur battant d’espérance. »
Et ensuite, le coup d’envoi du match: « Puis, sur un coup de sifflet, le center-forward mauve heurta le ballon d’un geste sec. Mais celui-ci comprit le signe d’amitié ; n’est-ce pas ainsi, qu’en témoignage de joie, l’on enfonce une bourrade dans les côtes d’un ami ? » (notez en passant l’emploi de l’anglais « center-forward », maintenant disparu).
Parfois, la météo rend le jeu difficile: « À la reprise du jeu, un vent violent souffla. S’abandonnant à ses impétuosités, la balle semblait s’allonger tel un chat dont on frictionne les reins. » Ou même très difficile: « Le stade tendait son drap qu’avait amidonné la neige et que repassait la bise. Pas une tache sur cette virginité. »
Voilà. Je suis heureux de voir avoir livré ce partage de Carême. Je recommande « Le martyre d’un supporter » tout particulièrement à mes compatriotes, comme une curiosité, une pépite originale de notre littérature.
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Le bourreau des estrades comme Prévert est le joyau des préaux...
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Maurice Carème reste à ce jour le seul poète qui aura bénéficié d'une grille indiciaire de la fonction publique d'Etat.
Parce que son style rudimentaire était accessible à tous, y compris au personnel enseignant, il réussira en effet à s'infiltrer dans les programmes scolaires du primaire pour devenir une référence indispensable avant tout passage en sixième. Tout élève incapable de réciter une poésie de Maurice Carème se voyait en effet impitoyablement refuser l'accès au secondaire pour se voir condamner à un cursus infamant en CPPN. L'auteur, après une carrière administrative remarquable, réussira à s'élever au grade de poète de classe exceptionnelle dernier échelon, malgré une oeuvre somme toute quelconque. Tout au long de sa carrière, il saura déjouer les pièges tendus par ses pairs, intriguant au plus haut niveau du ministère de l'Education Nationale pour discréditer un à un tous ses concurrents, jusqu'à René de Obaldia, un de ses adversaires les plus sérieux avec ses doigts trempés dans la confiture….Chapeau Maurice!
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Maurice Carême… Dès que je les entends, ces nom et prénom m’évoquent, de suite, les charmants poèmes que je récitais alors que j’étais tout jeune écolier !
Maurice Carême, poète belge wallon, a eu une enfance heureuse et simple, et ça se ressent bien dans ses poèmes !
Il parle avec beaucoup de tendresse de son père, qui était peintre en bâtiment, et de sa mère, qui tenait une petite boutique où les gens du village trouvaient alors tout ce dont ils avaient besoin.
Pour l’anecdote, selon son propre aveu, Maurice Carême fuyait souvent l’école, se faisait chapardeur d’œufs dans les fermes avoisinantes, maraudeur de vergers, chef de bande d’Indiens, se conduisant en « petit vaurien » !
Mais cela ne l’empêchera pas, plus tard dès ses 15 ans, d’entrer à l’Ecole normale d’instituteurs et de sortir 1er de sa promo !
Il sera donc enseignant, épousera Caprine, une institutrice, à laquelle il consacrera un chef d’œuvre : « La Bien-Aimée ».
Puis, passé la quarantaine, il quittera l’enseignement pour se consacrer uniquement à la littérature.
Maurice Carême est avant tout un poète de la joie.
Trois thèmes majeurs l’inspirent : les animaux, les fleurs, l’amour.
Trois poètes exerceront sur lui une influence déterminante : Emile Verhaeren, Paul Verlaine et François Villon.
Trois livres dont il est l’auteur marquent les étapes de sa vie : « La Lanterne magique », « Mère », et « Brabant ».
Ses poèmes ne sont pas adressés qu’aux enfants.
Sa poésie est marquée par le don d’enfance et la joie de vivre.
« Je suis resté l’enfant à qui la joie fait signe,
Des cerises couplées suspendues aux oreilles,
Et je ris, en jetant dans l’eau fleurie de cygnes,
Comme du pain de ciel, des morceaux de soleil.
L’humble enfant que je fus est enfant demeuré.
Je ne puis vivre qu’en enfant
Courant pieds nus dans l’origan.
Si je suis né au mois de mai,
C’est pour chanter à l’étourdie
Vivent la rose et le muguet !
Mes complaintes mêmes sourient.
Joie d’anémones, chevreaux neufs,
Les cœurs battent à contretemps.
Le ciel est poli comme un oeuf
Tout frais pondu par le printemps. »
Ce recueil de poèmes respire bon la nature, et l’homme y frémit de joie.
Les poèmes de Maurice Carême font du bien, à notre époque où règnent stress, malaises et incertitudes.
Ils nous submergent de naïveté, de candeur, et de simple bonheur rafraîchissant.
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La fluidité du style, le dépouillement et la simplicité des œuvres de l'auteur belge contrastent avec l'univers complexe, mutant et désenchanté que découvrent maintenant des yeux de plus en plus matérialistes. L'enchantement est affaire de regard et Carême invite à réanimer une réalité décolorée avec les atouts de l'enfance, jeux et rêves. En cela, ces contes où l'imaginaire est roi, diffusent un souffle vivifiant et salutaire. Ils ne sont pas seulement cela car, couronnés par le Prix Rossel en 1947, ils suscitent la réflexion sur, justement, le désenchantement, le passage à l'âge adulte et la mort dont l'antidote est la capacité de s'émerveiller. Le mot d'ordre, à qui sait l'entendre, est de préserver cette clé. "On peut faire le tour du monde en parlant avec une étoile."
Maurice Carême convoque le Diable et le petit Jésus en personne et ce sera la seule nuance: c'est un peu vieux bateau en regard de la finesse du reste. Ces petites histoires fantastiques (le terme nouvelle conviendrait, chutes et formes répondant aux critères du genre, si l'univers était plus réaliste) conduisent inévitablement le lecteur à une interprétation spirituellement nourrissante. L'enfant qui les lira ou se les entendra lire gagnera à formuler son ressenti: qu'a pensé Caprine, la petite fille assise sur les genoux du narrateur, de ce qu'on lui a lu ?
Primento propose trois publications numériques simultanées: "Mère", "La lanterne magique", tout deux des poèmes, et ces contes en prose. L'habillement est sobre et beau: agrémentés d'illustrations soignées, le tout manifeste une belle présentation qui n'est pas toujours le souci premier de l'édition numérique.
Mon sentiment: "La Vague et le Goéland", "Le Petit Vieux" sont de pures merveilles : chacun porte en lui ses morts. "Le Bonhomme de Neige" m'a ému: voulez-vous y entrer ?
"En se levant, la lune aperçut un bonhomme de neige debout sur la place du village. Elle ne put réprimer sa surprise lorsqu'elle le vit se décroiser les bras.
— Encore un malheureux qui va tenter de vivre ! Soupira-t-elle.
Que de gaucheries dans ses gestes ! Que d'efforts pour arracher du sol ses énormes pieds ! Le bonhomme faillit se casser à mi-corps et, durant un long moment, n'osa plus bouger. Pourtant ses yeux faits d'éclats de porcelaine s'habituaient à voir, sa cervelle de neige durcie s'accoutumait à réfléchir. Il ébaucha lourdement quelques pas, contourna la place en s'arrêtant à chaque tilleul, puis lâchant son balai, il s'engagea dans une rue craquante de gel.
L'idée lui vint de s'approcher d'une maison. Il jeta un coup d'œil par-dessus les rideaux, et ce qu'il discerna lui parut merveilleux."
Oui, vous avez gardé votre âme d'enfant: émerveillez-vous, il est toujours temps.
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jolis poèmes et quelques belles peintures
j'ai ainsi découvert le peintre Bruno Liljefors !
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Maurice Carême nous invite dans sa maison blanche, si longtemps rêvée, à savourer le goûter, en écoutant le chant des moineaux sous la charpente du toit …
Poésie douce (mièvre parfois) qui célèbre les plaisirs simples de la vie quotidienne, la beauté de la campagne brabançonne, les heures tendres auprès de l’être aimé, …
Images, odeurs, chants, l’écriture est très sensorielle. Un petit moment entre parenthèses, loin du brouhaha quotidien. Cela fait du bien, de temps en temps.
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Souvenirs d'enfance que ces poèmes qu'il fallait apprendre pour l'école.
Ce sont des poèmes à la rime simple mais non simpliste et si le poète s'adressait principalement à la jeunesse, la lecture en tant qu'adulte n'est pas du tout désagréable, loin de là.
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oui Maurice Carême nous enchante avec simplicité et originalité : les enfants et les adultes se réjouissent tant à le savourer !!
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Un petit bijou qui donne juste envie d'en découvrir plus.
J'aime la poésie, elle libère l'âme en quelques mots, elle allège le cœur en quelques traits.
« L'école était au bord du monde,
L'école était au bord du temps.
Ah ! Que ne suis-je encor dedans
Pour voir, au-dehors, les colombes. »
J'aime la poésie, elle résonne comme une musique douce et reposante, elle interpelle comme au son d'un tocsin imaginaire, elle agit sur les sens comme un parfum capiteux, elle fait frissonner l'échine quand surgit l'émotion.
« Mais le vrai soldat
Ne mange, quand la guerre est là,
Que des vers de terre
Et des fleurs de cimetière. »
J'aime la poésie, elle me parle au plus profond de moi et illumine mes jours gris par quelques touches de couleurs.
« Caillou d'or,
Quel trésor !
Caillou bleu,
Qui dit mieux ? »
Quelle merveille que cette plume si légère et primesautière, si rêveuse et lucide à la fois, si tendre et pointue pourtant, si fragile et souvent bien terre-à-terre.
« D'une bouteille d'encre,
On peut tout retirer
Si l'on n'est pas un cancre
Et que l'on sait dessiner. »
Quelle merveille que ce recueil qui en nonante-neuf poèmes nous fait voir l'étendue du génie poétique de l'auteur. On y rêve l'imaginaire, on y dépeint un monde magique, on y vénère la mère et la nature, on y vit une simple vie, une vie entre deux mondes, un impossible rêve.
« Le chat ouvrit les yeux,
Le soleil entra.
Le chat ferma les yeux,
Le soleil y resta. »
Quelle merveille enfin que cette poésie qui chante à l'esprit des enfants, qui résonne au cœur de notre enfance oubliée, qui fait frémir notre âme d'adulte parfois désenchanté, qui colore notre vie du quotidien.
« Mon perroquet
Est rouge et gris.
Il est joli
Comme un bouquet. »
J'ai adoré :-)
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Cette anthologie jeunesse, illustrée par les dessins aquarellés naïfs, aux couleurs tendres et douces de Jean-François Martin, reprend plusieurs poèmes de Maurice Carême, poète belge de langue française du XX° siècle, auteur de recueils pour enfants et permet une bonne approche de cet auteur.
La simplicité du poète et celle du peintre sont en parfaite harmonie.
Une porte en feuilles mortes, un matin qui a l'odeur du pain doré, une gazelle "faite de gaze", un chat noir comme du charbon, une grenouille bleue...et nous voilà en route vers de beaux rêves sans violence aucune.
Pas de mièvrerie toutefois, car sous l'étiquette naïve se cachent de nombreuses interrogations sur la vie, l'homme et le sens à donner à la vie.
Ainsi D'où venons nous? évoque Jean Tardieu mais en moins pessimiste que son "Rin"
"-D'où venons-nous?/-Du fond du temps./-Que sommes-nous?/-De pauvres gens./-Où allons nous?/-Où va le vent.
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