Citations de Odile Lefranc (26)
N'aie pas honte de qui tu es.
Ce qui va créer la vie, c'est le désir.
Pour la première fois de ma vie, parce que je me détachais de ce que je croyais être le plus cher à mes yeux, j'avais le sentiment d'accomplir un acte fort.
Dans un petit carnet noir qui faisait froid dans e dos, Andreas Müller avait répertorié les différentes méthodes utilisées pour spolier les familles juives. Il notait aussi une série de rendez-vous, des descriptions de collections et le sort atroce de certains propriétaires.
J'étais effondrée. Brusquement la réalité de la mort de ma mère m'apparaissait dans le petit tas de feuilles que constituait le dossier de succession.
Walter Spies échange un regard complice avec son singe, celui qu'il préfère parmi tous les animaux de sa ménagerie. Il le prend dans ses bras. L'animal se blottit dans le creux de son épaule.
N'aie pas honte de qui tu es !
Revoir ma mère, je n'y pensais plus.
Ce qui va créer la vie, c'est le désir.
Ma mère m’avait fait découvrir cette chanteuse new-yorkaise qu’elle admirait pour son style unique, entre jazz et cabaret. Elle aimait ses interprétations minimalistes, teintées de malice et d’humour cynique. Elle me disait :
— Savoir rester sur le fil de l’émotion sans jamais la montrer, c’est ça, la classe. Blossom Dearie, c’est du caviar en bouche.
J’adorais cette chanson qui parlait de l’impatience de tomber amoureux, du rêve d’aimer, de la peur que l’amour ne vienne jamais frapper à la porte.
Ce que je ne parvenais pas à savoir était si sa quête de jouissance était le fruit du désespoir ou si c’était sa manière de vivre.
Quand je fus enfin seule, je me suis laissée glisser le long du mur. L’eau coulait sur moi, j’aurais voulu me fondre en elle.
J'avais découvert la magie des rencontres de vacances ; parce que nous ne savions pas si nous nous reverrions un jour, nos échanges avaient été plus vrais. Comme une souveraine liberté.
Ce qui va créer le vie, c'est le désir.
Elle insista pour savoir ce qui s'était passé devant le tableau. Je lui dis ce que mes yeux d'enfant avaient vu.
- Raphaël est triste parce qu'il sait qu'il va mourir.
Ma mère savait que le peintre avait réalisé ce tableau l'année de sa disparition. En 1520. Elle me jeta d'admiration silencieuse. Comme l'admiration est voisine d'une peur secrète.
J'ai repensé à ce que m'avait dit ce vieil Occidental : "Ce qui va créer la vie, c'est le désir." Et j'ai cru voir apparaître le sourire de ma mère.
Tout finira un jour, le ciel dans sa perpétuité, la terre dans sa durée, mais jamais ne s'épuisera cette douleur sans fin
Maintenant qu'il se retrouve à l'entrée du cimetière, il hésite. Que vient-il chercher? Une sensation forte ou est-ce de la simple curiosité? Il a souvent reproché aux artistes leur manque de détachement. Il pense qu'il n'est guère mieux et qu'il ne parvient pas encore à prendre suffisamment de distance avec ses affects. Ses yeux s'attardent longuement sur le crâne humain posé sur un piédestal comme une vanité perdue dans la jungle.
Les notes de la Pavane de Ravel ont résonné dans la cour. Il me semblait que le pianiste avait modifié certains accords. La fausse note avait disparu. Comme s'il avait trouvé un passage secret dans la mélodie en altérant la sensible. Ce qui m'avait semblé discordant prenait une résonnance nouvelle.
A l'aube, il regarde par la fenêtre de son atelier. Aucun nuage, aucune brume. Cet instant si rare à Bali, il l'appelle l'embrasement d'or de la montagne sacrée. Une émotion le traverse. Il repense à une phrase lue dans un roman : Tout finira un jour, le ciel dans sa perpétuité, la terre dans sa durée, mais jamais ne s'épuisera cette douleur sans fin. Son regard se tourne vers le mont Agung ; il s'attend à un signe.